Abi dans le Pokéworld

Chapitre 25 : Engagement

5030 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 15/07/2020 21:40

Je me réveille tardivement le lendemain matin. J’ai dormi à poing fermé. Echo s’étire à côté de moi. J’effleure la tête d’Akui du bout des doigts, il ouvre les yeux et bats paresseusement de ses ailes. Yucca met plus de temps à émerger. Lorsque nous sommes tous prêt, nous descendons prendre notre petit déjeuner à la cafétéria du Centre Pokémon. Echo, Yucca et Akui me font signe pour que je leur choisisse tel ou tel baie. Lorsqu’ils sont satisfaits de leur ration et installés dans un coin de la salle, je vais me chercher un bol de Fromage Blanc d’Ecrémeuh avec quelques baies acidulées. Je rejoins mes compagnons. Nous dégustons notre repas dans le calme. Je suis perdue dans mes pensées. Akui vient se poser sur mon épaule et me donne de petits coups de tête.

« Miiii ! Miii ! »

-      Oui ? »

-      Charmiii ? » il a un regard interrogateur.

-      Pardon. Je réfléchissais. La proposition de Phil de devenir artiste me trotte dans la tête… La troupe avait l’air sympa, on aurait un salaire et on aurait sûrement l’occasion d’apprendre plein de choses… Qu’est-ce que vous en pensez ? »

-      Roca ! Bulbizaaare ! Charmiiii ! » Tous ont l’air très enthousiasme à ma grande surprise. Notre entrainement avec Reptincel, Phil et Cédric n’y est sûrement pas étranger.

-      On descend voir ? Il me semble que Phil avait dit que le cirque resterait en ville une semaine… »

 

Je bascule mon sac sur mes épaules et nous nous mettons en route. Aujourd’hui, une brise fraîche s’est levée et rafraichit l’air. Le ciel est teinté d’un gris pâle. J’espère qu’il ne pleuvra pas. Un frisson me traverse le dos sous ma veste. Je m’ébroue et m’avance d’un pas décidé. Lorsque nous arrivons au cirque, je commence par errer dans les allers. Il y a beaucoup moins d’activités que l’après-midi. Nous ne croisons que de rares passants et quelques enfants qui jouent entre les stands. Les artistes doivent se reposer ou s’entrainer dans leurs quartiers car je ne vois aucune démonstration ni spectacle. Quelques personnes habillées de queues de pie et vêtements aux couleurs vives organisent de petits jeux pour occuper les gamins. Je m’avance vers les roulottes des artistes. Je n’ai pas de mal à retrouver la roulotte recouverte de tentures où j’avais rencontré la fameuse Mathilda. Je souris en me remémorant l’épisode des cartons du malheureux Cédric. Je toque à la porte en bois.

« Qu’est-ce qui se passe encore ? Comment voulez-vous que je répare vos tuniques si vous me dérangez toutes les cinq minutes ! » La voix tonitruante de Mathilda résonne depuis l’intérieur de la roulotte.

J’ai à peine le temps de faire un pas en arrière que la porte de bois s’ouvre à la volée sur le visage rouge de Mathilda.

« Qui es-tu ? » me demande-t-elle d’un ton sévère.

-      « Bonjour. Je m’appelle Abi… On s’est rencontré avant-hier… »

-      « Hum… Je me souviens de toi. Tu étais arrivée avec ce maladroit de Cédric. »

-      « Oui. C’est ça… Et je… »

-      « Je n’ai pas le temps pour les visites guidées. Qu’est-ce que tu veux ? » me coupe-t-elle assez sèchement.

-      « Euh… J’ai vu que vous cherchiez de nouvelles recrues et… »

-      « Et tu t’es dit que tu serais parfaite pour le rôle ? Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre… Tu es trop jeune. Rien qu’en voyant ton Rocabot, on voit que tu débutes à peine. Tu n’as aucune idée de ce que c’est que de vivre une vie de bohème, l’inconfort des roulotes, l’entrainement quotidien, le rythme des spectacles… Tu ne tiendras jamais. »

-      « Rrrrr… » Echo grogne à mes côtés. Visiblement, le ton sans appel de Mathilda ne lui convient pas non plus.

-      « Vous avez tort. »

Je ne me laisse pas démonter, je me redresse et soutiens le regard de Mathilda. Elle est plus petite que moi, mais sa prestance et son ton implacable la rende très impressionnante. Quelques secondes passent et je refuse de baisser le regard. Finalement, je vois la bouche de Mathilda esquisser un demi-sourire et ses yeux verts se plisser imperceptiblement.

« Entre. Tu vas m’expliquer ça en te rendant utile. »

Sans attendre ma réponse, Mathilda fait tourner son ample jupon et retourne dans sa roulotte. Elle laisse la porte ouverte derrière elle. Je reste, quelques instants, interdite puis après un échange de regard avec Echo, j’hausse les épaules et suis les traces de la couturière. Il me faut un peu de temps pour m’habituer au changement de luminosité. La roulotte est organisée tout en longueur, la porte étant située sur la face arrière de l’habitation. Je m’avance entre des rayonnages pleins à craquer de vêtements et tissus aux multiples textures et couleurs. Juste devant moi, vient s’interposer un Pokémon rose, court sur pattes qui grogne en me lançant un regard noir.

« Snub, laisse passer la dame. » Sourit Mathilda d’un air malicieux, assise devant une vieille machine à coudre. Le Snubbull fait un pas de côté pour me libérer le passage. Je rejoins Mathilda, Echo collé à mes jambes.

« Assieds-toi. Tu sais coudre ? » me demande-t-elle le regard de nouveau fixé sur son ouvrage.

-      « Non. »

-      « Hhhhh… » Elle pousse un profond soupire. « Tu ne vas pas me faciliter la tâche. Approche, je vais te montrer. »

Elle se pousse sur le banc et me cède sa place face à la machine. Je m’assoie. Mathilda se met alors à m’expliquer comment utiliser la machine, où passer le fils, comment tenir le tissu. Elle me fait faire deux essais sur des chutes de vêtements puis me confit mon premier ouvrage. Il s’agit d’un ourlet dont elle a déjà préparé le repérage. Je m’y attèle en silence. Je suis très concentrée. Pendant ce temps, Mathilda s’emploie à fixer plusieurs autres vêtements, elle travaille vite et avec précision. Lorsque j’ai fini l’ourlet, je lui montre.

« Bon… Tout espoir n’est pas perdu avec toi. »

-      « Je… »

-      « Tu veux faire partie du cirque. J’ai compris. Qu’est-ce qui te fait croire que tu vas tenir le rythme ? » me demande-t-elle.

-      « Je viens de l’autre monde, j’y ai vécu dans la rue, je sais me débrouiller seule, je ne suis pas exigeante en ce qui concerne l’endroit où je dormirai… »

-      « Une dure à cuire, n’est-ce pas ? Et qu’est-ce que tu sais faire ? »

-      « Je… Euh… Je… » je n’ai pas réfléchi à ce que je pourrai faire. Je n’ai pas de don particulier. Je ne suis pas aussi souple que la gymnaste, ni aussi drôle que le clown… Les mots me manquent.

Soudain, la porte d’entrée s’ouvre à la volée. Snubbull sort de sous les rayonnages de vêtements prêt à attaquer. Deux silhouettes entrent dans la roulotte, essoufflés.

     « Mathilda ! Il faut la laisser venir ! » S’écrit Phil.

-      « Laisse-lui une chance ! » renchérit Cédric.

-      « C’est vous qui avez mis des idées folles dans la tête de cette pauvre petite ! » s’exclame Mathilda.

-      « C’est moi qui lui ais dit de tenter sa chance. » affirme Phil. « Il faut que tu la vois. Abi, viens. »

 

L’interruption des garçons a agi comme un électrochoc. Je n’ai peut-être rien d’extraordinaire à offrir à ce cirque mais mes Pokémons sont incroyables et je suis sûre qu’on peut faire quelque chose qui ravira les foules. Je m’extirpe lentement de derrière la table. Je me tourne vers Mathilda.

« Je vous attend dehors. Vous devriez vous dépêcher si vous ne voulez pas louper le début du spectacle. »

Sans attendre sa réaction, je me détourne et sors de la roulotte. Une fois à l’extérieur, j’inspire profondément emplissant mes poumons d’air. Je libère mes Pokémons.

« Bon, c’est le moment où jamais d’impressionner Mathilda. Yucca, on va reprendre notre entrainement Fouet Liane, je pense que ça peut être joli… »

-      « Tiens, je me suis dit que tu aurais besoin de ça. » murmure Phil en me tendant trois balles de jonglage.

-      « Je te remercie. »

Philippe va rejoindre Cédric et Mathilda au bord de la piste improvisée.

 

« Ok, c’est parti. » Je souffle puis me tourne vers mon public.

Je me tiens bien droite, les pieds joints, je sens le poids d’Akui sur mon épaule et ses ailes frôler doucement ma joue, je ferme les yeux quelques instants. Lorsque je les ouvre, je commence à chanter, d’abord piano puis de plus en plus fort. Akui quitte mon épaule et commence une danse aérienne de looping et salto. Mes mains s’agitent et les balles de jonglage rejoignent la valse. Yucca a sorti ses lianes et suit mes mouvements avec attention. Nous échangeons quelques passes d’abord hésitantes puis nous prenons de l’assurance. Yucca est maintenant habituée à se caler sur les modulations de ma voix. Akui vient agrémenter le spectacle en choisissant les moments où il vient s’interposer entre nous, évoluant entre les balles sans gêner nos échanges. S’il y a quelques loupés, nous ne nous laissons pas démonter. Je me ploie avec ce que j’espère un minimum de grâce pour ramasser les balles déchues. Echo initie de sa propre initiative une attaque Jet de Pierre. Il fait s’élever de tous petits cailloux sur un grand cercle autour de nous. Pour clore notre numéro, Echo relance son attaque Jet de Pierre et envoie de gros rochers sur ma gauche. Ceux-ci forment un promontoire. Je monte dessus accompagnée de Yucca et Echo, je tends le bras et Akui vient s’y poser déployant ses grandes ailes colorées. Philippe et Cédric nous applaudissent bien fort. Je redescends du monticule et m’avance vers Mathilda pour entendre son verdict.

« Tu n’as pas froid aux yeux en tout cas. » me dit-elle.

-      « … » je reste stoïque et silencieuse, attendant la suite.

-      « Ha ! ha ! ha ! ha ! » A ma grande surprise, elle éclate de rire. « Viens boire un thé ma grande, on va parler de ton contrat ! »

Mathilda retourne à l’intérieur, toujours en riant. Je reste interdite. Phil et Cédric s’approchent de moi.

« Tu as été formidable Abi ! ça faisait un moment qu’on n’avait pas entendu Mathilda rire comme ça. » s’exclame Cédric.

-      « Tu devrais y aller, Abi. Il faut en profiter tant qu’elle est dans de bonnes dispositions. » me sourit Phil.

-      « Merci Phil. » Je lui tends ses balles de jonglage.

-      « Garde celles-ci, tu vas en avoir besoin. » Il m’adresse un clin d’œil. « On te retrouve dans le grand chapiteau. »

Phil et Cédric s’éloignent. Je prends une profonde inspiration et rappelle mes Pokémons dans leurs Pokéballs. Echo marche à mes côtés quand nous pénétrons à nouveau dans la roulotte. Mathilda nous attend assise devant sa table en bois. Je m’installe face à elle.

« Je ne connais pas ton passé et nous aurons bien le temps de le découvrir. En tout cas, tu n’as pas froid aux yeux. Qu’est-ce que tu veux au juste ? » me demande-t-elle de but en blanc.

-      « … J’aimerai voyager avec vous. Je pense que le cirque peut nous apporter beaucoup. »

-      « C’est sûr… C’est une expérience de vie… Tu te vois parmi nous pour combien de temps ? » me demande Mathilda.

-      « Je ne sais pas. Rien n’est fixé. Je suis arrivée ici plus ou moins par hasard. Maintenant, j’ai surtout envie de découvrir votre monde. »

-      « Hum… oui, tu es une originaire de l’autre monde… Notre programme nous fait rester encore cinq jours ici puis nous descendrons vers le sud. »

-      « Ça me convient. La région de Sybak m’intéressait. »

-      « Nous n’irons pas jusque-là, la traversée des Montagnes du Dorn peut être risquée. » m’informe-t-elle.

-      « Je vous quitterai donc sûrement à ce moment-là si ça vous convient. »

-      « Très bien. En ce qui concerne tes activités au sein du cirque, si chacun a une casquette spécifique, nous sommes tous polyvalents. Certes, tu feras des représentations. Pour préparer tes spectacles, je pense que Cédric et Phil t’ont déjà pris sous leurs ailes. Tu peaufineras ton art avec eux. Tu occuperas aussi les postes d’agents d’accueil du public, nettoyage, balayage, un peu de couture si j’en ai besoin, tu devras te mettre en relation avec Isham pour l’aider en cuisine de temps en temps et à la gestion des stocks. La liste est longue et tu découvriras tes missions au fur et à mesure. Ici, on ne chôme pas. » elle s’interrompt et me regarde droit dans les yeux, semblant attendre ma réaction, ou plutôt que je parte en courant.

-      « Ça me convient. » je réponds avec un demi-sourire.

-      « Pour ce qui est de ta solde. C’est 15Pk par jour. Tu es nourri à nos frais. Tu logeras avec Line. Elle habite la roulotte à la porte bleue. Tu verras un groupe de Passerouges installés sur le toit. Tu vas te présenter et tu lui dis que tu viens de ma part. »

-      « Très bien. Merci Mathilda. »

-      « Maintenant, file avant que je ne change d’avis. » me sourit-elle.

 

Je quitte la table, passe devant Snubbul qui me suit du regard de son air grognon et quitte la roulotte. Le vent ébouriffe mes cheveux. Je m’accroupis et Echo se jette dans mes bras. Je libère Yucca et Akui qui se joignent à ce câlin collectif.

« Merci, vous avez été géniaux ! »

-      « Roc ! roc ! Charmiiii ! Bulbi, bulbizaaar ! »

-      « Essayons de trouver Line. J’espère qu’elle sera contente d’avoir une nouvelle colocataire… »

Je parcours les allées de roulottes. Elles sont toutes de tailles différentes. Chaque porte semble d’une couleur spécifique, certaines portent l’effigie d’un Pokémon en particulier. Je finis par arriver devant une roulotte à la porte bleue nuit. Un nuage de Passerouges décolle du toit lorsque je m’approche et commence à piailler en nous encerclant. Echo grogne et jappe pour essayer de les faire fuir. Effrayé il se colle à mes jambes. La porte de la roulotte s’ouvre et une toute petite femme menue aux cheveux cendrés avec des mèches violettes apparaît.

« Une sonnette efficace. » commente-t-elle d’une voix flûtée.

Aussitôt, les Passerouges s’éloignent. Certains retournent se poser sur le toit, d’autres viennent s’installer sur les épaules de leur jeune maitresse.

-      « Bonjour. Je cherche Line ? » je demande.

-      « Elle-même ! » sourit-elle.

-      « Je m’appelle Abi. Je viens d’être engagée dans la troupe, Mathilda m’a dit de venir te voir pour… »

-      « Parce qu’il y a une place dans la roulotte. » finit-elle avant que je ne puisse m’expliquer.

-      « Oui. »

-      « Entre, viens d’installer. On sera un peu serré mais je pense qu’on devra s’en accommoder. » sourit-elle.

-      « Merci. » je suis surprise qu’elle le prenne si bien. Après tout, on vient de faire emménager chez elle et sans lui demander son avis une parfaite inconnue.

Je suis Line à l’intérieur de la roulotte. Je suis surprise de découvrir un véritable capharnaüm. Line s’active pour déplacer quelques objets de ci de là pour me faire de la place. Au fond de l’habitation, je distingue des lits superposés. Line est en train de retirer les affaires trainant sur celui du bas. Je laisse mes yeux errer autour de moi. Petit à petit, je me rends compte que ce que j’ai pris pour du bazard est en fait un agencement serré de multiples instruments à corde, à vent…

« Tu es musicienne… » je commente l’évidence.

-      « Oui et chanteuse à mes heures perdues. » Sourit-elle rayonnante. « Et toi ? tu fais quoi ? »

-      « Euh… un peu de jonglage et je chante aussi. »

-      « J’ai hâte de te voir sur scène alors. »

Line a l’air pleine de vie et de gaité. Elle me fait un peu penser à Joy. A cette pensée, je ressens un petit pincement au cœur. Fugace, je chasse rapidement cette sensation en allant déposer mon sac sur le lit.

« Je t’ai laissé celui du dessous. J’aime bien être en hauteur. Mais si tu préfères, on peut échanger ? » me propose ma nouvelle colocataire.

-      « Non pas de soucis. Je pense qu’Echo préfère être près du sol. »

-      « Roc ! » approuve ce dernier.

-      « Salut ! Whoaaaa, il est super mignon ton Rocabot ! » s’exclame Line en tendant sa main vers Echo.

-      « Attention ! » J’attrape la main de Line au vol et la dévie lui faisant éviter les mâchoires d’Echo qui se referment sur du vide pour une fois.

-      « Oh… Pardon… » murmure Line de sa voix chantante.

-      « Ce n’est rien. Echo a eu des moments difficiles, il a appris à se défendre. Sa confiance se mérite. » dis-je succinctement.

-      « D’accord. On aura bien le temps de se connaitre. » sourit-elle.

Les piaillements des Passerouges nous parviennent depuis l’extérieur.

« Oh là là ! Je vais être en retard. Isham va me disputer ! Je suis de corvée de dressage de table pour ce midi. »

-      « Euh… Est-ce que je peux t’aider ? » je lui demande tandis qu’elle passe devant moi en courant.

-      « Ce serait super ! Suis-moi ! »

Je la suis en courant. Le nuage de Passerouges nous survole. Nous gagnons le point central autour duquel les roulottes semblent s’organiser. Là, se trouve une grande tente attenante à une seconde percée à son sommet d’un grand trou d’où s’échappe d’importantes volutes de fumées. Line entre dans la grande tente sans ralentir, je la suis. Je découvre alors deux longues tables de bois entourées de bancs.

« Ishaaaam ! Je suis là. » s’écrit Line

-      « Line, j’ai failli attendre. Tu crois que 46 couverts vont se dresser tout seul ? » retentit la voix grave de celui que je pense être Isham derrière les pans de la seconde tente.

-      « Tu ne vas pas nous faire une Mathildade ! Ils seront prêts à temps tes couverts, j’ai de l’aide ! »

-      « De l’aide ? de l’aide de qui ? »

L’un des pans de la seconde tente se soulève et je vois se tendre le cou d’un homme d’âge mûr. Il porte un foulard noué sur de longs cheveux poivre et sel ramassé en une queue de cheval et un long nez anguleux sur le bout duquel sont juchés de fines lunettes en demi-lunes.

« Tiens, tiens… Une nouvelle recrue ! »

-      « Bonjour, je m’appel… »

-      « On verra plus tard ! Rends-toi utile. Verres, assiettes en couvert dans le buffet sur la droite. » me coupe-t-il avant de retourner à ses fourneaux.

-      « Je vais te montrer. » me souffle Line.

Je la suis jusqu’à un énorme buffet posé à même le sol de terre battue. Line place entre mes mains d’immenses piles d’assiettes. Je me déplace avec précaution pour aller les disposer à table. Assez rapidement, la table est dressée. Les artistes et leurs Pokémons arrivent petit à petit et prennent place. Les Pokémons vont tous se rassembler dans un coin de la tente où Line a disposé de nombreuses écuelles. Lorsqu’elle pénètre dans cette salle à manger improvisée, Mathilda me remarque et me gratifie d’un sourire satisfait. Dès que tout le monde s’est installé, Isham fait son entrée portant une immense marmite fumante suivi de près par un Pokémon singe et un Pokémon brun aux longs membres transportant chacun de larges plats de boulettes colorées. Line les suit avec une seconde marmite quasiment aussi haute qu’elle. Pendant qu’ils déposent leurs plats sur chacune des tables, je sors aussi discrètement que possible mon Pokédex.

« Simiabraz est un Pokémon singe de type feu et combat. Il fait voltiger ses ennemis grâce à sa vitesse et son style de combat spécial qui utilise ses quatre membres. »

« Kicklee est un Pokémon humanoïde de type combat. Ses jambes peuvent se contracter et s'étirer à volonté. Après les combats, il masse ses jambes pour éviter de sentir la fatigue. »            

« Abi ! Tu viens t’asseoir ? »

Je me retourne vers la voix qui m’a appelée. Cédric me fait de grands signes de la main. Je range mon Pokédex et me rend compte que je suis la seule à être encore debout. Je rejoins Cédric et m’installe entre lui et une jeune femme blonde à la coupe asymétrique.

« Abi, je te présente Flora. C’est notre gymnaste, elle fait équipe avec son Machopeur. Flora, voici Abi. Mathilda vient de l’embaucher. Elle chante rudement bien. Faut que tu la vois avec son Bulbizarre ! » me présente Cédric plein d’éloges.

-      « Bonjour Flora. Je crois que je t’ai vu faire une démonstration il y a 2 jours. C’était très impressionnant. »

-      « Salut Abi. Bienvenue dans la troupe. Alors comme ça tu as passé le dragon ? »

-      « Le dragon ? » je demande perplexe.

-      « Mathilda ! C’est notre dragon local ! » S’exclame Cédric d’une voix forte qui lui vaut un regard meurtrier de la part de Mathilda assise à l’autre extrémité de la tablée et qui semble avoir l’ouïe fine.

-      « Passez vos auges au lieu de papoter. » nous interrompt Phil assis deux places plus loin.

Cédric se fait tout petit, prend mon assiette, la place au-dessus de la sienne et les fait passer en direction de l’immense marmite. Lorsqu’elle me revient pleine, je découvre une purée de baie avec des boulettes colorées qui semble aussi être un savant mélange de baies, épices et herbes aromatiques. Je jette un coup d’œil à mes pieds. Echo est collé à moi et regarde avec envie les plats passant au-dessus de lui. Je regarde dans la direction des autres Pokémons qui mangent tous ensemble ce qui semble être le même plat que nous.

« Echo, va les rejoindre. Il y a une gamelle libre avec eux. »

-      « Rocaaaa… » me répond-il inquiet.

-      « On va rester un moment avec eux, il va bien falloir que tu te fasses des copains… » je tente.

-      «  Roooooc… » il secoue la tête, têtu.

-      « C’est bien parce qu’on vient d’arriver. Tu manges à côté de moi aujourd’hui. » je conclue.

-      « Roc ! » s’exclame-t-il rassuré.

-      « Comédien, va… je vais chercher ta gamelle. J’arrive. Tu attends avec Cédric. » Echo couche immédiatement les oreilles, non rassuré de devoir être éloigné de moi pour quelques instants. « Oh que si. Tu attends là. Tu peux me suivre des yeux, je reviens. »

Je me lève et vais chercher la gamelle laissée libre à côté du Simiabraz et d’un petit Pokémon écureuil. Simiabraz me suis du regard alors que je retourne vers Echo la gamelle pleine à la main. Lorsque je me rassois, je vois du coin de l’œil que Simiabraz parle avec le Pokémon écureuil. Ni une ni deux, le petit Pokémon s’approche de nous. Simiabraz le suit apportant sa gamelle et celle du petit Pokémon. Ils s’installent au sol à côté d’Echo en lui laissant assez d’espace pour qu’il ne se sent pas pris au piège. Simiabraz me sourit et commence à manger tranquillement.

« Merci Simiabraz et… merci à toi aussi… »

Je sors mon Pokédex qui m’indique que le Pokémon rongeur est un Emolga, un Pokémon Pikachu-like de type vol et électrique.

« Merci Emolga. Bon appétit Echo. »

Nous dégustons notre repas. Les compliments que Phil m’avait fait sur la cuisine d’Isham semblent encore en-dessous de la réalité. Mes papilles palpitent de plaisir. Les saveurs sont douces et appuyées à la fois. Chaque bouchée semble révéler de nouvelles subtilités. Un vrai bonheur. De son côté, Emolga tente d’entamer la conversation avec Echo qui fait la sourde oreille. Simiabraz ne semble pas s’en offusquer et déguste son repas paisiblement. Je reporte mon attention que Cédric qui raconte des histoires abracadabrantes à Flora qui ne se laisse pas prendre au jeu. L’ambiance est bonne, les gens sont souriants et ont l’air de prendre plaisir à ce moment de convivialité.


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