John au pays des merveilles

Chapitre 5

3644 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 15:57

Il se tourna sur le côté et serra encore davantage la peluche contre lui. Il se laissa gagner par le sommeil.

Au milieu de la nuit, on entendit l’air d’une comptine.

xxx

Le matin arriva rapidement. Les rayons du soleil traversait la petite chambre. John s’étira de tout son long, bâillant largement. Il battit plusieurs fois ses paupières et se frotta les yeux pour chasser les dernières traces de sommeil. Son rêve de la nuit le rendit perplexe. Étais-ce seulement un rêve. Il était persuadé avoir entendu une comptine pendant son sommeil. Quelque chose le concernant. Il se secoua.

« Allons, John ! Commence pas à imaginer des trucs bizarres. »

Il tâtonna autour de lui à la recherche de sa peluche qui lui avait tenu compagnie toute la nuit et ne la trouva pas sur le lit. Il se retourna vivement à plat ventre au bord du lit et laissa tomber sa tête vers le sol pour regarder si elle n’était pas tombée sous le lit, mais elle n’y était pas. Il se leva et commença à chercher dans toute la pièce sans succès. Le lapin en peluche avait disparu.

Il alla se passer de l’eau sur le visage et s’habilla rapidement pour rejoindre son hôte pour le petit déjeuner. Il ne voulait pas se montrer impoli en le faisant attendre.

— Bonjour, dit John en voyant le lapin à la petite table, une tasse de thé à la main.

« Vraiment trop mignon ce lapin », s’amusa John.

— Bonjour, John, bien dormi ?

— J’ai dormi comme un loir, sourit-il à sa propre remarque en repensant au loir qu’il avait vu chez le Lièvre de Mars la veille.

John avala un croissant chaud particulièrement délicieux et but une grande gorgée de thé.

— Dites-moi, j’ai vu que vous aviez un lapin en peluche dans votre chambre et je me suis permis de dormir avec. J’espère que vous ne m’en voudrez pas.

— Un lapin en peluche ? Je n’ai aucune peluche chez moi.

— Pourtant si. Elle était sur la chaise. Par contre, je ne l’ai pas retrouvé ce matin.

— Je pense que vous avez rêvé. Je ne m’embarrasse pas de ce genre de futilité.

John n’insista pas. Il s’inquiéta de plus en plus, pensant qu’il perdait la raison.

— Je ne connais pas votre pays, que me conseillez-vous d’aller voir ?

— Mmm… Allez voir le Griffon, il vous fera survoler notre pays. Vous auriez une vue d’ensemble.

— Le Griffon, il ne serait pas à moitié aigle, moitié lion, demanda John en repensant à ses lectures.

— Exactement, vous le trouverez à l’ouest en sortant d’ici, prêt du grand lac. Il passe son temps à dormir, ça lui fera du bien de bouger un peu.

— D’accord, je vais faire ça.

L’horloge sonna huit heures, ce qui fit sursauter le lapin.

— Il est déjà si tard ! Bon sang, je suis en retard !

Il commença à courir dans tous les sens, prit sa tenue de travail, ses gants et son éventail et passa vite fait la porte sans prendre la peine de dire au revoir à John.

« Quelle rapidité ! S’il est toujours en retard, pourquoi ne se lève-t-il pas plus tôt ? J’ai même oublié de lui demander si je le reverrais. Je crois me souvenir que la Reine organisait une partie de croquet. Il y sera peut-être. Si j’osais, j’irais y faire un tour. »

Il se souvint de la recommandation du Chapelier de ne pas aller au château.

« Je ferais bien ce que je veux. »

Sur cette pensée, il sortit de la maison et commença sa promenade à la recherche du Griffon. Le temps était toujours aussi magnifique, le soleil radieux brillait de mille feux.

Il marchait depuis un petit moment lorsqu’il entendit une petite voix haute perchée qui le stoppa. Il regarda autour de lui et remarqua sur la branche d’un arbre un oiseau.

— Où allez-vous si vite, demanda l’oiseau.

— Je me rends chez le Griffon.

— N’avez-vous rien d’autres plus urgent à faire ?

— Quoi d’autres ?

— N’avez-vous rien à dire à quelqu’un ?

— Euh… non, pas que je sache, pourquoi ?

L’oiseau siffla ce qui pourrait passer pour un agacement.

— N’avez-vous rien à avouer à votre amoureux ?

— Pardon ? Je suis déjà fiancée à une merveilleuse femme.

— Une passade, croyez-moi ! Votre véritable amour est sous votre nez et vous ne le voyez même pas.

John souffla, fronça les sourcils. Cet oiseau stupide lui faisait cruellement penser à sa sœur contre qui il avait eu une altercation qui l’avait indirectement amené ici. Alors qu’il s’apprêtait à lui dire de se mêler de ses affaires, un couplet de la comptine lui revint en mémoire :

Écoute les conseils de ta sœur

Accueille-les avec douceur

Il adorait Mary. Elle était charmante et drôle, un peu mystérieuse et il aimait passer du temps avec elle. Pourtant, il n’avait pas changé ses habitudes. Quand Sherlock l’appelait, il accourrait et Mary le soutenait toujours, car elle aimait aussi le détective, alors que ses ex le détestaient. Il se voyait vraiment vivre avec elle, pourtant, une part de lui l’empêchait de concrétiser ce moment, comme s’il avait peur de laisser quelque chose d’important derrière lui.

— Écoutez, je ne suis pas ici pour ça, mais je réfléchirai à ce que vous m’avez dit.

— Vous continuez à fermer les yeux, mais un jour vous comprendrez ce que je vous ai dit.

— Bien sûr, vous avez raison. Merci du conseil.

Il reprit sa route en soupirant de soulagement. Cet oiseau allait le rendre dingue, mais une idée saugrenue lui fit penser qu’il aimerait revoir le Chapelier.

Il arriva bientôt en vue du lac, un très grand lac vu que la rive opposée était assez éloignée. Le soleil se reflétait à la surface de l’eau et les lumières dansantes l’éblouirent.

Il trouva le Griffon endormi sur un rocher. John s’approcha précautionneusement. L’animal, pourtant d’une taille particulièrement correcte, était impressionnant.

— Bonjour. Vous dormez ?

— Non, je me reposais juste les yeux, dit le Griffon, soulevant sa tête. Que me voulez-vous ?

— Le lapin blanc m’a dit que vous pourriez me faire découvrir le pays du ciel.

L’animal mystique se leva d’un bond et s’ébouriffa.

— Je veux bien, mais vous me semblez un peu lourd.

— Oh ! J’ai peut-être une solution.

John prit dans une de ses poches un bout du champignon qu’il avait prit la veille et en mangea un morceau. Son corps se mit à rapetisser, lui faisant perdre presque cinquante centimètres.

— Est-ce que ça suffira ou dois-je rapetisser encore ? Demanda-t-il.

— Non, c’est bon. Montez sur mon dos, dit le Griffon en baissant son aile au sol pour que John puisse grimper. Vous êtes prêt ? Alors accrochez-vous bien, on décolle !

John agrippa le cou du Griffon en se sentant décoller, de peur de tomber. Le sifflement du vent battant à ses oreilles, le froid le submergeant le fit frissonner. Le vol se stabilisa et ils planèrent à plat. John se redressa pour apprécier la vue qui défilait sous eux. Il était époustouflé par ce qu’il voyait. La vue imprenable qu’il avait de ce pays étrange était fabuleux. Le lac qu’il venait de quitter était minuscule maintenant. Il voyait une grande forêt, très certainement celle qu’il avait traversé. Mais au-delà de celle-ci, un épais brouillard en cachait l’horizon.

« C’est peut-être à cause de ce brouillard que j’ai perdu mes repères », songea John.

Détournant son regard, il observa la maison du Lièvre de Mars et un peu plus loin, celle de la Duchesse Narcissa et enfin la demeure du lapin blanc. Regardant un peu plus au sud, il vit un grand manoir.

— Qui habite le manoir, demanda-t-il au Griffon.

— C’est là que vit le Chapelier.

— Ah oui ! S’enthousiasma John.

Il enregistra les chemins dans sa mémoire pour pouvoir y aller la prochaine fois.

Il voyait d’autres petites maisons moins impressionnantes, mais très jolies et colorées. Ensuite, des champs à pertes de vue prirent place où seule une route semblait les séparer, puis ils volèrent au-dessus d’un petit bois et ils arrivèrent enfin à un immense jardin coloré devant lequel se trouvait un magnifique château. John était subjugué par la beauté des lieux. Un vrai conte de fées. Il y avait de nombreuses personnes dans le jardin sûrement en train de jouer au criquet.

« Qu’est-ce que j’aimerais y jeter un œil », dit-il tout haut.

Sur ces paroles, le Griffon opéra un piqué en direction du sol, juste au-dessus du bois. John émit un cri effrayé devant ce revirement de situation. Ils atterrirent néanmoins en douceur à l’abri des regards.

— Vous auriez pu prévenir que vous vouliez atterrir. J’ai bien failli tomber, le gronda John.

— Vous avez dit que vous vouliez aller voir, répliqua l’animal.

— J’ai dit ça comme ça, il ne fallait pas le prendre au pied de la lettre. (Il souffla) Bon, maintenant qu’on est là, autant aller visiter les lieux.

— Je vous attendrai ici et faites attention à vous. L’endroit n’est pas sûr et méfiez-vous de la famille royale. Si vous voyez que vous êtes en danger, revenez vite ou appelez-moi et je viendrais.

— D’accord, de toute façon, je tiens à ma tête, dit-il en pensant à ce que lui avait raconté le Chapelier sur les habitudes de la Reine. À tout à l’heure !

— Il s’engagea dans un chemin de haies presque similaire à celui qu’il avait vu à son arrivée. Il avait mémorisé le chemin qui menait à la grande pelouse ce qui l’aida à ne pas rester coincé. Il songea qu’il devait peut-être reprendre sa taille normale et mangea un bout de l’autre morceau de champignon. Il arriva enfin à la sortie du labyrinthe et se trouva devant une assemblée de personnes tout à fait orignaux. Les humains côtoyaient les animaux, certains sur deux pattes, d’autres à quatre pattes. Certains portaient des vêtements assez grotesques où un genre de déguisement de carnaval.

— Hé ! Vous ! Que faites-vous là !

John, interloqué, commença un mouvement pour repartir d’où il venait, après tout, il n’était pas invité à cette fête, mais l’homme qui s’approcha – un genre de garde – arriva rapidement à sa hauteur.

— Venez rejoindre les autres. La partie va bientôt commencer.

— Oh ! Mais je… commença-t-il.

— Que se passe-t-il ? Appela la Reine.

« Oups, repéré ! » regretta John.

Lorsque celle-ci s’approcha, les sourcils de John montèrent d’un coup. La femme qu’il avait devant lui était le portrait craché d’Irène Adler : La Femme, quoi !

« Dans quel guêpier me suis-je fourré ! »

— Eh bien, venez ! Ne soyez pas timide. Comment vous appelez-vous ? Demanda-t-elle.

— John, Votre Majesté, dit John en faisant une courbette.

Elle le prit par le bras et avançait vers ses invités.

— Justement, il me manquait une personne pour que l’on soit impair.

John préféra ne pas révéler qu’il s’était incrusté sans invitation.

— Mesdames et Messieurs, je vous présente John. Il va jouer avec nous.

John fit un sourire et essaya de se détendre pour ne pas révéler le pot aux roses.

La partie se jouait depuis dix minutes lorsque la Duchesse vint le rejoindre.

— Je ne pensais pas vous voir avant ce soir, John.

— En fait, c’est un peu par hasard que je suis ici.

— Ce n’est pas grave. Amusez-vous et surtout, ne gagnez jamais à ce jeu, la Reine aime être le seul vainqueur.

— Ça tombe bien, je ne sais pas y jouer.

Elle repartit jouer dès qu’il fut son tour. John aperçu le lapin blanc dans ses habits de serviteur. Lorsqu’il tourna la tête vers lui, John lui fit un coucou de la main avec un sourire, mais celui-ci lui rendit un regard noir et se détourna pour se rendre plus loin. La mine du docteur se décomposa devant ce changement d’attitude.

« Pourquoi est-il en colère contre moi. Ai-je fait quelque chose de mal ? » s’attrista-t-il.

Quand vint son tour, il se posa devant la balle, mais en fait, ce qui en avait le nom était un hérisson en boule tout tremblant. Il regarda autour de lui. Les visages semblaient impassibles, comme si c’était normal de taper un pauvre animal. Pourtant, il n’avait pas le choix.

— Je vais juste te pousser pour que tu n’aies pas trop mal, marmonna-t-il à l’adresse du hérisson.

Il colla le maillet contre le dos du hérisson et poussa d’un coup pour le faire glisser sur l’herbe. Il réussit deux coups à le faire passer par les arceaux avant de perdre son tour. Son attention ne passa pas inaperçu aux yeux de certains.

La partie était sur le point de se terminer lorsqu’un coup d’éclat l’alarma.

— Qu’on lui coupe la tête !

— S’il vous plaît ! S’il vous plaît ! Je n’ai rien fait ! Supplia le pauvre lézard.

John, qui n’écouta que son cœur, intervint devant le regard horrifié des autres invités et l’affolement du lapin.

— Majesté, qu’a-t-il fait de si grave pour que vous soyez obligée d’appliquer une telle sentence ?

— De quoi vous mêlez-vous ? Il a triché, et il sait que j’ai horreur des tricheurs, s’emporta-t-elle.

L’assemblée retint son souffle.

— Et si vous faisiez une dernière partie, comme ça, vous montrerez à tous que même un tricheur ne peut pas vous battre, Majesté, suggéra John.

La Reine sembla réfléchir tout en observant John d’un nouvel œil.

— Très bien ! Faisons une dernière partie. Si je gagne, il sera gracié, par contre, si je perds, c’est à vous que je ferais couper la tête.

John déglutit. Il n’avait pas pensé à ce retournement de situation. Il se dirigea vers le lézard.

— Bon, laisse-la gagner et on sera tranquille.

— Sûrement pas, je compte bien gagner.

— Mais tu es idiot ou quoi, je risque ma tête dans l’affaire pour t’avoir sauvé, s’énerva John.

— Je ne t’avais rien demandé !

— Tu as une dette envers moi, c’est grâce à moi que tu as encore la tête sur les épaules alors t’as intérêt de perdre pour me sauver la mienne, grogna John.

— C’est ton problème, pas le mien, le contra-t-il en se dirigeant chercher un maillet.

John était dépité par ce type arrogant. Il s’ébouriffa les cheveux, tentant de trouver une solution pour se sortir de ce bourbier. Il pensa à repartir rejoindre le Griffon, mais des gardes avaient été déployés à toutes les sorties, rendant toute retraites impossibles.

Le lézard frappa violemment le pauvre hérissa qui couina sous le choc et passa un arceau.

« Réfléchis, John ! Réfléchis ! Il doit forcément y avoir un moyen de s’en sortir. »

Un serveur passa devant lui avec un plateau contenant des petits fruits murs et la solution à son problème. Il prit plusieurs fruits murs et s’agenouilla sur l’herbe, à portée de vue du petit animal. Il lui montra les fruits.

Quand le lézard se remit en position, il frappa à nouveau le hérisson qui dévia de sa trajectoire sous son œil irrité. La reine prit son tour et passa plusieurs arceaux ce qui la fit gagner, abandonnant ses idées de décapitation.

— Majesté ! Je réclame justice ! Cet homme a truqué le jeu pour que je perde, ragea-t-il.

Tous se tournaient vers John qui donnait à manger au petit hérisson, assit contre une haie. Il releva la tête pour faire face à son opposant.

— Je n’ai pas bougé d’ici dit-il avec une petite moue innocente. Je vous trouve bien mauvais joueur. La Reine est plus douée que vous, c’est tout.

Le lézard fulmina en partant tandis que tous les joueurs discutaient entre eux ou commencèrent à rentrer chez eux.

John se releva et reprit la direction du labyrinthe sous le regard de la Reine qui l’observait à la dérobée avec un sourire. Le Roi, posté en haut du balcon, avait suivi l’altercation avec fascination.

Après avec diminué sa taille, John avait repris la voie des airs avec le Griffon sous le soleil de midi. Sa matinée n’avait pas été si catastrophique en fin de compte et il avait réussit à éviter une décapitation, même si finalement, le lézard aurait bien mérité son sort, mais une vie est précieuse, quelles que soient les circonstances.

Son ventre émit une plainte et John se décida d’aller se faire inviter chez le Chapelier. Le Griffon vira en direction du manoir.

À SUIVRE...

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