Honneur et Amertume

Chapitre 4 : La Bataille de la Marche de la Soif II : Le Berserker

5495 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 28/01/2021 16:45

La sueur couvrait Ioreck avant même que le combat de commence. Le soleil accablant vrillait les yeux et donnait la migraine au nordique, peu habitué à une telle température. Même débarrassé des couches de vêtements encombrante, il cuisait dans son armure à la vapeur de son propre corps. Pire, le contact du cuir et de la maille collait et irritait sa peau. Et bien que l'idée soit tentante, il ne pouvait tout de même se battre nu....


Pour se donner du courage, il songea aux lourdes cohortes de légionnaire qu'il avait croisé à la manœuvre au moment de prendre place sur le champ de bataille. Il les plaignait vraiment, eux, écrasé sous le poids de leur cuirasse d'acier, de leur heaume, de leur bouclier. Mais pourtant stoïque, alignés en lignes impeccables.... Mais comment faisaient-ils ce salauds, à tenir debout immobile dans leur casserole de métal ? Pas une plainte, pas un gémissement. S'ils tenaient le coup en silence, Ioreck le pourrait bien. Il appartenait à l'infanterie de choc après tout, non ? Les troupes de chocs étaient les soldats les plus courageux, c'était connus. Alors si les légionnaires supportaient sans broncher les rayons ardent de l'astre solaire, Ioreck ferait de même. Il allait mépriser la chaleur comme on ne méprise le plus indigne des adversaires ! Il allait leur prouver au légionnaire, qui était bien le plus brave...


Il n'y avait qu'à attendre le début de la bataille sous le soleil qui atteignait peu à peu son zénith. Tout était en place pour les évenements à venir. Ioreck avait assisté de loin aux escarmouches de cavaleries et aux échanges timides flèches et de sortilèges. Juste un échauffement, la véritable issue se scellera ici et bientôt. Les lignes de fantassins n'attendaient plus que le signal du départ. Elles couvrait le fond les flancs de la vallée en une interminable file de têtes... Ioreck espérait que Shaiélaè ne soit pas l'une d'entre elles.. Il ne l'avait pas vu depuis la veille, avant qu'on ne l'envoie mission de reconnaissance. Peut être avait-elle pris part aux échauffourées de la matinée. Son unité serait être mise au repos, gardée en réserve. Au pire patrouillerait-elle autour du champs de bataille. Mais elle éviterais le pire de la tuerie.


Il préférait savoir son amie loin du champs de bataille. Ce n'était pas une guerrière. Elle était douée comme personne avec son arc, évidemment. la petite elfe rivaliserait presque avec Bourlor, cet archer dans le conte où il était le héro. Il était réputé ne jamais manquer sa cible, même lorsqu'il tirait comme un pied. Ioreck adorait cette histoire étant gosse.

Mais même avec cet incroyable talent, la petite elfe restait trop naïve et innocente pour supporter les horreurs de la guerre. Ca ne faisait pas parti de l'esprit des bosmers. Ils avaient une culture de la chasse, pas de la guerre. Pas au sens où les nordiques l'entendaient. Le monde n'était pour eux qu'un jeux, une vaste occasion de s'amuser. Bon, Shaiélaè n'était pas vraiment la plus rieuse de ses congénères... Mais elle gardait cette même naïveté qui réchauffait le cœur de Iorek, l'innocence enfant dans un corps d'adulte qui n'aurait pas poussé complétement.


Comment imaginer que son innocence survivrait un seul instant dans cette vallée, quand elle se rendrait compte à quel point l'équilibre naturel auquel elle était habituée dans la forêt volait en éclat sous la violence des hommes ? C'était facile pour lui, Ioreck. Il acceptait les conséquences comme un mal nécessaire pour que le bien triomphe. Il se battait pour sa famille, sa patrie, des dieux, les valeurs qui lui étaient chères. Si défendre sa terre impliquait de tuer et de mourir dans ce pays étranger, il ferait sans hésiter. Mais quelle motivation poussait Shaiélaè à vouloir verser le sang dans cette vallée aride? la petite elfe n'avait ni terre, ni patrie et sa famille se trouvait de l'autre côté de la frontière.


Elle lui avait confié jadis les raisons de son enrôlement : " Je m'engagerais si tu t'engage. Si la compagnie se bat pour l'Empire, je ferais pareil. " Elle endossait l'uniforme par peur de l'abandon. Combien de temps teindrait une telle motivation dans le chaos de la bataille, lorsque tout se briserait et que sera vie en danger ? Ioreck ne pouvait qu'espérer qu'elle en reste le plus éloignée possible... Pire, il se sentait coupable de l'avoir amenée ici, de ne pas l'avoir découragée...


Pourvu qu'ils aient retiré son unité après la patrouille de cette nuit... Pria Ioreck alors que le remord de ne pas avoir insisté pour lui faire changer d'avis commençait à lui nouer les tripes. Il pesta contre ses angoisses en réalisant qu'elle lui encombraient la tête. Lui qui se vantait de ne ressentir aucune peur à l'aube de la bataille... Il devait chasser tout ça de sa tête, faire le vide. Ioreck respira un bon coup et chassa Shaiélaè de son esprit, pour tâcher de garder les idées claires. 


Pour se changer les idées, il jeta un oeil à ses compagnons autour de lui. Il ne croisa que des regards vides, abrutis par la chaleur et trop étourdis pour ressentir même de la rage à la vue des elfes. Ce n'était rien qu'une armée de zombies en sueur, soigneusement alignés et machinalement agrippés à leurs armes, impatient qu'on les ordonnes d'aller se faire tuer pour cesser enfin d'être planté debout ici. Il y avait là les plus beaux fils de putes que l'Empire pouvait cracher pour sa survie. Ioreck le pensait sans nulle arrogance, il était comme eux après tout. Des nordiques et des orques surtout, taillés pour les chocs frontaux. Et les plus sacrifiables, d'après les mauvaises langues... Les deux affirmation avait sans doute leur fond de vérité.


Tiens, son voisin n'avait pas l'air de très bien tenir la chaleur... C'était Gorzac, un orque plus grand encore que Ioreck, que le cimier en crin de cheval au sommet de heaume grandissait encore. Gorzac était agité. Il ne cessait de pester en essuyant ses mains moites sur ses cuisses . Quelqu'un derrière lui gueula de la fermer, remarque à laquelle l'orque répondit par une injure. Brefs rire dans les rangs, mais Gorzac baissa quand même d'un ton.


Directement à la gauche de Ioreck se trouvait Suzanna, comme lui une ancienne du Lynx-Noir. La pire des garces, qui aimait bien se donner des airs importants. Elle aurait pu être jolie, en portant autre chose qu'une armure et en cessant de passer ses journées à manier la hache. Au lieu de ça elle ressemblait à un garçon manqué et aucun homme ne voudrait jamais d'elle... Quel gâchis...


C'était Hokir que Ioreck voyait de dos juste devant lui. Un homme bizarre, mais qu'il respectait profondément. Un vrai nordique. On ne trouverait pas de guerrier plus pieux que lui dans tout la légion. A sa tête légèrement baissé, Ioreck devina qu'il était occupé à prier sur l'amulette qui gardait attaché autour de la poignée de son épée. Les peintures de guerres dont il couvrait cérémonieusement sa peau valaient le détour également : si Ioreck s'appliquait quelques traits de charbons liés à la graisse pour effrayer l'ennemi, Hokir lui se peignait sur le corps et le visage des motifs complexes à l'aide de pigments divers, tous doté de symbolique magique destinées à le protéger au combat. Le nordique frissonna en remarquant que la sueur suintant du guerrier mystique mettait en péril son chef d'oeuvre corporel. Les peintures sur ses bras nus goutaient et s'estompaient, et il craignait qu'il ne s'agisse d'un mauvais présage pour Hokir...


Ioreck contemplait encore les motifs de la peau de Hokir lorsque l'armée impériale se mit enfin à s'agiter. Des trompes rappelèrent les escadrons de cavalerie légère qui harcelaient les formations elfes sur les flancs et au milieu de la vallée. Les cavaliers se replièrent, laissant sur le terrain des morts qui ne seraient que plus nombreux encore à la fin de la journée. Au son des trompes, des cohortes entières de légionnaires entières s'approchèrent de l'ennemi, de plus en plus près. Puis Ioreck assista a une véritable pluie de feu et de fer lorsque chacun fut à porté. . L'Empire avait monté dans les matinée de légères balistes déployées à la jonction des différentes unités. Elles projetaient des balles de plomb grosse comme le poing sur les troupes ennemies, qui brisaient les écus, les armures et les os. Des javelots, d'innombrables flèches volaient dans les cieux. Les elfes se protégeaient derrière leur bouclier qui ne tardèrent pas à ressembler à des hérissons, tandis que leurs mages dressaient un peu partout de larges barrières protectrices. Le Domaine Aldméri comptait de très nombreux sorciers dans leurs rangs. Les nouvelles recrues des cohortes auxiliaires avaient suivi pendant leur entrainement de nombreux cours théoriques sur la manière d'affronter cet ennemi : les instructeurs conseillaient de jouer la carte de l'attrition, en faisant durer le combat. Les mages s'épuisaient petit à petit, on pouvait ensuite les frapper alors qu'ils étaient incapable de lancer le moindre sortilège. Cette nuée de projectile remplissait exactement ce rôle: chaque barrière levée pour les contrer consommait un peu de leur précieuse énergie, qui leur ferait défaut pour la suite du combat.


On siffla non loin. C'était pour eux cette fois, dirait-on. L'ordre d'avancer, que des officier relayèrent en gueulant dans les rangs. La cohorte se mis en branle et au terme de la marche, s'approcha des lignes ennemis. Un sifflet l'arrêta tout juste hors de portée des flèches ennemis. Devant eux, une cohorte d'infanterie lourde sensée soutenir les troupes de chocs s'était stoppée au plus près des elfes, sans entrer en contact. Ils les harcelaient de javelot tout en supportant flèches sorts aldméri à l'aide de leurs boucliers levés en une impénétrable tortue. Les elfes n'avançaient, ne les attaquaient pas autrement qu'à distance. Sur la défensive, ils attendaient le premier mouvement de l'Empire.


Coup de sifflets. Les troupes de chocs avancèrent. Ioreck empoigna Foyer à deux mains, prêt à frapper. Son cœur battait dans sa poitrine. Non de peur, mais d'excitation. L'adrénaline qui coulait dans ses veines s'apprêtait à prendre le dessus sur sa pensée consciente. La cohorte se déplaçait en marchant. Les troupes de choc s'insérèrent dans la cohorte d'infanterie lourde. Une suite frénétiques de brefs coups de sifflets retentirent aux oreilles du Nordique. Tout comme ses camarades il poussa un rugissement puissant et couru. Oubliée, la chaleur. Oubliée, Shaiélaè, peut être morte dans les escarmouches de la matinée ou perdue au milieu de ces armées gigantesques. Il n'y avait que lui, l'ennemie et l'épée titanesque dans ses mains.


Les rangs de la cohorte d'infanterie lourde s'écartaient pour laisser passer la charge des troupes de choc. Partout ailleurs sur le champs de bataille, les cohortes de choc se faufilaient vers l'ennemi, avec l'honneur de porter le premier coups de la véritable mêlée. . Les flèches tombèrent, fauchèrent leurs premières victimes parmi les compagnons de Ioreck. Ils s'effondraient dans la poussière emportés par leur élan. Les suivants enjambaient les corps sans vies sans s'arrêter. Ioreck défilait en remontant au milieu de sa rangée de légionnaires . Il gueula de plus belle pour impressionner ses garçonnes, stoïques derrière leurs boucliers. Qu'ils voient à qui ils avaient affaire. Les lignes de soldats lourds défilaient une à une, jusqu'à ce qu'il n'y ai plus que quelques mètres de vide entre eux et l'adversaire. Ils s'arrêtèrent un bref instant, juste quelque seconde. Et puis le sifflet sonna. Le nordique hurla, couru de toute ses forces. Il accéléra férocement, pour dépasser ses compagnons, être parmi le premier a frapper l'ennemi .


Une lance transperça la poitrine de Hokir juste devant lui, alors Ioreck passa en tête. Juste à temps pour le choc, les elfes étaient là. Foyer n'attendait que ça depuis le depuis le début de la journée, il n'avait plus qu'à frapper. Et il le fit. Son premier revers dégagea du passage le bouquet de piques de qu'on tentait de lui opposer. L'elfe devant lui se cachait au mieux derrière son bouclier, percé d'un javelot reçu plus tôt lors des échanges de tirs. Il n'avait pas pu le retirer et il le gênait sa parade. Ioreck lui fit payer cher cet inconvénient. Toute l'énergie accumulée pendant sa course, il la déchargea sur l'écu doré en un violent coup de pied. La force du soldat ne suffit pas à soutenir le choc et il se trouva nu face à Foyer. L'épée trancha l'elfe de l'épaule au sternum. Ioreck hurla le nom de Talos, tailla de larges coups de faux, trancha au hasard ce qui se présentait devant lui.


Autour de lui, les autres combattants enfonçaient eux aussi la ligne Aldméri. Ils s'y s'engouffraient. L'attaque était presque suicidaire, mais on les payait pour ca. Ils n'étaient déterminés qu'à faire subir à l'ennemi le plus de dommage possible avant de mourir à leur tour. Ioreck sentit des lames lacérer sa chair. Il n'y prêta pas attention, il sentait à peine la douleur. La soif de sang brouillait ses sens. Derrière eux, la masse uniforme et métallique de la cohorte lourde engagea la charge à son tour, d'un pas lent et implacable.Ils n'avaient que peu de temps pour profiter du chaos engendré par les troupes de choc.


Passé collision initial, les elfes reformaient peu à peu leurs rangs, les refermaient sur les troupiers qui s'étaient enfoncé le plus au cœur de la formation. Ioreck brulait de faire de même, d'avancer plus, toujours tout droit. Un coup de sifflet sonna la retraite et le mouvement de reflux de ses camarades l'entraina vers l'arrière. Pourquoi donc ? se demanda-t-il ivre de combat, inconscient des considérations stratégiques que la féroce lutte pour la vie et la mort cachait à ses yeux. Il tenta d'ignorer l'ordre, mais des bras l'entrainèrent de force vers l'arrière. Impériaux ou elfes, vivant ou mort, tueurs ou blessés, on se bousculait, se piétinait, s'écharpaient à coup de piques et de lames. Ioreck marchait sur des corps sans savoir à qui ils appartenaient, il était écrasé entre les ennemis devant et les alliés derrières. Tant la lutte était dense que les tués restaient debout, entre ciel et terres, bien après qu'ils n'aient rendu leur dernier soupir. Sans trop savoir comment, Ioreck se retrouva derrière une ligne de solides fantassins bardés d'aciers, armés de lourds boucliers de chêne peint et de métal. En sécurité, derrière l'infanterie lourde, qui lentement enfonçait l'armée elfe, une vague après l'autre.. Les épées taillaient comme dans du beurre, boucliers heurtaient les poitrines. les légionnaires avançaient et Ioreck reculait, si bien que la mêlée finit par le distancer. Les mains sur les genoux pour reprendre son souffle, il laissa Foyer tomber à ses pieds, poisseuse de sang. Son cœur battait si vite qu'il ébranlait son être tout entier. Pas plus de huit minutes ne s'étaient écoulées depuis le début de la charge, elles lui semblaient être autant une vie entière qu'un instant fugace.


Trempé de sueur comme s'il venait de s'y noyer, il se laissa tomber assis sur le sol poisseux de sang. l'effort l'accablait encore, alors il se coucha sur le dos. Il étouffait. Ioreck respira longuement, bruyamment, sans chercher à apaiser son souffle. Son esprit vide vagabondait autour des cris des mourants et du chocs de l'acier contre l'acier. Les bruits étaient lointain résonnaient dans son esprit, comme perdu en rêve. Le nordique prenait conscience de sa gorge sec et rapeuse à mesure que l'adrénaline refluait. De ses blessures, aussi. Son torse lui faisait un mal de chien. Trop crevé pour lever la tête, il ne vérifia même pas les dégâts.

Une botte lui tâta le visage. Depuis combien de temps était-il couché ainsi ? Le pied lui secouait la tête et une voix l'appelait. Il l'entendait, sans comprendre qu'elle lui était destinée.


"Ioreck, t'es vivant ?"


"Merde, il est mort..."


"Mais nan, il respire. Ioreck, oh, IORECK !


Ioreck trouva la force de lever le bras pour repousser le pied. Il soupira et accomplit l'effort de lever la tête, éblouie par le soleil. Suzanna et Gorzac étaient penché au dessus de lui. Et Suzanna semblait ressentir un plaisir jouissif en lui piétinant la face. Les troupes de chocs s'étaient regroupées tout autour. Enfin, ce qu'il en restait. Moins que ce que Ioreck esperait, plus que ce à quoi il sa'ttendait.


" Par Ysmir, qu'est ce qu'il fait chaud..." articula Ioreck en bredouillant presque. Gorzac tendit la main pour l'aider à se relever. Ioreck s'en emprara et tira pour se remettre debout lourdement. L'orque comme le nordique titubèrent un moment sous l'effort. Suzanna leur tendit une outre qu'ils se passèrent pour boire avec avidité. Ioreck aurait aimé se verser l'eau sur le visage, mais il préféra l'economiser.


"Allez, du nerf ! " lança énergiquement Suzanna toute aussi en nage que ses deux compagnons. Elle frappa plusieurs fois du plat de son épée contre ses jambières d'acier pour les motiver. "La bataille n'est pas terminée, je vois des elfes encore debout, là-bas ! Il faut qu'on ait l'air frais si on veut qu'ils nous y renvoient !"

Comme pour la contredire, une trompe résonna non-loin.


" Le replis ?" s'étonna Ioreck en reconnaissant l'air qu'il entendait. " On a enfoncé leurs lignes, on leur roule dessus ! Pourquoi est-ce qu'on se replierait ?" 


" Replis ! " confirma un officier qui tâchait de réorganiser les rangs de sa cohorte de troupes de choc. " Il faut se regrouper plus haut, bougez-vous !"


Ils suivirent le capitaine et son sifflet frénétique. Gorzac lâcha un chapelet de juron entre ses dents en pestant contre la chaleur. Sa tête tournait, pas un pet d'ombre à l'horizon. Quand à Ioreck, sa poitrine zébrée d'estafilade lui faisait presque oublier le marteau accablant son crâne. Et un coup reçu à la main propageait une chienne de douleur jusque dans son coude. Il en aurait des cicatrices à exhiber, quand la guerre serait finie...


Ils arrivèrent un peu plus haut au point de rassemblement où les soldats de l'intendance se montra utile en servant rafraichissement en abondance aux combattants exténué. Ioreck les auraient embrassé, il pleurait tant l'eau fraiche comblait sa bouche asséchée. Les voilà les héros de cette bataille ! songea-t-il en réclamant une nouvelle outre à l'un des serveurs. On pansa les blessures, une brancardière appliqua un bandage propre sur son torse. Enfin quelque peu remis, le nordique pu intéresser à l'évolution de la bataille. Une meilleure vue s'offrait à lui d'ici, su l'un des petits coteaux jalonnant le pourtour de vallée dans laquelle l'Empire venait de fixer le Domaine.


Visiblement, les charges des légions n'avaient pas eu grand effet sur l'adversaire. Aucune elle n'avait cédé, tout juste les deux armées avaient elles pivotées l'une sur l'autre dans leur prise, si bien que le flanc droit de la Légion avait avancé pour faire reculer le flanc droit du Domaine, tandis que de l'autre côté, la situation était inverse. Le centre quand à lui restait immobile, embourbé dans un corps-à-corps acharné. Plusieurs cohortes avaient fait mouvement appuyer le mouvement tournant et tenter un débordement, mais de ce que voyait Ioreck, la cavalerie elfe était efficace pour les en empêcher.


Les troupiers se reposèrent un peu. Puis des troupes fraiches vinrent les renforcer. Ils arrivaient de l'arrière, sans doute de la réserve qui se tenait en retrait il ne savait où. La XIIIème légion ce n'était donc pas l'unité de Shaiélaè. La petite elfe et lui appartenaient tout deux à la IXème légion, mais chacun dans une cohorte différente : elle dans la XVème cohorte auxiliaire d'infanterie légère, lui dans la XIème cohorte auxiliaire d'infanterie de choc. Ioreck se demanda où pouvait-elle bien être à cet instant. Pas dans la bataille, espérait-il.

Les restes reformés de la XIème cohorte auxiliaire d'infanterie de choc fut bientôt partie prenante, à mesure que de plus en plus de soldats arrivaient de l'arrière où d'unités mise au repos, d'une légion improvisée assez puissante quoique hétérocyclique. Ioreck pressentait un nouvel assaut dont ils seraient les protagoniste.


" Vous voyez cette colline ? " demanda un officier qui passait à cheval devant eux, lame au clair.


Le nordique la voyait bien : une crête étroite qui fendait sa droite la vallée comme l'étrave d'un navire. Elle se trouvait plus tôt dans la matinée au sein des lignes aldméri mais les mouvements de troupes avaient déplacé le combat à ses pieds. Impossible à présent pour les légions de l'Empire d'avancer plus sans que ce promontoire ne coupe en deux la formation. Les elfes en avaient très pertinemment garni le sommet d'archers bosmers et de divers lanceurs de sort. Dotés d'une vue imprenable sur le terrain en contrebas, ils arrosaient copieusement les troupes de l'Empire à leur portée, forcées de s'immobiliser. 


" La XIIIème légion va nous ouvrir un passage. Escaladons ce tas de merde, tuons ce qui s'y trouve et prenons le sommet ! Pour l'Empire !


Tandis qu'il attendait le signal du deuxième assaut de la journée, le nordique sentait monter en lui la fureur et la soif de sang. Elle éclipsait peu à peu la chaleur et les élancements douloureux de ses blessures. Son corps ne vibrait que de l'impatience du combat à venir


Les légions d'infanteries lourdes bloquées au pied de ma colline relancèrent un furieux assaut. Les elfes refluèrent, gênés par la pente dans leur dos. La ligne s'émietta, se scinda de part et d'autre de l'éperon alors que les légionnaires s'engageaient jusqu'à l'encadrer, au prix de lourdes pertes occasionnées par le déluge de projectiles sur leurs côté et la résistance sauvage des soldats aldmer . L'infanterie lourde tâcha de garder ouvert l'étroit couloir créé entre leur flanc et la pente abrupte de la colline sur ce versant, bouclier dressé par dessus leur tête. Pointant le sommet de son épée, l'officier à cheval ordonna la charge. La horde dépareillée d'auxiliaires et de troupes de réserves se lancèrent sur les pentes. Nul cris de défi ne s'échappa des gorges fatiguées, seulement des grognements haletants. La charge déjà s'essoufflait sur l'escalade. L'ennemi invisible ne se manifestait que par l'invraisemblable quantité de flèches, de sorts, de pierres balancées depuis le sommet. 


N'eut été le devoir à accomplir et la perspective d'une tuerie sanglante à l'arrivée,Ioreck se serait déjà allongé à même le sol pour y dormir deux jours entiers. Il rampait plus qu'il ne marchait. Foyer inutile, il tenait l'épée par la lame dans la main gauche alors la droite tâtonnait sur rochers brulants pour s'y hisser mètre par mètre, centimètre par centimètre. Le souffle rauque du nordique s'échappait chaotiquement de sa bouche. Ses lèvres cherchaient désespérément de l'air qui lui permettrait de continuer encore un peu. En baissant les yeux, il vit Gorzac un peu plus bas, appuyé contre un rocher. Il avait délacé sa tunique pour se mettre torse nu. Elle pendait dans son dos,retenue à la ceinture. Et son armure bazardée au sol semée tout autour de lui alors qu'il reprenait sans elle l'ascension. Ioreck, lui, renonça a se hisser plus haut. Une pause s'imposait, il n'en pouvait plus. Juste un instant, promis... Le sang bourdonnait dans ses oreilles, la réalité s'offrait à lui comme à travers un verre dépoli. Autour de lui, on grimpait ou on mourrait en essayant. Les flèches se plantaient avec un petit bruit mou dans les corps déjà sans vie. Les roches instables glissaient sous le pieds des soldats et qui dégoulinaient en cascade sur ceux qui suivaient. La poussière saturait l'air d'un brouillard ocre imprenable, recouvrait les corps trempés de sueur, asséchait les bouches.


Des hommes qui y prirent part à l'escalade, aucun n'aurait pu dire combien de temps dura-t-elle. Ils avançaient. Malgré les pertes malgré la mort.Maladroitement, lentement. Rocher après rocher, cailloux après cailloux, mort après mort. Parce qu'il le fallait. Que quelqu'un l'avait ordonné. Que en-bas, comptait sur eux pour prendre cette fichue colline. Puis vint le moment où la main d'un soldat ne rencontra que le vide au dessus d'elle. Il avait, le premier, atteint le sommet. D'autres suivirent. Hagard, ahuris d'épuisement, tous auraient tué pour un peu de repos. Et tous le durent. Les elfes là-haut les attendaient. Aux flèches et aux sorts suivirent les coups d'épées. Mais ils étaient de plus à plus a atteindre la cime, de plus en plus à y prendre pied, les jambes tremblantes. Deux milliers d'impériaux s'étaient élancé à l'assaut. De ce nombre, un fraction seulement ne put en contempler le faîte. Mais c'était plus qu'il n'en fallait pour en chasser les elfes qui l'occupaient. A moitié aveugle de la poussière, Ioreck aggripa à deux mains la poignée de son épée et se lança sur l'adversaire, sans nulle intention de faire le moindre quartier. Il lu la peur des archers tandis que l'affrontement tournait au corps à corps et s'en délecta. Les bosmers jetaient leurs arcs et dégainaient leur sabres. Il se jeta sur eux.


"Un dernier et j'arrête..." se disait sans cesse Ioreck a chaque fois qu'il assenait un coup, avant d'en porter un suivant. Fauchant tout autour de lui, Foyer ravageait la masse de chair faiblement armurée des archers et des sorciers elfes. Il arrivait pourtant à trouver encore au fond de lui la force de frapper encore, une dernière fois. Trop lent à s'écarter, un elfe se fit presque couper en deux. Un autre tenter d'opposer un mince sabre damasquiné à la puissance cinétique de l'estramaçon du guerrier. La rustique lame d'acier alla trancher briser le sabre, la main qui le tenait et une bonne partie de la poitrine de son propriétaire.

Il s'apprêtait à pourfendre une archère bosmer lorsqu'il la reconnu, stoppant sa lame de justesse avant de commettre l'erreur fatale.


"Shaiélaè ?" l'appela Ioreck d'une voix hésitante, étourdit de surprise.


"Frappez-les au visage ! " hurla non-loin un soldat impérial anonyme par dessus les cris et le fracas des armes. "Nous verrons bien si les elfes sont encore si mignon après cela !"


L'image disparue aussi vite qu'elle lui était apparue. Non, ce n'était pas elle, clairement. Cheveux trop clairs, nez trop pointu. Cette vision l'emplit de trouble un instant, qui se dissipa presque aussitôt dans la fournaise de la bataille. L'elfe en avait profité pour disparaitre, alors il redoubla d'ardeur sur ceux qui fuyaient devant eux.


Les étendards impérial flottait sur la colline. Les légionnaires à la poursuites des elfes en fuite foulaient au pied ceux du Domaine dans leur implacable rage meurtrière. Tandis que les blessés criaient grâce, les survivants jetèrent bas leurs armes et s'en remirent à la merci des vainqueurs.


Ioreck cessa alors le combat. Le calme revint, la douleur aussi. Le sang engluait le bandage qu'on lui avait fait un peu plus tôt. La brancardière lui avait appliqué un onguent cicatrisant, mais au mal de chien que les coupures lui arrachaient, il devinaient qu'elles s'étaient rouverte pendant l'assaut. Et cette chaleur, elle l'écrasait plus qu'il ne pouvait le supporter... Ioreck se mit à la recherche d'un coin ombragé, pour l'amour des neufs, et ne trouva qu'une petite cabane de berger à présent utilisée pour abriter les blessés. Ils étaient si nombreux et la cabane si petite que la plupart étaient allongés dehors, sous le soleil. Ioreck dût ainsi se passer du luxe d'un peu de repos à l'ombre...


Il retrouva tout de même Suzanna, allongée par dessus Gorzac. Il grognait et jurait tandis qu'elle lui épongeait le bras à l'aide d'un paquet de charpie.


" Comment as-tu fais pour être toujours vivant ? " lui demanda Suzanna en l'entendant arriver, sans même quitter son ouvrage du regard.


"Je n'en ai aucune idée..." répondit Ioreck. Il jeta un œil à la blessure : Ce n'était pas très joli, le coude était broyé presque au point d'être tranché. L'os et les tendons en jaillissaient. Il faudrait de la magie pour le sauver, mais le nordique doutait qu'il puisse retrouver un jour toute sa mobilité.


Ioreck se plaça entre le soleil et l'orc pour protéger ce dernier des rayons du premiers. Suzanna entreprit de dérouler un bandage. Comme elle comprimait toujours la plaie d'une main, elle dut s'aider de ses dents. Ioreck le lui arracha, et s'en chargea lui même. Sans prononcer un mot, Suzanna emmaillota ensuite le bras mutilé, tirant de toute ses forces pour bien serrer le pansement. La douleur crispa les muscles de Gorzac, décupla l'intensité des grognements et des jurons qui s'échappaient de ses lèvres sèches. Sa main valide tenta de dégager Suzanna, mais Ioreck l'intercepta au vol, la retint captive.


" Brancardier !!" hurla-t-il à la cantonade.


" Un brancardier ? " marmonna Suzanna, le visage crispé par l'effort. " Tu crois qu'on a escaladé cette colline avec des putains de brancardiers ? "


Gorzac ne perdit pas connaissance pendant l'opération. mais quand ils eurent finit, il souffalit comme un taureau et son poing serré martelait le sol de rage et de douleur. C'est ce moment ue choisis l'officier pour reparaitre. Toujours vivant, mais sans cheval. Il rassembla les soldats valide, leur ordonna de former une ligne convenable. Le Domaine, dit-il, pouvait encore contre-attaquer par le versant le plus doux.


A contre-coeur, Ioreck et Suzanna se levèrent et joignirent les rangs. Ils se retrouvèrent l'un à côté de l'autre, au deuxième rang de la formation. Résigné, le nordique attendit la contre-attaque, espérant qu'elle ne tarderait pas , qu'on en finisse. Le temps passa sans que le moindre elfe ne pointe le bout de son nez. Une unité de mage de guerre vint les renforcer, accompagnés d'une poignée de guérisseurs. Mais sans qu'un ordre quelconque venu rompre la monotonie ne soit donné pour autant. Attaquer, reculer, rompre les rangs... Tout était valable aux yeux de Ioreck, qui n'aspirer qu'à se soustraire à ce maudit soleil rougegarde. Debout depuis des heures, il en vint à envier les morts qui en étaient libéré, alors que plusieurs légionnaires s'étaient déjà évanoui sur place, terrassé par l'insolation et la déshydratation. Et lui ne pouvait que trépigner sur place, à se demander s'il s'effondrerait avant qu'on ne les fasse bouger, s'il aurait la force de lever le bras le Domaine leur faisait finalement la grâce d'attaquer...


Le Domaine Aldméri ne contre-attaqua jamais. Sentant la bataille perdu, ses commandants préfèrent sauver leurs troupes en les retirant. Epuisés, l'Empire n'eut pas les moyens de se lancer à leur poursuite, mais resta maitre du terrain. Si l'armée elfe n'avait pas été anéantie comme escompté au moins avait-elle subie de lourdes, les rescapés des légions de Martelfell sauvés et l'invasion de la province, enrayée pour le moment. Et Ioreck était encore debout sur la colline alors que dans la plaine, tous célébraient le première vrais victoire remportée par l'Empire de la guerre.


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