Histoire de cendres

Chapitre 5 : Une ombre dans la nuit

1523 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 09:10

Chapitre 5: Une ombre dans la nuit

Je me couchai de bonne heure ce soir-la, et fis mon campement pres du foyer ou j'avais surpris cette femme démente ce matin. Les combats de la journée avaient completement épuisé mes réserves d'énergie mystique; je jugeais nécessaire de me reposer plus qu'a l'accoutumée.

Je m'étais souvent demandé pourquoi la magicka ne se régénérait que par le sommeil. Enfant, je croyais que c'étaient les reves qui opéraient, puisque lancer des sorts exigeait tant de concentration mentale. Je pensais que les expériences intenses et les souvenirs acquis a travers les reves, étant en définitive des simulacres d'expérience, agissaient comme des sortes de tampons pour les vrais souvenirs, pour les vraies facultés mentales. Je me disais que ce tampon permettait par la suite de se concentrer suffisamment pour lancer des sorts sans endommager ces facultés mentales. Ma théorie se basait sur le fait que se souvenir de ses reves requiert, également, un certain degré de concentration. Cette thérorie s'effondrait toute seule a chaque fois que je tentais de l'exprimer par des mots, comme vous pouvez le constater...

Adulte, je ne savais trop que penser: personne n'avait pu réfuter ma théorie des reves, mais personne ne l'avait prise vraiment au sérieux non plus. Tout ce que je savais c'était que les jours ou j'avais épuisé ma magicka, j'avais toujours eu des reves particulierement vivants.

Ce soir-la par exemple, je revais de la nuit ou j'avais été surpris en train de cambrioler la maison d'un noble. J'avais été trahi par un chat qui avait craché en me voyant. Dans mon reve, le chat ne cessait de siffler et cracher alors que j'essayais frénétiquement de le calmer.

Je réalisai que mon reve, une fois de plus, se mélangeait au monde réel, et je me secouai de mon sommeil. Le feu de camp était éteint depuis longtemps, et je promenai mon regard dans la pénombre en essayant de deviner ce qui m'avait réveillé.

Une cacophonie de sifflements, ceux-la bien réels, montaient des profondeurs de la caverne, vers la cage aux esclaves. Je bondis sur mes pieds, cherchant mon casque a tatons. Je me dirigeais prudemment vers la source de la commotion, en tirant lentement mon sabre de facon a faire le moins de bruit possible. Quand j'arrivai devant l'enclos des esclaves, qui était toujours plongé dans la pénombre, les sifflements s'arreterent brusquement. Je m'arretai moi aussi, courbé, plissant les yeux comme pour percer les ténebres. Tout ce que je pouvais distinguer étaient les yeux luminescents des ex-esclaves khajiits, qui brillaient a la lueur d'une torche derriere moi. Ils semblaient tous collés le dos contre la paroi de la caverne, les yeux agrandis de peur, regards fixés vers le milieu de l'enclos. Tous sauf un: alors que mes yeux se faisaient petit a petit a l'obscurité, je crus voir un des khajiits accroupi aucentre de la prison, d'une facon qui me parut étrange. En fait, il (ou elle) semblait etre maintenu au sol.

"Hé," lui lancai-je. "Que se passe.."

Je n'allai pas plus loin, car le Khajiit accroupi bascula soudain en avant, et la silhouette sombre de l'etre qui s'était caché derriere bondit vers moi, en un instant.

Je sentis ma cotte de maille s'écarter, puis une sensation de froid a un endroit inhabituel. Il me fallut une seconde pour réaliser que ma poitrine avait été littéralement ouverte d'un coup de lame et que c'était l'air que je sentai a travers la blessure !Faisant de mon mieux pour ignorer la douleur fulgurante qui se fit sentir aussitot apres, je frappai de taille en un grand arc de cercle maladroit, et ma lame toucha quelque chose. Je ne pouvais toujours rien voir de plus qu'une sorte d'ombre en face de moi, donc je battis rapidement en retraite vers un endroit mieux éclairé. Je recus un coup violent sur le haut de mon casque alors que je dégringolai les marches de l'échelle de bois pour me retrouver a mon point de départ.

Il y avait deux ou trois torches dans la caverne, et je me retournai juste a temps pour voir une forme toute de noir vetue sauter du haut des marches, brandissant au-dessus de sa tete un court sabre menacant -un wakizashi akavirii.Je concentrai l'énergie de mon sort de Froid dans ma main gauche et réussis a saisir son poignet avant que son coup ne porte. Il émit un grognement étouffé de douleur, mais je me rendis compte, trop tard, qu'il avait également un wakizashi dans son autre main: il se défit de mon étreinte d'un coup violent dans mon diaphragme.Perdant désormais beaucoup de sang, je roulai en arriere sous la force du coup et tentai de prendre mes jambes a mon cou, concentrant mon sort de guérison dans ma main et l'appliquant sur mes deux blessures a la fois.

La forme sombre était trop rapide pour moi; je ne pouvais lui échapper. Le coeur battant, je décidai de tenir le terrain et de faire tout ce que je pouvais pour parer ses attaques. Au bout de quelques minutes a faire se croiser et s'entrechoquer nos lames, j'étais dans une situation désespérée. Quelques-un de mes coups avaient porté, mais mon assaillant avait a peine semblé les sentir. Moi en revanche, j'avais quasiment épuisé toute ma magicka pour me soigner; j'estimai qu'il m'en restait juste assez pour me soigner, ou lancer un dernier sort de Froid. Je perdais du sang de plusieurs blessures, et j'étais sur le point de lancer un futile sort de guérison, quand la chance tourna.

Je parvins, je ne sais comment, a repousser en meme temps les deux lames de l'assassin, lui faisant perdre l'équilibre un court instant. Concentrant une fois de plus mon sort de Froid dans la main gauche, je le saisis a la gorge et appuyai. Le givre mortel du sort s'infiltra a travers la fine maille noire de son armure et sur son cou.

Suffoquant, cherchant désespérement de l'air, il joua des avant-bras pour briser l'étau et me rejeter loin de lui. Je voyais bien qu'il ne pouvait plus respirer: ses doigts s'agrippaient a sa gorge, le laissant a ma merci. Je me fendis en avant, lui portant un coup de bas en haut qui lui fit une vilaine entaille depuis l'abdomen jusqu'a l'épaule et a travers le torse.

Au cours de notre lutte, nous nous étions rapproché de la profonde vasque naturelle ou je m'étais lavé plus tot; le coup que je lui portai le fis basculer en arriere,  dans l'eau ou il disparut tout a fait.

Je perdais tant de sang que c'est a peine si je pouvais tenir debout. Je me dirigeai en boitant vers la sortie, en espérant pouvoir m'échapper a temps et alerter un garde. Alors que je quittai la caverne, je jetai un coup d'oeil par-dessus mon épaule, et vis avec effroi l'homme en noir émerger de la mare a quatre pattes, toussant et crachant a travers son masque, essayant de reprendre son souffle. En me voyant, il poussa un juron et batti en retraite, disparaissant de nouveau dans l'eau noire. Je ne m'attardai pas plus, et continuai de courir.

Une fois sorti, je claquai le panneau de bois qui refermait l'entrée de la caverne et m'affalai sur le sol au milieu des champignons luminescents. Je n'en pouvais plus. Je bandai mes blessures du mieux que je pus avec des lambeaux de mes vetements; il ne me restait plus assez de magicka, je le sentais, pour me guérir. Je m'étirai sur le dos, la tete reposant sur l'humus. Je respirai l'odeur épaisse et humide des marais dans la nuit, et contemplai le ciel. Les étoiles scintillantes semblaient s'éteindre une par une, cependant que je perdais conscience.

 

  

 

 

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