Sword Art Online ; A New Beginning

Pratiquement un mois venait de s’écouler depuis l’incident SAO. Beaucoup de joueurs étaient restés dans la Ville du Départ par peur de mourir. Je les comprenais un peu, mais en ne faisant rien, la situation n’évoluerait pas. J’avais évité récemment tout contact avec d’autres personnes, car les joueurs ayant testé au préalable la bêta étaient considérés comme des tricheurs. On pouvait l’expliquer par le fait du nombre croissant de joueurs qui mourraient depuis le début de ce jeu. Par sentiment d’égoïsme, on a cherché à profiter des avantages de nos connaissances sur la bêta pour prendre de l’avance et nous mettre en sécurité pour les premiers niveaux. On nous reniait, critiquait, mais je savais que j’avais pris la bonne décision. Personne n’avait cherché à m’aider depuis le début alors je ne voyais pas pourquoi je devais en faire autant. C’était une pensée de lâche, mais je devais rester concentré sur mon objectif principal, sortir de cet enfer. Par curiosité, j’étais revenu à la ville et avait fait un tour dans l’enceinte du Monument de la Vie. On pouvait y voir écrit les noms des 10.000 participants sur une géante stèle. Cependant, plusieurs centaines de ces noms étaient barrés avec la cause marquée à côté. Suicide, ce terme revenait souvent et me faisait froid dans le dos. Des rumeurs circulaient dans la ville. Les gens pensaient que le créateur du jeu nous avait mentis et qu’en sautant par-dessus l’île, nous pourrions rejoindre nos familles dans le monde réel. C’était stupéfiant de voir à quel point le manque et la terreur pouvaient nous amener à commettre des actes d’une telle envergure. Je reprenais mon chemin dans les plaines environnantes pour m’entraîner et améliorer mes capacités. Ma dague m’était fort utile, je terrassais chacun de mes adversaires. Ils n’avaient pas le temps de contre-attaquer. Mes principales qualités étaient la vitesse et la furtivité. Il n’existait pas meilleur moyen de combattre en sécurité que d’attaquer en douce. Ce n’était pas la même gloire et le même prestige qu’un combat sanglant et rempli de courage, mais le but était de rester en vie, c’est tout ce qui comptait. Je remarquais depuis un certain temps qu’une personne me dévisageait et me regardait m’entraîner. Je ne devais pas perdre de temps à discuter, mais cette étrange personne m’intriguait et m’empêchait de me concentrer. Après avoir tué le dernier mob de la zone, je repris mon souffle et je le vis s’approcher de moi. Il était vraiment grand, très grand. C’était carrément effrayant. Il était métis et tenait un gigantesque bipède. Son armure était de bonne qualité, surtout à ce niveau de jeu. Je me demandais qu’est-ce qu’une personne comme lui me voulait :

« Hé jeune homme, ça fait un bon bout de temps que je te regarde t’entrainer et t’es plutôt doué dans la maîtrise de ton arme ! »

Je ne lui répondis pas et je le regardais avec méfiance. Il sourit et me tendit la main :

« Oh désolé, je ne me suis pas présenté. Je suis Agil, ravi de te rencontrer ! 

-Hum, de même. Je suis Kuroyami, et je suis flatté de voir que j’ai un certain talent à tes yeux. »

Je n’eus pas le temps de poser ma prochaine question qu’il s’était déjà remis à parler :

« Écoute, je ne vais pas y aller par trente-six chemins, on a besoin de pas mal de joueurs pour aller combattre le premier boss du palier. On est à la recherche des meilleurs soldats du jeu et je pense que tu peux en faire partie. 

-Je ne crois pas que ma place soit parmi vous, je serais probablement mal vu par les autres à cause du titre que mille autres joueurs portent sur eux.

- Tu es un bêta-testeur ? Aucun problème, j’ai déjà réglé cette affaire lors de la réunion pour la conquête du premier palier. Les affaires sont encore tendues, mais personne ne t’en voudra si tu viens parmi nous. Tu ne seras pas le seul, je pense. »

Je ne savais pas si j’étais prêt pour aller affronter un boss, mais ma sœur m’attendait dehors. Je devais la revoir et le chemin qu’on m’offrait semblait le plus court :

« D’accord, j’accepte, mais je ne fais équipe avec personne, je suis un joueur solo et je m’en sors très bien de cette manière. Si les conditions te semblent raisonnables, je rejoins l’expédition temporairement.

-Aucun problème, tu seras libre de faire ce qu’il te plaît après notre victoire. Je te passe ce plan pour que tu puisses connaître l’emplacement du donjon, l’attaque commencera dès demain, à 12h30 ! Prépare-toi bien et sois à l’heure au rendez-vous ! »

Il me fit un signe de la main et partit en direction du village le plus proche. Je me demandais encore si c’était une bonne idée, mais je ne pouvais plus faire machine arrière. Je devais prendre mon courage à deux mains.

J’ai eu beaucoup de mal à m’endormir, probablement le stress de la future bataille qui m’attendait. Il me restait plus qu’à attendre que les heures défilent. Cela faisait qu’un mois que le jeu avait commencé et l’on venait tout juste de trouver l’antre du premier boss. Il restait encore cent autres étages à parcourir et la difficulté allait augmenter exponentiellement. Cette dure réalité était difficile à encaisser, mais nous n’avions pas le choix. Il était nécessaire que des joueurs se lancent dans cette quête périlleuse pour la liberté. Midi venait de retentir, il était temps de me rendre au point de rencontre. Arrivé sur place, nous étions une vingtaine à être présent aux coordonnées. Des gens de tous types étaient présents. Nous avions des épéistes, des manieurs de haches, des lanciers. Une vraie troupe prête à combattre ce monstre. Selon mes souvenirs, le boss que nous allions affronter était « Illfang the Kobold Lord ». Il était très imposant, mais nous étions tout de même nombreux à l’affronter. Je connaissais mes capacités et mes attaques furtives lui feraient très mal. Le leader du groupe se dénommait Diavel, un homme un tantinet prétentieux et sûr de lui, mais j’étais persuadé qu’il était l’homme de la situation. Le genre de personne capable de rallier les troupes dans le pire des moments. Il nous fit un speech pour nous monter le moral et nous entrâmes dans la forteresse ennemie. Nous traversâmes des couloirs, et nous éliminions tous les ennemis qui nous barraient le chemin. Personne ne pouvait résister à une attaque de vingt combattants. J’avais aperçu Agil dans le groupe, mais le temps n’était pas à la causerie et nous devions rester concentrés jusqu'à la fin de la mission. La dernière porte qui nous séparait du boss était droit devant, la tension devenait palpable et je pouvais apercevoir des gouttes de sueur sur le visage de mes camarades. Diavel nous rappela ce que l’on devait faire. Je n’avais reçu aucun ordre de sa part me concernant, comme je l’avais demandé à Agil. Je devais tout simplement rester en vie. Nous entrâmes en trombe dans la chambre du boss. Des colonnes de marbre soutenaient cette gigantesque salle et des fresques ornaient les murs. L’énorme monstre se tenait devant nous et n’attendit pas pour bondir. Le combat démarra. Le bruit du métal se fit entendre, des gémissements résonnèrent, mais personne ne perdait la face. Tout le monde restait concentré sur l’objectif. Les points de vie du boss diminuaient à un rythme constant et personne n’avait péri pour le moment. Tout se passait pour le mieux. Nous venions d’atteindre la dernière barre de vie d’Illfang, comme dans la bêta, il allait changer d’arme et armer de nouveaux coups que les nouveaux joueurs ne pouvaient connaître. Il était temps pour moi d’entrer en jeu. Comme prévu, il changea d’arme, mais je fus pris instantanément de terreur à la vue de ce métal. Ce n’était pas une épée comme je l’attendais, mais un katana. Un autre joueur l’avait remarqué et avait crié aux autres de se mettre à couvert. Le Minotaure arma son coup et frappa de plein fouet Diavel qui s’envola pour percuter le sol dix mètres plus loin. Les techniques et armes utilisées par ce monstre avaient changé. Nous ne pouvions plus nous reposer sur nos connaissances de bêta-testeurs. Je me mis à courir en direction de l’ennemi, me plaça rapidement derrière lui, bondit vers sa nuque et lui asséna un violent coup de dague dans la nuque. Il se mit à hurler et à être désorienté. Il fallait que quelqu’un en profite pour le tuer, mais les joueurs étaient désemparés par le violent choc reçu par leur leader. Cependant, deux personnes se mirent à courir en direction du Minotaure, l’une portait une capuche, et l’autre arborait une tenue d’épéiste simple. L’homme aux cheveux bruns lacéra le ventre du boss avec son épée, recula et cria :

« Switch !! »

Son coéquipier se mit à l’avant et asséna de violents coups de rapière sur le torse du boss. Ils étaient tellement rapides que je ne pouvais pas discerner le nombre total d’attaques. Il changea de position, mais le katana le frôla et laissa apparaître une longue chevelure châtain clair. Ce n’était pas à un homme à qui je faisais face, mais à une jeune fille. Son coéquipier ne tarda pas attaquer le Minotaure et son épée transperça la chair de l’ennemi et remonta le long de son corps. Des polygones rouges apparaissaient au fur et à mesure de son avancée. Les cris du monstre étaient effrayants, il en était de même pour celui de l’attaquant. Le combat prit fin lorsqu’Illfang disparut sous un éclat de débris virtuels.

Ce combat titanesque était enfin fini. Cependant, Diavel avait succombé à ses blessures et était le premier soldat à mourir face à un boss. Je me posais encore des questions sur son attaque frontale. S’il avait joué en équipe, il n’aurait pas été surpris par Illfang et serait encore en vie. Je n’eus pas le temps d’y réfléchir qu’un homme cria en direction de l’homme aux cheveux brun : 

« Tout cela est de ta faute ! Diavel serait encore parmi nous si tu l’avais empêché d’attaquer. Tu nous as dit de reculer, tu savais que quelque chose clochait. »

Des murmures se faisaient entendre, je savais qui il était, mais je ne pouvais pas le défendre, j’étais comme lui :

« C’est un voleur, il voulait s’emparer de l’ultime récompense décernée à la personne qui assène le coup final. Il a volontairement laissé mourir notre leader pour se procurer un item rare.

-Il n’y a qu’un bêta-testeur qui aurait pu remarquer une différence dans les attaques de ce boss, je ne les supporte pas ! Ils ne pensent qu’à eux ! Ils ne valent rien, tous autant qu’ils sont ! »

Les soldats commençaient à porter des injures à cet homme, mais celui-ci ne les regardaient pas, il fixait une icône virtuelle qui venait d’apparaître devant lui. Je m’apprêtais à avancer pour aller le voir, mais Agil mit un bras devant moi pour m’en empêcher. Cet homme mystérieux se mit à rire. On aurait dit qu’il devenait fou. Il se retourna et prit la parole avec confiance :

« Bêta-testeur ? Moi ? Vous me faites bien rire. Ne me comparez pas à ces moins que rien. Je suis au-dessus d’eux. Ils ne m’atteignent pas. Durant la bêta, j’ai arpenté des niveaux qui vous sont encore secret et dont vous n’avez pas même pas idées. »

Son sourire en coin était révélateur de sa ruse. Je connaissais le fonctionnement du jeu, ce qu’il racontait ne pouvait pas être possible, mais je savais où il voulait en venir. Les joueurs incrédules étaient apeurés par ses propos :

« Tu n’es pas normal ! Qui es-tu ?! Tu n’es qu’un tricheur ! Aucun bêta-testeur n’a parlé comme ça auparavant !

-Tricheur ? Bêta-testeur ? »

Il appuya finalement sur cette icône qui était apparue et une cape noire s’enfila automatiquement sur lui. Il nous regarda d’un air meurtrier et prononça les paroles suivantes :

« Vous avez devant vous Kirito, le « Beater » de ce jeu, je me situe au-dessus des autres joueurs et personnes ne peut rivaliser avec mes connaissances. Retenez bien ce nom, car vous le réentendrez prochainement. »

Il se retourna et gravit les escaliers pour pénétrer dans le deuxième palier de l’Aincrad. La fille de tout à l’heure se mit à lui courir derrière et lui parla discrètement. Les autres soldats étaient encore déboussolés par ce qu’il venait de révéler :

« Agil, tu sais comme moi que ce qu’il vient de raconter n’est qu’un tissu de mensonges ?

-Et pourtant, il vient de mettre un terme au conflit des bêta-testeurs en endossant la responsabilité de tous ces autres joueurs.

-C’est vrai… Dis-moi, qui était cette fille qui lui a couru derrière ? Elle était vraiment douée avec sa rapière.

-Elle se prénomme Asuna, et tout comme lui, nous réentendrons parler d’elle bientôt.