Overwatch : Recall

Chapitre 2 : Le début de la Traque

6241 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 26/01/2020 21:52

Chapitre 1 ; Le début de la Traque 

 

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2 novembre 2076, Washington DC 


Adam Chillwell déambulait dans un corridor les mains dans les poches, seul, d’une démarche pleine de confiance et de calme, comme un fantôme tant la moquette beige atténuait le bruit de ses pas. Il était l’un des rares hommes à fouler le sol du Pentagone sans sacoche, ni chemises pleines de documents. Seulement trois clés USB, nichées au fond de la poche intérieur de sa veste. Sa cravate était divinement nouée pour la première et dernière fois de sa vie, et allait parfaitement avec son costume bleu nuit qui ne souffrait d’aucun pli disgracieux. Tandis qu’il s’arrêtait devant une porte sur sa droite et tapotait nonchalamment sur son digicode, il eut une pensée pour sa voisine qui bossait dans un pressing et à qui il était redevable. Le battant, sur lequel un écriteau “Archives” était fixé, pivota sur ses gonds, ouvrant la voie sur un nouveau couloir d’un blanc aveuglant. Une vingtaine de mètres plus loin, deux militaires était armé de fusil-mitrailleur laser, eux-mêmes dotés d’un silencieux ainsi que d’un viseur automatique intégré qui avait comme utilité de diriger le canon de l’arme directement vers ce que regardait le soldat. Ils protégeaient une l’entrée d’un ascenseur contenant lui-même plusieurs systèmes de sécurité. 

Il referma la porte et s’engagea dans le couloir oppressant. En passant l’encadrure, il avait traversé un portique anti-métaux intégré. Seul sa montre, spécialement faite pour lui et multifonctions, d’une manière ou d’une autre, était autorisée à passer. Il la regarda un petit moment avec une moue satisfaite. Il arriverait à temps. Ça aussi, ça arriverait probablement pour la première et dernière fois. C’est qu’aujourd’hui était un jour capital dans la vie d'Adam.  


— Qu’est-ce que tu fous ici, Adam ? lança l’un des soldats avec un sourire narquois. Tu sais que c’est pas vraiment là, les archives, n’est-ce-pas ? 

— Et qui t’as donné le code d’accès ?  

— Les gars, j’ai pas le temps de blaguer, répliqua l'intéressé d’un air sérieux qui ne lui ressemblait pas. J'ai rendez-vous avec le Siffleur.  


Les deux soldats se regardèrent et sifflèrent, justement, signe de leur surprise.  


— T’as encore fait une connerie, putain... souffla l’un d’eux, hochant la tête. S’il te vire, sache que je ne te laisserai pas disparaître tant que tu me dois mes deux-cent dollars !

— Lâche-moi les grappes avec tes deux-cents dollars ! Tu les auras quand on m'aura promu... ! 

— Une promotion... ? 

— Je vous expliquerai, souffla Adam avec un sourire triomphant. Je peux ?  


Les deux soldats le laissèrent passer avec un mélange d’amusement et d’étonnement dans la cage d’ascenseur. Après avoir passé un test de reconnaissance faciale, il descendit à un étage tenu secret de la plupart pour rencontrer ledit “Siffleur”, son officier traitant. Quelques minutes plus tard, il ouvrait la porte de la salle de réunion et fixait bouche bée l’assemblée qui l’attendait : Rien de moins que son officier traitant, ainsi que le ministre de l’intérieur et le chef des armées. Adam en resta coi, la langue collée au palais bien qu’il ait ouvert la bouche de stupéfaction.  


— Bonjour, Chillwell, déclara le Siffleur sans lever les yeux de son ordinateur. Asseyez-vous, je vous prie.  


 

******* 

 


Le même jour, à un peu plus de 3000 kilomètres d’ici, à Tampico, au Mexique 


Loin de l’immensité et de la propreté de la salle dans laquelle était rentrée Adam, le studio de Sombra était étroit, désordonné, et il y traînait une odeur de chips aux fromages. La jeune femme basanée était paresseusement lovée dans la couverture de son lit, ses longues jambes croisés devant elle et lui cachant légèrement l’écran plat qui passait un énième épisode de télénovela qu’elle avait dû regarder une dizaine de fois depuis la rentrée. Des habits sales jonchaient sur son bureau à côté d’un ordinateur portable ouvert sur des interminables lignes de code. Un ventilateur de plafond tournait lentement et inutilement dans le vide. Des paquets de cacahuètes vides et des canettes à moitié pleine étaient posés sur le sol. Sur le mur au papier peint rose bonbon, deux posters de ses groupes préférés des années 2000 étaient fixés. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait plus été sur le terrain en mission, et elle s’était laissée un peu aller. La solitude l’affectait plus qu’elle n’aurait pu le croire et elle ne s’était jamais sentie aussi déprimée. 

Pourtant, bosser à La Griffe, c’était vraiment le pied, ne serait-ce que pour la somme d’argent que chacun de ses agents pouvait personnellement amasser par mission. En fait, ça marchait un peu comme dans un gang. Vous pouviez faire tous les délits que vous vouliez, revendiqués et avec les technologies de la maison, mais en retour, vous donniez un petit pourcentage à l’organisation. Comme avait l’habitude de dire Sombra, c’était “tout bénéf”. Seulement, elle avait aussi des comptes à rendre à ses supérieurs, était impliquée sur des missions de plus en plus importantes, et perdait peu à peu ce sentiment de liberté qui l’avait toujours accompagné depuis son départ de l’orphelinat. 


“Sombra” était beaucoup de choses aux yeux de la planète : un symbole, un bandit international, mais pour une vingtaine de personnes parmi les 8,7 milliards qui peuplaient la planète, elle était une ravissante mexicaine d’une trentaine d’années. Son sourire d’ordinaire malicieux était remplacé par une moue pensive, alors que ses grands yeux curieux se perdait dans le triste plafond.  


C’est pourquoi lorsque le téléphone sur sa table de chevet sonna, elle n’hésita pas une seconde et bondit tel un félin de son lit.  


— Oui ? fit-elle un peu trop précipitamment.  

— Bonsoir, Sombra.  


Elle eut la chair de poule rien qu’en entendant sa voix. D’habitude, une voix profonde et chaleureuse l’aurait rassurée plus qu’autre chose, mais de savoir que c’était son boss qui l’appelait, provoqua une vague de frissons qui lui parcourut l’échine. Il faisait partie d’un des rares hommes qu’elle craignait réellement, même si elle n’osait se l’avouait, et cachait sa peur avec du sarcasme à outrance.  


— Bonsoir, boss, répondit-elle en essayant de paraître le plus calme possible. Vous êtes revenu plus tôt que prévu de votre voyage au Mexique... ! 

— En effet. Les choses se sont déroulés rapidement. Maintenant, il va falloir parler de la suite des évènements avec tout le monde. Un taxi sera chez toi dans une heure.  

— Entendu, je vais m’apprêter.  


Il raccrocha sans plus de cérémonie, et Sombra posa le combiné avant de se déplacer paresseusement vers son armoire pour y prendre une serviette. Une fois sortie de la douche, elle opta pour des bottines confortables et une longue veste noire, car elle ne s’habituait toujours pas à la froideur des nuits du Brésil. Elle plaça dans sa sacoche ses deux ordinateurs et autres fichiers, se maquilla légèrement, et ferma la porte de son studio au moment même où elle entendait le taxi klaxonner. 

Le véhicule était une berline volante et noire aux vitres teintées de l’intérieur comme de l’extérieur : A priori, Doomfist ne voulait pas savoir où ils allaient. Sa journée s’égaya pour la première alors que le soleil se couchait, lorsqu’elle vit une silhouette musclée au masque blanc et menaçant sur la tête.  


— OooOoh ! s'exclama-t-elle sous la surprise en écarquillant les yeux, choquée. Hola, Gabriello ! Tu m’as manqué ! 

— Ne commence pas, rétorqua sèchement ce dernier de sa voix grave et trafiquée.  

— Tu ne pouvais pas attendre de me voir au Q.G, hein ? plaisanta-t-elle avec un grand sourire. Il fallait que tu viennes chercher ta femme avant, je comprends...  

— Si je n’étais pas un tueur à gages recherché mondialement, je porterai probablement plainte pour harcèlement ! soupira-t-il en hochant lentement la tête. On peut y aller, ajouta-t-il à l’encontre du chauffeur.  

— C’est toi qui harcèles mes sens avec ton regard de tombeur, ricana-t-elle, hilare.  

— Alors toi, tu t’es sacrément ennuyé ces deux derniers mois...  

— Moi, m’ennuyer ? Jamais ! mentit-elle avec aplomb. 

— Tu as fini le cryptage de données ? 

— Nan, répondit-elle à contre-cœur en détournant le regard.  

— Tu vas te faire taper sur les doigts.  

— La Griffe a énormément de données, d’accord ? se défendit Sombra. Doodoo (se prononce “doudou”) comprendra.  

— Ah, tu lui as trouvé un nouveau surnom ? 

— Tu l’aimes bien ?! 

— J’adore ! susurra-t-il avec sadisme. Je me demande s’il aimera bien, lui aussi... ! 


Sombra le regarda l’air interdit alors que Faucheur ricanait d’un rire sans chaleur.  


— Maintenant, tiens-toi tranquille, si tu ne veux pas que cette information fuite ! 

— Tu es la personne la moins drôle que j’ai jamais vu de toute ma vie, et pourtant je travaille avec Amélie ! s’insurgea-t-elle, en croisant les bras et en faisant la moue. 


Mais au grand bonheur de Faucheur, la suite du voyage se passa dans un calme relatif. Le voyage dura donc nettement plus longtemps pour la pipelette taquine qu’était Sombra, désormais forcée de se taire. En plus, elle ne pouvait voir à l’extérieur à cause des vitres teintés. Elle se surprit plusieurs fois à somnoler, signe que les dernières nuits blanches la rattrapaient, jusqu’à ce que la voiture s’arrête et se pose au sol dans un petit tintement métallique.  


— Avant de sortir, je vais devoir vos bander les yeux, lança mécaniquement le chauffeur en sortant deux bandes de tissus noires de la boîte à gants, tandis que Sombra essayait en vain d’ouvrir la portière.  

— On est pas au Q.G ? 

— Non, c’est un nouvel emplacement, mais le boss ne veut pas que vous soyez au courant de sa localisation pour le moment.     


De ses doigts fins et métalliques, le robot banda les yeux de Sombra et Faucheur, puis les fit sortir. La jeune mexicaine ne voyait plus rien, certes, mais elle avait froid. Elle entendait aussi au loin un petit bruit de ventilation... Ils n’étaient donc pas à l’extérieur... Mais impossible qu’ils soient dans une tour de bureau non plus. Elle en conclut que c’était un parking, probablement souterrain. Elle ne savait pas si ceux à étages nécessitaient aussi une ventilation... Une autre main, rêche, mais moins dure que celle du chauffeur, l’attrapa à l'arrière du cou et la força à avancer. Cela provoqua un petit cri de sa part, et elle essaya automatiquement de s’extirper de sa prise en vain.  


— Doucement avec vos mains ! pesta-t-elle.  

— Vous pouvez y aller, dit le chauffeur derrière elle, alors qu’elle entendait de nouveau le moteur du taxi qui les avait emmenés.  


Le vrombissement du moteur fit comme un écho, ce qui lui confirma qu’ils étaient bien dans un vaste parking souterrain, probablement vide d’après les répercussions du son. Elle fut forcée de marcher droit devant elle. Le sol sous ses pieds lui confirma qu’elle était bien dans un parking d’intérieur et non à l’air libre sur du bitume. Ils arrivèrent bientôt devant ce qui sonnait comme un ascenseur. Elle en eut la confirmation lorsqu’elle sentit cette petite sensation de haut-le-cœur quand la cabine s’éleva. Ils arrivèrent finalement et se mirent à marcher sur ce qui semblait être un tapis en velours. Malgré toute ces informations que ses sens aiguisés capturaient et que ses capteurs intégrés traitaient, elle n’avait toujours pas trouvé où ils étaient... 


Lorsqu’on leur enleva le bandeau devant leurs yeux, la seule lumière leur venait d’un écran tactile bombé de la taille de la table circulaire à laquelle il était soudé. Une douce lumière bleue illuminait le visage des participants assis tout autour. Immédiatement, en face d’elle, elle vit la tête de son boss, baissée sur la map monde, en proie à la réflexion, avec les yeux dans l’ombre. Akinjide Ogundimu, alias Doomfist ou “Le Successeur”, était une grande personne, épaisse comme une armoire. Son corps tout entier était sculpté par des années de sport de combat et de musculation qui faisaient de lui, couplé à sa technologie, l’un des hommes les plus dangereux du monde sur un champ de bataille. Il était une véritable arme destructive humaine, et cela allait en empirant... ! 

A sa gauche se tenait Maximilien, un robot grand et longiligne, aux yeux de basset et maniéré comme un politicien corrompu. Enrôlé dans un costume noir qui lui allait comme un gant, il était tantôt gérant de multiples casinos en Italie, ainsi que conseiller interne de La Griffe.      

Widowmaker était là aussi, une française à la peau bleutée en raison de ses très faibles battements de cœur. C’était une tireuse d’élite impitoyable qui ne trouvait satisfaction que dans le meurtre. Sa silhouette fine d’ancienne danseuse de ballet lui donnait l’impression de se noyer dans son grand fauteuil. D’un air froid, elle manipulait entre ses mains une araignée rouge et noir qui semblait être un croisement d’espèces particulièrement venimeuses.  


Buenas tardes todos ! Patron, je ne savais pas que vous aimiez les surprises !  

— Si on vous capture et qu’on vous torture, je ne souhaite pas que vous révéliez des infos compromettantes... ! 

— Charmant, murmura-t-elle avec un sourire narquois.

  

Tandis que Faucheur se dirigeait vers la droite de Doomfist en faisant flotter sa longue cape noire, Sombra choisit de se poster à côté d’Amélie. Alors qu’elle tirait la chaise, elle la vit jongler avec une araignée grasse et vivace entre ses doigts aux couleurs rouge et noirs qui semblait être un croisement d’espèces particulièrement venimeuses, eut un haut-le-cœur, et alla plutôt se poster à côté du gros Omnique menaçant qui la toisait comme si elle n’était qu’un insecte. Il était tout aussi imposant que Doomfist, et portait un costard aussi, mais ses yeux rouges et anguleux semblaient en proie à une haine destructrice en permanence, et lui donnait un tout autre air que Maximilien. Il sortait de sa gueule d’acier une lueur pourpre et de la vapeur froide. Sombra se rappelait qu’il s’appelait Akuma, et qu’il était un allié capital pour La Griffe, en provenance du Japon.   

Sombra balaya la tablée du regard. Elle voyait des sales têtes de mafieux, des originaires du pays, des femmes espions, mais pas les deux acolytes qu’elle attendait.  


— Mais où sont donc nos espions préférés ? s'enquit-elle. 

— En mission, lança Doomfist, tandis que Widowmaker soupirait comme simple réponse.  Rapprochez-vous de la table, allez ! Bonsoir tout le monde. J'espère que vous aurez profité de cette petite période de vacances lorsque je n’étais pas là... 


Des vacances... ? Sombra fut pris d’une quinte de toux légère et factice pour signifier sa désapprobation, mais elle ne reçut que des regards noirs qui l’enfouirent dans un silence gêné, son éternel sourire ne quittant pas ses lèvres. 


— Comme je disais, donc, reprit calmement Doomfist, qui semblait être le seul à supporter la troubleuse de fêtes qu’était Sombra, j’espère que vous avez bien profité de cette période de vacances lorsque je n’étais pas là, parce que maintenant, on passe à la vitesse supérieure ! Mais tout d’abord, Sombra, il semblerait qu’un agent spécial des forces russes t’ait retrouvé ? 

— Hein ? s'exclama-t-elle, surpris de savoir qu’il savait. Heu... Pas exactement. En fait, j’ai vu qu’elle me cherchait et c’est moi qui aie décidé d’aller la trouver... 

— Pourquoi ne pas l’avoir laissé tourner en rond ? demanda Faucheur.  

— Je... J’en avais assez de l’avoir dans mes pattes.  

— Ce n’est pas parce qu’elle aurait pu découvrir quelque chose de réellement compromettant sur ton identité... insista-t-il. Comme ton nom, par exemple ? 


A la dernière allusion, le cœur de Sombra sembla se serrer si fort qu’il devint aussi grand qu’une orange. A quoi jouait-il donc ? 


— Bon, c’est fini l’interrogatoire ! s'énerva-t-elle en lui lançant un regard noir, la voix légèrement tremblante. Ce n’est rien de tout ça ! Elle ne faisait même pas partie de forces spéciales, ce n’est qu’une simple paysanne qui a gagné deux médailles en carton aux J.O et qui a été sollicité par la Première Dame Russe !  

— Tiens donc, par la Première Dame russe ? rebondit Faucheur qui ne voulait pas lâcher le morceau, sous le regard insondable de Doomfist. Tu veux dire, celle que nous avons essayé de tuer avant d’aller chercher le boss à Numbani ? Pourtant, vous ne vous êtes jamais croisée pendant l’opération, si ? 


Cette fois, les rougeurs montèrent carrément aux joues de Sombra. Comment Gabriel en savait-il autant ? Le fait que l’agent spécial russe connaisse son nom, mais aussi ses insinuations très précises et justifiés sur la mission en Russie... 


— Bien sûr que non, répondit-elle abruptement, jetant furtivement un regard à son boss pour voir sa réaction. Tu le sais bien, j’ai fait ce que j’ai pu, mais j’avais une armée devant moi !  

— Ce qui t’as empêché de répondre à ton talkie, intégré directement dans ton oreille ? A aucun moment je n’ai entendu des coups de feu... ! En fait, on aurait carrément dit que tu l’avais désactivé ! 

— Je t’emmerde, toi et tes insinuations, Gabe ! J’ai rien à te prouver !  

— Où veux-tu en venir, Faucheur ? s'enquit Widowmaker, piquée par la curiosité.  

— A rien, s’exclama Sombra en lançant un regard assassin au mercenaire. Il joue juste les troubleurs de fêtes !  

— Que ce soit toi qui m’appelles comme ça, c’est un peu le comble de l’ironie...  

— J’en ai assez entendu comme ça, trancha Akinjide d’un ton calme.  


Le silence retomba à nouveau dans la salle. Sombra avait le cœur qui battait la chamade, et les mains moites d’épouvante. Que se passerait-il s’il étalait toute ses magouilles ici ? Avec la venue de cet agent spécial russe, et ce que savait Faucheur, elle avait l’impression de perdre cette sensation de contrôle qu’elle avait toujours eu en piratant les autres. Elle avait l’impression de laisser des indices derrière elle, mais savait pertinemment que ce n’était pas le cas, alors comment, pourquoi... ? Ou alors n’était-elle pas encore assez précautionneuse ? C’est quelque chose qu’elle pouvait aisément accepter quand elle regardait l’état de son studio... ! 


— Vous poursuivrez cette discussion plus tard, si ça vous arrange, reprit le boss. Pour ma part, j’en sais suffisamment.  


Suffisamment de quoi ? Que voulait-il dire par là ? 


— Mais enfin, boss, vous n’allez quand même pas croire...  

— Maximilien, reprit-il implacablement, présente-nous le sujet suivant.  

— La Griffe aura bientôt son propre Q.G terrestre, enchaîna ce dernier d’une voix mielleuse et légère. Bientôt, nous pourrons refaire de l’Italie notre petit cocon, et nous aurons aussi une place privilégiée en Asie. Ce n’est plus qu’une question de temps. Seulement, nous n’aurons pas le champ aussi libre que nous le pensions. En effet, Overwatch renaît, et j’attends de vous que vous tuiez cette entreprise dans l’œuf ! 

 


******* 


 

Son officier traitant le regarda d’un air ébahi, ses doigts tapants toujours impatiemment la table métallique. 


—Overwatch est de retour ? Vous en êtes sûr, Chillwell ?

— Certain.


Le ministre et "SIffleur" se regardèrent un moment, ébahi.


— Mais comment avez-vous fait ? 

— Je vous avais dit que ré-ouvrir la section de surveillances du canal de communication secret entre les agents principaux d’Overwatch allait payer.  


Son interlocuteur leva un sourcil, perplexe, avant de regarder le ministre des Renseignements, dont le regard indiquait qu’il comprenait un peu mieux que le Siffleur.    


— Winston a envoyé un message à tous les anciens agents d’Overwatch, se mit à expliquer Adam. Absolument tous. Et cela nous m'a donné l’ensemble de leur localisation. Je l'ai découvert après son escapade avec l’agent Tracer à Numbani. 

— Winston ? Le babouin qui parle ? 

— Le gorille de 2 mètres 50 génétiquement modifié, oui, rectifia le ministre avec une petite grimace avec une petite grimace lorsqu’il entendit le mot “babouin”.  

— C’était pourtant l’un de nos scientifiques les plus intelligents ! insista Siffleur de sa voix déraillée. Comment-a-t-il pu faire une telle bourde ? 

— Rappelez-vous, à l’époque, reprit le ministre. Un traité de confidentialité avait été signé autour de ce canal. Personne ne devait le surveiller pour des raisons de sécurité, afin d’éviter les fuites et les possibles trahisons au sein du Pentagone pour des organisations criminelles comme La Griffe, IronHead, et ainsi de suite.

— Mais c’était un mensonge éhonté, comprit-il en hochant la tête. Bien... Très bien Chillwell... ! La Traque va pouvoir commencer ! 

— Justement, concernant la Traque, messieurs, je tiens à avoir la totale responsabilité des opérations.  


Les deux hommes se regardèrent avec un sourire vague, pas sûr de savoir si Adam se foutait de leur gueule ou était bel et bien sérieux. 

 

— C’est une plaisanterie ? sourit l'officier traitant.

— Non, c’est très sérieux, répliqua Adam qui apparaissait étonnement calme. Toutes ces années où vous m’avez demandé de chasser les derniers agents d’Overwatch, j’ai fait mon petit bonhomme de chemin tout seul, contre vents et marées, à gérer seul les problèmes administratifs et les manques de moyens. La quasi-totalité de mes requêtes ont été ignorés, sauf celle de re-surveiller leur canal de communication, comme quoi si on m’avait écouté plus tôt, je les aurais attrapés depuis bien longtemps... ! Je pense avoir prouvé que j’étais plus qu’un bon petit soldat...  

— Ne montez pas sur vos grands chevaux, Chillwell, l’arrêta Siffleur dans un souffle, balayant sa requête d’un geste de la main, comme s’il voulait écarter une mouche. Vous n’avez aucune expérience de gestion, on parle d’une entreprise planétaire et dont la réussite pourrait placer notre nation à nouveau au centre du monde ! Moi qui croyais votre insolence définitivement partie... ! 

— Sauf que pour arriver à ce stade, il vous fallait parier sur ma réussite, et entre nous, monsieur, combien de mes supérieurs auraient pariés leur vie sur mon succès ? 


Son officier traitant resta silencieux, les bras croisés.  


— C’est bien ce que je pensais, souffla-t-il avec un sourire narquois. Je pense même que mettre un billet de dix leur aurait fait mal au cœur. J’ai toujours été le petit gars qui ne voulait pas écouter les ordres et qui foutait la merde, mais je n’ai jamais été suffisamment bon pour avoir un passe-droit. Vous m’avez mis sur cette affaire parce que vous ne saviez plus où me mettre, et vous savez quoi ? En parlant de pari, je parierai bien un billet de cent que vous pensiez tellement que j’allais rater, que vous n’avez aucune idée de ce que vous alliez faire par la suite.  


Adam reprit sa respiration et entreprit de gagner la bataille de regard qui s’était lancé. C’est vrai qu’il avait longtemps été le vilain petit canard de l’armée. Il avait d’impressionnantes capacités physiques et intellectuelles excellentes bien sûr, ce qui lui avez valu de ne pas se faire virer, mais pas suffisamment au-dessus du lot pour avoir le respect total des supérieurs à qui il faisait des pied-de-nez. Il était trop chaotique, imprévisible. À bout, son général avait signalé son cas particulier, et quelques semaines plus tard, il était envoyé dans un petit bureau avec des étagères pleins les murs, et des dossiers à étudier afin de réaliser un nouveau projet : trouver les agents d’Overwatch qui n’étaient pas encore en prison. C’était ce jour, ce premier jour, qu’il comprit que ses supérieurs avaient créé un projet poubelle impossible à réaliser dans le seul but de ne plus l’avoir dans les pattes. Ce qu’ils n’avaient jamais su, c’est que la mission qu’il avaient confié à Adam Chillwell était parfaitement en accord avec la promesse qu’il s’était faite bien des années auparavant, et ils n’avaient jamais autant entendu parler de lui qu'à partir de ce jour-là.  


— Eh bien... vous avez partiellement raison, avoua l’officier traitant avec la même réticence que l’aurait fait un tueur devant un juge. Il est vrai que vous avez dépassé nos espérances. 


Il se leva et se mit doucement à faire les cent pas, tandis que Adam expirait d’un coup, comme s’il avait retenu sa respiration tout ce temps. Foutre la merde pendant le service militaire, c’était bien, mais c’était surtout une impulsion autodestructrice. Il se rendait compte que c’était tout de suite beaucoup plus difficile de tenir tête à ses supérieurs pour satisfaire ses propres intérêts. Le ministre des Renseignements regardait Adam avec un sourire mi-amusé, mi-surpris, appréciant visiblement le courage dont il faisait preuve. Siffleur lui jeta un coup d’œil interrogateur et il eut un très léger hochement de tête, avant de se lever.

  

— Je vous laisse régler ce petit problème, Watson... ! glissa-t-il légèrement sans se départir de son sourire, avant de quitter la pièce. Je suis déjà en retard pour une réunion plus importante, mais n’hésitez pas à me tenir au courant du dénouement... ! 


En sortant, il aurait juré qu’il lui avait fait un clin d’œil, mais il n’eut même pas le temps d’y réfléchir : A peine fermait-il la porte que Siffleur se penchait sur la table et le fixait droit dans les yeux.  


— Bon, écoutez Chillwell, commença Watson, je vous entends, mais vous ne pourrez pas être seul aux commandes, c’est impossible. Ils ne voudront jamais, tout là-haut, explicita l’homme ventripotent en montrant du doigt le plafond. Le président et toute sa clique, j’entends, ajouta-t-il devant l'incrédulité de son interlocuteur. On en reparlera. Pour l’instant, je suis en effet très intéressé de savoir ce que tu as dans la tête pour la suite des opérations. Dis-moi, quels sont tes cibles principales, et où se trouvent-elles ? 


Adam sortit les trois clés USB de sa poche et les fit glisser sur la table vers lui et l’ordi portable posé devant lui.  


— J’ai énormément d’infos, commença-t-il alors que Siffleur s’asseyait précipitamment et sauter sur ses clés avec l’avidité d’un lion affamé, avant de les introduire dans son ordinateur. Tout d’abord, celui qui vous intéresse le plus : Jack Morrison. D’après mes infos, il est au Mexique,... 

 


***** 

 


— Nous savons que Jack Morrison était au Mexique il y a quelques jours, et se dirige en ce moment même vers l’Afrique du Nord, déclara Maximilien de son ton mielleux. 


Il posa sa grande main sur l’écran tactile. Sombra baissa le regard et pu voir la map monde plus en détails. Les mers étaient bleu clair et les continents plus foncés, avec plusieurs petits points. A Gizeh, en Égypte, se trouvait trois points rouges, et un point vert. Un peu plus loin, vers l’Irak, un autre point vert. Il y avait aussi deux points rouges au Mexique, un au Japon, un en Grande-Bretagne, deux en Allemagne, un en Suède, un en Afrique du Sud... Il y avait encore plus de points verts à travers tout le globe, et elle comprit bien vite que ceux-ci devaient représenter leurs alliés. Logiquement, les rouges étaient donc leurs ennemis.  

Maximilien zooma vers le Mexique, vers le sud du pays, à quelques heures de leur position, sur un point rouge.  


— Overwatch ? s'enquit un mafieux irlandais allié de La Griffe depuis plusieurs années. Et que font-ils du Petras Act ? 

— Ils agiront en cachette, désormais, répondit Doomfist. Rappelez-vous à Numbani. Ils avaient déjà posé des problèmes à Gabriel et Amélie.  

— En effet, renchérit Maximillien. Et puis, ils sont toujours considérés comme des criminels recherchés par l’opinion, certes, mais il suffirait quel leur avis change après des actes héroïques de leur part, bien qu’illégaux, pour que nous soyons dans de beaux draps. 


De son index de métal, il pointa l’Égypte, où il y avait un point vert et trois points rouges.  


— Hakim, l’un de nos proches collaborateurs, m’a informé qu’il était suivi par un chasseur de primes locale. Nous n’avons désormais plus de doutes sur son identité, il s’agit d’Ana Amari, la soi-disant morte au combat.  

— Comment est-ce possible ? s'exclama Widowmaker d'un ton poli et de son éternel accent français, l'air perplexe. Je pensais l'avoir descendu... !  

— Nous n’excluons pas le fait qu’elle s’en soit sorti. D'autant plus qu'elle t'avait tiré dessus, et que toi aussi tu t'en étais sorti, n’est-ce-pas ? Quant à toi Sombra, tu nous as dit avoir retrouvé la trace de Jack Morisson au Mexique, c’est ça ? En ce moment même, il est en déplacement vers l’Afrique du Nord. On peut donc supposer qu’il sera en Égypte dans peu de temps pour se réunir avec Amari, d’où le deuxième point rouge. 

— Et le troisième ? demanda Faucheur. 

— Lindhölm, l’ancien ingénieur en armes d’Overwatch, le plus remuant d’entre eux. Il a parcouru le mondes ces dernières années, en reprenant le contrôles d’armes qu’il avait construites et que nous convoitions. Dernièrement, il a même détruit un Titan sur lequel notre ami Sven avait mis la main.  


De la main, il présenta le dénommé Sven que Sombra connaissait bien. Un homme du nord, teigneux, avec des cheveux blancs en catogan, une moustache encore plus longue et extravagante que son voisin russe, et une barbichette soignée. Il était l’un de leur collaborateur les plus importants, mais aussi le plus têtu. 


— Il est parti de Suède pour aller en Espagne enquêter sur une entreprise de fruits et légumes qu’il trouvait louche. L’entreprise en question est celle qu’utilise notre allié en Égypte, Hakim, pour faire transiter des armes d’Europe vers l’Afrique. En ce moment, Lindhölm est en Méditerranée et suit la marchandise. Il devrait bientôt finir en Égypte, lui aussi. 

— S’il s’agit de les éliminer, boss, commença Widowmaker, je peux reprendre le travail où je l’ai laissé.  

— Ce n’est pas contre toi Widow, mais je pense qu’il est plutôt de mon devoir de finir le travail, intervint Faucheur.  

— Je pense aussi, acquiesça Doomfist. La réunion du quator du début, uni une dernière fois à Gizeh... Ce serait plutôt poétique comme retrouvailles. Jusqu’à ce que tu leur troues la cervelle bien sûr.  

— Ce sera fait.  

— Voie ça avec Hakim. Toi Amélie, je t’envoie en Grande-Bretagne, continua Akinijide en tournant le globe, montrant un point rouge à Londres. Vas-y, et attends-y mes instructions. Tu as un logement, des armes et une voiture à ta disposition.  

— Bien reçu. C’est pour tuer cette arrogante de Léna Oxton, n’est-ce-pas ? 

— Oh oui, au final, mais pas pour le moment, temporisa Doomfist d’une voix douce, mais qui ne manqua pas de faire frissonner ses interlocuteurs. Tu trouveras là-bas sa copine, une dénommée Emily... !  

— Je comprends, fit Widowmaker en affichant le sourire que devait avoir intérieurement une araignée avant de fondre sur sa proie.  

— Sombra, tu viendras avec moi, et Bill restera ici. Nous parlerons ensemble des préparatifs de la mission. 

— Ok.  

— Comment avance le projet IEM ?  

— Très bien ! mentit-elle. Je m’y suis concentré à défaut de bosser sur le cryptage de données, mais je compte bien finir les deux avant la semaine prochaine.  

“Avant la semaine prochaine ? Non mais t’es folle ma vieille !?” 

— Parfait ! Parce que nous aurons justement besoin de ta technologie dans peu de temps.  

“Ah, ben j’avais pas le choix de toute façon... !” 

— Toi, Akuma, tu iras en Australie. Quant aux autres, ils sont déjà placés. Maintenant je vais vous expliquer exactement en quoi consisteront les prochaines semaines, ajouta l’homme d’affaire en se penchant, éclairant un peu plus son visage à la lumière bleue.  


Tout le monde se pencha vers lui, l’oreille attentive, alors que Doomfist zoomait vers son pays natal, le Nigéria. Enfin, tous n’écoutaient pas religieusement, à l’instar de Sombra qui ruminaient et s’inquiétaient en silence. A l’avenir, il fallait qu’elle soit plus prudente. Et surtout, le travail reprenait de plus belle. Désormais, elle redevenait le membre à part entière de la plus grande et dévastatrice organisation criminelle qui ait jamais existé. Et le monde allait entendre parler d’eux de nouveau... ! 


 

**** 

 


— Et du coup, comment on fait pour les opérations, étant donné que je ne pourrai pas gérer tout ? s'enquit Adam

— Je vais vous associer à une femme dans un premier temps. Elle est aussi espiègle que vous quelques années plutôt et a besoin d’un défi plus grand pour la calmer quelque peu. Amy Dearan, qu’elle s’appelle.  

— Une associée ? Je préfère encore laissez les décisions venir de plus haut... !  

— Allons, allons, ne vous inquiétez pas ! s'exclama Siffleur. Elle est prompte à jouer des pieds et des poings, sait sentir les choses et sait piocher les bonnes informations grâce à son expérience d’espion. J’ai hâte de voir ce que votre duo va donner. Deux pour l’instant, car je veux que vous restiez discret. Je ne pense pas que rentrer dans le tas face à des soldats surentraînés soit la bonne solution. Mais peut-être avez-vous une objection à faire, comme c’est qui êtes aux commandes maintenant... ! 


Avec un désagréable sentiment dans l’estomac, il se rendit compte qu’il était une fois de plus considéré comme un objet intéressant, mais à qui personne ne faisait attention.  


— Non, c’est ce que je pense aussi, acquiesça-t-il doucement, les lèvres pincées. C’est ce que je pense aussi.  

 

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