Mère divine et Humaines inquiétudes
Chapitre 1 : Mère divine et Humaines inquiétudes
3219 mots, Catégorie: K+
Dernière mise à jour 26/08/2024 00:01
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Mère divine et Humaines inquiétudes
15 mai 2014, au sommet de l’Olympe,
Athéna est seule dans son gigantesque palais aux immenses colonnes d’or et d’airain qu’est sa demeure officielle, faisant les cent pas, très radieuse de la journée particulière, mais en même temps très triste.
Aujourd’hui, sa fille préférée, Annabeth, se mariera au fils de son rival, Persée, dit Percy, Jackson, fils de Poséidon et de Sally Jackson. Elle, la déesse vierge aux yeux pers qui ne connait pas le joug du mariage ni celui de la maternité, est ravie, comme toute mère, que sa fille soit enfin mariée, qu’elle passera enfin cette étape importante de la vie, mais la déesse aux yeux de chouette n’apprécie guère son gendre. Même si elle doit reconnaître sa bravoure et son courage à toute épreuve lors des récentes guerres contre Gaïa et Cronos. L’Immortelle soupire, glisse une main entre ses cheveux d’ébène pour ramasser ses cheveux libres en une tresse et se déplace, rapide comme la lumière d’Hélios, sans même effleurer le sol en or incrusté d’émeraudes de ses pieds divins chaussés de sandales dorées, cadeau d’Héphaistos, jusqu’à son miroir d’airain sagement installé sur la commode. Tournant un regard vers l’Égide qui trône au fond de la chambre, où la tête de Méduse domine son centre — figée pour l’éternité dans un horrible rictus, les yeux écarquillés d’étonnement et les cheveux ophidiens en désordre — , la mère d’Annabeth prononce une incantation en ancien grec et une image se forme à la surface de l’objet poli. Elle note sa chère fille, cette grande et jeune demie-déesse de vingt-et-un ans au teint hâlé, aux yeux gris et aux cheveux blond, vêtue dans une élégante robe blanche aux arabesques les plus complexes sur les bras, très fébrile et excitée que dans quelques heures elle sera l’épouse de son amour d’enfance. Le cœur maternel de la déesse se gonfle de joie, d’un bonheur indescriptible, ses yeux brillent d’un éclat de fierté et ses lèvres murmurent une bénédiction.
La déesse de la Guerre et des Stratégies ne peut réprimer un sourire nostalgique à l’image qui s’offre à ses yeux pers, celle de sa fille, sans se souvenir de sa rencontre avec le père d’Annabeth, Frédérick Chase, une vingtaine d’années auparavant. Ce simple professeur d’Histoire, spécialiste des Guerres mondiales et des stratégies militaires du monde occidental, l’a immédiatement séduit par son intelligence et sa vivacité d’esprit, caractéristiques rares pour des mortels, pense-t-elle. Leur première rencontre a été hors de l’ordinaire, un intérêt et une curiosité réciproques dans leur regard a été l’amorce de leur relation platonique, une étincelle qui est née de ce premier moment marque son souvenir à jamais. Elle saisit facilement la curiosité et le respect que sa présence engendre auprès du professeur, mais elle ne peut toujours pas s’expliquer cet attrait pour lui, un attrait amical, puis amoureux — attrait qui laisse en son âme une amertume de ne pas être plus à ses côtés. Elle se rappelle de la conception de sa fille, de sa pensée divine qui s'est mêlée à celle de son amant lors de leurs discussions animées autour des stratégies militaires, sans jamais le connaître physiquement. L'acte intellectuel, bien qu'inconcevable pour les mortels est très aisé à exécuter pour la déesse : une pensée concentrée sur la forme adulte de sa fille, sur sa taille, sur son apparence et sur son caractère à laquelle elle joint les pensées de son amant, puis sa forme enfantine. Le moment même de cette conception hors de l'ordinaire est toujours suivie d'une joie et d'un bonheur indescriptibles en son âme d'immortelle. Et elle a donné à sa fille la couleur de ses yeux — en lui donnant la plus belle nuance, la grise — et son intelligence, mais elle lui a laissé la jolie couleur de cheveux de son amant, à savoir des cheveux blond cendré, par respect pour l’homme qu’elle aime. La déesse ne parvient jamais à s’expliquer ce moment d’euphorie lorsque leurs pensées, dans un désir et un mouvement communs, s'étaient unis pour créer leur fille, sans jamais s’être déshabillés ou manifester un geste amoureux. Elle a admiré la grande retenue et la politesse de son amant, malgré son immense désir de la connaître plus intimement; il a freiné ses gestes, créant un petit sourire reconnaissant à la déesse. Cette grossesse par la pensée a l'avantage de pas être aussi exigeante que la physique, en plus d'être plus rapide, en quelques semaines, le temps que les pensées unies mûrissent pour former le bébé. Même si la déesse a un certain goût amer de ne jamais connaître une réelle maternité, ni les plaisirs de l’amour, à l’instar des autres déesses qui ont des demis-dieux, ni d’avoir un enfant de lui, mais elle ne regrette pas son choix.
À la naissance d’Annabeth, Athéna reconnait au fond de son âme que son amour et son instinct maternels ont augmenté, plus que pour aucun autre de ses enfants — et les fils et les filles de sa pensée sont nombreux au cours des millénaires — mais aucun n’a eu autant d’attention qu’elle. Son intuition et les Moires lui laissèrent présager son importance pour le futur de l’Olympe et les guerres à venir, et non seulement elle, mais surtout ses enfants. Ces derniers seront la clé pour l'équilibre du monde et de l'existence des hommes et des dieux, d'eux dépend l'écroulement ou la survie de l'univers. Et, lorsqu’elle devait la laisser à contrecœur à Frédérick pour ne pas enfreindre la loi divine qui empêche au parent immortel d’élever leurs enfants, elle a donné à sa fille une arme — un petit poignard caché dans un collier — une casquette magique, un livre et une chouette. Les deux premiers sont destinés à la protection de l’enfant lorsqu’elle aurait onze ou douze ans et le livre — un livre de mythologie — est destiné à éveiller la curiosité et l’intelligence enfantine sur cette réalité qui lui vient de sa mère, pour qu’elle sache que sa mère la chérie de tout son cœur malgré qu’elle brille par son absence auprès d’elle. L’oiseau de nuit, quant à lui, veille sur le bébé de quelques mois tous les soirs et tous les jours, avec pour mission de défendre sa fille et de semer les ennemis — les monstres de Gaïa et ceux des Enfers. Athéna est d’autant plus heureuse qu’elle constate que la jeune demi-déesse porte toujours le collier autour du cou. Sans oublier que la casquette magique qui la rend invisible lui est toujours à portée de main en cas de nécessité. La chouette, son fidèle compagnon ailé, depuis qu’Annabeth a été reconnue comme sa fille, revint à son rôle d’oiseau messager auprès de la déesse.
La loi divine qui empêche les Immortels d'élever leurs enfants issus des unions avec des mortels est néanmoins logique, reconnaît à contrecœur la Déesse de la Sagesse. Les dieux ont beaucoup trop de responsabilités pour s'occuper adéquatement des enfants, plus absents que rien d'autres de leurs demeures principales, leur rôle de gardiens de l'ordre cosmique est nécessaire — en plus de leurs champs de compétences personnelles — mais également très harassant depuis la fin de l'Antiquité, donc s'occuper en plus d'un bébé n'est pas une priorité. Sans oublier qu'elle doit reconnaître ne pas être à l'aise de changer les couches d'un bébé qui pleure ou même de le nourrir, elle, la déesse sortie adulte, armée et casquée, de la tête de Zeus, l'Immortelle au terrible cri de guerre, est absolument incompétente en matière de soins aux petits enfants. La déesse aux yeux pers préfère les enfants à partir de douze ans, ils ont une certaine autonomie et ont un langage compréhensible pour tous. Sans oublier que Zeus, avec ses multiples bâtards, à l'instar de Poséidon, s'attirera toujours les foudres de son épouse. Celle-ci haït les enfants illégitimes de son mari, les considérant comme un affront à son mariage, et même Héraclès bébé n'a pas réussi à l'amadouer.
Athéna se remémore aisément ses craintes et ses peurs que sa fille, encore bébé, soit découverte par les monstres, les Cyclopes, la Chimère, les Harpies, des dragons, les Érynies, Empousa ou pire, Arachné — cette fileuse qui a rendu ses enfants arachnophobes. Ne cessant d’interroger trois fois par jours, très angoissée, la chouette gardienne concernant la sécurité de sa fille, Athéna ne peut jamais formuler ses pires craintes et soucis pour sa fille. Annabeth est son enfant qui hérite le plus de son intelligence et de son sens de la stratégie militaire, fierté de l’Immortelle, mais elle n'est pas pour autant invulnérable à cette malédiction, à cette phobie des araignées.
Maintes fois, depuis la venue de sa fille au Camp des Sangs-Mêlés — camp qui accueille et forme les enfants des dieux et des mortels — reconnue rapidement comme sa fille, c’est-à-dire revendiquée, Athéna veille toujours sur elle, l’observant dans son miroir pour connaître ses progrès, accomplissements et réussites. Elle n’oubliera jamais sa joie et sa fierté augmenter lorsqu’elle a observé sa fille battre à plate couture des enfants d’Arès lors des exercices militaires, ni de son fin sens de la stratégie qui s’est révélée exact et infaillible. Elle se souvient encore avec quel mauvais œil elle remarque l’amitié entre sa fille et le fils unique de Poséidon, son rival, Percy Jackson. Elle ne calcule plus toutes ses tentatives d’avertir sa fille de se méfier de lui, autant dans ses rêves que dans des discussions en tête-à-tête, mais en vain; Annabeth ne l’écoutait jamais, persuadée que sa mère n'a été que sur-protectrice envers elle, ce qui n’est pas tout à fait faux. Et maintenant, la déesse reconnaît au fond de son âme, à contrecœur, qu’elle a eu tort d’agir ainsi, mais en même temps, elle ne peut supporter l’idée que Percy abandonne sa fille au moment le plus capital pour sa survie ou pour la survie du monde, ni d’entendre les pleurs et gémissements de sa fille préférée. L’Immortelle admet en son âme sa plus grande crainte maternelle d’être impuissante à aider Annabeth. Imaginer la tristesse de sa fille préférée la chagrine, lui laisse en son cœur un immense gouffre qu’elle ne voudrait pas vivre — déjà que son amour maternel est toujours à rude épreuve lors des guerres et lorsque ses enfants meurent au combat — puisque la douleur serait indescriptible, une douleur inextinguible à la poitrine. Mais elle camoufle du mieux qu’elle le peut cet amour maternel blessé auprès de ses semblables lors des réunions. Elle doit rester forte et rationnelle même en période de drame personnel et familial… En tant que déesse, il est préférable d’avoir plusieurs cordes à son arc, y incluant un minimum de talents en comédie et en camouflage de ses émotions.
Sortant de ses rêveries, souvenirs et craintes, la déesse sourit à sa fille en la voyant si radieuse, si jeune et si heureuse, sa poitrine se gonfle de joie et de fierté. Mais elle est aussi inquiète… Annabeth sera-t-elle une bonne mère ? Élèvera-t-elle bien ses enfants ? Son angoisse est d’autant plus grande que l’Immortelle est bien consciente de ne pas être une bonne mère, plus absente que rien d’autre… Elle a peur que sa fille répète le même schème comportemental… qu’elle n’abandonne ses enfants ou qu’elle ne se comporte de la même manière que sa belle-mère Hélène. Son inquiétude augmente d'autant plus qu'elle est consciente que les enfants qui naîtront de l'union de sa fille avec Percy seront la clé de la victoire définitive des Olympiens sur les Titans. Selon le camp qu'ils choisiront, après une pérégrination dans le Pays des Dieux, le monde sera voué soit à périr sous l'assaut trop important des monstres mythologiques qui s'attaqueront même aux simples mortels, soit à continuer à exister sous l'égide bienfaisante des Olympiens qui veilleront à l'équilibre du monde, reléguant les Titans dans la noirceur de l'insondable Tartare, terreur des Immortels. Et les Moires se taisent, ne fournissant aucun indice, n'affichant qu'un sourire narquois pour toute réponse et s'échangeant un regard entendu, toutes les fois que la mère d'Annabeth les interroge à intervalles réguliers à ce sujet, trop angoissée de ne pas avoir le cœur net à propos d'une question aussi primordiale que la survie du monde des dieux et des hommes.
Chassant ses sombres pensées, accumulées comme des nuages noirs au-dessus de sa tête, Athéna Tritogénie, d’un geste de la main droite, efface l’image du miroir et descend sur Terre, auprès de sa fille.
— Maman ! sursaute-t-elle, étonnée.
La déesse s’approche d’Annabeth et lui donne un câlin maternel, murmurant :
— Ma fille chérie, je suis bien ravie que tu te maries enfin ! Au moins, tu connaîtras des joies desquelles je suis privée ! Et à te voir si radieuse, mon cœur maternel en est fier !
Bouche bée, la jeune femme, s’exclame :
— Mère ! Ainsi, tu me lances un concert de louanges… Alors qu’il y a quelques années, tu me répétais toujours la même chanson concernant mon fiancé ! Qu’il était indigne de moi, qu’il pourrait m’abandonner, qu'il ne m'aime pas réellement et courra rapidement une autre fille, etc. !
— Annabeth, j’ai changé d’avis, je reconnais bien que j’ai failli dans mon jugement ! Paix, ma fille, je ne veux pas être une pomme de discorde le jour de ton mariage ! Veux-tu un câlin, Annabeth, pour se réconcilier ?
— Pourquoi pas ?
Les deux femmes s’enlacent, la déesse met tout son amour maternel dans ce geste, laissant sa fille en larmes.
— Athéna ? interroge, soudain, une voix masculine grave, harmonieuse et familière aux deux femmes derrière leur dos.
La déesse n’a pas besoin de se retourner pour savoir que la voix appartient à son amant et père de sa fille.
— Frédérick Chase vient au mariage de sa fille ! plaisante l’Immortelle, faussement fâchée et sourire radieux.
Le mortel baisse les yeux, honteux, et chuchote :
— Il est vrai que j’étais loin d’être le meilleur des pères, mais elle est ma fille, non ? …
La fille de Zeus approuve d’un geste de la tête, sèche ses larmes de joie d’un geste de la main.
— … Et je ne veux pas être absent le jour de son mariage ! Je veux participer aux festivités ! Et j’ai organisé et payé, conjointement avec Madame Jackson, la mère de mon gendre, les frais rattachés à la cérémonie à la mairie et le repas au restaurant chic. Sans oublier que nous avons sollicité l’aide de Ganymède pour qu’il apporte le nectar et l’ambroisie, à la fois pour toi, ma fille, mais aussi pour les immortels présents à la cérémonie. Il est certain que ta mère, ton beau-père, Aphrodite et Héra y seront...
Le quarantenaire toujours élégamment vêtu d'un complet bleu marine se tourne vers la demie-déesse.
— ... Et je n'agis pas ainsi pour me racheter, ma fille ! Je ne veux surtout pas manquer le jour le plus important de ta vie ! En plus que mon gendre, ce jeune homme qu'est Persée Jackson, est fort sympathique et agréable compagnie.
Athéna sourit devant l’attention et l’égard de son amant envers leur fille, ses semblables immortels et elle-même. La déesse s’arrête devant le mortel et lui chuchote :
— Merci d’être si attentif, Frédérick ! Nous nous reverrons dans quelques heures pour la cérémonie.
L’interpellé, étonné de la douceur de son ton et de sa familiarité, le cœur battant la chamade en sa présence, lui adresse un sourire gêné. L’immortelle l’enlace amicalement contre elle, puis, métamorphosée en une hirondelle, s’envole de la pièce en sortant par la fenêtre entr’ouverte.
Quelques heures plus tard, à la mairie, sans tambour ni trompette, le jeune couple de demi-dieux, suivi de leurs amis — Léo Valdez, Will Solace, Thalia Grace, Nico Di Angelo, Claire Larue, Jason Grace, Piper McLean et bien d’autres — de leurs parents mortels et divins et des dieux qui participent à la cérémonie, arrivent dans la petite salle aux murs blancs, devant une table en chêne. Zeus, accompagné de son épouse légitime, Héra, est le dirigeant de la cérémonie. Aphrodite, les Muses et les Charites entonnent un doux chant d’amour; Apollon joue sa lyre. Au moment où le mariage s’officialise, la mère d’Annabeth rêvasse malgré elle : « Si seulement je pouvais moi aussi être heureuse et mariée… Avoir des enfants de ma chair et de mon sang et non seulement de mes pensées… Et je suis bien intriguée par cette prophétie d'enfants puissants de demi-dieux qui sauveront le monde et les hommes... Sont-ils les enfants ma fille ? Certainement. Je n'ai plus qu'à espérer que ma fille les élèvera bien, qu'ils seront nos alliés... Avant que le monde ne sombre dans le chaos. »
Un frisson parcourt son échine à l'idée d'une défaite lors d'une guerre future contre les Titans, défaite qui est suspendue comme une épée de Damoclès au-dessus du monde des hommes et des dieux, une défaite qui marquera la fin de l'univers, la fin des races immortelles et mortelles, une fin qu'Athéna ne souhaite pas être témoin.