Your blood

Chapitre 1 : Entretien

13187 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 12/02/2019 17:26

Le taxi s’immobilisa sur le parking du Fangtasia. Mur gris, enseigne lumineuse rouge, tapis assorti. Il s’agissait du club de nuit dans lequel je rêvais d’aller depuis plusieurs mois. Les les vampires étaient sortis de l’ombre grâce à la création du Trueblood, du sang de synthèse deux ans auparavant.

Depuis l’annonce de leur existence, j’avais toujours eu l’envie secrète de les côtoyer. Ils me fascinaient et observer leur monde à travers mon écran d’ordinateur n’était plus suffisant pour échapper à mon existence fade et morose. En outre, trop de questions les concernant demeuraient sans réponse. Je présumais qu’ils ne nous donnaient que des miettes à leur sujet.

La Ligue des Droits des Vampires œuvrait pour leur faire reconnaitre de véritables droits dans notre société. Elle était présidée par un conseil de plusieurs membres. Ils pouvaient désormais être officiellement propriétaires, travailleurs et payer des impôts comme tout bons citoyens.

Jusqu’à cette nuit, je n’en avais encore jamais rencontré. Ils se faisaient extrêmement rares là où je vivais, à Miami. Trop ensoleillé pour cette population. Jamais je n’avais eu l’intention de déménager de ma ville natale auparavant, mais en lisant sur le fangtasia.com qu’Eric Northman, le tenancier du Fangtasia, recherchait un nouvel assistant de jour, j’avais sauté dans le premier avion pour Boston.

Autant dire que cette opportunité tombait à pic. Mon contrat dans l’agence notariale dans laquelle je bossais en tant que secrétaire standardiste avait pris fin la semaine précédente. Mes parents avaient hâte que je prenne mon indépendance. Sophia, ma meilleure amie, venait d’emménager à Londres avec son mari. Bref, rien ne me retenais plus vraiment à Miami.

Eric Northman, était l’un des plus riches vampires d’Amérique du Nord. On le disait multimillionnaire. Son ascension, que j’avais suivie à distance sur internet, m’avait toujours fascinée, autant que son physique de dieu grec d’ailleurs… Je ne savais pas pourquoi c’était sur ce type que j’avais littéralement flashé. Je l’avais vu pour la première fois dans l’un des spots de la Ligue pour que son espèce obtienne le droit de vote. J’avais été littéralement alpaguée par ses yeux bleus. Chaque fois que je revoyais le spot, mon cœur s’emballait comme un fou. Depuis lors, je n’avais cessé de chercher dans la presse tout ce que je pouvais trouver sur lui. Et ça, je n’en avais parlé à personne. On aurait dit une espèce de groupie hystérique de rock star. Ce type était devenu une obsession. Je me doutais que je n’aurais pas eu le job, mais au moins, j’aurais eu l’occasion de le rencontrer et de vérifier par moi-même que c’était un homme comme les autres. J’espérais qu’une fois démystifié, j’aurais pu passer à autre chose.

Après avoir déposé mes affaires dans un petit motel miteux, j’avais pris un taxi. Et me voilà devant le fameux club que j’avais si souvent scruté en photo.

           L’endroit était désert. Il n’ouvrait qu’à 23h30, soit une demi-heure plus tard.

-         Vous voulez vraiment que je vous dépose ici Mademoiselle ? me demanda le conducteur de taxi inquiet.

-         Oui, je viens pour un entretien de travail. Je vous appelle pour que vous veniez me chercher dès que c’est fini.

-         D’accord, bonne chance alors.

-         Merci. A tout à l’heure.

J’inspirais un bon coup et sortis du véhicule. Pour l’occasion, je portais un tailleur couleur prune et des escarpins noirs Louboutins. Classe et de bon goût. Du moins, c’était l’impression que j’espérais donner. Je frissonnais, la nuit s’annonçait fraiche pour un mois de mai. J’aurais du mettre un long manteau par-dessus. C’est d’un pas mal assuré que j’approchais de l’entrée, fixant l’enseigne lumineuse « Fangtasia ». Je sonnais à la porte et attendis, droite comme un I. Je serrais fort mon porte document contre moi. J’avais prévu un spray à particules d’argent au cas où. Personne ne vint me répondre. Lorsque que je sonnais à nouveau, j’entendis alors une voix de femme à travers la porte :

-         Revenez dans une demi-heure, le club n’est pas encore ouvert !

-         Excusez-moi, je viens pour un entretien avec Monsieur Northman.

La lourde porte noire en cuir capitonné s’ouvrit sur une femme. Elle était grande, un peu plus que moi, blonde aux cheveux longs avec de grands yeux gris foncés cerclés de khôl noir. Pamela de Beaufort, la progéniture d’Eric et son bras-droit au Fangtasia. Sa tenue se composait de cuir uniquement : corset noir à lacets et pantalon moulant. Elle arborait également des escarpins hauts perchés.

-         Les entretiens se terminaient hier,

Mince, j’avais pourtant noté qu’ils duraient jusqu’à ce soir. Je me mordis la lèvre inférieure. J’avais donc fait tout ce voyage pour rien ?

Pam me reluqua de la tête aux pieds, ce qui me rendit extrêmement mal à l’aise.

-         Comme personne n’a fait l’affaire, je suppose qu’Eric acceptera de te rencontrer, dit-elle froidement.

Elle s’écarta pour me laisser entrer. Je passai à côté d’elle pour pénétrer dans un hall aux murs noirs, éclairés d’une lumière faible. Je n’eus pas le temps d’achever un deuxième pas vers l’intérieur que Pam m’agrippa le bras. Je me retrouvai en une fraction de seconde coincée entre elle et le mur. Ses narines palpitaient tandis que ses yeux s’assombrissaient. Mes entrailles se nouèrent, elle allait me bouffer c’était sûr. Mon spray était dans mon petit sac à main, impossible à saisir sans qu’elle ne s’en aperçoive.

Pam s’approcha à quelques centimètres de mon visage et me renifla. Les vampires n’ont pas besoin de respirer, lorsqu’ils le font c’est pour goûter une odeur. Je n’osais même plus respirer.

-         Nom de dieu ! s’exclama t-elle. Une déisha !

Elle relâcha mon bras sans prévenir et je manquais de m’affaler mais elle me retint avec la rapidité caractéristique des vampires.

-         Excuse-moi.

Je tentai de recouvrer mes esprits.

-         Que… qu’est-ce que vous avez dit ? demandais-je éberluée.

-         Tu es une déisha.

Elle ne cessait d’humer l’air et ses yeux restaient noirs.

-         C’est bien la première fois que j’en croise une, fit-elle en s’écartant de moi. Tu sens si bon…

Pam caressa mon visage avec une tendresse surprenante après son plaquage contre le mur. Elle semblait fascinée et ne quittait pas mes yeux. Allait-elle me bouffer toute crue ? Je resserrais ma main sur mon sac, prête à y chercher ma ridicule arme de défense si elle tentait quoi que ce soit.

-         Je sens qu’Eric va être ravi. Suis-moi.

Je lui emboitai le pas dans un long couloir. Je remarquai qu’elle portait elle aussi des Louboutins. Cette femme avait une classe folle.

-         Comment se fait-il que tu sois toujours vivante ?

Sa question me glaça le sang.

-         Que voulez-vous dire ?

Pam stoppa net et me fit face. Elle s’approcha de moi, si près que je crû qu’elle allait m’embrasser. Ou me mordre.

-         Tu n’as jamais croisé de vampire auparavant ?

-         Pas à ma connaissance. Vous êtes la première que je rencontre.

-         C’est impossible… murmura t-elle.

-         Il y en a très peu à Miami.

-         Alors, tu n’as même pas conscience de ce que tu es ?

Je soupirais d’agacement. Je déteste quand les gens tournent autour du pot. Et là, elle me faisait complètement flipper.

-         Mais expliquez-moi bon sang, c’est quoi cette histoire ?

-         Le sang des déishas a une odeur et un goût exceptionnels. Tu n’as pas idée comme c’est ensorcelant. Un peu comme les humains avec le chocolat j’imagine… mais en pire. Sois donc heureuse que je sois le premier vampire que tu rencontres, je sais me maîtriser.

Sur ce, elle fit volte face et continua son chemin dans l’interminable couloir. Je restais plantée là à la regarder s’éloigner. Mon cerveau semblait fonctionner au ralenti après les informations qu’il venait d’engranger. J’avais un sang aimant à vampire et j’étais à Boston, leur « capitale ». Et moi qui trouvais mon existence monotone…

           Pam ouvrit la dernière porte à droite et s’adressa à l’occupant de la pièce.

-         Eric, une nouvelle postulante, annonça t-elle. T’es-tu nourri récemment ?

-         Oui, pourquoi cette question ? répondit une voix grave à l’intérieur.

Pam me fit signe d’approcher avec son doigt. Et s’il ne résistait pas ? C’était stupide de s’en inquiéter, Eric Northman était un vampire millénaire, si sa progéniture avait pu se contenir, lui n’aurait pas le moindre mal.

Après quelques secondes d’hésitation, je décidais de m’avancer lentement. Je m’arrêtais à son niveau. Elle me prit la main avec une grande douceur.

-         Je perçois ton appréhension. Mais ne t’inquiètes pas, il ne te sera fait aucun mal.

Après qu’elle m’eut adressé un clin d’œil, je pénétrai dans la pièce. Il s’agissait d’un bureau d’environ 50m². L’un des murs était constitué de vitres avec une vue directe sur le club. De là, on voyait tout : le bar, la piste de danse, une grande partie des banquettes. J’imaginais qu’il s’agissait de vitres sans tain de l’autre côté. Les autres murs étaient pourpre, mais en cuir capitonné. Il y avait un gigantesque bureau au centre, deux chaises, des étagères, un canapé. Tout le mobilier était noir. Derrière le bureau, un grand fauteuil. Son occupant nous tournait le dos et observait son club à travers les vitres.

           Il pivota dans notre direction. Son beau regard bleu se planta directement dans le mien et il me détailla des pieds à la tête comme Pam l’avait fait quelques minutes plus tôt. Eric Northman, 998 ans, d’origine suédoise, shérif de la zone 5 de Boston depuis 73 ans. Je connaissais beaucoup de lui grâce à Internet. 1,93m, mince et tout en muscle, cheveux courts blonds et des yeux d’un bleu à se damner. La perfection incarnée. Il portait un t-shirt noir col en V près du corps ainsi qu’une veste en cuir assortie. Je le trouvais encore plus beau qu’en photo.

J’eus l’impression qu’on avait mis le temps sur « pause ». Il me submergeait littéralement. Quelque chose en moi se fissura, lentement. Mon sang se mit à bouillir dans mes veines. Il y avait quelque chose d’extrêmement sensuel chez cet homme, absolument hypnotisant. Son expression était curieuse, il paraissait également statufié. Peut-être même choqué. Nous restâmes nous regarder dans les yeux et le silence s’étira à l’infini sans que cette étrange sensation ne s’atténue.

-         Bonsoir, fis-je impressionnée.

-         Bonsoir, me répondit-il de sa belle voix grave.

Pam me poussa doucement en avant, je fis quelque pas vers lui jusqu’à heurter son bureau. Mon odeur dû parvenir jusqu’à lui car instantanément Eric serra les poings et ses pupilles se dilatèrent. Ses crocs jaillirent de sa bouche.

-         Ne la mange pas, prévint Pam.

Eric se matérialisa derrière moi, trop vite pour que mes pauvres yeux d’humaines n’eurent le temps de le suivre. J’étais pétrifiée, plus par surprise que par peur. Il prit une mèche de mes cheveux entre ses doigts. Je l’entendis inspirer profondément.

-         Pam est-ce que c’est ce que je crois ? murmura t-il.

-         Absolument.

Eric me saisit la main pour me retourner afin que nous nous retrouvions face à face. Je m’attendais à ce qu’il soit glacé mais sa paume avait une fraicheur agréable. Il prit mon visage entre ses mains avec précaution, comme si j’étais la chose la plus fragile au monde. Ils étaient décidemment très tactiles ces vampires. J’étais à la fois impressionnée et excitée de sa proximité. La fascination était mutuelle. Mon cœur battait à toute allure. Ses yeux bleus fouillaient les miens sans relâche. Je ne pus m’empêcher d’inspirer fort à mon tour, subjuguée par son odeur. Son regard, le son de sa voix, son odeur, ses lèvres pleines qui semblaient si douces.

-         Comment es-tu arrivée ici vivante ?

-         Elle vient de Miami, répondit Pam pour moi. Nous sommes les premiers vampires qu’elle croise.

Eric relâcha mon visage et recula d’un pas pour me jauger.

-         Vous êtes sérieux quand vous dites que n’importe quel autre m’aurait déjà…

-         Vidée ou emprisonnée pour profiter de ton sang à volonté ? coupa Eric. Oui, nous sommes sérieux. J’ai en ce moment même bien du mal à résister.

Mon ventre se serra sous l’effet de cet aveu. Mais j’étais sereine. N’importe qui ayant un instinct de survie à peu près normal aurait déjà prit ses jambes à son cou. Moi, je l’aurais laissé me tuer sans sourciller tant être prêt de lui me captivais.

-         Ou bien il t’aurait proposé d’être son humaine, ajouta t-il après un bref silence.

Etre l’humain d’un vampire consistait à le laisser se nourrir sur vous en contrepartie de sa protection contre les autres suceurs de sang. Avec le temps, les liens humains-maîtres pouvaient être presqu’aussi forts que créateurs-progénitures. A ce qu’on disait.

-         Pam, entends-tu les battements réguliers de son cœur ?

Celle-ci acquiesça.

-         Incroyablement calme, dit-il le regard dans le vide. Elle n’a pas peur.

Eric contourna son bureau à vitesse humaine cette fois. Il s’assit dans son fauteuil en me priant d’en faire de même face à lui. Me séparer physiquement de lui me sembla presque douloureux. Bon sang, que m’arrivait-il ? J’avais été subjuguée en moins de deux minutes. Pam pris place sur le siège à ma gauche.

-         Je te prie de m’excuser pour ce manque de courtoisie. Il n’est pas dans mes habitudes de venir sentir d’aussi près les gens. Mais, j’ai été pris au dépourvu. Ce n’est pas tous les jours qu’on rencontre une déisha.

Son visage, resté fermé et tendu jusque là se métamorphosa. Il m’adressa un grand sourire et ses canines se rétractèrent. Je me laissais tomber sur le siège plus que je ne me m’asseyais.

-         Quel est ton prénom ?

La normalité de sa question réussit à me surprendre après tout ce qui venait de se passer depuis mon arrivée au Fangtasia. J’en avais presque oublié pourquoi j’étais venue.

-         Mathilda.

-         Très joli, commenta t-il. As-tu apporté un CV ?

-         Euh oui…

J’ouvris mon porte document un peu maladroitement pour lui tendre le papier. Eric le parcouru avec attention. Il m’expliqua de manière précise ce qu’il attendait d’un assistant de jour : 2000 dollars par mois de salaire. Résidence 7 jours sur 7 à leur domicile. Horaires : 15h-19h sauf le lundi, jour de repos. Présence requise chaque soir au club ou pour n’importe quel déplacement. Les tâches administratives consistaient à rédiger des courriers, répondre aux invitations, réceptionner ses appels diurnes, s’occuper de tous les rendez-vous ne pouvant se faire qu’en journée (banque, pressing, poste…).

Lorsqu’il eut fini, il croisa les doigts sur son bureau.

-         Quel âge as-tu ? demanda t-il.

-         J’ai eu 22 ans la semaine dernière.

-         Bien. Pour ma part, je n’accorde pas trop d’importance à l’expérience professionnelle. Je vois que tu as été secrétaire pendant 18 mois, ça me suffit. Mais ce qui importe, c’est le feeling. Pour être mon assistante, il faudra vivre avec nous en permanence, à notre rythme, à notre manière. S’immerger complètement dans notre monde jusqu’à pratiquement en oublier que tu es humaine. Et qui mieux qu’une déisha serait faite pour ça ?

Je me reculais contre le dossier de mon siège. J’imagine que c’était le moment du « nous vous recontacterons, merci et au revoir ».

-         Pam, qu’en dis-tu ?

-         Tu le sais très bien, répondit-elle du tac au tac un sourire en coin.

Eric ne me quittait pas des yeux, guettant chacun de mes gestes. Le silence s’éternisa, j’allais devenir folle.

-         Tu me plais à moi aussi, lâcha t-il enfin. Si tu le souhaites, le poste est pour toi.

J’en serais tombée à la renverse si je n’avais pas été assise.  

-         Vous… vous êtes sérieux ?

-         Comme elle est mignonne, rit Pam.

-         Dois-je prendre ça pour un oui ? s’enquit-il.

-         Oui… putain oui !

Je me choquais moi-même à répondre de manière aussi familière. Mais cela les fit rire.

-         Elle me plait de plus en plus, dit Pam.

Malgré sa froideur au premier abord, je sus qu’on allait bien s’entendre toutes les deux. Je lui souris comme si j’avais gagné un million au loto. Je réalisais mon rêve, côtoyer le charismatique Eric Northman et m’éloigner de ma vie monotone.

-         J’ai juste une petite question. Pourquoi votre précédent assistant de jour a-t-il quitté ce poste ?

-         David était à mes services depuis presque 7 ans et il me satisfaisait en tout point. Mais l’effet de mimétisme était trop avancé, il ne supportait pratiquement plus la lumière du jour. Et il souhaitait fonder une famille. Le temps était venu pour lui de quitter notre univers.

-         Qu’est-ce que l’effet de mimétisme ? Je n’en ai jamais entendu parler.

-         Un humain qui côtoie les vampires très fréquemment voire au quotidien va biologiquement adopter le même mode de fonctionnement de vie que nous, c’est ça le mimétisme. Nous transmettons notre essence à force de proximité physique. L’esprit humain copie celui des vampires. Ainsi, tu verras que tu n’auras aucun mal à ne vivre pratiquement que la nuit. Il y aura aussi probablement des changements en toi pour les sentiments amoureux et à la sexualité, ceux-là surviennent extrêmement vite.

-         C'est-à-dire ?

-         Les vampires peuvent aimer sincèrement plusieurs personnes à la fois. Notre cœur se fractionne en quelque sorte et partage les sentiments alors que les humains ne se focalisent que sur un seul individu. Avec le mimétisme, ça arrive aussi aux humains. Ça s’appelle la fragmentation.

-         Vraiment ?

-         Oui. On appelle ça la Fragmentation. Toutefois, nous n’aimons pas les individus de manière égale. Une hiérarchisation des sentiments s’installe au fur et à mesure. Et contrairement à vous, nous aimons partager nos humains ou conquêtes. Mais uniquement avec notre créateur et nos progénitures. Aucun autre vampire. Rassures-toi, pour que le processus du mimétisme s’arrête, il suffit de ne plus nous fréquenter et en quelques semaines, tout revient à la normale.

J’étais abasourdie par ces révélations. Jamais je n’avais lu quoi que ce soit à ce sujet concernant les noctambules.

On entendit un petit coup sec frapper à la porte.

-         Oui ?

-         C’est Julian.

-         Entre.

Le jeune homme s’exécuta. Il était grand, bien bâti, brun. Ses yeux étaient également bleus mais d’une teinte plus foncée que ceux d’Eric. Je lui donnais le même âge que moi, ou peut-être quelques années de plus.

-         Je te présente Julian, mon humain, dit Pam en le couvant des yeux.

Je me levais pour lui tendre la main. Il l’a serra et je remarquais un bracelet de possession de couleur doré sur son bras droit avec des sortes de motifs anciens. Ce bijou avait deux fonctions : indiquer aux autres vampires que cet humain appartenait à quelqu’un et électrocuter tout vampire que Pam n’aurait pas autorisé mentalement à toucher sa « propriété ».

-         Julian, enchanté.

-         Enchantée également, je suis Mathilda.

-         Ma nouvelle assistante de jour, précisa Eric.

-         Bienvenue à bord, dit-il.

-         Merci.

Julian m’inspira immédiatement beaucoup de sympathie. Il dégageait quelque chose d’apaisant et de chaleureux dans le regard.

Après ça, tout s’enchaina très vite. Pam et Eric me firent visiter les lieux. L’endroit était encore plus grand qu’il n’y paraissait, tout de rouge et de noir. Ils me présentèrent également au personnel en déclarant que quiconque essayerai de me mordre ou aurait une attitude déplacée envers moi serait renvoyé sur le champ. A mon arrivée, ils eurent tous la même réaction : corps tendus, yeux noirs. Mais ils se contrôlèrent. Il y avait Sandy la DJ, Jack, Igor et Stacy au bar, Norma et Jane aux vestiaires ainsi qu’une douzaine de personnes à la sécurité. Au fond de la salle, il y eu un endroit qui attira mon attention, une sorte de place VIP ronde un peu surélevée dans laquelle trônait une table et deux banquettes arrondies face à face, assez grande pour accueillir dix personnes. C’est Julian qui me montra le secret de cette place qui leur était réservée chaque soir. En appuyant sur un bouton, une vitre de verre descendait du plafond pour recouvrir l’endroit de sorte que le bruit de la musique était étouffé. Un second bouton faisait descendre une paroi cette fois opaque pour n’être vu de personne.

Pam se chargea d’appeler mon taxi pendant qu’Eric notait l’adresse de mon motel pour m’envoyer une voiture avec chauffeur le lendemain. Ils m’accompagnèrent jusqu’à l’entrée. Le Quand le taxi arriva, Eric m’y escorta et m’ouvrit la portière. Un vrai gentleman.

-         Passes une bonne nuit.

-         Merci, vous aussi. A demain.

Je me faufilai dans le véhicule qui démarra en trombe. Le chauffeur était effrayé de la proximité des vampires. Quant à moi je jetais un dernier regard aux trois personnes avec qui j’allais partager ma vie, ma nouvelle famille. Tout était allé si vite, j’avais vraiment du mal à réaliser ma chance…

 

           J’avais eu du mal à trouver le sommeil. Je ne cessais de repenser à mon entretien au Fangtasia et à ce qui m’attendait. Travailler pour Eric était dangereux. Un homme de pouvoir tel que lui devait avait un nombre impressionnant d’ennemis. Néanmoins, j’estimais que le jeu en valait la chandelle. C’est seulement vers 4h que je réussi à m’endormir. Heureusement je n’avais rien à faire le matin et je pus dormir jusque midi.

Une fois levée, je passai prêt d’une heure à barboter dans un bain moussant. Faire mes bagages ne prit que quelques minutes. Je n’avais emporté avec moi que 3 valises et en avais défaite seulement une. J’ai revêtu un jean slim et mon chemisier rose pâle. En guise de déjeuner, je commandais un hamburger dans ma chambre.

           A 16h précise, une grosse berline noire aux vitres fumées m’attendait devant l’accueil du motel, comme convenu. Le chauffeur, un petit homme au crâne dégarni qui s’était présenté sous le nom de Brad, mis mes affaires dans le coffre et m’ouvrit la porte arrière gauche. Julian m’y attendait.

-         Hey salut la belle, me lança t-il joyeusement.

-         Bonjour Julian.

Je me glissais à côté de lui tandis que Brad refermait la portière. Julian était tout sourire. Ses cheveux bruns courts étaient savamment mis en bataille avec un peu de gel.  Malgré le temps nuageux, il portait une paire de lunettes de soleil aux verres si opaques que je n’arrivais pas à croiser ses beaux yeux. Je ne pus m’empêcher de le questionner là-dessus.

-         Pourquoi ces lunettes ?

-         Mimétisme, répondit-il laconiquement.

-         Tu vis auprès d’eux depuis combien de temps ? Si ce n’est pas indiscret.

J’avais peur de manquer de tact mais j’avais tellement de questions qui bouillonnaient dans ma tête.

-         Bientôt quatre ans. Depuis quelques semaines, la lumière directe du jour me fait un peu mal aux yeux. Mais quand je suis à l’intérieur, ça va. J’essaye de prendre le soleil le plus souvent possible pour reculer les effets.

-         Je trouve ce phénomène quelque peu effrayant, avouais-je.

-         Il ne faut pas. C’est progressif tu verras. En moins d’un mois, tu te seras adapté à vivre en plus grande partie la nuit. En moins de six, tu auras envie de te taper tout le monde. Et à la fin, tu auras comme moi du mal à affronter le jour. Il n’y a que l’envie de boire du sang qui ne viendra jamais. Et c’est pas plus mal, crois-moi, me fit-il avec un clin d’œil.

-         Tu m’étonnes !

« Se taper tout ce qui bouge ». Et moi qui étais encore vierge…

-         Et ça a dû être fascinant de les côtoyer alors que pratiquement tous les humains ignoraient leur existence jusqu’à il y a deux ans.

-         Même maintenant ça l’est toujours. Vivre à leurs côtés offre une vie peu banale.

-         C’est ce qui t’as fait devenir l’humain de Pam ? L’envie d’une existence trépidante ?

-         C’est l’amour avant tout. Nous sommes âmes sœurs elle et moi. J’occupe la première place dans son cœur.

Ça semblait le combler au plus haut point. Mais s’il précisait être le premier, cela signifiait qu’il y en avait un deuxième. J’avais bien du mal à comprendre comment pouvait-on tolérer de partager la personne que l’on aime. J’imaginais que ce type de pensées allait vite s’estomper.

-         Ta famille ne va pas trop te manquer ? Pam m’a dit que tu venais de Miami.

-         Oh tu sais, mes parents avaient hâte de me voir déguerpir de la maison depuis que j’ai commencé à travailler. On a toujours eu des relations assez conflictuelles. Et je suis fille unique, alors ça ira. 

-         Un petit-ami peut-être ?

Je repensais à Jack, qui m’avait plaquée presque six mois plus tôt. Ça n’avait pas duré longtemps, mais suffisamment pour me laisser le cœur en miette. Entre lui et ma précédente relation en classe de première, qui avait durée presqu’un 1 an, j’avais été échaudée pour pas mal de temps.

-         Eh non, ma dernière relation s’est terminée il y a de cela quelques mois et je n’ai pas trouvé chaussure à mon pied depuis. Il n’y a vraiment rien qui me retenait là-bas.

-         Bien, j’imagine que ça sera plus facile pour toi alors.

Au fur et à mesure que nous roulions, le paysage changeait, passant d’un endroit complètement paumé à des quartiers de banlieue bien propret. On se serait crû à Wisteria Lane de la série Desperate Housewives.

           Bientôt nous nous arrêtâmes devant un haut portail sécurisé. Brad composa un code et se dernier s’ouvrit sur une longue allée bordée de petits arbustes fleuris. J’aperçu la villa trois cent mètres plus loin. Elle était gigantesque, dotée de nombreuses baies vitrées et de composées de plusieurs cubes.

-         Bordel, c’est là que vous vivez ? m’exclamais-je.

-         Classe, hein ?

Le jardin devait bien faire 4000 m² et il s’étendait sûrement autant de l’autre côté de l’habitation. La propriété était bordée de murs très hauts. Il y avait un grand garage accolé à la maison, nous nous y engouffrâmes. Brad sortit mes valises et nous suivîmes Julian vers la porte d’entrée qui débouchait sur un hall. Il y avait un porte manteau pour se dévêtir, une console sur lequel trônait un bouquet de lys blancs. L’intérieur était encore plus impressionnant, moderne et décoré avec goût dans un style minimaliste. Meubles blancs et noirs uniquement, quelques touches de couleurs dans les objets tels que les coussins de fauteuil ou tableaux aux murs. Il y avait une cuisine ouverte sur l’immense salle de séjour, avec un îlot central et un équipement digne d’un grand chef. La salle de séjour était constituée de deux grands canapés en cuir noir, table basse et écran plasma surdimensionné accroché au mur. Le summum du luxe était le pan de mur intégralement en baie vitrée qui donnait sur une piscine en parti couverte aux formes arrondies – avec toboggan s’il vous plait. Brad avait laissé mes bagages dans le hall et avait déjà disparu.

-         Les volets de toute la maison sont programmés selon le lever du soleil. Il y a un bip qui retentit exactement cinq minutes avant leur ouverture ou leur fermeture pour prévenir, précisa Julian.

-         C’est très perfectionné, admirais-je.

-         La villa n’aurait pas été jolie sans fenêtres à l’étage et Eric et Pam déteste dormir en sous-sol. Je te fais visiter ?

-         Oui, avec plaisir.

Je parcourus donc l’immense demeure sur les talons de Julian. Au rez-de-chaussée : salle de bain et toilettes, le bureau, une pièce que l’on pourrait nommer salle de jeux, une petite salle de sport. Tout était d’une propreté irréprochable. Je ne pouvais m’empêcher d’écarquiller les yeux à chaque fois que Julian ouvrait une porte. Il m’expliqua qu’une femme de ménage nommée Dita passait deux fois la semaine, le mardi et le vendredi matin. Pour l’extérieur, un jardinier une fois par semaine. Le sous-sol était une pièce aussi grande que la maison, aménagé en salle de sport et doté d’un jaccuzzi.

Une fois remontés, Julian s’empara de deux de mes valises et je saisis la dernière pour grimper à l’étage. Le noir était complet, chaque fenêtre étant obstruée par des volets. Un long couloir desservait 5 chambres avec salle de bain attenante pour chaque.

-         La chambre de gauche est la nôtre à Pam et moi. La 1ère à droite est celle d’Eric. Au fond c’est celle pour les invités. Et la seconde à droite sera la tienne.

Nous nous y rendîmes. La pièce était plongée dans le noir. Julian ouvrit manuellement les volets. Je découvris alors une chambre d’environ 30m² aux murs peints en couleur taupe clair. Sur la gauche, un mur avec une porte vitrée donnant sur un petit balcon avec vue sur le jardin et la piscine. Il y avait une commode avec écran plat ainsi qu’un bureau et deux fauteuils à côté. Sur le mur de droite, un lit king size. On aurait facilement pu dormir à quatre dedans ! En face de l’entrée, une sorte panneau de séparation de style japonais. Je me rendis derrière et y découvrit le plus génial des dressings qu’il m’ait été donné de voir. Il faisait la largeur de la pièce, tout en penderie et rangements bien pensés, avec des spots partout.

-         Qu’en dis-tu ?

-         J’en dis qu’elle me plait beaucoup.

-         Et attends, tu n’as pas vu la salle de bain.

Julian ouvrit une porte que je n’avais pas vu qui donnait sur la salle de bain, de l’autre coté du mur contre lequel le lit trônait. Douche à l’italienne et baignoire, meuble et vasque moderne, le top du luxe.

-         Je sens que je vais me plaire ici.

-         Ça te dit d’aller piquer une tête dans la piscine ? Pam et Eric ne se lèvent que dans cinq heures.

-         Avec plaisir.

-         Je te laisse le temps de t’installer, rejoins-moi d’ici une demi-heure. Je vais nous préparer des cocktails.

Il me fit un clin d’œil avant de s’éclipser. Je posais l’une de mes valises sur le lit et l’ouvrit. J’ai tout sortit et ranger dans le dressing. Mes affaires n’en remplissaient même pas un dixième. Une fois fini, j’enfilai mon bikini noir. Dehors il faisait une vingtaine de degrés, un peu frais mais comme les piscines sont chauffées… Comme je n’avais pas apporté ma serviette de plage avec moi, je me suis emparée d’une serviette de la salle de bain et ai rejoint Julian dehors. Celui-ci était déjà dans la piscine, il était allongé sur un matelas gonflable et sirotait un cocktail orange et jaune.

-         Le tien est sur la table, m’indiqua t-il.

J’aperçus alors un grand verre au contenu bleu pétant.

-         Il y a de l’alcool dedans ?

Je n’avais pas franchement envie de prendre une cuite en pleine après-midi, surtout pour mon premier jour.

-         Non m’dame. Jus de pamplemousse, citron vert et une touche de curaçao pour la couleur.

Je m’en emparai pour le goûter, il était délicieux.

-         Hmm, c’est parfait.

-         Aller viens, prend l’autre matelas.

Je me saisis du matelas en question. Ça a été un peu laborieux de me hisser dessus sans trop de glissade mais une fois bien positionnée, j’ai pu attraper mon verre laissé sur le rebord. Je me laissais aller contre le coussin gonflable qui faisait office d’oreiller. Le soleil me chauffait la peau doucement, sans exagération. L’absence de vent était très agréable.

-         Je suis content d’avoir trouvée une camarade de jour, me dit Julian. David vaquait à ses occupations de son côté alors je t’avoue que les journées semblaient parfois longues.

-         Tu m’as moi maintenant.

-         Oui, et j’en suis ravi. Heureusement on ne se lève rarement avant quatorze heures alors ça réduit considérablement l’attente du soir.

-         L’hiver tu ne dois pas beaucoup voir le jour alors vu l’heure à laquelle la nuit se lève.

-         Non en effet. C‘est pour ça que j’essaye de passer le plus de temps possible au soleil ou du moins en extérieur pendant les beaux jours, pour retarder l’effet de mimétisme. Hey regarde ça !

Il saisit une télécommande près de sa main que je n’avais pas vue et on entendit la chanson « Young Blood » de Naked and Famous.

-         J’adore cette chanson, dis-je en terminant mon délicieux cocktail. Si ça n’est pas le paradis, ça y ressemble.

 Après avoir jacassé près de trois quart d’heure sur nos goûts musicaux en commun et sur nos familles respectives, nous sommes sortis de la piscine. J’avais appris que Julian avait une sœur de huit ans sa cadette. Elle était décédée dans un accident de voiture avec ses parents cinq ans plus tôt. Tout comme moi, il ne se sentait pas retenu par quoi que ce soit dans sa vie d’avant.

           J’ai inauguré ma salle de bain. Quel bonheur d’en avoir une rien que pour moi. Je pris tout mon temps pour me doucher. Une fois sèche, j’ai appliqué un lait hydratant partout mon corps un peu rougit par l’exposition au soleil. Choisir une tenue me pris un temps fou. Ma garde robe se composait pour la majeure partie de petite robe d’été, de jupe, short et t-shirt tout simple. Je n’avais aucune idée de la tenue à adopter pour le soir. Lors de mon passage au Fangtasia je n’avais pas croisé un seul client, uniquement les employés. Et ils avaient tous des tenues un peu olé olé… Après avoir passé plusieurs tenues, je décidais d’opter pour un slim noir enduit, mes escarpins Louboutin portés la veille et un haut bordeaux un peu décolleté. Bracelet et collier dorés pour parfaire le tout. Ensuite j’entamais le maquillage et le lissage de mes cheveux au fer à lisser. Il était presque vingt heures quand je descendis rejoindre Julian affairé dans la cuisine.

           Une odeur de bolognaise flottait dans l’air.

-         Mais tu es un vrai cordon bleu dis donc ! m’exclamais-je devant les deux assiettes fumantes posées sur la table.

-         J’adore cuisiner, admit-il tout sourire.

-         Et bien tant mieux car moi je déteste ça ! Je pourrais pratiquement me laisser crever de faim tant ça me saoule de faire à manger. Ou alors je m’empiffre de paquet de gâteaux, au choix.

-         Ne t’en fais pas, tu ne mourras pas de faim avec moi va.

Nous nous assîmes face à face. C’est avec appétit que je goûtais à son plat, il était divin. Julian m’expliqua qu’il avait appris à cuisiner avec sa mère. Il m’énonça ses spécialités et je bavais presque lorsqu’il arriva au chapitre des desserts.

           Alors que nous débarrassions nos assiettes et couverts dans le lave-vaisselle. Un espèce de bip-bip de micro-onde retentit.

-         C’est le signal du coucher de soleil, me dit Julian.

Il me tendit la corbeille à fruits.

-          Non merci, je n’ai plus de place pour un dessert.

Il s’empara d’une pomme verte et la croqua à pleine dents. Nouveau bip-bip. On entendit un bruit dans toute la maison, une sorte de claquement à l’étage. Les volets avaient dû s’ouvrir.

-         Je déteste quand tu prépares de la bolo Julian, après ça pu dans toute la maison.

Je sursautais violemment et fit volte face. Je n’avais pas entendu Pam arriver. Elle se tenait devant nous en nuisette et shorty de satin rouge, à peine décoiffé. J’aurais aimé avoir sa mine au lever. Julian la prit dans ses bras et ils échangèrent un baiser si fougueux que je me demandais si je ne devais pas quitter la cuisine sur le champ pour leur laisser un peu d’intimité. Pam s’avança ensuite vers moi et me serra dans ses bras. Je fus surprise de cet accueil, les vampires se contentent d’habitude de hocher la tête pour saluer.

-         Bonsoir.

-         Bonsoir Pam, répondis-je en la serrant timidement contre moi.

-         Julian t’as bien reçue ? Tu es bien installée ? s’enquit-elle.

-         Oh oui très bien. Votre demeure est somptueuse et j’adore ma chambre.

-         Je savais qu’elle te plairait, sourit-elle. Il ne te reste plus qu’à la décorer à ton goût.

Pam se dirigea vers la baie vitrée et l’ouvrit en grand. Je devinais aisément que les vampires détestaient l’odeur de nourriture humaine.

-         Bonsoir.

Nouveau sursaut. Je frôlais l’évanouissement en me retournant pour découvrir Eric, vêtu uniquement d’un pantalon de pyjama. Il avait un torse ferme, musclé et glabre, à vous donner l’envie de le caresser pendant des heures. Le rouge me monta aux joues rien qu’à cette idée.

-         Bonsoir Eric.

Ma voix avait été à peine audible. Enfin, pas pour les vampires dont l’ouïe était beaucoup plus développée que celle des humains. Il me serra dans ses bras de la même manière que Pam venait de le faire, mais plus brièvement. Mon cœur eu un raté à ce simple contact. Il en fit de même avec Julian puis sa progéniture.

           Eric me demanda à son tour si mon arrivée s’était bien déroulée et si ma chambre me plaisait. J’aurais été de mauvaise fois en affirmant le contraire.

-         Parfait, sourit-il. Je vais me doucher et ensuite nous nous retrouverons dans mon bureau pour que je te confie tes premières tâches.

-         Ok ça marche.

Je le regardais s’éloigner à regret. C’était dingue, je connaissais à peine cet homme et il exerçait déjà sur moi une telle attraction que s’en était effrayant. Pam alla également se préparer.

           Une demi-heure plus tard, Eric et moi nous nous installâmes dans son bureau copie conforme de celui du Fangtasia. La seule différence était la couleur des murs, ceux-ci étaient blancs, et il y a avait un second bureau – le mien. Il prit place derrière le sien, et moi sur le fauteuil face à lui. Je ne pouvais m’empêcher de le dévorer des yeux. Il portait un pantalon noir et une chemise bleu marine. Ses cheveux encore humides étaient rejetés en arrière. Que n’aurais-je pas donné pour partager un moment avec lui sous la douche… Il verrouilla son regard sur le mien. Je me sentais totalement subjuguée, il émanait de lui une prestance et un charisme hypnotisant.

           Eric ouvrit son tiroir et en sortit un téléphone dernier cri qu’il me tendit.

-         Tiens, ton portable pour le travail. Tu devras être joignable de 15h à 19h.

Je m’en emparai. Il avait noté le numéro de la ligne sur un post-it. Il allait falloir que je le mémorise au plus vite.

-         Quel est votre numéro ? demandais-je.

Eric émit un petit rire.

-         Mathilda, on va vivre ensemble pour à priori un petit moment. Je crois que le tutoiement est de mise.

-         Heu oui, vous… tu as raison.

-         Tu as dans le répertoire tous les numéros importants, dont le mien et celui de Pam.

Eric m’indiqua une pile d’enveloppe.

-         Le courrier n’a pas été ouvert depuis quatre jours, il faudra que tu commences par ça demain. Tu le sépareras en deux piles, les invitations d’un côté et le reste de l’autre. Chaque jour tu iras relever le courrier à notre boite postale. Ensuite je t’indiquerai quelle réponse donner aux invitations et te dicterai des courriers à taper. Tu gèreras les e-mails également de cette manière. David t’as laissé cette note avec tout les identifiants dont tu auras besoin.

Je saisis la note en question. Eric poursuivit :

-         Chaque lundi je dois me rendre au tribunal avec Pam. La justice des vampires ne fonctionne pas comme la votre. Il convient au chérif de prononcer les sentences. Il faut aller au pressing chaque mercredi emmener et récupérer nos affaires.

Je baissais les yeux sur la note et y trouvait l’adresse du pressing.

-         Pour le reste, il s’agira de missions plus ponctuelles. Est-ce que tu as des questions ?

-         Non, c’est clair pour moi.

-         Bien, parfait. Maintenant j’aimerais aborder un tout dernier point, sûrement le plus important.

-         Lequel ?

-         Je ne voudrais pas qu’il t’arrive malheur.

Mon ventre se serra. Pourquoi cela arriverait-il ?

-         Comme tu t’en doutes, détenir une haute fonction comme la mienne peut en agacer plus d’un. On pourrait te kidnapper ou te faire du mal pour m’atteindre. J’avais pris David pour humain, le bracelet de possession le protégeait. Je crois qu’il serait bon qu’il en soit de même pour toi. Qu’en dis-tu ?

Je déglutis. Je n’avais pas imaginé qu’il me prenne pour humaine. J’allais devoir lui obéir au doigt et à l’œil comme un petit toutou. Il pourrait se nourrir de moi quand il le voudrait. Je n’étais pas bien sûr d’avoir envie qu’on me pompe le sang tous les soirs. Ça devait être douloureux. En même temps, je serai sous sa protection. Et, étant une déisha machin chose, je risquais de ne pas vivre bien longtemps si je croisais le chemin de vampire sans scrupule.

           Devant mon hésitation, il ajouta :

-         Je suis le seul à pouvoir te mettre le bracelet, et toi et moi serons les seuls à pouvoir le retirer. Donc si quelque chose ne te plait pas, tu es libre de partir à tout moment.

Le deal me paraissait donc honnête.

-         Et bien c’est d’accord. Mais, je vais électrocuter n’importe quel vampire que je vais effleurer alors ?

-         Non, la décharge ne survient que lors d’un contact prolongé. Si tu te cogne à quelqu’un ou l’effleure, le mécanisme ne s’activera pas.

Eric ouvrit une nouvelle fois le tiroir de son bureau et en ressortit cette fois-ci une boite noire et rectangulaire en velours. Il l’ouvrit et me montra le contenu. Il s’agissait d’un bracelet de possession métallique d’une couleur indéfinie, tirant sur le violet. Je lui tendis mon poignet.

-         Es-tu sûre et certaine de ton choix ?

-         Et toi ? répondis-je du tac au tac.

Un clic retentit lorsqu’il referma le bracelet sur mon poignet. Il scintilla légèrement quelques secondes et reprit sa couleur initiale. Avec ça, aucun vampire ne pourrait me toucher sans se prendre une douloureuse décharge électrique. Seul Eric pourrait le faire sans être inquiété par ce mécanisme ainsi que les personnes qu’il y autorisait d’un ordre mental.

-         Te voilà mienne, chuchota t-il.

Le bleu de ses yeux était hypnotisant, tachetés de vert à certains endroits. Je m’y noyais quelques instants.

-         Bienvenue dans la famille, fit Pam en rentrant.

Je sursautais sur mon fauteuil.

-         Oh bon sang, tu m’as fichue la trouille !

-         J’adore les humains, ricana t-elle, un rien les effraies.

Pam s’assied sur mon bureau et me dévoila un grand sourire plein de dents blanches et brillantes. Comment lui en vouloir de s’amuser de ça, on devait parfois leur sembler tellement pathétique. Elle avait revêtu une tenue identique à la veille, sauf que cette fois le corset était en tissu de couleur bordeaux.

-         Klaus sera impatient de rencontrer ton humaine, Eric.

Celui-ci grimaça

-         Qui est Klaus ? demandais-je aussitôt.

-         Le pire ennemi d’Eric et…

-         Pam ! l’interrompit celui-ci agacé.

-         Quoi ? Il faut la mettre au courant, et appelons un chat « un chat ».

Il leva les yeux au ciel. Pam poursuivit.

-         Klaus est le Gouverneur d’Amérique du Nord. Il existe un Gouverneur pour chaque continent. Ce sont les plus vieux de tous les vampires.

-         Quel âge a-t-il ?

-         Plus de 1800 ans, répondit Eric le visage fermé.

-         Nous lui devons tous allégeance. Il dicte les règles et fait ce qu’il veut de nous.

-         Et si quelqu’un l’en empêchait ?

-         Personne n’a la force physique de vaincre un vampire si vieux. Ça ne viendrait d’ailleurs à personne de tenter quoi que ce soit. Ce serait s’exposer à une mort certaine. Ce type est un vrai connard.

-         Et qu’est-ce qui fait de lui ton pire ennemi ? demandais-je à Eric.

Il s’enfonça dans son fauteuil et plissa les yeux.

-         C’est une vieille histoire. Disons que pour me venger des règles trop strictes qu’il avait imposées à ma circonscription, je lui ai volé ce à quoi il tenait le plus au monde.

-         Et depuis ils se détestent cordialement, conclut Pam.

Je compris qu’ils n’en diraient pas plus. J’espérais tout de même qu’au fil du temps Eric m’expliquerait le pourquoi du comment en détail. Je décidais d’en revenir au premier propos de Pam au sujet du Gouverneur.

-         Pourquoi voudra t-il me rencontrer ?

-         Klaus convoite tout ce qui m’appartient, expliqua Eric. Par pur esprit de vengeance. Et il ne mettra pas longtemps à savoir que j’ai pris une humaine.

-         De toute façon, nous nous rendons chaque dernier samedi du mois à la réception qu’il donne chez lui. Chaque shérif est sommé d’être présent, progéniture et humain comprit.

-         Comment se fait-il que je n’ai jamais rien lu au sujet de Gouverneurs sur internet ?

-         Nous n’aimons pas que les humains en sachent de trop sur la manière dont nous fonctionnons. Klaus a les moyens de rester anonyme. Les journalistes qui ont tenté de le photographier ou tout simplement d’en parler ne sont plus de ce monde.

Eh bien, je n’étais franchement pas impatiente de faire connaissance avec ce type.

           Eric changea ensuite de sujet. Il m’expliqua qu’il tenait une boutique de vêtements de luxe et m’indiqua que je pouvais y faire mon shopping à ses frais autant que je le voulais. Cette perspective me fit chaud au cœur car je n’avais pas emporté grand-chose avec mois dans mes trois pauvres valises.

           A minuit précises, nous sommes sortis de la maison. Une limousine noire nous attendait devant. Brad nous ouvrit la porte située à l’arrière. Eric s’effaça pour que j’y entre la première. Il me suivit, Pam ensuite et Julian fut le dernier. C’était la première fois que prenais ce type de véhicule. L’intérieur était tout en cuir beige. Il y avait un toit ouvrant. La proximité d’Eric me rendait nerveuse. Je sentais son odeur musquée et délicieuse. Je ne pouvais m’empêcher de l’admirer dès qu’il ne me regardait pas. Et dès que nos regards se croisaient, je rougissais comme une petite lycéenne. Je décidais d’entamer la conversation pour ne pas me laisser aller à mes fantasmes. Je les ai interrogé sur le club le Fangtasia. Ils me racontèrent comment l’idée leur était venue deux ans auparavant, les travaux effectués, la manière dont il est vite devenu populaire.

           Après un quart d’heure de trajet, nous arrivâmes au Fangtasia. La limousine se gara à l’arrière du club et nous avons emprunté la porte d’entrée du personnel dotée d’une ouverture par code. Nous nous rendîmes dans le bureau d’Eric pour poser nos affaires. Je regardais par la vitre. A l’intérieur, c’était l’effusion tout le monde prenait son poste. Sandy la DJ passait un titre électro. Elle avait une chevelure rose fluo qu’on ne pouvait pas rater, même dans le noir. Quelques clients étaient déjà au bar. Igor passait le chiffon sur le bar avec tellement d’entrain qu’il allait finir par l’user.

           Quand nous prîmes place sur les banquettes du « coin VIP », tous les regards se tournèrent vers nous. Les clients déjà présents étaient humains. Je le devinais à la façon dont il bavait presque en nous regardant. Eric me fit m’asseoir à côté de lui, Pam et Julian s’installèrent en face. Stacy, la barmaid prit notre commande. True Blood pour Pam et Eric bien sûr, champagne pour Julian et moi. Une fois nos boissons apportées, Eric appuya sur le bouton pour faire descendre la vitre. On entendait encore un peu la musique en bruit de fond mais c’était bien plus agréable pour parler. Le but de cet emplacement était de se montrer. Beaucoup de gens, humains comme vampire venaient admirer Eric et Pam.

Ils m’interrogèrent sur mes études, les écoles que j’avais fréquentées. Pam avoua qu’elle avait parfois envie de prendre des cours du soir pour apprendre l’italien, ce qui beaucoup fit rire Eric.

-         Comme si parler quatre langues n’était déjà pas suffisant.

-         Si j’avais le temps, je te jure que c’est pourtant ce que je ferais.

Ils me questionnèrent également sur mes parents et ma relation avec eux. C’était bizarre de parler de ça, mais avec eux je ne ressentais aucun malaise à me mettre à nu.

           Au fur et à mesure que la soirée avançait, le club se remplissait. Vampires et humains se côtoyaient dans une ambiance curieuse. Je ressentais le sexe partout, dans les attitudes, les tenues, les danses. Beaucoup me dévisageaient avec attention. Qui était donc cette nouvelle aux côté d’Eric ? Certains humains nous lançaient parfois des regards noirs à Julian et moi. Nous avions un statut privilégié très envié. Je me sentais un peu en décalage avec le style vestimentaire ambiant, presque trop habillée.

           Eric baissait la vitre qui nous isolait du reste de la pièce. La musique était plus forte.

-         Allons danser, fit-il en se levant et en me tendant la main.

Pam et Julian filaient déjà sur la piste de danse. Je suivis Eric, ma main toujours dans la sienne. Il n’eut aucun mal à se frayer un chemin puisque tout le monde s’écarta automatiquement pour le laisser passer. Nous attirions tous les regards, ce qui me gêna énormément. Je n’avais pas l’habitude de cette attention. A notre passage, je remarquais que les vampires me flairaient et les signes de la faim apparurent aussitôt. Je comprenais alors mieux la nécessité de porter le bracelet de possession. Ils avaient remarqué mon statut de part le bijou et faisaient très attention à ne surtout pas me frôler sous peine de se prendre une décharge électrique violente.

           J’étais impressionnée à l’idée de danser avec Eric. Il était si grand, si puissant, que je me sentais toute fragile à côté de lui. Je n’eus pas le temps de m’interroger sur la manière de danser puisqu’il plaça mes mains derrière sa nuque, les siennes dans le bas de mon dos et se colla à moi. Je suivais les mouvements de son corps, sans le quitter des yeux. J’étais comme hypnotisée par son regard brûlant. J’accordais mes mouvements aux siens.

La chanson qui passait était « Innocence » de Nero, un morceau de drum and bass plutôt doux qui permettait de se mouvoir comme pour un slow, en plus rythmé. Cette musique était terriblement sensuelle. C’était vraiment déroutant cette proximité avec son patron.

-         Ton cœur bat plus vite, remarqua t-il.

Bon sang, il arrivait à l’entendre avec tout ce bruit ?

-         Tout le monde nous regarde.

-         Je sais.

Cela ne semblait pas le gêner le moins du monde. Eric avait visiblement l’habitude d’être le centre d’attention. Pas moi.

           Je cherchais un sujet à aborder tant j’étais subjuguée par cette accolade. Il fallait que la température de mon corps redescende d’un cran. Julian, enlacé avec Pam non loin de nous, me fit un clin d’œil. Je remarquais son bracelet doré.

-         Pourquoi les bracelets de possession n’ont pas tous la même couleur ?

-         La couleur signifie le degré du lien entre un vampire et son humain. Si l’union a été consommée par le sang, il devient cuivré. Si c’est par le sexe, c’est le bleu. Quand les deux ont eu lieu, le bracelet devient finalement argenté.

Je fronçais les sourcils.

-         Pourquoi celui de Julian est doré ?

-         C’est le cas quand l’union a été consommée par le sang et le sexe et que les deux protagonistes sont âmes sœurs.

-         As-tu trouvé ton âme sœur ?

Il ne répondit pas. Je m’écartai un peu d’Eric pour le regarder dans les yeux, ce qui m’obligea à lever la tête. Ils étaient noirs. Je ne m’étais pas rendu compte à quel point être près de moi pouvait être si dérangeant.

-         Eric, tu ne vas pas boire mon sang ?

-         Bien sûr que non. Je sais me contrôler.

Ma question paru le vexer.

-         Excuses-moi, c’est juste que…

Il me serra contre lui.

-         Avec l’habitude, la faim ne se manifestera plus. Et de toute façon, je ne boirais jamais ton sang si tu ne le veux pas.

Nous gardâmes le silence sur plusieurs chansons. Dans le fond, que désirais-je ? Je ne savais même pas ce que ça faisait d’offrir sa veine. Ce n’était peut-être pas si douloureux que ça. Il faudrait que j’en parle avec Julian.

           Pam s’approcha de nous.

-         Mathilda, me laisseras-tu une danse avec mon Créateur ?

Je relevais la tête et m’écartai.

-         Mais bien sûr.

Eric me sourit et me lâcha presque à regret. Julian me proposa de prendre le relais. Il me prit dans ses bras avec douceur.

-         Julian quelle heure est-il ?

-         Presque trois heures.

On en était déjà aux slows et je ne m’en étais même pas rendu compte.

-         Alors ma belle, comment se passe ta soirée ?

-         Bien. Très bien. Même si j’ai l’impression qu’on va me bouffer d’un instant à l’autre…

-         Ne t’en fais pas, tu es protégée. Et Eric est là, tu ne crains rien. D’ailleurs, je crois que tu lui plais beaucoup.

Je me reculais un peu pour croiser son regard.

-         Qu’est-ce que tu racontes ?

-         Ton odeur est une vraie torture si on ne peut pas céder à la tentation. Dixit Pam ! Alors j’imagine que s’il s’inflige ça depuis plus d’une demi-heure, c’est qu’il a vraiment envie d’être près de toi.

-         Ne dis pas de bêtise, voyons.

Il se faisait des films, c’était certain. Et quand bien même ce serait vrai, moi une autre. Eric pouvait toutes les avoir.

-         On va au bar se boire une seconde coupe de champagne ?

-         Avec plaisir.

Je le suivis d’aussi prêt que possible. La foule ne se dispersa pas autant à son passage que pour Eric. Elle était si dense que je finis par le perdre de vue après avoir fait même pas cinq mètres. Un vampire, tout croc sortis me barra la route. Il avait le crâne rasé façon skinhead, très flippant. Il était torse nu, avec plein de tatouages sur les bras. Des veines lui striaient le visage.

-         Tu sens trop bon toi !

Je fouillais la salle des yeux, Julian était invisible. En reculant, je heurtai quelqu’un. Monsieur Skinhead se jeta sur moi. Tout ce que j’ai pu faire a été de fermer les yeux et crier. Sa grosse main se referma sur mon poignet. Il reçu une décharge, son corps vibra sous les secousses.

           Lorsque que je rouvris les yeux, il était à terre. Tout les gens autour de nous s’étaient éloignés sur trois mètres à la ronde, sûrement alertés par mon cri. Eric surgi de nulle part. Il était vraiment furieux. Corps tendu prêt à bondir, mâchoires et poings serrés, crocs sortis pour lui aussi. Il émit une sorte de feulement, comme un lion. Littéralement. Il saisit le type sans ménagement. La musique s’arrêta, toute l’attention était sur nous. Certains avaient l’air ravis d’une bagarre à venir.

-         Shérif, je ne savais pas qu’elle était à vous ! se défendit mon agresseur.

Mais Eric ne voulu rien savoir. Il le traina par le bras et sortit sur le parking. Tout le monde s’effaça sur son passage et le suivit à l’extérieur. J’en fis de même.

           Vampires et humains formaient un cercle autour de la scène. Je me suis faufilée au premier rang, suivit de Pam. Monsieur Skinhead était à genoux, tête levée vers Eric. Ce dernier n’avait visiblement pas décoléré.

-         Quel est ton nom ? aboya t-il.

-         Joshua, gémit le vampire.

Eric lui décocha un coup de poing magistral dans l’estomac. Joshua tomba au sol.

-         Et bien Joshua, tu connais la règle. On ne boit pas le sang d’un humain qui appartient à un de ses congénères.

Nouveau coup de poing, dans le visage cette fois. Joshua cracha du sang. Il ne fit rien pour se défendre. Il se soumettait à son supérieur et espérait sans doute apaiser sa colère en n’offrant aucune résistance. Quand bien même il se défendrait, il devait être plus jeune qu’Eric et donc moins fort.

-         Enfin un peu d’action, chuchota Pam ravie.

Eric releva Joshua qui était au sol.

-         Shérif, je vous en supplie. Je n’avait pas vu son bracelet.

Eric se tourna vers moi.

-         Mon humaine l’a pourtant bien au poignet. Avances-toi Mathilda et montre le nous.

Je me suis approchée d’eux et ai levé le bras pour que toute l’assemblée puisse le voir.

-         Il n’y avait pas d’erreur possible.

-         Elle sentait si bon, je n’ai pas pu m’en empêcher. Je n’ai pas pris le temps de vérifier.

-         La règle est de toujours vérifier l’appartenance d’un humain.

Certains vampires scandaient « mort définitive ! » Mon sang se glaça. Je ne pouvais pas croire qu’il risque la peine ultime pour si peu. Certes il aurait dû vérifier avant de se jeter sur moi, mais j’étais une déisha et donc irrésistible pour eux.

-         Maitre, puis-je formuler une requête ? demandais-je à Eric.

Je savais qu’à un moment pareil il convenait de l’appeler ainsi et d’y mettre les formes. Celui-ci tourna la tête vers moi, décontenancé.

-         Je t’écoute.

-         Son attaque m’a terrifiée, certes, mais je suis indemne grâce à la protection de ton bracelet. Pour sa défense, il n’a sûrement jamais croisé de déisha de toute sa vie et a été pris au dépourvu.

Murmure général dans l’assemblée. Pam m’observait d’un air amusé. Julian vint se poster à ses côtés.

-         Cela aurait pu arriver à n’importe lequel d’entre vous, ajoutais-je.

Et c’était vrai. Les vampires parurent se calmer. Eric rejeta Joshua au sol violemment. Après un silence interminable où il pesait le pour et le contre, il reprit :

-         J’entends ton argument. Il s’agit, en effet, d’une situation comportant des circonstances inhabituelles. Mais il est du devoir d’un shérif d’appliquer la loi à la lettre. Je vais lui extraire les crocs !

Assentiment général de la foule. Je recommençais à respirer normalement. Joshua m’adressa un regard plein de reconnaissance. Les crocs d’un vampire mettaient près de trois mois pour repousser. Mais il était préférable de boire du True Blood pendant ce lapse de temps que de subir la mort définitive. Je regagnais le cercle des personnes agglutinées autour d’Eric et de Joshua. Les vampires s’écartèrent tous. Aucun ne voulait subir le même sort que ce pauvre Joshua qui n’avait pas su se maîtriser.

           Pam fit un aller retour à la vitesse de la lumière dans le club et revint avec une tenaille qu’elle tendit à Eric. Je me suis caché les yeux avec la main. Mais j’entendis tout de même les deux affreux craquements qui suivirent.

Ils étaient tous prévenus désormais, j’étais la propriété d’Eric.

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