Survivre en ennemis

Chapitre 1 : Survivre en ennemis

Chapitre final

Catégorie: K+

Dernière mise à jour 07/11/2009 15:36

8
Style/Orthographe
8
Scenario
8
Note globale

400 point(s)

Diantre ! Janvier, déjà. Terminées, les fêtes et leurs agapes, derrière nous aussi la galette des rois et l’Épiphanie (mais c’est qui, au fait, cette Fanny ?). Place au détox et à l’année nouvelle que je vous souhaite belle et prospère, paix et félicité et toute cette sorte de choses. Et pour entamer 2018 en douceur, quoi de mieux qu’une petite review, qui, de ma part, en surprendra peut-être certains : nous allons mettre le cap sur l’île de Tortuga, à bord du terrible Black Pearl. Enfin… presque. Car les deux protagonistes, le très à l’ouest Jack Sparrow et l’infâme Hector Barbossa, se retrouvent infortunés piétons le temps d’une courte aventure qui amènera les archennemis de la franchise à collaborer afin de survivre.

Alors Yo – oh, matelots ! Une bouteille de bon rhum brun à la main, embarquons sans tarder pour l’OS de Syrene : Survivre en ennemis .


Orthographe/Style


Je me réserve le droit, lorsque je pioche les textes au hasard de mes découvertes, de ne garder que ceux qui m’ont ravi. Vous pouvez donc vous douter que, cette fois encore, la maîtrise du français est impeccable. Style épique, vocabulaire riche, adapté à la piraterie et à ses petites particularités, aucune faute… Lire cette histoire a été un vrai plaisir sur le plan purement technique tant l’écriture est fluide et les mots précis, variés et bien choisis.

Beaucoup de descriptions par rapport aux dialogues, qui rendent brillamment l’atmosphère glauque et poisseuse d’une escale de pirates. Tout y est, des remugles nauséabonds à la crasse poussiéreuse, en passant par la moiteur de l’air alourdi de sel et le bruit de tonnerre des ressacs contre les rochers. Tout ceci se mêle adroitement aux scènes d’action, dynamiques et visuelles, pour une immersion époustouflante dans l’univers sordide de nos pirates certes préférés, mais sales et puants comme des chacals.

Même s’ils sont finalement peu nombreux et à vocation essentiellement pratique, les dialogues sont efficaces et viennent toujours à point nommé, ponctuant les actions de nos deux capitaines avec des répliques plus vraies que les originales. L’auteur a su prendre le meilleur des films pour nous offrir de petites perles d’humour et de sarcasmes qui font mouche à tous coups. Les incises ne sont pas oubliées, avec des choix de verbes réfléchis et rigoureux. S’il fallait une remarque, elle porterait sur le tiret cadratin, délaissé au profit du trop populaire trait d’union. Mais je chipote ! Le texte est tellement bon que cette broutille syntaxique ne vaut même pas la peine d’être mentionnée.


Histoire/Personnages


Si le style est un régal, qu’en est-il de l’histoire ? Elle est simple : alors que les capitaines Sparrow et Barbossa, à peine remis des événements de World’s End , se rencontrent fortuitement dans un bouge quelconque, sans doute au hasard de leurs pérégrinations alcooliques, la Marine Royale leur tombe dessus manu militari, les forçant à fuir et à faire fi de leurs différends pour sauver leur peau de pirates. Une intrigue simplissime, mais propre et efficace. Le court récit d’une union forcée, quasi-contre nature pour ce duo antithétique, mais nécessaire pour la durée de leur tourment.

Si elle est facile, l’idée n’en est pas moins admirablement traitée, servie aux petits oignons par un texte haletant, mené d’une main de maître par un auteur habile. La richesse des descriptions et le rendu énergique des scènes de combat nous plongent dans l’action et nous vivons avec les personnages les affres de la déconvenue et la terreur de finir noyés au fond de leur trou comme des rats.

Suivre la rencontre, puis la fuite et enfin l’évasion des deux capitaines du Black Pearl nous permet de les côtoyer un court moment, le temps de nous rendre compte qu’ils sont absolument fidèles à eux-mêmes, abordés avec talent par une admiratrice attentive et patentée. Jack Sparrow l’inconstant, bénéficiant de ces étonnants et très fugitifs éclairs de lucidité qui lui permettent de se sortir de n’importe quelle situation. Hector Barbossa, l’ancien mutin, irascible et exécrable, au verbe bien plus guindé dans la version française que dans l’originale. Des personnages archétypaux et antinomiques comme savent nous le vendre les films, et pourtant bien plus intéressants à force de visionnages que ce que Disney veut bien nous laisser entrevoir de prime abord. Il existe un jeu permanent de je t’aime moi non plus entre l’ancien officier en second et son jeune capitaine, sur fond de mutinerie et de trahison, et, s’ils nous divertissent systématiquement avec cette ritournelle éculée, on sent malgré tout poindre entre eux une admiration mutuelle et une forme de respect. L’un comme l’autre se pendrait plutôt que d’avouer qu’ils s’apprécient, mais ils savent tous les deux que le monde est plus intéressant si l’autre en fait toujours partie. Comme un match serré, jamais terminé, dont les différentes manches se jouent lors de chacune de leur rencontre. Les meilleurs ennemis…

Et à situation désespérée, mesures désespérées. Lorsque, coincés dans un cul-de-sac avec la marée qui menace, ils n’ont d’autre choix que de s’entraider pour ne pas finir noyés ou pire, écrasés contre les parois par la force de l’eau vive, ils le font, non sans s’invectiver copieusement, à grand renfort de remarques mesquines et plus ou moins raffinées. Où l’on réalise que, tout Johnny Depp qu’il soit, le beau capitaine Jack Sparrow a une haleine à décoller le papier peint. Hector Barbossa ne sent pas la pomme non plus, cela dit. Enfin un constat sincère dans les rêves édulcorés de milliers de midinettes qui ne se rendent probablement pas compte que les dreadlocks, à cette époque, tenaient davantage du laisser-aller hygiénique que d’un effet de mode capillaire.

Une très belle surprise que ce récit qui colle à l’univers comme un pantalon de cuir ajusté aux hanches d’un féroce pirate. L’aventure ferait l’objet d’une scène de film qu’elle ne déparerait pas le reste, bien au contraire.


Conclusion


Une énième joute opposant Sparrow et Barbossa dans un scénario bidon ? Que nenni, mes amis. Si l’idée n’est pas neuve, l’histoire nous est contée avec humour et maîtrise ; elle laisse le fan sur un sentiment agréable, celui d’une parenthèse inattendue, une trêve de raison entre les deux ennemis, et ébauche l’esquisse d’une complicité retrouvée le temps d’un soupir. On sourit, on hoche la tête avec tendresse, et on reprend le cours de sa vie, rempli de la sensation d’avoir vécu un moment simple, mais important.

Ou n’est-ce que parce que j’ai cet affreux et néanmoins intrigant Capitaine Barbossa en fond d’écran sur mon smartphone ? ^_^°

Bonne lecture à tous!