La fausse légende

Chapitre 1 : Les mémoires de Link

Chapitre final

6074 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 07/01/2021 19:59

Je m'appelle Link.


Je suis né Hylien et j'ai grandi dans la forêt Kokiri.


Je ne suis pas certain des circonstances qui on amené ma mère Hylienne à s'aventurer dans cette forêt reculée du royaume d'Hyrule et à me confier au Vénérable Arbre Mojo. Mais le fait est que j'ai passé les dix premières années de ma vie dans cette forêt, avec d'autres enfants Kokiri que je considérais comme mes frères — à part peut-être Mido que je n'ai jamais supporté tant il se comportait comme s'il était le chef avec tout le monde.

Cela dit, j'étais particulièrement proche de Saria, qui a toujours été comme une sœur pour moi, qui m'a appris à jouer de l'ocarina et m'a toujours traité avec gentillesse quand les autres me faisaient des brimades parce que j'étais "différent" selon leur chef auto-proclamé.

Nous vivions tous sous la protection du Vénérable Arbre Mojo et des fées qui furent comme des nourrices pour les enfants Kokiri.

Hormis les tourments que me faisaient subir Mido et ses partisans, je n'avais pas à me plaindre de mon existence au sein de cette forêt protectrice. J'avais un chez moi et une famille, en quelque sorte. Et j'étais loin de me douter qu'un jour, je serais appelé à sauvé tout un royaume d'une force maléfique.


Et puis vint ce fameux jour où tout a basculé, où je fus convoqué par le Vénérable Arbre Mojo, ce qui était un honneur pour les Kokiris.

Il s'avérait que quelqu'un de mal intentionné avait jeté une malédiction sur l'Arbre Vénérable afin de l'obliger à lui céder le joyau de notre forêt, l'Émeraude Kokiri. Et donc l'Arbre Mojo m'avait exhorté de venir à bout de cette malédiction qui le rongeait de l'intérieur, même si cela voulait dire que j'allais abréger les souffrances dans mon protecteur. Notre protecteur.

Avant de lâcher son dernier soupir, il me remit la fameuse pierre ancestrale et m'exhorta de me rendre au château d'Hyrule où j'aillai rencontrer mon destin.

Si j'avais su où l'époque où ce "destin" allait m'entraîner, pour rien au monde je n'aurais quitté la forêt de mon enfance.

Mais j'avais promis au Vénérable Arbre Mojo d'honorer ses dernières volontés et une promesse était une promesse. Je fis donc mes adieux à ceux que j'appelais mes frères et sœurs et quittai la forêt où j'ai grandi, les abandonnant à leur sort, privés de la protection de l'Arbre Mojo.


Je découvris alors le royaume d'Hyrule, ses plaines, ses fermes, ses villes et son château dans lequel je devais me rendre, avec ou sans l'autorisation des gardes, et où je fis la connaissance de la princesse Zelda.

Elle me fit part de ses suspicions vis-à-vis d'un individu à l'apparence plutôt sinistre qui ce jour-là était venu prêté allégeance au roi d'Hyrule. Il s'agissait de Ganondorf, roi des Gerudos, une tribu du désert dont il était le seul mâle, et qui, selon les dires de la princesse, convoiterait secrètement le trésor sacré du royaume d'Hyrule, une relique au pouvoirs divins appelée la Triforce qui selon la légende exaucerait le souhait de quiconque poserait la main dessus, même la plus mal intentionnée.

Heureusement, cette relique était gardée dans un autre monde appelé le Saint Royaume et son accès demeurait un mystère pour le commun des mortels.

Pourtant la princesse Zelda m'avait suppliée à empêcher cet homme du désert à mettre la main sur la Triforce et m'avait donc ordonné de réunir les trois pierres ancestrales avant Ganondorf. Selon ses dires, ces trois pierres combinés avec un ocarina magique que la princesse avait en sa possession, seraient les clés pour accéder au Saint-Royaume et donc à la Triforce.

J'avais déjà une de ces pierres en ma possession, l'Émeraude Kokiri. Il me fallait donc récupérer le Rubis Goron au Mont du Péril et le Saphir Zora au domaine du peuple Zora. Il fallu donc que j'aide le peuple Goron à reprendre possession d'une caverne qui leur servait d'unique garde-manger et qui fut infesté de monstres cracheurs de feu. Puis que je vienne au secours d'une princesse du peuple Zora qui avait été avalé par un poisson géant, considéré par les siens comme un dieu protecteur, qu'elle était chargée de nourrir. Ce ne fût pas une tâche facile mais le jeu en valait la chandelle et en plus des pierres que j'étais venu chercher, je gagnai le respect et la sympathie des peuples Goron et Zora, en particulier le chef Darunia qui me traita en frère et la princesse Ruto qui fit de moi son fiancée en me remettant leur joyau respectif.


J'avais donc les trois pierres en ma possession. Ma quête était presque achevé.

Je pris la route pour le château quand je croisa la princesse Zelda en fuite après que Ganondorf ait commis un coup d'État. Elle eut cependant le temps de me remettre son ocarina et suivant ses instructions, je me rendis au Temple du Temps, plaçai les trois pierres réunis sur l'autel, jouai une mélodie avec l'instrument, ouvrant ainsi l'accès vers une salle secrète où j'y trouvai une épée planté sur un socle.

Mon intuition m'indiquait que cette épée allait m'être d'une grande utilité pour ma quête contre le Mal et je n'eus aucune difficulté à la retirer de son socle.

Mais ce faisant, j'avais sans le savoir ouvert l'accès au Saint-Royaume et permis à Ganondorf de s'emparer de la Triforce et de son pouvoir divin, tandis que moi, je fus plongé dans un sommeil qui dura sept ans. Pour avoir sorti son socle une épée légendaire sans avoir l'âge requis pour la manier.

Quelle ne fut ma surprise lorsque je me retrouvas avec un corps d'adulte à mon réveil. Mais les sept années de ma vie qui m'avaient été volés n'étaient rien comparé à ce qui m'attendait à l'extérieur du temple.

La mort et la désolation.


Je me rendis compte que j'avais non seulement permis à un sinistre individu de s'emparer d'un pouvoir divin mais aussi condamné le royaume que je devais défendre à sept années de terreur et de ténèbres.

Et personne n'avait été épargné. Des innocents. Des gens que je considérais comme ma famille. Et d'autres dont j'avais gagné la confiance, pour qu'en retour, je leur impose un règne de Ténèbres et de désolation. Peut-être étaient ils morts dans d'horribles circonstances durant mon sommeil dans le Saint-Royaume.

Certains me diront que je n'étais encore qu'un enfant à cette époque, que je ne savais pas ce que je faisais ou de quoi il en retournait, que je n'avais fait que suivre les instructions d'une princesse pourtant plus avisée que moi ou que j'avais été dupé par un être maléfique et assoiffé de pouvoir. Ils auront peut-être raison, mais cela ne changeait rien. Le mal était fait. Et j'en étais le responsable.

Par ma faute, des gens que j'aimais, des gens qui m'avaient accordé leur confiance ou juste des gens qui n'avaient rien demandé à personne avaient souffert avaient subi les conséquences de mon ignorance et de mon aveuglement. Ils avaient fait les frais de sept années de règne de terreur.

Et c'était à moi de réparer ma faute.


Guidé par un mystérieux personnage qui s'avérera être la princesse Zelda déguisée, je dû me rendre dans des temples cachés au fin fond de la forêt de mon enfance, dans le cœur d'un volcan, au fond d'un lac, dans le royaume des morts et enfin au fin fond du désert où mon ennemi avait vu le jour. Ceci dans le but de saper le pouvoir de Ganondorf, de gagner assez de puissance pour en venir à bout et ainsi ramener la paix et la Lumière sur Hyrule.

Mais je n'eus pas le temps de savourer ma victoire, ni même d'en récolter les lauriers.

À peine Ganondorf fut vaincu et banni dans le Saint-Royaume, la princesse Zelda me pria de lui rendre son ocarina et s'en servit pour me ramener à mon époque.

Je me retrouvais donc à nouveau dans le corps d'un enfant, le jour où j'avais fait la connaissance de la princesse Zelda.


Je pensais alors que je n'avais qu'à lui raconter mon histoire, aussi invraisemblable fut-elle à entendre, et lui expliquer que son plan n'amènerait qu'à la victoire de Ganondorf et de plonger son propre royaume dans les Ténèbres. Je lui avais même suggéré un meilleur plan pour empêcher cela de se produire, comme plutôt que d'utiliser les pierres pour atteindre le Saint Royaume et rendre la Triforce accessible à n'importe qui, les cacher de manière à ce que plus personne ne les trouve ou ne songe à les trouver, pas même Ganondorf. J'avais notamment pensé à jeter le Rubis Goron dans un volcan, le Saphir Zora au fin fond de l'océan et enfin de cacher l'Émeraude Kokiri au fin fond du Bois Perdu, où il était facile de se perdre. Certes, ça allait être des trésors d'une valeur inestimable perdus à jamais, mais si ça pouvait éviter à Hyrule un règne de Ténèbres, j'étais prêt à prendre le risque.

Et puis, j'étais persuadé que les Gorons et les Zoras comprendraient que je les sépare ainsi de leur trésor, surtout si je leur explique ce qui pourrait advenir d'eux si une personne comme Ganondorf mettait la main sur leur trésor, s'en servait pour s'emparer d'un pouvoir divin et ainsi refaire le monde à son image. Après tout, ils ne seraient pas assez bête pour risquer leur vie et leur avenir pour des pierres, aussi précieuses fussent-elles.

De plus, s'il y avait bien une chose que j'ai retenu de mon périple à travers le temps, c'est que peu importe les circonstances, personne ne devait mettre la main sur la Triforce. Même avec les meilleurs intentions du monde. Si on l'a placé dans un lieu aussi inaccessible pour le commun des mortels, c'est qu'il y a une raison. Cette relique ne pouvait être que source de malheur.

J'ai même cru pendant un moment que c'était la raison pour laquelle la Zelda du futur m'avait renvoyé au jour précis où nos destins s'étaient croisés, pour l'empêcher de commettre une erreur qui allait plongé son royaume dans les Ténèbres pendant pas moins de sept ans.


Mais à ma grande surprise, la princesse Zelda du présent refusait de croire à mon histoire ou même d'écouter mes suggestions concernant les pierres ancestrales. Pire, elle insistait pour que je fasse ce qu'elle disait, que je lui ramène les pierres afin qu'elle puisse ouvrir l'accès au Saint-Royaume et utiliser la Triforce pour anéantir Ganondorf avant qu'il ne mette à exécution ses plans de conquêtes, prétextant que lui ou quelqu'un d'autre trouverait les pierres d'une manière ou d'un autre si on agissait à ma façon. Elle affirmait aussi que si mon histoire était réel et que Ganondorf projetait bel et bien un coup d'État contre le roi d'Hyrule comme je le lui avais prédit, ça lui ferait une raison légitime d'utiliser la Triforce contre lui.

Pendant un moment, j'ai cru que la Zelda du futur m'avait renvoyé à la mauvaise époque ou dans une réalité alternative, que la Zelda à qui je faisais face n'étais pas celle que j'avais rencontré le jour où j'ai quitté ma forêt pour rencontrer mon destin. Puis je me suis souvenu que c'était bien les paroles de Zelda que j'ai rencontré la première fois, de mettre la main sur la Triforce avant Ganondorf et de s'en servir comme arme contre lui.

C'est alors que j'eu un aperçu du vrai visage de la princesse Zelda. Et me sentit idiot de ne pas m'en être aperçu plus tôt.


J'avais compris ce jour-là que le Mal que je me devais de combattre ne prenait toujours la forme d'un homme vêtu de noir et au regard empli de haine et de malice, ni celle d'un démon gigantesque à tête de cochon. Il pouvait tout aussi bien prendre l'apparence d'une princesse au regard angélique, d'apparence fragile et innocente.

J'en été même venu à penser que l'ennemi que j'avais affronté tout au long de mon périple n'était pas le vrai ennemi.

Oui, Ganondorf convoitait le pouvoir de la Triforce et le voulait pour son propre compte. Oui, il avait jeté une malédiction sur le Vénérable Arbre Mojo ainsi que sur Jabu-Jabu, le poisson que les Zoras vénéraient en dieu protecteur, et il avait condamné l'accès au garde-manger des Gorons après y avoir enfermé des monstres cracheurs de feu, ce juste en représailles de ne pas lui avoir remis les pierres ancestrales. Et oui, il avait orchestré un coup d'État contre le roi afin de prendre le pouvoir. Et les sept années de terreurs et de Ténèbres bel et bien de son fait.

Mais Zelda ? S'était-elle souciée du malheur qui frappait les Kokiris, les Gorons et les Zoras ? Y avait-elle prêté attention ne serait-ce qu'une fois avant de réclamer leur pierre ? Ceux sont ses sujets après tout. Et une princesse digne de ce nom ne devrait-elle pas se soucier du bien-être de ses sujets avant tout, quelle que soit leur race ? Ou bien s'intéressait-elle juste à leurs joyaux et aux portes qu'ils allaient lui ouvrir ? Et si c'était le cas, en quoi cela la rendrait différente de Ganondorf qu'elle cherche tant à mettre hors d'état de nuire ?

Et avant que Ganondorf ne mette à exécution son coup d'État, qu'avait-elle au juste contre lui ? Hormis le fait de venir du désert et d'une tribu de voleurs, d'avoir une sale bobine ou qu'elle fasse des rêves soi-disant prémonitoires, avait-elle une raison légitime de le soupçonner ? Autant que je m'en souvienne, Ganondorf a plutôt été bien reçu par les Hyliens avant qu'il prenne le pouvoir. Surtout pour quelqu'un dont les termes "malfaisant" et "fourbes" étaient inscrits sur son visage. Ses méfaits à l'encontre de l'Arbre Mojo ainsi que des peuples Gorons et Zoras étant restés obscurs à la population hylienne, même durant son règne de terreur. Cette crapule avait eu droit à une audience avec le roi d'Hyrule tandis que moi, simple enfant de la forêt, j'ai dû m'infiltrer dans le château et tromper la vigilance des gardes pour aller rencontrer la princesse.

Je m'en souviens même qu'avant même de connaître le nom de mon ennemi, j'en avais légitimement plus contre lui que Zelda le jour où j'ai fait sa connaissance, rien que pour ce qu'il avait infligé au Vénérable Arbre Mojo. Et pourtant, elle agissait comme si elle était la plus concernée dans l'histoire.


Et en y réfléchissant, comment une princesse aussi avisée et clairvoyante que Zelda, surtout pour son âge, ait pu concevoir un plan aussi grossier que d'ouvrir la voie vers une relique sacrée si le but est d'empêcher son ennemi d'y mettre la main dessus ? Pour en plus s'en servir comme d'une arme contre Ganondorf à qui il reproche principalement d'avoir une sale tronche ? Encore fois, en quoi cela la rendait différente, si ce n'est meilleure que son ennemi ?

Rien que d'ouvrir la voie vers une relique au pouvoir divin dont personne ne doit s'en emparer, c'est le genre d'erreur que commettrait un gamin impétueux, obstiné et imprudent, comme la princesse des Zoras, Ruto — et je sais de quoi je parle pour avoir dû la supporter pendant qu'on était dans le ventre de son "dieu" — et le pire qu'elle ait fait de sa vie a été de se laisser avaler par un poisson géant. Ça ou me choisir comme son fiancé sur un coup de tête.

Mais tout ça pour dire que ça ne pouvait être le fait d'une princesse comme Zelda, réputée pour sa sagesse et sa clairvoyance précoces.


Et puis il y avait la Zelda du futur qui avait survécu aux sept années de règne de terreurs de Ganondorf et qui a pu tromper sa vigilance durant tout ce temps en se déguisant en homme. Et il lui suffit de me révéler sa vraie identité pour qu'elle se fasse capturer et retenue prisonnière par Ganondorf en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Peut-être avions nous sous-estimé l'intelligence de notre ennemi, mais cela reste bizarre venant de quelqu'un qui a vécu assez longtemps sous son joug pour échapper à sa vigilance et déjouer ses pièges. Cela n'aurait pas été plus sage et prudent de me révéler sa vraie identité une fois Ganondorf mis hors d'état de nuire ?

J'en viens même à me demander si elle ne s'était pas servie de moi durant toutes ces années. Après avoir vécu sept ans de Ténèbres sous le joug de Ganondorf, elle a dû acquérir assez d'expériences, de connaissances et de savoir-faire pour saper son pouvoir. Nettement plus que moi qui a été plongé dans un sommeil dans le Saint Royaume durant tout ce temps. Elle l'a même démontré à mon réveil. Je me souviens, à chaque fois que je devais me rendre à un temple pour avancer dans ma quête — temples qui étaient loin d'être facile d'accès, je peux vous le garantir, certains étant même farouchement gardés par les sbires de Ganondorf — elle m'y attendait, tranquille, comme si elle avait pris un raccourci dont elle seule connaissait l'existence. Elle restait le temps de m'enseigner une mélodie pour que j'accède plus facilement au temple que je viens d'atteindre — ce qui m'aurait utile avant de m'obliger un traverser un désert ou d'affronter des gardes armés jusqu'aux dents et faisant deux fois ma taille — avant de disparaître sans laisser de trace de son passage.

Toutes les fois où elle aurait pu m'aider dans ma quête !

Je suis même prêt à parier que son discours à base de "je me sens responsable de ce qui s'est passé, je te renvoie à ton époque pour que tu puisses réparer mes erreurs" c'était du pipeau. Que ce n'était qu'un prétexte pour un prétexte après que j'ai accompli tout le boulot pour elle et qu'elle puisse s'en attribuer tous les mérites. Ce ne serait guère surprenant, maintenant que j'y pense. Les seuls qui furent au courant de mes exploits pour délivrer Hyrule des Ténèbres, ce furent les sages que j'ai dû réveiller dans leur temple respectif. Sages que je soupçonne ne plus appartenir à ce monde depuis belle lurette.

Mais bon, j'admets, ce ne sont que des suppositions. Et je ne compte nullement plonger Hyrule à nouveau dans les Ténèbres pour en avoir le cœur net.


Le fait est que depuis mon retour du futur, je commençai à avoir des doutes sur la bonté et la sincérité de la princesse Zelda. Celle-là même pour laquelle, je dois l'admettre, j'étais prêt à décrocher la Lune pour ses beaux yeux.

Il y avait quand même une part de vérité dans ce qu'elle disait. D'une manière ou d'une autre, Ganondorf mettrait la main sur les pierres ancestrales et l'ocarina du Temps pour pouvoir s'emparer de la Triforce si je ne faisais rien pour l'en empêcher.

Et puis si les histoires de voyage dans le temps ne suffisaient pas à convaincre une princesse qui elle croit dur comme fer à des rêves soi disant "prophétiques", en quoi suffiraient-elles à convaincre des gens plus terre-à-terre que moi ? En quoi seraient-elles efficaces pour prouver la culpabilité d'une personne qui n'avait officiellement commis aucun méfait contre le royaume d'Hyrule ? Et même si ça marchait, est-ce que je ne risquai de m'incriminer moi-même en expliquant que c'est à cause de moi que Ganondorf ait pu s'emparer de la Triforce ?

J'étais perdant dans tous les cas.


Je m'en allai donc au Mont du Péril et au domaine Zora, j'affrontai les monstres infestant la caverne Dodongo et le ventre de Jabu-Jabu et gagnai ainsi le respect et la sympathie des peuples Goron et Zora, notamment l'amitié du chef Darunia et l'amour (bien que infantile) de la princesse Ruto en échange de leur trésor. Exactement comme la première fois.

Sauf que cette fois, je ne retournai pas au château.

À ma place, j'achetai une jument dans une ferme de la plaine que j'ai appris à connaître au cours de mon aventure. Une jument qui allait devenir ma fidèle Epona.

Puis je m'en allai en exil, quittant Hyrule pour ne plus jamais y revenir. Je m'aventurai dans des contrées lointaines où personne n'avait jamais entendu parler de la Triforce ni du Saint-Royaume et ignorait la vraie valeur des pierres ancestrales que je me trimbalais.


Et conformément à ce que j'avais en tête, "j'égarai" ces pierres de manière à ce personne ne puisse les trouver, même en remuant ciel et terre.

Je mentirai en disant qu'égarer les pierres fut aussi facile à dire qu'à faire. Ce ne fut pas tant le geste en lui-même, le plus dur. N'importe quel idiot pouvait jeter un caillou dans un étang, une crevasse ou du sommet d'une falaise. Non, ce fut ce que ce geste impliquait qui fut difficile à surmonter. En me séparant des pierres ancestrales, je ne pus m'empêcher de penser à ceux qui me les avait confier, à ce qui me liait à eux et ceux que représentaient leur pierre lorsqu'ils m'en avaient fait cadeau. Je pensai au Vénérable Arbre Mojo qui fut le seul "père" que j'ai jamais eu, qui m'avait confié l'Émeraude Kokiri dans son dernier soupir et comptait sur moi pour protéger Hyrule du Mal dont il avait la première victime. Je pensai à Darunia, le chef des Gorons, certes bourrin mais non moins amical et honnête, qui m'avait remis le Rubis Goron en gage d'amitié ainsi qu'en remerciement d'avoir à nouveau permis l'accès de la caverne à son peuple. Et enfin je pensai à Ruto, la princesse Zora, certes capricieuse et prétentieuse sur les bords mais qui sait se montrer reconnaissante dès lors qu'on gagnait son estime et sa sympathie, et qui par conséquent m'avait offert le Saphir Zora non seulement en guise de fiançailles mais aussi pour me remercier d'avoir veillé sur sa protection quand on était dans le ventre de Jabu-Jabu. D'ailleurs, quand j'appris plus tard ce qui était advenu de Zelda, Ruto me parut soudain plus supportable et avenante.

Ce fut donc comme si en égarant les pierres, j'avais enterré, jeté dans les flammes ou dans l'océan une partie de mon âme. Je me consolai en me rappelant que j'allais leur épargner, à eux et à leur peuple respectif, un règne de ténèbres et un destin tragique. Que j'allai empêcher toute personne mal intentionnée de se servir des pierres contre eux. Mais cela ne changeait rien au fait que je me sentais comme mort de l'intérieur, une fois m'être débarrassé des pierres.

Il ne me restait plus que ma fidèle Epona et l'ocarina que Saria m'avait offert le jour de mon départ pour m'accompagner dans mes aventures et garder la tête sur les épaules.


Je croisai sur ma route un mystérieux lutin qui me joua des vilains tours mais que je parvint à arrêter et à raisonner avec l'aide d'un pas moins étrange vendeur masque, et ce avant que le lutin rendu fou par le masque qu'il portait ne provoque une apocalypse. Une fois de plus, j'avais sauvé le monde d'une entité maléfique et hormis le lutin et le vendeur de masques, personne n'en sût jamais rien. Au moins j'eut plus de succès cette fois. Et puis cette mésaventure m'avait permis de me sentir à nouveau vivant, en plus de m'être fait de nouveaux amis.

Et puis je m'installai dans un village forestier, me rappelant la forêt Kokiri, où je fus chaleureusement recueilli par les habitants. J'y travaillai en temps que garçon de ferme et épousai une fille de mon village quand nous fumes en âge de nous marier.

À l'heure où j'écris ces lignes, elle attend son premier enfant. Notre premier enfant.

Serait-ce une fille ou un garçon ? Comment allons nous l'appeler ? On verra bien. Ce que j'attend le plus pour l'instant c'est le jour de sa naissance. Et de voir ce bout de chou grandir, que je puisse l'enseigner à jouer de l'ocarina, à monter à cheval, à tirer à l'arc et à manier l'épée. On ne sait jamais, ça pourrait lui être utile un jour ou l'autre.

Je reconnais cependant avoir été assez vague concernant mes origines. Aux yeux des villageois et de ma femme, je ne suis qu'un jeune chevalier déchu qui fut contraint de fuir un royaume ravagé par la guerre.


Quant à ce qui était advenu d'Hyrule depuis mon départ, je ne le sus que plus tard, un soir d'orage, lorsque ma femme et moi recevons la visite de deux voyageurs qui avaient été surpris par la pluie alors qu'ils passèrent dans le coin.

L'un d'eux était un ancien garde du château, maintenant devenu un déserteur suite aux événements qui avaient ébranlé Hyrule durant mon absence.

L'autre était une femme Gerudo, la tribu de Ganondorf, également en cavale. Heureusement, il s'agissait de Nabooru, une voleuse Gerudo dissidente, qui ne portait nullement Ganondorf dans son cœur et cautionnait encore moins ses plans de conquête... du moins avant que des sorcières jumelles ne la capturent, ne lui lavent le cerveau et en fasse le second en chef de mon ennemi. J'ai pu m'en faire une alliée, toutefois et ai même parvenu à la libérer de l'emprise des sorcières.

Mais c'était dans un futur alternatif, où son roi avait pris le pouvoir sur Hyrule et s'était octroyé un pouvoir divin. Donc je compris qu'elle ne m'ait pas reconnu et n'ait aucun souvenir de mon combat contre les sorcières. Cela dit, elle était toujours aussi belle que dans mes souvenirs. Et je ne put m'empêcher de remarquer qu'elle semblait très intime avec son ami déserteur.


Tandis que ma femme et moi leur offrions de quoi se réchauffer, j'osai leur demandai ce qui les avaient amenés si loin d'Hyrule.

C'est alors que j'appris que le jour de mon départ, Ganondorf avait bien commis son coup d'État et obligé la princesse Zelda de s'enfuir. Mais sans les pierres ancestrales et l'ocarina du Temps, il ne pût accéder au Saint Royaume et donc ne pût s'emparer de la Triforce et de son pouvoir divin.

Son règne fut par conséquent de courte durée. Le temps pour la population hylienne de se révolter et pour Zelda de rallier les rebelles. Il était clair que personne dans Hyrule ne voulait pour monarque un régicide doublé d'un usurpateur et d'un profanateur.

Au moins ça aura prouvé qu'il n'avait nullement besoin de Triforce, d'épée légendaires, de Héros du Temps ou de sages pour venir à bout du roi des Gerudos.

Ainsi Zelda put récupérer le trône de son père et fut couronnée reine d'Hyrule. Quant à Ganondorf, de ce que j'ai compris, il croupirait jusqu'à la fin des séjours le cachot le plus obscur qui soit du royaume. Un destin pas très différent de ce qui l'attendait dans un futur alternatif.

Mais à peine Zelda avait-elle repris le pouvoir, elle avait imposé à son tour un règne de terreur, traquant et persécutant même les présumés traîtres d'Hyrule et partisans de Ganondorf. C'était ce qui avait poussé Nabooru et son ami le garde-déserteur à fuir le pays ensemble, eux qui avaient pourtant rejoint sa cause pour libérer Hyrule du joug de Ganondorf. Car apparement, même les alliées de Zelda ne voyaient plus en elle qu'un tyran et risquaient leur tête pour avoir osé le dire à haute voix.

Moi qui voulais épargner à Hyrule un règne de terreur, j'ai la désagréable impression d'avoir encore une fois tout fait de travers. Quel piètre héros je faisais !

Je m'en voulus de également que Nabooru et son ami ait dû fuir Hyrule après avoir contribué à sa libération et leur proposai avec ma femme l'hospitalité dans note village. Ils refusèrent poliment, clamant qu'ils savaient déjà où trouver refuge et refaire leur vie, loin du pouvoir et des intrigues politiques. Je leur souhaitai donc de faire bon voyage le lendemain.

J'appris par la même occasion que la princesse, enfin la reine Zelda devrais-je dire, avait mit un prix sur ma tête pour trahison envers Hyrule et sa couronne. Elle avait fait de moi l'ennemi public numéro un, après Ganondorf, du royaume où je suis né.

J'en déduis qu'elle m'en veut encore de ne pas lui avoir remis les pierres comme elle me l'avait demandé.


J'appris aussi de l'aveu du garde-déserteur la vérité sur la famille royale de Zelda. Une vérité qui avait tôt fait de confirmer mes craintes.

Durant des siècles, la famille royale se prétendaient être les protecteurs du Saint-Royaume alors qu'en réalité, ils étaient les premiers à convoiter les pouvoir de la Triforce afin d'étendre leur empire à travers le monde et d'écraser leurs ennemis de manière irrémédiable. Ce qui expliquait que leur château et leur capitale furent bâti à proximité du Temple du Temps. Ils savaient depuis le début que ce temple était la porte vers le Saint-Royaume. Ils leur manquaient juste les clés.

Au cours de leur règne, la famille royale avait lancé des guerres contre les peuples voisins afin de mettre la main sur les pierres ancestrales, ce qui avait amené à l'éradication presque totale de certains, comme les Sheikahs, et à l'expulsion d'autres vers des contrées moins hospitaliers, comme les Gerudos. Jusqu'à ce que le père de Zelda, en eut assez de faire couler le sang de braves Hyliens et décida donc de déclarer la paix avec les peuples restant et d'unifier le royaume d'Hyrule, espérant qu'avec le temps, les peuples voisins lui feront assez confiance pour lui remettre d'eux même les pierres ancestrales tant convoités.

Mais ce jour n'arriva jamais et en vieillissant, le roi se fit impatient. Il avait donc sollicité le roi des Gerudos de récupérer pour lui les pierres, lui promettant en échange une terre plus avenante pour son peuple. Je compris alors que celui que j'avais considéré comme mon ennemi juré avait aussi été le pion d'un monarque avide de pouvoir. J'en eu presque de la peine. Et puis, à en croire Nabooru, Ganondorf avait vite compris de quoi il en retournait en réalité, s'était laissé séduire par le pouvoir absolu et décidé de s'emparer de la Triforce pour son propre compte. Son coup d'État était ni plus ni moins que la concrétisation de sa scission avec le roi d'Hyrule.

La princesse Zelda était l'une des rares à se douter que cette collaboration serait voué à l'échec. Pour cause, elle nourrissait une méfiance envers les gens du désert, déjà réputés pour être des voleurs sans scrupules et n'appréciait pas que son père remette le destin de leur famille et de leur royaume entre les mains d'un tel étranger. Pour autant, elle ne désapprouvait pas la quête de pouvoir absolu de son père ou de ses ancêtres. Bien au contraire. Elle s'était même juré d'accomplir ce que ces ancêtres n'avait pas réussir à réaliser et en avait fait son obsession au fil des années.

Et maintenant, elle était contrarié qu'un tel projet ne puisse se concrétiser et en avait après ceux qui lui avaient privé d'un tel honneur. En particulier moi, en qui elle avait confiance. D'où la mise à prix de ma tête.


Cela me faisait une bonne raison de ne pas rentrer au pays. Pas tant que Zelda régnerait. Je me doutais qu'elle ne ferrait pas de cadeau si je me montrer à nouveau.

De toutes façons, je me plaisait trop bien dans ce petit village, avec mes nouveaux amis, ma femme et la petite famille que j'étais sur le point de fonder.

Et puis, maintenant que Zelda avait révélé son vrai visage, il n'était plus question que je lui fasse la courbette, même si elle m'accordait son pardon et me graciait. Autant lécher les bottes d'un Moblin. Jamais plus je ne me laisserai avoir par ses airs faussement innocents et angéliques, pas en sachant qu'elle diablesse se cachait derrière. Même la forme bestiale de Ganondorf me parût moins repoussante par comparaison.


Cependant, je ne pus m'empêcher de penser aux gens pour qui je comptais réellement.

Mon amie d'enfance Saria qui a toujours été une sœur pour moi et dont j'ai encore l'ocarina qu'elle m'a offert le jour de mon départ pour le château d'Hyrule.

Mon ami Darunia qui voyait en moi un frère et qui dans un futur alternatif donnera mon nom à son fils.

Mon ex-fiancée Ruto à qui je viens de commettre une infidélité alors qu'il s'avérait que j'étais vraiment l'amour de sa vie.

Et même Malon, la fermière qui m'a si généreusement céder sa jument, ma fidèle Epona.

Toutes ces personnes me manquent. La gentillesse de Saria. L'optimisme de Malon. Même le caractère difficile de Ruto et même le manque de finesse de Darunia me manquent. Après tout, c'était ce qui faisait leur plus grande force. Et puis eux m'avaient témoignés leur gratitude mieux que ne l'a jamais fait Zelda, même dans un futur alternatif.

Et pourtant, je m'en veux d'avoir trahi leur confiance et de ne pas avoir été à la hauteur de leurs espoirs. Je m'en veux de les avoir abandonné à leur sort, à une princesse aussi tyrannique si ce n'est plus que l'homme qui menaçait son royaume. Je me sens responsable de ce qui a pu leur arriver et je n'ose imaginer leur déception, peut-être même leur colère, quand ils apprirent que j'ai "trahi" Hyrule.

Je ne peux demander leur pardon. Seulement espérer qu'ils s'en soient sorti malgré tout. Que Malon ait toujours sa ferme et les animaux qu'elle chéri tant. Que Saria veille sur les enfants Kokiris comme elle l'a fait pour moi. Que Darunia continue de veiller sur le peuple Goron la tête haute. Que Ruto règne sur le peuple Zora autant avec la fermeté qui lui est propre qu'avec justesse. Et aussi qu'elle ait pu trouver un fiancé qui soit digne d'elle.

Et je veux aussi qu'ils sachent que quoi j'ai put faire pour sauver Hyrule, que ce fut dans ce temps présent ou dans un futur alternatif, c'était bel et bien pour eux.


C'est ce qui m'amène à l'écriture de ses lignes. Ainsi, je puis me confesser, soulager ma conscience et me libérer du fardeau qui pesait sur moi toutes ces années.

Et aussi pour qu'un jour, quelqu'un comprenne la vérité en lisant ses mémoires.

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