Neela

Chapitre 7

Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 22:24

Lorsque Sal comprit qu'il ne pourrait plus empêcher ses dents de claquer à cause du froid, il ralluma les moteurs. Obi-Wan remonta dans sa tourelle, au cas où. Immobiles et silencieux, il attendaient depuis au moins trente minutes et le chasseur corellien devait avoir abandonné ses recherches, mais il valait mieux rester prudent.


Sal détacha les grappins magnétiques et le vaisseau bougea doucement à l'intérieur de sa cachette. Contrant l'attraction que provoquait la rotation de la station sur elle-même, Trandil poussa doucement les moteurs et se détacha de son orbite. Le ciel semblait vide. Alors il donna sa pleine puissance à son appareil et fusa en direction de la sphère bleue de Corellia.


Obi-Wan regarda s'éloigner la forme caractéristique du gigantesque chantier naval et songea à Neela, prisonnière de la forteresse de métal. Comme toujours il avait pris la bonne décision, celle guidée par la raison, permise par le sang-froid qu'il gardait dans n'importe quelle situation grâce à son entraînement de Jedi. Mais il ne pouvait se défaire de l'impression qu'il l'avait abandonnée. Il avait trahi la promesse silencieuse qu'il s'était faite de ne jamais rien laisser lui arriver.


Trandil semblait avoir compris son humeur sombre et tenta de le raisonner :


- Elle se débrouillera très bien toute seule.


Dans l'esprit d'Obi-Wan sa phrase fit écho avec celle de Maître Yoda parlant d'Anakin lors de leur conversation dans le bureau de Palpatine. Le Jedi devint alors encore plus amer en songeant que la jeune fille n'était pas la seule personne qu'il avait abandonnée.


L'Aile Cinglante se posa avec un bruit de métal fatigué dans le hangar dont le toit était resté ouvert. Obi-Wan en sortit mais Trandil resta à l'intérieur.


- Retourne chez Madame Brag, lui dit-il en lui jetant une petite bourse du haut de la passerelle. Et achète quelque chose à manger sur le chemin. Je serai bientôt là.


Le Jedi n'aimait pas ignorer ce que le contrebandier cachait dans sa soute, mais celui-ci était son ami et non une mission. S'il ne souhaitait pas le lui révéler, alors le Jedi devait l'accepter. Il reprit donc sa route solitaire parmi les ombres de la nuit, son état d’esprit s’accordant parfaitement avec la morosité des rues.



Lorsque Neela rouvrit les yeux, elle eut l’impression d’être tirée d’un endroit très profond où la réalité n’avait plus aucun sens. Elle regarda la salle de commandement du Majestic sans comprendre ce qu’elle avait sous les yeux. Puis sa conscience lui revint doucement et elle constata qu’elle était seule. La salle était vide et elle serrait encore dans ses doigts le bâton aux éclairs violets.


Elle eut une soudaine envie de se laisser aller au désespoir et des larmes firent briller les coins de ses yeux. Elle avait failli à sa mission. Si le Géonosien s’était fait capturer par la CorSec, alors ils n’auraient plus aucune chance de savoir qui l’avait envoyé ici. A cause d’elle, leur unique piste pour retrouver la Sénatrice Coriolan était perdue. Obi-Wan serait furieux. Non, pas furieux : déçu, songea-t-elle et cette pensée lui fit encore plus mal.


Elle se mit en route, seule dans les flancs du navire échoué, et sécha ses larmes. Il était temps de rentrer.


A la sortie du dock, elle se heurta de nouveau aux droïdes qui gardaient le passage. N’ayant aucune idée pour parvenir à traverser comme elle l’avait fait la première fois, elle s’assit derrière eux et attendit. Cela lui rappela les longues veilles dos au mur et assise en tailleur qu’elle avait l’habitude d’effectuer il n’y avait pas si longtemps. Après tout, elle avait tout son temps. Et si le garde Hrakien avait fait son rapport, le dock ne tarderait pas à être envahi par des patrouilles et des mécaniciens venant vérifier le vaisseau. Elle devait juste être patiente.


Elle n’eut pas à attendre longtemps. Quelques minutes plus tard, elle entendit le claquement des bottes de gardes arrivant au pas de course. Elle se mit debout et se dissimula dans un recoin.


- Comment avez-vous pu le laisser filer? criait avec fureur l’homme qui menait la petite troupe.


Derrière lui, tentant de se maintenir à sa hauteur, courait le Hrakien dont la peau couleur de sable avait considérablement pâli.


- Il allait trop vite, dit-il dans une pitoyable tentative pour se justifier.


- Vous êtes un incapable! l’incendia son supérieur.


Il donna des ordres et la petite troupe se dispersa fébrilement dans le croiseur. Les droïdes de sécurité furent démis de leur poste et envoyés en renfort vers les hangars de navettes, grâce auxquelles le Géonosien  pourrait s’enfuir, avec pour ordre de condamner les issues du deuxième pont.


Neela hésita. Le passage était libre et elle pouvait courir après le saboteur en sachant qu’elle n’avait pas de grandes chances de le rattraper, ou rester ici et tenter d’en apprendre le plus possible. Elle regarda le couloir libre et attirant qui l’emmènerait jusqu’à la sortie, puis soupira et lui tourna le dos. Décidément, elle n’avait pas imaginé sa mission ainsi.


Les techniciens de la CTC cherchaient partout, démontaient chaque panneau et inspectaient méticuleusement chaque fil. Neela se fit la même réflexion que le commandant :


- Ça va prendre des heures!


- Il faudrait mettre le Majestic en route, Commandant, proposa timidement le garde Hrakien.


L’homme le considéra en se demandant s’il fallait qu’il remette le jeune garde à sa place.


- Tu penses que le vaisseau serait capable de détecter tout seul ses avaries? se moqua-t-il. Pourquoi crois-tu que les autres ont explosé en plein vol? Ces saboteurs sont extrêmement doués pour ne laisser aucune trace de leur passage.


Le Hrakien baissa la tête mais osa répliquer.


- Le Majestic n’est pas un vaisseau comme les autres, Commandant. Si le pilote pouvait venir, je suis certain qu’à eux deux ils trouveraient ce qui ne va pas.


- Tu écoutes trop les histoires de bonnes femmes. Un croiseur est un croiseur, pas un être intelligent.


Le jeune garde n’ajouta rien ; le bord de ses oreilles était devenu complètement blanc. Neela supposa que c’était sa façon de rougir. Pour sa part, elle ne trouvait pas son idée si stupide. Elle avait peine à croire que le vaisseau, avec tous ses câbles courant sous sa peau de métal, ne puisse pas être capable de savoir ce qu’on lui avait fait subir. Au contraire, il lui faisait plutôt l’effet d’un gigantesque animal endormi, mais dont un sursaut de conscience pouvait à tout instant réveiller la force formidable qui dormait dans ses entrailles de métal. Elle l’imaginait presque s’arrachant de ses entraves magnétiques et s’élançant de sa propre volonté vers l’espace qui était son foyer. Elle s'identifia à lui, reconquérant sa liberté, tout comme elle souhaitait reconquérir la sienne.


Soudain, une phrase que venait de prononcer le commandant sans qu’elle y prête attention la tira de ses rêveries.


- Condamnez toutes les portes, ordonnait-il. Absolument toutes. Je veux que rien ne sorte ni entre d’ici , hommes autant que droïdes.


Neela comprit soudain que si elle ne partait pas maintenant, elle resterait prisonnière de la station. Elle s’élança en courant, sans se soucier de l’air étonné des mécaniciens qu’elle croisait et qui sentaient le courant d’air qu’elle provoquait. Elle sentit l’adrénaline parcourir son corps et évita de songer au fait que le stress la rendait parfaitement perceptible. Elle passa sans s’arrêter devant les hangars du deuxième pont, dont les portes étaient fermées et les issues gardées. Elle descendit les escaliers en volant presque, utilisant la gravité plus faible de la station pour effleurer les marches. Elle déboucha sur le premier pont, le souffle court, et repartit avec effort, bousculant de petits droïdes mécaniciens qui trillaient d’indignation. Le premier hangar qu’elle dépassa était lui aussi fermé et elle fut terrifiée à l'idée de rester prise au piège. Mais elle continua sa course et trouva enfin une sortie. Sans réfléchir, elle donna une décharge violette au droïde de sécurité qui tenta de l’arrêter. Devant elle se trouvaient quatre chasseurs corelliens, leur silhouette racée éclairée par la lumière provenant des coursives.


La jeune fille s’arrêta et eut un moment de flottement. Elle n’avait aucune idée de ce qu’elle devait faire ensuite. Tout d’abord, elle ne savait pas du tout comment faire démarrer l’un de ces engins. Ensuite elle n’avait aucune compétence dans le vol interstellaire et n’avait aucune envie de se retrouver flottant à la dérive dans le vide comme ces pilotes malchanceux qui n’avaient jamais reçu l’aide qu’ils attendaient. Elle s'approcha d'un des vaisseaux et regarda avec indécision le cockpit fermé qu'elle ne savait même pas ouvrir. Elle monta lentement les barreaux de l'échelle posée contre le flanc de l'appareil et fit glisser une petite gâchette dans le métal. Le dôme transparent s'ouvrit dans un souffle caractéristique et l'appareil s'alluma, révélant des écrans et des séries de témoins lumineux dont la signification était une énigme pour la jeune fille.


- Descend de là tout de suite, ordonna dans son dos une voix qu'elle reconnut.


Elle obéit lentement et se retourna face au canon d'un blaster. Le jeune garde Hrakien à la couleur sable se tenait devant elle, une lueur perplexe dans ses yeux brun doré. Il éprouvait une étrange sensation face à cette intruse. Puis son regard accrocha le bâton de métal que la jeune fille tenait toujours à la main. Intuitivement, celle-ci appuya sur le bouton de l'arme et les éclairs violets jaillirent dans un grésillement. Le Hrakien tressaillit et approcha encore plus son blaster de façon menaçante, mais son regard n'arrêtait pas d'aller et venir entre le visage de Neela et les éclairs électriques.


- C'est moi qui t'ai sauvé la vie sur le pont du Majestic, prononça celle-ci doucement.


- Pourquoi est-ce que je te croirais? demanda le garde méfiant.


- Tu le sais, répliqua Neela, ça se voit. Je suivais le saboteur. Maintenant il s'est enfui et il faut que je le retrouve.


Le blaster s'abaissa et la jeune fille ne put retenir un soupir de soulagement.


- Laisse-moi partir, je t'en prie, reprit-elle.


- Je n'ai pas le choix, hésita le Hrakien. Je dois t'amener au sergent.


- Ton idée de demander au pilote du Majestic de vous aider était excellente, continua Neela. Tu ne dois pas l'abandonner.


Les yeux du garde s'agrandirent.


- Comment sais-tu...


- Le Géonosien s'est enfui, mais je peux le retrouver, le coupa-t-elle. Il est très important que je le retrouve. J'ai besoin de ton aide.


- Pour te laisser partir?


- Non. Je ne sais pas comment marche ce ...truc, avoua-t-elle, honteuse, en désignant le chasseur.


Le doute et l'hésitation emplirent les yeux mordorés du Hrakien, puis il prit sa décision.


- Merci pour tout à l'heure, dit-il simplement.


Puis il monta dans le chasseur et donna des instructions à l'ordinateur de bord.


- Où veux-tu atterrir? demanda-t-il.


- A l'astroport du Secteur Bleu.


Le jeune garde ne fit aucun commentaire et programma la destination dans le pilote automatique. Puis il lui tendit une petite carte électromagnétique qui servait de clef pour démarrer.


- Le chasseur va t'emmener directement là où tu veux aller, dit-il enfin. Il ne devrait y avoir aucun problème, personne ne te prendra en chasse vu que toutes les autres portes sont fermées. Et comme tu descends à l'astroport du Secteur Bleu, il n'y aura pas de questions gênantes à ton arrivée. Je te conseille de vendre l'appareil rapidement ou de l'abandonner. Si jamais il se passe quelque chose d'anormal, tu peux désactiver le pilote automatique en appuyant là.


Il lui désigna un bouton carré de couleur bleue sur le côté du tableau de bord.


- La vitesse se règle ici et pour la direction, c'est comme le manche d'un speeder.


Neela acquiesça. Ça elle savait faire. Elle grimpa dans l’appareil et eut juste le temps de remercier le jeune homme couleur de sable avant que le dôme de tranparacier ne se referme au dessus de sa tête. La porte du hangar s’ouvrit sur les étoiles. Le Hrakien lui fit comprendre par gestes qu'elle devait mettre le casque qui était posé entre ses jambes et elle obéit, la visière trop grande glissant sur son nez.


Les quatre petits réacteurs du chasseur s’allumèrent et il quitta la station.


Neela eut du mal à s'accommoder à son casque qui affichait des informations sur la vitesse de l'appareil, les réserves des propulseurs et la distance à parcourir en lettres vertes sur sa visière. Ses yeux faisaient des allers retours rapides entre les chiffres lumineux et les étoiles qui semblaient bouger très lentement autour d'elle. Puis elle vit Corellia. La planète verte et bleue s'approcha de plus en plus vite et Neela se recroquevilla instinctivement dans son siège. Le chasseur entra sans aucune délicatesse dans l'atmosphère et elle eut le souffle coupé par l'accélération. Des langues de flammes bleues vinrent lécher le cockpit tandis que le gaz brûlait à la surface de l'appareil. Neela ne put retenir un gémissement de peur et ferma les yeux. Elle n'avait qu'une seule pensée à l'esprit : que ça s'arrête. Mais le chasseur continua sa descente folle et elle sentit son estomac remonter dans sa poitrine.


Puis tout doucement, l'appareil ralentit et se positionna à l'horizontale. La jeune fille osa desserrer ses paupières et regarda à l'extérieur. La lumière de l'étoile Corell qui illuminait l'espace ne parvenait pas jusqu'à cette partie de la planète encore plongée dans le noir. Mais le jour n'allait pas tarder à se lever. Déjà, l'horizon devenait plus clair au nord. Neela distingua sous elle les bâtiments de l'astroport et comprit que le chasseur attendait une autorisation pour se poser. Il l'obtint quelques minutes plus tard sans que la jeune fille ait besoin de faire quoi que ce soit. Il amorça sa descente et se posa avec légèreté dans un hangar déjà à moitié plein. Neela déglutit difficilement lorsqu'elle vit ce qui l'attendait dehors et fut tentée de rester à l'abri dans son cockpit, mais la coque de transparacier se releva traîtreusement.


Tous les gens présents avaient les yeux braqués sur elle.


Elle se leva et descendit du chasseur avec un élan de gratitude pour le casque qui protégeait son visage des regards suspicieux. Elle traversa le hangar en résistant difficilement à une grande envie de courir qui  transformait chacun de ses pas en cauchemar. Le sang semblait vriller dans ses veines. Elle n'avait jamais été aussi visible qu'en cet instant et c'était une sensation atrocement désagréable.


Elle parcourut la station en cherchant de mémoire l'emplacement de l'Aile Cinglante. Elle espérait que le contrebandier et le Jedi n'étaient pas encore rentrés car elle n'avait aucune envie de traverser seule la ville, en particulier de nuit. Mais l'Aile Cinglante était posée dans son hangar et semblait vide.


Elle s'en détournait lorsqu' un bruit parvenant de la soute la retint. Il y avait quelqu'un dans le vaisseau.


Pourtant l'échelle était relevée et la porte fermée. Elle s'approcha de  la coque de l'appareil et repéra la serrure où Trandil avait inséré une clé quelques heures plus tôt. Elle y trouva un loquet, le poussa et le sas s'ouvrit, l'échelle se déployant devant ses pieds. Elle monta, un peu anxieuse à l'idée de découvrir à l'intérieur quelque chose d'autre que ce à quoi elle s'attendait. Elle se dirigea vers les soutes, tentant d'être la plus silencieuse possible. Elle y découvrit Randil Sal, accroupi, lui tournant le dos, devant une grande caisse qu'elle ne pouvait pas bien voir. Il semblait parler tout seul.


Intriguée, elle s'approcha sans s'annoncer. Elle se plaça juste derrière le contrebandier et vit à quoi il parlait réellement. Elle fut ébahie : dans la caisse était allongée une panthère des sables.


Le félin avait la taille d'un petit cheval et la fourrure beige clair. Sal avait dû l'endormir car ses pattes tressautaient faiblement et ses paupières s'entrouvraient à peine sur un regard nacré, assommé mais furieux. L'homme murmurait d'une voix rassurante, en passant la main sur son pelage lustré. Au cou de l'animal brillait un collier en argent incrusté d'une  magnifique topaze bleu ciel.


Neela savait ce que cela signifiait. Il n'y avait que des personnages très hauts placés qui pouvaient s'offrir de tels animaux de compagnie. Ce n'était plus de la contrebande, c'était du vol à haut risque. Cette panthère mettait en danger de mort tous ceux qui l'approchaient.


Neela recula lentement. Elle devait prévenir Obi-Wan. Mais son pied buta soudain avec un bruit métallique contre un objet posé au sol et elle manqua tomber. Sal se retourna à une vitesse fulgurante, son blaster pointé sur elle.


- Qu'est ce que tu fais là? demanda-t-il d'un ton menaçant, ne baissant pas son arme bien qu'il l'eut reconnue.


Neela réfléchissait à toute vitesse. Elle ne connaissait pas cet homme. Il était ami avec Obi-Wan, mais lui cachait visiblement des choses. Elle doutait qu'on puisse lui faire confiance.


- Je vous cherchais, répondit-elle.


Derrière le contrebandier, la panthère poussa un feulement. Elle se réveillait doucement. Sal regarda tour à tour la jeune fille et l'animal, semblant évaluer laquelle était la plus dangereuse. Puis il remit son blaster à sa ceinture et ouvrit une mallette de métal posée sur le sol. Elle contenait une seringue et plusieurs flacons.


- Viens m'aider, ordonna-t-il.


Neela s'approcha, considérant avec appréhension la longueur des griffes que la panthère avait sorties dans une vaine tentative d'intimidation.


- Tiens lui les pattes. Et surtout ne la laisse pas bouger. Ses griffes sont emplies de poison. Une simple éraflure pourrait te tuer.


Guère rassurée, la jeune fille posa ses mains sur les pattes musclées de l'animal et le sentit tressaillir. Elle comprit l'humiliation de la panthère, si fière et noble, de se voir affaiblie et sans défense, sa rage et sa peur aussi.


Sal passa sa main sur la fourrure, tendit la peau et fit lentement pénétrer l'aiguille dans la chair. La panthère se raidit mais ne trembla pas. Au fur et à mesure que le produit pénétrait dans ses veines, la tension se relâcha sous les mains de Neela et les paupières se refermèrent sur les yeux de nacre. La jeune fille caressa la tête majestueuse avec tristesse.


Sal referma la mallette avec un claquement sec puis se tourna vers elle.


- Tu ne dois rien dire à Obi-Wan.


Neela se releva en soutenant son regard.


- Pourquoi ferais-je cela?


- Il n'a pas à s'inquiéter de mes problèmes. Il a déjà assez à faire avec les siens. Si tu lui parles d'elle, reprit-il en désignant la panthère, il va vouloir la rendre à ses propriétaires. Et crois-moi, ce n'est pas une bonne idée.


- A qui appartient-elle? demanda Neela en considérant la pierre précieuse incrustée dans le collier d'argent de l'animal.


- Au Gouverneur.


La jeune fille eut le souffle coupé. Rien que ça!


- Ce n'est pas moi qui lui ait volé! se justifia Sal. Elle était avec une cargaison que j'ai récupérée. Elle n'était pas du tout prévue dans mes plans. Je la nourris comme je peux, et j'essaie de trouver une solution pour sortir de ce traquenard.


Neela n'arrivait pas à se décider. Elle savait qu'Obi-Wan lui en voudrait de lui cacher une telle information, mais elle ne voulait pas lui imposer un souci supplémentaire.


- Je ne lui dirai rien, finit-elle par accepter.


Le contrebandier soupira. Puis il referma la caisse et ils sortirent du vaisseau. Il s'engagèrent dans les rues éclairées par les premiers rayons du soleil et regagnèrent la tanière de Madame Brag.



- J'ai un atout! s'écria Sikes en brandissant une paire de cartes.


- Tu as encore gagné, sourit Obi-Wan.


- Faites attention, l'avertit Madame Brag, c'est un excellent tricheur.


- C'est pas vrai! se défendit le gamin.


Puis il tourna un regard suppliant vers la Sélonienne.


- Je peux aller dehors maintenant? Il fait jour!


- J'ai dit non Sikes. Je préfère te savoir en sécurité ici.


L'enfant croisa les bras et partit bouder dans une chambre.


- Comment avez-vous connu Trandil? demanda Obi-Wan tandis que son hôtesse s'asseyait avec fatigue.


- Par Sikes. Je me suis attachée à ce gamin, qui venait chaque jour me quémander une tarte et plaisanter avec moi. Je tiens un étal sur le marché. Je vois beaucoup de monde toute la journée, mais je me sens quand même seule. Sikes venait me tenir compagnie. Et comme il fréquentait des endroits peu recommandables, notamment la nuit, j'ai fini par l'accueillir chez moi.


Elle sourit.


- Je ne pensais pas me retrouver avec un deuxième gamin sur les bras! Maintenant il partage son temps entre moi, Trandil, et les autres galopins du quartier. Ce n'est pas le meilleur environnement qui soit pour un enfant, mais c'est le meilleur que nous puissions lui offrir.


Obi-Wan acquiesça et son regard se fit vague. Il pensait à Neela.


- Je ne peux pas vous empêcher de vous inquiéter, lui dit la Sélonienne avec compassion. Mais cela ne la fera pas revenir plus vite. Vous devriez vous reposer un peu.


- Vous avez raison, admit le Jedi. Vous êtes plus sage que beaucoup de personnes que je connais. Sikes a de la chance de vous avoir.


Obi-Wan prit congé de son hôtesse et s'assit en tailleur dans une des chambres, à même le sol. Il tenta d'apaiser son esprit et s'ouvrit tout entier à la Force. Il savait qu'il ne pourrait pas repérer Neela mais essaya quand même. Puis il se mit à la recherche de son padawan et le trouva facilement, ses émotions trop fortes trahissant comme à chaque fois sa présence. Obi-Wan avait à de nombreuses reprises enseigné à son apprenti comment maîtriser ses sentiments, mais celui-ci était incapable d'appliquer la leçon. Le Maître rencontra l'esprit d'Anakin et ressentit son amertume d'avoir été laissé pour compte sur une planète ennuyeuse, aux prises avec des diplomates. Le jeune homme souhaitait qu'ils terminent tous les deux leur mission au plus vite.


Puis Obi-Wan lâcha prise et fit une chose qui lui arrivait rarement : il s'endormit.



Lorsque Trandil Sal et Neela arrivèrent chez Madame Brag, ils trouvèrent la Sélonienne et le Jedi endormis, et Sikes en train de fabriquer en silence un engin spatial avec des rebus de métal. Le gamin fit un grand sourire à Sal en le voyant, et lui indiqua de ne pas faire de bruit.


- Bapati a veillé toute la nuit, murmura-t-il.


Trandil regarda la Sélonienne, qui s'était endormie sur un étrange fauteuil aux formes courbes adaptées à sa grande taille.


- Je suis vraiment pas un cadeau, grimaça-t-il.


Il alla à la cuisine et en ramena deux galettes. Il en tendit une à Neela.


- Mange et dors un peu toi aussi, lui ordonna-t-il. Moi il faut que j'aille ouvrir mon stand.


- Je peux venir avec toi? se précipita Sikes.


- Oui, mais je veux que tu me suives comme mon ombre c'est compris?


Le gamin acquiesça avec enthousiasme. Il détestait être enfermé.


Ils sortirent et Neela se retrouva seule dans la maison silencieuse. Elle grignota sa galette et s'assit en face d'Obi-Wan, le regardant dormir. Elle réfléchissait. Sa petite expédition n'avait pas été aussi fructueuse qu'elle l'avait espéré. Elle connaissait maintenant le saboteur et supposait fortement qu'il était seul à faire le travail. Elle savait aussi que le Majestic était sa dernière mission. Pourquoi? Les sabotages étaient-ils devenus trop dangereux? Ou inutiles? Et surtout que cachaient-ils? Car il était évident que ces sabotages n'étaient qu'une diversion destinée à cacher une manoeuvre bien plus importante, une manoeuvre qu'avait découvert la Sénatrice Corellienne et qui avait été la raison de son enlèvement. Ils devaient aller plus loin.


Obi-Wan ouvrit les yeux.


- Tu es rentrée, dit-il simplement.


Neela sourit.


- Je n'ai pas de grandes nouvelles, s'excusa-t-elle.


Le Jedi lui fit signe de raconter, et elle s'exécuta de bon coeur.


- Un Géonosien, reprit-il perplexe lorsqu'elle eut fini. C'est vraiment étrange. Ce peuple n'est pas particulièrement apprécié par la République, mais pour l'instant ils ne nous ont créé que des ennuis mineurs. Pourtant je vois mal un Géonosien s'engager dans un travail de ce genre sans avoir l'aval de ses supérieurs. C'est donc la planète entière qui est concernée.


Il secoua la tête.


- Il y a quelque chose qui nous échappe. Les puissances qui entrent en jeu sont trop importantes.


- Qui profiterait de la déstabilisation de Corellia? demanda Neela.


- S'il n'y avait pas tant d'éléments extérieurs, j'aurais pensé en premier à un membre du gouvernement.


Neela songea à la panthère des sables prisonnière dans les soutes de l'Aile Cinglante.


- Le Gouverneur?


- Non, plutôt à celui qui voudrait prendre sa place. Mais ça n'expliquerait qu'une partie de la situation.


- Peut-être qu'un changement de Gouverneur profiterait à quelqu'un d'autre, quelqu'un de plus puissant, suggéra Neela.


- C'est une bonne hypothèse. Il faudrait rendre une petite visite à la Corona Hunt, le coeur politique de la planète. Mais pour cela, il faudra que je révèle mon identité, ce que je ne souhaite faire qu'en dernier recours.


- Alors que fait-on?


- Je vais donner le signalement du Géonosien à l'Ordre, ils finiront par le localiser. Mais la priorité, c'est la Sénatrice.


Le Jedi se leva, décidé.


- Tant pis pour mon identité, dit-il. Il faut parler au Gouverneur. J'ai l'intuition que ton idée est la bonne.


Neela sourit.


- Vous ne regretterez pas de m'avoir eu dans les pattes, finalement.


- On verra ça, grogna Obi-Wan.


Il enleva sa veste marron, passa sa bure de Jedi et redevint brutalement le respectable et dangereux Maître Kenobi.



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