In Medias Res [vignettes] - Star Wars Knights of The Old Republic

Chapitre 2 : Embuscade

4946 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 02/08/2021 20:21

Quelques modifications, quelques passages retravaillés. Mais pas de révolution.


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L'alerte générale retentit cette nuit-là. L'Endar Spire subissait des feux ennemis.

 

Le son strident de l'alarme nous sortit tous brutalement de notre sommeil. Lorsque j'ouvris les yeux, je remarquai immédiatement que les vitres avaient été occultées par le dispositif de blindage, se déclenchant automatiquement en cas d'attaque.

 

 

 

Dans notre quartier, où je résidais avec Hannah, Garrick et quelques autres camarades, l'agitation se propagea rapidement. Mes compagnons comprirent immédiatement la situation et se précipitèrent hors du dortoir pour rejoindre la zone où était entreposé notre équipement. Étant encore peu familier avec les procédures à suivre en pareilles circonstances, je mis un moment de trop à me ressaisir et à emboîter le pas de mes camarades. Alors que je me dirigeais vers mon propre casier, Garrick m'interpella sévèrement :

 

 

« Bordel, bouge-toi ! C'est l'alerte générale, c'est très grave ! »

 

 

Je ne répondis pas à Garrick et m'efforçai d'accélérer le rythme, conscient que le temps pressait. Je revêtis rapidement mon armure et saisis fermement l'épée basique qui m'avait été attribuée. Bien que je n'aie pas été officiellement autorisé à utiliser une arme à distance, je connaissais les bases de leur fonctionnement. Cependant, faute de formation adéquate et de pratique, je ne pouvais pas les manier en toute sécurité selon les normes de la République. Je devais donc me contenter des armes de mêlée. Alors que je fixais le fourreau à ma ceinture, une voix saturée se fit entendre dans tout le quartier, résonnant probablement à travers tout le croiseur :

 

« Alerte générale. Mobilisation de l'effectif combattant. Alerte générale. Mobilisation de l'effectif combattant. »

 

 

En hâte, je me joignis à mes camarades qui se préparaient à quitter les quartiers. J'aperçus au loin notre lieutenant, Trask Ulgo, qui avait déjà commencé à donner des instructions :

 

« Mesdames, Messieurs. Voici la situation : les Sith ont attaqué l'Endar Spire. Ils sont à la recherche du Commandant Shan. Le Lieutenant Onasi a déjà formé une équipe pour accompagner notre Commandant aux capsules de sauvetage de l'aile ouest. À l'heure actuelle, ils doivent être proches de leur destination. Votre mission est de neutraliser tous les Sith que vous rencontrez en vous dirigeant vers les capsules. Nous devons protéger Bastila Shan, quel qu'en soit le prix. Est-ce bien clair ? »

 

« Oui, Lieutenant ! »

 

« Alors, en avant ! » conclut Trask Ulgo d'une voix inspirée. Il prit la tête de notre petite unité et nous nous dirigeâmes vers notre objectif.

  

Lorsque le sas de nos quartiers fut déverrouillé, nous pénétrâmes dans un vaste couloir où les bruits de combat étaient déjà audibles. Dès l'ouverture de la porte, des tirs fusèrent de toutes parts dans le couloir. Nous nous abritâmes un court instant jusqu'à ce qu'un calme relatif se rétablisse, puis nous nous lançâmes dans la bataille. Je repérai rapidement cinq soldats Sith qui venaient d'immobiliser deux de mes collègues provenant d'un autre quartier. Ulgo et mes camarades se cachèrent pour éviter le feu ennemi imminent, se préparant tous à riposter. Quant à moi, je me sentais démuni avec ma simple épée et mon manque d'expérience. Un peu plus loin, je vis Hannah me faire signe de la rejoindre, ce que je fis immédiatement.

  

« Tiens Corem. » Me dit-elle en me tendant son pistolet blaster de secours. « Les règlementations, on se les carre où je pense. Les Sith sont là, et il est hors de question que je te laisse en première ligne désarmé à cause de réglementations stupides. Si on survit et qu'on te poursuit, tu diras que je t'ai menacé. »

  

Quelque peu choqué, je saisis tout de même l'arme qu'elle me tendait. Cela me procurait un réconfort plutôt inattendu, bien que finalement très prévisible et justifié.

 

« Merci Hannah. » Fis-je avec gratitude.

  

Les Sith engagèrent le combat, et une pluie de lasers traversa à nouveau le couloir en notre direction.

 

Hannah se pencha et riposta, touchant l'épaule d'un des Sith. Mes collègues firent de même et éliminèrent deux soldats. Alors qu'ils préparaient une nouvelle offensive, je me courbai légèrement, visant un des Sith qui semblait menacer le Lieutenant. Je passai mon arme sur son mode le plus puissant et tirai l'unique coup que ce même mode permettait. Le faisceau laser dégagea une telle puissance qu'il créa un nuage de fumée qui obstrua brièvement la vue d'Hannah et de moi-même. Lorsque la fumée se dissipa, nous vîmes que j'avais touché ma cible. Le soldat était étendu au sol, le crâne fumant. affichant un large sourire admiratif. Elle me donna un coup de coude et dit :

 

« Je savais que je pouvais compter sur toi. »

 

Je lui rendis un sourire empreint de gravité, bouleversé par la scène terrifiante de l'homme que je venais de tuer, puis je remis mon arme en mode standard. En quelques secondes, mes camarades éliminèrent les deux derniers soldats, visiblement déstabilisés par la mort particulièrement violente de leur compagnon. Un calme précaire s'installa dans le couloir. Nous étions tous légèrement essoufflés, le stress de l'affrontement commençant à se dissiper.

 

Nous nous regroupâmes pour reprendre notre avancée vers notre objectif, le Lieutenant en tête. Malgré le soulagement d'avoir survécu à cette rencontre mortelle, la réalité de la situation s'imposait à nous. Les Sith étaient toujours là, représentant une menace constante. Nous devions rester vigilants et prêts à combattre à tout moment.

Alors que je me remis en mouvement, Ulgo s'approcha de moi et, une main posée sur mon épaule, il me dit avec reconnaissance :

 

« Merci, soldat. »

 

Il prit ensuite la tête du groupe et continua vers les capsules de sauvetage les plus proches. Nous avancions avec prudence, nos sens en alerte. Chaque bruit, chaque ombre nous mettait en état d'alerte. Nous étions une équipe soudée, prête à affronter les dangers qui se dressaient sur notre chemin.

 

Une dizaine de minutes s'écoulèrent alors que nous affrontions des poignées de soldats Sith. Tous furent vaincus par notre groupe, bien que certains d'entre nous aient été blessés. Dans un autre couloir, nous nous retrouvâmes pris en tenaille. D'un côté, Garrick, Hannah et un autre camarade se battaient contre quatre soldats Sith. De l'autre côté, Trask Ulgo, un jeune Aspirant presque adolescent, et moi-même nous attaquions aux trois autres soldats proches de nous. Alors que nous nous approchions de nos ennemis, une explosion puissante retentit, secouant violemment la structure du couloir. En une fraction de seconde, une partie de la carlingue métallique s'effondra, séparant notre groupe de manière beaucoup plus concrète. Sans me préoccuper de la situation pour l'instant, je profitai du nuage de particules provoqué par l'effondrement pour me précipiter sur les Sith. Cette fois, j'utilisai mon sabre pour prendre les soldats par surprise, alors qu'ils semblaient désorientés. En quelques instants, j'éliminai un à un les adversaires avec la lame de mon sabre. Une fois assuré qu'il n'y avait plus d'ennemis, je me retournai vers Trask qui était agenouillé près des débris, son blaster fumant dans la main. Je fis les quelques pas qui me séparaient de lui et découvris le jeune Aspirant baignant dans son propre sang, son torse, son bassin et ses jambes écrasés sous les lourdes plaques de métal. Je remarquai également une petite marque circulaire sur son crâne, Une petite marque circulaire sur son crâne laissait échapper un mince filet de sang. Ulgo me lança un regard empli de tristesse et de désillusion : il avait mis fin aux souffrances du garçon. Sans dire un mot, le Lieutenant se releva et s'éloigna quelques pas du cadavre de notre compagnon. Je me sentais comme pris dans un tourbillon d'émotions contradictoires, incapable de trouver un équilibre dans ma tête. La réalité brutale de la guerre s'était imposée à nous de la manière la plus cruelle. Les images de la bataille, le son des armes à feu, tout se bousculait dans ma tête. Je me sentais submergé par un sentiment d'impuissance, comme si j'étais simplement un spectateur impuissant de cette folie destructrice.


Pourtant, au milieu de cette tourmente émotionnelle, une étincelle de détermination émergea en moi. Le Lieutenant, d'une voix empreinte de fermeté, m'appela à reprendre mes esprits, à me relever. Sa parole résonna dans ma conscience, me rappelant que nous avions une mission à accomplir. Nous ne pouvions pas laisser nos émotions prendre le dessus, notre mission n'était pas encore terminée. Dans cette tourmente, des voix nous interpellèrent de l'autre côté de l'effondrement :

 

« Lieutenant ! Vous nous entendez ? » Demanda un Garrick apeuré.


« Oui. Je vous entends. Quelle est votre situation ? »

 

« On est sains et saufs. Nous avons pu neutraliser les Sith. Nous allons essayer de déblayer le passage. »

 

« Non ! » Répliqua Ulgo. « Nous n'avons pas le temps. Il vous faudra emprunter un autre itinéraire. Rejoignez les capsules de l'aile est, c'est ce que vous avez de mieux à faire. »

 

Un silence pesant s'installa, et je me sentis mal à l'aise face à cette décision qui pouvait être qualifiée de cruelle par certains. Néanmoins, dans un tel contexte, elle était rationnelle. Nous ne pouvions pas nous permettre de perdre du temps. La priorité était Bastila Shan, pas Hannah, Garrick ou tout autre soldat ordinaire.

 

« Entendu Lieutenant. Nous partons. » déclara Hannah d'une voix résolue et professionnelle, comme à son habitude. Même si personne ne lui avait donné l'ordre, je savais qu'elle allait prendre les devants du groupe. À ce moment-là, une onde d'anxiété me parcourut. J'avais peur. J'avais peur pour Garrick. J'avais peur pour Hannah. J'avais peur pour son mari et ses filles, qui pourraient bientôt recevoir de terribles nouvelles.

 

« Allez Aspirant ! » poussa le Lieutenant en ma direction. Sortant péniblement de ma stupeur, je me remis en mouvement et suivis l'homme.

 

Nous étions presque arrivés aux capsules de sauvetage. Par chance, nous n'avions pas croisé d'autres formations de Sith, seulement quelques individus isolés qui semblaient chercher à éviter les combats. Néanmoins, nous devions les affronter, et nous avions fini par éliminer environ six soldats supplémentaires. Nous étions proches. Il fallait tenir bon. Les capsules se trouvaient à seulement un couloir et quelques salles de nous. Alors que nous traversions une petite infirmerie, nous fûmes arrêtés dans notre course effrénée par un homme en armure de métal à l'allure particulièrement inquiétante. Il était plutôt grand, d'une carrure svelte. Son visage, d'une pâleur presque maladive particulièrement accentuée par un crâne totalement nu, présentait deux yeux sombres. Il ne nous porta pas attention immédiatement. Lorsque nous le croisâmes, il semblait plutôt préoccupé par quelque chose sur le sol. Ou plutôt quelqu'un. Je le vis ensuite relever la tête vers nous, et après avoir passé les doigts le long de son bouc noir, il esquissa un sourire satisfait.

 

« Messieurs. » Salua-t-il d'une voix faussement chaleureuse. « Ca en fait une. » L'homme désigna du doigt ce qui l'intéressait avant que nous n'entrions. C'était un cadavre, celui d'une femme Jedi qui accompagnait le Commandant. « Où sont les autres ? » demanda-t-il ensuite, avançant vers nous. De sa main droite, il souleva un morceau de tissu accroché à l'une des lanières de son armure et saisit un objet cylindrique. « Où est Bastila Shan ? » Son ton impatient était évident alors qu'il s'approchait toujours de nous. Sans hésitation, je vis mon Lieutenant se placer devant moi, s'emparant au passage de mon sabre et adoptant une posture offensive face à notre adversaire, ce qui ne manqua pas d'ailleurs de le faire rire.

 

« Empruntez le sas de droite ! » Me dit alors Trask Ulgo. « Il rallongera un peu le chemin, mais vous devriez rejoindre votre destination très vite. Je verrouillerai la porte dès que vous vous serez sauvé. Retrouvez votre Commandant, soldat ! Allez ! »

 

Malgré le choc du moment, et de l'annonce de mon supérieur, je décidai qu'il n'était plus question de réfléchir à mes actes. J'avais reçu un ordre, il fallait obéir, point. Sans perdre une seconde, j'engageai une foulée soutenue et quittai la petite infirmerie, laissant Ulgo face à cet inconnu. Lorsque la porte se referma derrière moi, je pus néanmoins entendre un son inhabituel, mais pourtant si révélateur : le vrombissement très caractéristique d'un sabre laser. C'était donc bien cela qu'il avait détaché de sa ceinture. Trask n'avait aucune chance. Et moi, il fallait que je me dépêche, sans quoi le Sith allait aussi avoir ma peau. Je courus de toute mes forces à travers le dédale de pièces. J'y mis tellement d'énergie que, lorsque j'ouvris la toute dernière porte vers les capsules, je m'effondrai d'épuisement. Une pression sur mon épaule vint me sortir cependant de ma torpeur. Je saisis instinctivement l'origine de cette sensation, et m'apprêtai à en découdre avec ce mystérieux individu que je n'avais même pas remarqué. Seulement, lorsque je levai les yeux, je reconnus le visage, quelque peu surpris, du Lieutenant Onasi. D'un mouvement délicat, il s'agenouilla pour se mettre à mon niveau.

 

« Du calme, Galhor, du calme. » Dit-il posément. « J'attendais que d'autres rejoignent les capsules. Vous êtes seul, Galhor ? »

 

Je regardai l'homme sans pouvoir répondre, les yeux perdus. J'effectuai des hochements de tête en guise de réponse. Je le vis pousser un soupir défait, avant de se relever.

 

« Alors il ne faut plus s'attarder ici. Venez, Aspirant. Il reste quelques capsules, il faut quitter le vaisseau une bonne fois pour toutes. Bastila a visiblement réussi à atteindre notre aile. Les dernières capsules ont été libérées il y a une vingtaine de minutes. Elles ont sûrement déjà dû atteindre Taris. Ne perdons plus de temps, allons chercher Bastila. »

 

L'homme s'approcha de moi et me tendit une main solidaire, que je saisis aussitôt. Le souffle haletant, je suivis mon supérieur dans l'une des capsules restantes. Nous nous assîmes et nous sanglâmes à toute vitesse. Puis Carth déverrouilla les sécurités et notre capsule fut presque aussi vite éjectée de son alvéole de métal, nous plaquant violemment contre notre siège. Avant que la capsule ne pénètre l'atmosphère de Taris, je pus assister à la triste scène de l'Endar Spire tombant doucement mais sûrement en miettes. J'espérais profondément que nos camarades puissent rejoindre l'aile est, et les capsules qui les attendaient. Toutefois, une partie de moi était persuadée qu'elle n'en connaitrait jamais la réponse. Une nouvelle minute s'écoula, et des secousses plus violentes les unes que les autres me sortirent de mes pensées. Nous entrions dans l'atmosphère. Sur la rangée de sièges qui me faisait face, je voyais Carth s'accrocher tant qu'il pouvait à son collier de sécurité. Je tentai d'en faire autant.

 

Mais soudainement, tout devint noir, silencieux, inexistant. Après tous ces périls, mourir ainsi, c'était tout de même très ironique.

 

 

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Cette souffrance. Elle se propageait dans mon crâne à un rythme effréné. Elle me brûlait les yeux. Ce supplice... Mais était-ce... Cela signifiait-il que j'étais en vie ? Aurais-je survécu ?

 

« Hé. »

 

Un bruit. Une voix.

 

Onasi ?


« Galhor, ouvrez les yeux. »

 

Il fallait que je réagisse. Je ne pouvais pas déterminer le temps écoulé avant que je ne réponde à la sollicitation de Carth. Finalement, j'ouvris les yeux avec difficulté et tentai laborieusement de me redresser. Je sentis immédiatement le bras de Carth soutenir mon dos, m'aidant dans cette tâche périlleuse mais pourtant banale. Ma vision était partiellement voilée. À ce stade, je n'étais pas en mesure de discerner précisément l'endroit où nous nous trouvions, Carth et moi. Tout ce que je pouvais supposer, c'était que nous n'étions pas à l'extérieur. Je distinguais des murs, un plafond et des fenêtres recouvertes de rideaux occultants. Peu à peu, mes yeux recouvrèrent leurs capacités et je pus identifier une table, des chaises, quelques bancs et quelques lits. Mon esprit était encore embrouillé, à tel point que, pendant un bref instant, je crus me trouver à bord de l'Endar Spire, me demandant si tout ce que j'avais vécu précédemment était réel.

 

 « Tenez. » dit Carth Onasi d'une voix prévenante, en me tendant un verre d'eau de sa main libre. Je fixai l'homme pendant quelques secondes, encore désorienté, puis je pris enfin l'objet et le portai à mes lèvres tremblantes.

 

 « Buvez par petites gorgées. » Me recommanda l'homme à côté de moi, ce que je fis docilement.

 

 « Vous m'avez fait peur, Galhor. Pendant un temps, j'ai cru que vous ne vous réveilleriez jamais. »

  

J'écoutais mon supérieur avec peine. J'entendais les mots qu'il prononçait, mais je ne parvenais pas à les assembler et à les assimiler efficacement. Sans réagir à ses paroles, je fis néanmoins une douloureuse tentative de communication :

 

 « Où sommes-nous ? »

 

« Taris. Notre capsule s'est écrasée dans la ville basse. Vous avez perdu connaissance lorsque nous sommes entrés dans l'atmosphère. Les secousses ont été très violentes. Votre tête a reçu un vilain coup et vous a plongé dans une profonde inconscience. »

 

Je tâchais de fixer Carth avec attention.

 

« Au fait, vous souvenez-vous de ce qui s'est passé ? » Demanda le Lieutenant presque abruptement. Je le regardai avec perplexité, l'invitant à clarifier ses pensées. « J'ai connaissance de certaines informations vous concernant. Je crois savoir que vous n'en êtes pas à votre premier coup sur la tête. Et je crois également savoir que vous en subissez des séquelles. »

 

Mon regard se posa sur mes mains alors que je prenais une brève inspiration pour répondre. Je me retrouvais ramené à cet accident, à ma longue convalescence, à mon amnésie... Les souvenirs étaient flous, et cela rendait la réalité du moment encore plus évasive et difficile à accepter. Je ne parvenais pas à faire le deuil d'une partie de ma mémoire, et par conséquent, d'une partie de ma vie. Il ne restait que des fragments épars de cette existence que je ne pouvais pas reconstituer pleinement. Cela n'avait aucun sens, et pourtant, c'était bel et bien réel.

 

« Je ne suis pas plus infirme que je ne l'étais, rassurez-vous mon Lieutenant. » Dis-je finalement, sur la défensive. Une attitude que Carth sembla percevoir.

 

 « Je vous demande simplement comment vous allez, Corem. » Répliqua mon supérieur avec une certaine douceur et une chaleureuse familiarité.

 

« Je me sens encore secoué, mais je crois que je vais bien, Lieutenant. » Lui répondis-je bien plus aimablement. Onasi afficha un sourire bienveillant. A l'évidence, il était soulagé d'entendre cette heureuse nouvelle. « Où sommes-nous, exactement ? » Poursuivis-je.

 

« Dans un vieil appartement laissé à l'abandon. Quand la capsule s'est écrasée dans la ville basse, je me suis dépêché de nous évacuer. Les gangs ont investi toute cette partie de Taris. Les capsules de sauvetage du croiseur républicain qui se sont écrasées sont une formidable occasion pour eux de piller et de capturer. Et je ne parle même pas de la quarantaine Sith qui a été décrétée pendant l'attaque de l'Endar Spire. Ils attendaient tranquillement que les capsules débarquent pour cueillir les survivants. » Carth semblait soudain très préoccupé. Qu'en était-il de Bastila Shan ? Il recouvra toutefois rapidement sa contenance et enchaîna :

 

« Je vous ai transporté dans la ville haute. En plein milieu de la soirée, on a sûrement attiré un peu l'attention, mais beaucoup ont cru simplement que je reconduisais chez lui un camarade de beuverie. Dans le pire des cas, on a fait rire un paquet de Tarsiens. »

 

Nous esquissâmes tous les deux un sourire amusé.

 

« J'ai vagabondé dans la ville haute. Puis je me suis aventuré dans cette tour, qui, sans être totalement insalubre, ne semblait pas particulièrement bien tenue. En explorant, je suis tombé sur cet appartement, la porte à moitié ouverte. Je ne me suis pas posé de questions. Je nous y ai installés. Je me suis dit que si quelqu'un devait revenir ici... eh bien, il nous mettrait dehors, point final. Mais, jusqu'à présent, personne n'est jamais venu, hormis nous deux. Quatre jours ont passé, et nous sommes là, à discuter. »

 

« J'ai été inconscient si longtemps ? » Interrogeai-je avec incrédulité.

 

« Oui. »

 

Je poussai un soupir, puis poursuivis : « Merci, Lieutenant. Je vous dois la vie. » Annonçai-je avec reconnaissance.

 

« Vous n'avez pas à me remercier. C'est mon devoir. Je ne laisse jamais personne derrière moi. »

 

Ces dernières paroles suscitèrent en moi un violent sentiment de regret. Il me renvoyait en pleine figure le sacrifice de Trask Ulgo et la perte de tous mes camarades. Bien entendu, je ne pouvais pas m'en vouloir, mais il était difficile de ne pas se sentir en partie responsable. Je prenais les propos de Carth comme un jugement, même si le pauvre homme n'avait aucune idée de ce qui était arrivé sur le croiseur.

 

« Et maintenant ? » Demandai-je d'un voix fatiguée.

 

« Maintenant que vous êtes conscient, et visiblement valide, je vais partir à la recherche d'informations concernant le crash des autres capsules. Il ne faut pas se leurrer. Si Bastila est encore en vie, elle a dû être capturée par les gangs. »

 

« Ou par les Sith. » Répliquai-je.

 

« Non. Si c'était le cas, ils auraient déjà tous quitté Taris. Il faut miser sur les gangs. Ou autre chose. Mais, clairement, les Sith n'ont pas mis la main sur elle. Pas encore. »

 

Carth s'éloigna de moi et je le vis empoigner sa fameuse veste orange, qu'il enfila prestement. Par instinct, je me levai de la couchette sur laquelle j'avais passé les quatre derniers jours, et me préparai à suivre mon supérieur. Seulement, alors que je me débattais pour enfiler mes bottes, Carth m'adressa une espèce de sifflement étouffé. Je me retournai vers lui, déconcerté.

 

« Vous restez là. Vous êtes de retour parmi nous, mais vous n'êtes pas en état d'explorer les environs. Vous restez ici. Il y a une petite provision de nourriture dans l'un des vestiaires de la cuisinette. Reprenez des forces si vous voulez être utile par la suite. »

 

Le Lieutenant termina en me gratifiant d'un sourire bienveillant, auquel je répondis. Puis il quitta l'appartement, en quête d'informations susceptibles de nous conduire à notre Commandant. Pour ma part, je me conformai aux ordres et restai dans l'appartement. Je fouillai dans les fameux vestiaires et y dénichai une poignée de biscuits secs, quelques fruits et plusieurs morceaux de viande séchée. J'en saisis une portion ainsi qu'un fruit, que je partis grignoter allègrement sur l'une des banquettes de l'appartement. Je profitai du calme offert par cet endroit quelque temps, avant de me mettre sérieusement au travail.

 

Carth revint après environ deux heures. Lorsqu'il franchit le seuil de la porte, je le vis ôter sa veste et la déposer sans ménagement sur le dossier de l'une des chaises disposées autour de la table ronde à laquelle je me trouvais. Puis il dirigea les yeux sur moi et soupira avec lassitude avant de prendre place.

 

« Avez-vous appris quelque chose ? » Demandai-je d'une voix ragaillardie. L'homme fixa le plateau de la table un petit moment, puis répondit très factuellement :

 

« Je suis navré de devoir vous solliciter si vite : vous êtes invité à une petite fête ce soir. »

 

Je levai les yeux, et fronçai les sourcils avec vigueur. Je balayai ensuite la pièce du regard, dans l'espoir de découvrir peut-être le lien qui me permettrait de comprendre ce que Carth venait de m'annoncer. Malheureusement, rien ne vint, et Carth reprit la parole :

 

« Les gangs ont été les premiers à rejoindre les capsules. Ils ont volé tout ce qui pouvait être volé et ils ont capturé tous les survivants. »

 

« Le commandant fait partie de ces survivants ? » Demandai-je raisonnablement. Carth sembla serrer les dents avant de me répondre :

 

« Je n'en ai pas la certitude. Mais j'ai entendu parler d'une prochaine course de fonceurs dans la ville basse, tenue par le gang des Vulkars Noirs. Ce serait la course 'ultime' de la saison, qui aurait été avancée subitement, lorsque les capsules se sont écrasées. »


 « Où voulez-vous en venir ? » Interrogeai-je.

  

« Ils y remettrait cette saison un prix tout à fait exceptionnel. J'ai pensé que ça pouvait être Bastila, mais sans vraiment y croire. Puis quelqu'un a évoqué une 'très haut gradée de la République'. Lorsque Bastila a quitté l'Endar Spire, elle portait l'uniforme, et l'insigne de commandement. Ils ont dû la trouver, la capturer, et la proposer comme prix au gagnant de cette future course de fonceurs. »

 

Je hochai légèrement la tête, le regard perdu. Ce qu'il disait avait du sens. Toutefois, c'était une hypothèse fragile. Mais nous n'avions pas d'autre choix que de la poursuivre.

 

« Drôles de coutumes. » Ajoutai-je sans attendre de retour, les yeux toujours dans le vague. Soudain, je sortis de mes réflexions et fixai résolument mon supérieur :

 

« En ce qui concerne cette fête... ? » Demandai-je. Carth ne parvint pas à masquer un léger sourire avant de livrer une explication.

 

« Il faut que nous allions dans la ville basse. Il faut qu'on s'assure de ce que je suppose. S'il s'avère que l'hypothèse se vérifie, il faut soit là le jour de la course, et avant que les Sith ne s'y intéressent. Il faut qu'on puisse approcher les pilotes, le personnel, mais surtout le prix. Et on n'entre pas dans la ville basse comme bon nous semble. Lors de mes pérégrinations, j'ai fait la connaissance d'une jeune femme éméchée qui travaille pour les Sith, une certaine Sarna. Elle m'a convié à une soirée. Ce serait l'occasion de se procurer des laissez-passer. »

 

« C'est donc vous qui êtes invité. » Rectifiai-je en effectuant des gestes de la main, désignant mon Lieutenant.

 

« Oui, mais je n'irai pas. » Répondit l'homme en premier lieu, les yeux fixés sur moi. « Elle était ronde comme une queue de pelle, Sarna. Elle n'a pas été en mesure de mettre un nom sur mon visage. Je ne suis pas une immense célébrité, mais si je me pointe dans un appartement rempli de Sith, il y a aura forcément quelqu'un pour me reconnaître. »

 

« Mais comment elle va réagir, votre copine, quand elle va me voir moi sur le pas de la porte, alors qu'elle vous attendez vous ? On ne nous confondrait pas si facilement. »

 

« Jouez le culot ! » Me dit-il sur un ton enjoué. Je pus presque penser que la situation l'amusait. « Vous lui dites que vous êtes ce chic type qu'elle a rencontré dans la cantina de la ville haute, et qu'elle a convié à la fameuse soirée. Fraiche comme elle était, il y a de grandes chances qu'elle se laisse berner par votre éloquence. »

 

J'observai mon supérieur avec une pointe de fausse vexation. L'homme, qui soutenait mon regard, semblait durant un court instant confus. Puis, soudainement, ses traits se détendirent, et poussa un rire quelque peu gêné.

 

« Je ne sous-entendais pas que vous n'aviez aucun charisme, Corem. » Se justifia le soldat, en retenant difficilement de rire. J'accompagnai l'homme avec un certain plaisir. Une telle légèreté venait apporter un peu de lumière à notre situation bien sombre.


« Et, si ça peut vous rassurer, elle a convié tout un tas d'illustres inconnus ce soir. » Précisa l'homme avant de fouiller l'une de ses poches pour en sortir une minuscule carte de données, qu'il me tendit :

 

« Le précieux sésame. » Dit-il. « Il contient les coordonnées de l'évènement en question, que vous pouvez consulter depuis le terminal de l'appartement. Une fois que vous serez à l'adresse, vous donnerez la carte à un des responsables, ils devraient vous laisser entrer sans même que vous ayez à convaincre qui que ce soit. J'arrête de vous taquiner : il s'agirait en vérité d'une soirée mondaine entre dignitaires Sith et fonctionnaires Républicains peu scrupuleux. Je ne serais même pas surpris que vous ne croisiez jamais la fameuse Sarna, vu le monde qui grouillera là-bas. »

 

« Il fallait me le dire tout de suite. » Répondis-je avec un sourire soulagé, en saisissant la carte. « Il est donc temps d'aller charmer tous ces voyous. »

 


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