Please notice me, Dedenne-sempaï!

Chapitre 2 : Chapitre 2 ou comment gagner le badge de la plus belle des conasses.

2802 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 16:51

Cher Dedenne tout puissant,

Merci infiniment pour ton cadeau. La petite Millie est absolument adorable, je sens que nous allons devenir les meilleures amies de la terre. Et ça encore n'est rien à côté de la joie d'avoir pu t'entendre te manifester après tant d'année. Ton message m'a redonné courage, et je n'épargnerais aucun effort pour contribuer à notre cause, la vénération par tous et toutes de ta splendeur sacrée. Me travestir, supporter de barbares gamins de la campagne et parcourir le monde sont bien peu de choses à coté de ce but des plus louables. Par contre, pardonnes-moi, mon dieu, car j'ai péché...

 

« Passes une bonne journée, Joël !! »

Mes camarades partaient, guillerets comme des Pijako, vers l'école des dresseurs accompagnés de leur clique de bestioles. Je leur souriais d'un air légèrement condescendant avec un signe d'au revoir (j'aurais aimé un signe d'adieu).

Ne sont-ils pas mignons, ces naïfs petits dresseurs de pacotille, prêt à se faire déflorer à la première arène rencontrée ? Pensais-je humblement en feuilletant l'ABC des dresseurs empruntés au centre, tout en me dirigeant à nouveau vers la forêt de Neuvartault.

Sans le Feunnec, mon équipe n'était plus composée que de Charlotte, un Cheniti niveau 5 incapable de faire autre chose qu'abri et lutte en dernier recours, et Millie, le petit Dedenne de niveau 1 envoyé par mon maître. Quitte à tricher un peu sur la déontologie de World Pokémon Found, il me fallait un autre pokémon pour continuer l'entraînement, quitte à ne rien capturer sur une route future. Et ce n'est pas dans une ville à la Kalosienne ne servant que des diabolo menthe dans leurs café que je trouverais un esclave à la hauteur de mon prestige. Mais bien sûr, je n'en était ni à ma première ni à ma dernière déception dans cette aventure.

Le premier pokémon que je croisais et que je fus forcé d'attraper était un Aspicot nommé Askip. Au moins, c'était une chenille bien de chez moi, et pas un de ces insectes poilus des forêt de Kalos. J'étais tout de suite moins enthousiaste en analysant sa fiche avec le pokédex. 

Askip, Aspicot, mâle, lvl 2, Jovial de nature, bête et impulsif.

Comme si il n'y avait pas déjà assez d'abrutis impulsifs dans mon entourage.

L'entraînement se déroula bien mieux. Comme je me l'étais promis, je n'abattais pas sans raison des pokémons sauvages, et me contentais des dresseurs de forêt que j'avais soigneusement évité par ailleurs. Millie avait besoin d'un dressage sévère pour cesser ses caprices et respecter sa maîtresse, même si je savais pertinemment que je ne pourrais pas traiter de la même manière un envoyé de mon dieu et une vulgaire créature sauvage. Quand elle se fit empoisonner par le pokémon d'un dresseur, je cédais à la panique et utilisais toutes mes potions jusqu'à l'amener au centre pokémon de Neuvartault où ma mère le soigna sans broncher. Aucune idée si c'est à cause du charmant Tierno qui était toujours au centre et qu'elle tenait à respecter mon choix de vie, ou si c'était tout simplement le reflet de la profonde indifférence que je lui inspirais, mais elle me traitait comme un parfait inconnu. Quoi qu'il en était, je la remerciais sèchement avant de repartir à l'entraînement, sans un geste de la part du pokémon que je venais de sauver d'une mort certaine.Très vite, Askip, Charlotte et Millie gagnèrent en expérience, et tous les dresseurs de la forêt avaient laissés tombés l'idée de nous battre. J'étais contente qu'ici, au moins, on commençait à connaître ma vrai nature de championne, et que j'inspirais le respect que je méritais. Soit beaucoup d'argent, de plates excuses et une peur mêlée à de la jalousie dans le regard. Je m’enorgueillis tant et tant qu'une fois sur les chemins lumineux près de Neuvartault, je laissais mes pokémons gérer tous seuls les combats, les croyants assez forts pour s'entraîner tous seuls contre les créatures des autres dresseurs. De toute façon ces gosses ne valaient pas la peine que je perde mon temps en discussions ou en gestes de camaraderie. Face au Keunotor d'une fillette, Askip finit par se vider de ses forces. Je ne relevais la tête de mon livre qu'une fois lui à terre, et l'enfant toute tremblante sur ses jambes.

« Que se passe-t'il ? » Demandais-je d'un air sévère en époussetant ma veste.

-Je… Ton Aspicot, il… Il bouge plus... 

-C'était ton premier combat ? Ne t'inquiètes pas va, je vais le mettre dans sa ball et la gentille infirmière va... »

Je pressais sa pokéball contre le petit asticot à terre pendant une bonne dizaine de seconde, sans que ça ne fasse rien. Intriguée, j'essayais la pokéball de Millie qui était elle aussi sortie. Peut-être m'étais-je juste trompé ?

« Petite, il y a bien un système de survie intégré dans la pokéball à Kalos ?

-Euh oui… C'est ce qu'ils ont dis à l'école.

-Merde. »

Je feuilletais à nouveau l'ABC du dresseur laissé à terre, il y avait des schémas explicatifs sur ce système de survie. Un pokémon K.O peut être maintenu en vie dans sa pokéball deux heures après sa défaite avant de ne vraiment mourir. Pourtant…Je prenais Askip dans mes bras, et le contemplais un peu. Les yeux fermés, sa corne devenue légèrement grise, les boules formant son corps étaient devenues un peu molles. Le dernier pokémon que j'avais capturé, le deuxième de ma courte vie. Celui sans qui l'entraînement des deux autres n'aurait pas été possible.

Lentement, de peur de l’abîmer, je me dirigeais vers le centre pokémon, avec la gamine me suivant sans trop savoir quoi faire.

Une fois arrivée, beaucoup de regards se tournèrent vers moi. Je redescendis très vite de mon nuage, ce n'était pas des regards d'admiration ou d'envie qui me contemplaient, mais d'autres, plus cruels que je sentais pleins de reproches. Ma mère également, se tourna vers moi, un peu surprise et me fit signe de lui montrer Askip. Après quelques secondes, elle conclu dans un silence glacial.

« Il est mort, Jo... Monsieur. »

La petite à mes pieds explosa en sanglot. Étrangement, comme si la tension était soudain retombée, tout le monde reprit ses activités à cet instant. Les pleurs de l'enfant avaient fait rentrer cet instant dans l'anodin. Tierno se leva à son tour, pour se diriger vers nous. Quand il vit le Aspicot gisant sur la table, il posa une main sur mon épaule. Je sentis la chaleur de sa paume se propager petit à petit dans mon épaule.

« Je vois. Pouvez-vous vous occuper de lui ?

-Bien sûr. »

Je vis ma mère, et son regard inexplicable, prendre mon compagnon de voyage et sortir par la porte arrière. En tant qu'ancienne assistante, je savais où allait-elle. Enfant, on me disais souvent que les infirmières Joëlle sont des sortes d'anges, et qu'elles amènent les pokémons dans un grand jardin fleuri, sous un arbre gigantesque où ils seront toujours heureux avec leurs amis, que c'est l'objectif de tous de s'y rendre. Plus tard, j'ai cru que c'était un beau cimetière, à l'arrière de chaque centre, où on les enterrait.L'année dernière, j'y suis allé dans le cadre de mon apprentissage. J'étais impatiente de voir ce lieu secret qui me faisais rêver depuis toute petite. Derrière la porte, c'est une lugubre machine de métal qui m’accueillit, en ouvrant sa gueule de feu.

C'est à partir de ce jour que j'ai choisi de refuser ce destin imposé par la carnation de mes cheveux.

« Alors on apprends pas la vie que dans les livres... »

La petite retenait ses sanglots en triturant ses doigts, les yeux fixés sur ses chaussures. Je lui souriais tristement, m'accroupissais pour me mettre à sa hauteur, et la prit contre moi.

« Hey, petite. Tu sais, l'infirmière prendra bien soin de lui. Elle l'a emmené dans un très grand jardin, très beau, où il retrouvera tous ses amis sous un arbre gigantesque. Et tous ensembles, ils pourront jouer toute la journée ! »

Une lueur s'alluma dans ses yeux.

« C'est vrai ??

-Bien sûr que c'est vrai ! Pas vrai madame l'infirmière ? »

Avec un regard légèrement accusateur, je regardais ma mère qui venait de retourner à son bureau. Elle m'observa un instant, avant de sourire tristement à l'enfant.

« Oui, c'est vrai. »

L'écolière, toute contente, ressortie du centre avec le sourire. Tierno aussi, et je lui renvoyais son sourire en silence.

* * *

Après une petite séance de recoiffage, je partais d'un pas décidé vers l'arène pokémon, le menton haut, fier comme un paon d'avoir consolé une gamine et d'avoir ainsi lavé mon honneur perdu. Je m'amusais même à adresser quelques clins d'oeils aux jeunes campagnardes croisant mon chemin et sensible à mon charme masculin. L'une d'entre elle, après un combat, fut si subjuguée par mon sourire qu'elle m'en offrit une paire de roller. Bien sûr, cet accessoire que je maîtrisais comme un champion du monde (au moins) mit encore davantage en valeur ma prestance légendaire. C'est bien sûr sans aucun mal que je parvins en quelques minutes face à la championne de l'arène.

Tout en haut, et après avoir traversé un drôle d'endroit couvert de toiles d'araignée, là où j'aurais imaginé trôner une femme aux milles splendeurs qu'on me décrivait, je ne trouvais qu'une tente de pauvresse et une délurée en tenue de camping, qui ne cessa de me mitrailler de son appareil photo à mon arrivée. Surprise, je me dépêchais néanmoins de prendre mes plus belles poses masculines pour sa pellicule. Une fois satisfaite, elle m’accueillit avec un très grand sourire.

« Merci beaucoup jeune homme ! Vous avez un fabuleux Cheniti, et vous le mettez parfaitement en valeur, vos couleurs sont complémentaires, c'est fou ! »

J'ouvrais de grands yeux et me retournais sur Charlotte, toute fière, qui déployait toutes grandes ses feuilles et gigotait à l'aide de sa branche en forme de ressort sur son crâne. La championne, totalement désintéressée de ma personne, partit dans de grands discours sur la photographie et sa passion des pokémons insectes, auxquels je n'accordais pas plus d'attention. Au moins ça justifiait la multitude de photos sans intérêt encadrées dans le bâtiment. Mais comme elle ne cessait pas, je me sentais obligé de hausser le ton.

« Oh ! Je suis pas venu pour ça, donne-moi ton badge. »

Interloquée, elle me contempla sans savoir que dire.

« Arrête avec la surprise j'en ai eu assez comme ça. C'est ton job de combattre les gens qui se présentent non ? Alors battons-nous. »

Mon ton avait été sec. Ces histoires de dresseurs commençaient vraiment à me taper sur les nerfs.« Comme tu le souhaites. » me répondit-elle sur un ton tout aussi glacial en engageant le combat.

Avec Charlotte ne connaissant toujours rien de plus qu'abri, c'est Millie que j'envoyais au combat. Quelque peu réticente, je la poussais du pied pour qu'elle se force un peu, et ça eut plutôt bel effet, le premier pokémon est rester si peu sur le terrain que je ne me souviens même plus à quoi il ressemblait. Ça se corsa davantage à l'arrivé du second. Le Charmillon de mon adversaire, qui ressemblait à un Papilusion avec un peu plus de couleurs et une trompe, arriva sur le plancher accompagné d'un regard noir, empli de détermination. Millie, qui sautait un peu partout jusque là pour éviter d'éventuelles attaques, se figea sur place.

« Harcèlement ! » hurla la championne.

L'attaque me donna des sueurs froides. Une aura noire se déplaçait furtivement sur le terrain pour entourer le minuscule Dedenne. La jeune femme la répéta plusieurs fois, quand les attaques éclairs du petit pokémon n'avaient pas l'efficacité escomptée. Un peu paniqué à l'idée de voir mourir une seconde créature, l'envoyé de mon maître tout puissant qui plus est, j'essayais de me remémorer ce que m'avais appris la lecture de l'ABC du dresseur, sans succès. Ce n'est que quand Charlotte se manifesta depuis l'intérieur de la pokéball que j'eus l'idée de les faire collaborer.

Une fois la boule de feuille sur le terrain, je remarquais bien vite que même sans bouger, elle encaissait très bien les offensives du Charmillon. Bien droite sur elle-même, Charlotte me laissa tout le temps nécessaire pour soigner Millie avant de la renvoyer sur le terrain, où elle finit par vaincre l'effrayant papilusion en seulement une dernière attaque.

Je ricanais en faisant rentrer mes pokémons. Le visage décrépi de la jeune femme me mettait dans un état de joie sans précédent. Je l'avais écrasée, et j'eus presque envie de lui cracher dessus quand elle me tendit mon badge et la capacité technique qui allait avec.

« On se reverra peut-être, pouilleuse. »

Ou pas. Que reviendrais-je faire dans ce trou paumé ?

Laisser un commentaire ?