Une dernière promesse

Chapitre 5 : La faille

3732 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 04/09/2020 11:09

Papyrus poussa la porte de sa maison nerveusement. Il avait demandé timidement si Asgore voulait prendre le goûter avec eux et le roi avait répondu positivement, ce qui n'était clairement pas prévu dans le programme millimétré du squelette. Frisk trouvait toujours drôle la manière dont le grandiloquent garde royal s'écrasait devant son roi. Il n'était pourtant pas pire qu'Undyne, mais ce dernier l'impressionait bien plus pour une quelconque raison. La maison était un chantier de guerre. La table du salon était couverte de cartes et de numéros de téléphone entourés rageusement en rouge. Frisk se sentit un peu coupable de les avoir fait paniquer à ce point, mais que pouvait-il y faire ?


L'adolescent laissa le plaisir à sa mère de le materner et récupérer ses affaires sales. Ses gestes irrités témoignaient de la grande joie d'avoir Asgore dans les parages, mais Frisk ne lui en tint pas rigueur. Toriel le poussa gentiment dans la douche où il put effacer les traces de ses dernières mésaventures. Physiquement, en tout cas. Pour le mental, ce n'était pas tout à fait ça.


Quand il sortit dix minutes plus tard, Sans sortait lui aussi de sa chambre. Frisk se figea net, tout comme lui. Ils restèrent un long moment à se regarder dans les yeux avant que l'adolescent ne rompe la distance qui les séparaient pour le prendre dans ses bras. Le squelette en fut surpris, mais se laissa faire. Il l'entendit même pousser un soupir de soulagement.


"Ah ! Vous voilà enfin ! dit Papyrus derrière eux. La collation du milieu d'après-midi est servie. Sans, le roi est là. Il... Il est vraiment dans la maison.

— Woah, tous les voisins vont en parler pendant des semaines au moins, se moqua Sans d'un ton malicieux. Tu vas pouvoir supporter ta popularité croissante ?

— Sans, je n'ai pas le temps pour ça. Je... Je crois que Lady Toriel est irritée. Je n'aurais peut-être pas dû l'inviter ?

— Elle a déjà passé ses nerfs sur moi, dit-il avec un ton de reproches dans la voix. Elle ne lui fera rien. Allez, descendons. Il ne vaut mieux pas les laisser seuls trop longtemps."


L'adolescent suivit les deux squelettes jusqu'à l'escalier. Toriel et Asgore étaient installés chacun à un bout de la table, une tasse de thé dans les mains. Sans fit mine d'aller dans le canapé mais Papyrus l'en dissuada d'un regard. Le squelette poussa un soupir et traîna des pieds jusqu'à une des chaises vides. Frisk s'installa à côté de lui.


"Le gamin est rentré, dit-il d'une voix étrangement aïgue.

— Ce n'est pas grâce à toi, grogna Toriel, menaçante. Monsieur a refusé de se téléporter pour aller te chercher, expliqua-t-elle à Frisk.

— Ce n'est rien, Maman, le défendit l'enfant. Sans ne se sentait pas très bien hier, c'est moi qui lui ai dit que j'allais rentrer tout seul. Et puis, Papyrus est venu me chercher, non ? Et puis, c'est pas comme si je risquais quelque chose ici. Ce n'est pas comme là-bas."


Elle se crispa légèrement en comprenant où il venait en venir et détourna le regard. Sans remercia l'adolescent du regard. Son frère ne tarda pas à arriver avec les crêpes de la veille et les posa sur la table. Il partit s'asseoir en face de son frère, les mains agitées. Toriel récupéra le plat et commença à servir les crêpes dans un silence inquiétant. Asgore se râcla la gorge et se tourna vers Frisk.


"Alors, Frisk, es-tu prêt pour la réunion de mercredi ? Nous comptons sur ton discours pour encourager les humains à mieux accepter notre peuple à l'extérieur.

— Je pense, oui. Sans m'a aidé à préparer mes idées la semaine passée. J'espère que ça suffira, dit-il d'une voix peu assurée. J'ai l'impression que ça n'avance pas beaucoup.

— On ne peut pas changer tout le monde, gamin, répondit l'aîné des frères squelettes en lui ébouriffant les cheveux. Mais si on réussit à faire changer ne serait-ce que l'un d'entre eux, ce sera déjà gagné. Et puis, la situation ne peut pas être pire qu'avant. On a patienté deux cents ans dans une montagne, nous ne sommes pas à quelques mois près. Papyrus sera avec toi, personne ne peut nous détester quand mon frangin est dans les parages, pas vrai ?

— Bien sûr, se vanta immédiatement l'intéressé. Avec le grand Papyrus, il ne peut y avoir que de grands discours. Je suis la mascotte officielle de l'ambassade, après tout. Mon charisme naturel, la blancheur de mes os, rien ne pourra les faire reculer."


Ils éclatèrent tous de rire. Il était vrai que Papyrus avait sa place à part dans l'ambassade. Frisk n'avait jamais réussi à se débarrasser de lui lors des discours et donc il avait fini par accepter que le squelette le suive partout. Après quelques temps, il s'était avéré qu'il était très doué pour la gestion du stress avant de monter sur scène et apportait à l'adolescent un soutien non-négligeable.


"J'espère que la sécurité sera à la hauteur, cette fois, reprit Toriel, plus sérieuse. Je ne veux pas que les choses se passent comme l'année passée."


L'ambiance en fut immédiatement refroidie. Cela faisait un moment que Frisk n'avait pas fait d'apparition publique pour l'unique raison qu'il avait manqué de peu de perdre la vie lors de la dernière. Un homme déguisé en policier avait réussi à s'introduire sur la scène et avait poignardé l'enfant plusieurs fois. Sans l'intervention rapide de Undyne, qui avait coursé l'assaillant sans relâche deux semaines de suite, et Papyrus, sous le choc, qui avait fait au mieux pour l'empêcher de se vider de son sang, il ne serait sans doute plus là pour y penser. Depuis, l'homme était mort. Sans l'avait trouvé avant Undyne et traîné jusqu'au commissariat de force. Il s'était suicidé dans sa cellule peu avant le procès. Quelque part, savoir qu'il ne reviendrait jamais rassurait Frisk, mais ses parents, et Sans en particulier, éprouvaient d'amer regrets de ne pas avoir pu lui faire payer son acte.


Cet événement en particulier avait été suivi d'une violente dispute entre le couple Dreemur. Pour protéger l'adolescent, déjà fortement traumatisé par l'attaque, Sans l'avait logé chez lui quelques semaines, afin de se remettre loin de la tension ambiante. Toriel avait exigé d'Asgore de laisser l'enfant tranquille et de se trouver un autre emblème pour ses missions diplomatiques, et le roi avait accepté à contre-coeur. Mais Frisk éprouva rapidement des regrets et décida de lui-même de reprendre ses activités à l'ambassade, d'abord de manière discrète, via des communiqués écrits, puis, quelques semaines plus tôt, avec une apparition publique. Toriel était contre, il le savait, mais il se sentait mal à l'idée d'abandonner le peuple qui l'avait accueilli juste à cause de ce petit accident.


"Undyne veillera à la sécurité, lui assura Asgore. Une grande partie de ses troupes sont mobilisées pour ce jour-là. Nous ne ferons pas l'erreur de confier la vie de Frisk à des policiers humains une nouvelle fois. J'ai toute confiance en ses talents. Elle a toujours été la meilleure des meilleurs, après tout.

— Et puis Sans sera dans le public, surenchérit Papyrus, il n'y a rien à craindre. Mon frère est peut-être paresseux, mais il a toujours fait attention à l'humain Frisk."


Frisk détourna brièvement les yeux vers le frère du squelette. Les pupilles de Sans avaient disparues, confirmant ses craintes. Il ne serait pas là. Cela ne dura qu'une fraction de seconde, mais il l'avait vu. Sans, se sentant observé, tourna la tête vers lui. Il posa une main sur la jambe de l'adolescent et lui fit "non" de la tête, pour l'encourager à garder le silence. Frisk se força à sourire et recentra son attention sur Papyrus, parti dans un monologue sur comment il était aussi bon pour protéger les autres que Undyne. Il fit l'erreur de croiser les yeux de Toriel. Sourcils froncés, elle regarda Sans, puis lui, puis Sans de nouveau.


"Bien, il est temps pour moi de rentrer, dit Asgore en se levant. J'ai encore beaucoup de travail devant moi. Merci pour le thé, Papyrus."


Le squelette rougit et le remercia dans une série de gargouillis étranges. Le squelette et Frisk le raccompagnèrent à la porte. A peine celle-ci claquée, Sans se leva et tituba maladroitement jusqu'au canapé. Il se laissa tomber dedans et s'endormit à peine quelques secondes plus tard, au grand désespoir de son frère qui débarrassa la table en se plaignant de lui. Toriel l'aida à faire la vaisselle, puis gagna sa chambre pour se reposer un peu.


Frisk suivit Papyrus dans leur chambre. Le squelette accepta d'annuler la sortie à la plage en prétextant que Frisk devait être fatigué pour masquer le fait qu'Undyne l'avait atomisé et que lui aussi avait besoin d'une sieste. L'adolescent fut content de retrouver l'atmosphère rassurante de la chambre de Papyrus. Elle n'avait pas tellement changé depuis les Souterrains. A côté de la porte, un grand lit en forme de voiture de course rouge longeait le mur. Plusieurs peluches étaient alignées soigneusement sur les coussins, à côté d'une robe et d'un bonnet de nuit rose bonbon. Juste à côté, une table en bois débordait de figurines de jeux de rôle, auxquels s'étaient ajoutés au fil du temps des constructions en briques colorées. Depuis que Frisk l'avait initié au jeu, Papyrus avait montré un vrai talent pour concevoir divers objets avec et les collectionnait. En face, une bibliothèque et une penderie encadraient un drapeau de pirate noir, bariolé de couleurs, reste d'une soirée qui avait mal tourné et où le pauvre locataire des lieux s'était retrouvé avec une quantité de whisky un peu trop importante dans les os. Dans l'angle se tenait un bureau chargé de dessins et de crayons de couleur, au milieu duquel un ordinateur bien plus récent avait trouvé sa place, ouvert sur un réseau social humain, bien plus complet et performant que celui originel des monstres. Enfin, contre le dernier mur, un deuxième lit était installé, plus simple, tout en bois. Comme pour le premier, de nombreuses peluches étaient disposées dessus, ainsi que la valise de l'adolescent.


Il s'approcha et explora son nouvel espace de vie, qu'il connaissait déjà par coeur. Habituellement, son lit se trouvait dans la chambre d'ami, mais Toriel l'empruntant, il avait déménagé ici. Il tira les tiroirs sous le lit, où sa mère avait déjà soigneusement rangé ses vêtements, à côté de vieux dessins, jouets et livres qu'il avait oublié les cinq dernières années passées ici. Frisk saisit un petit paquet soigneusement emballé et se tourna vers Papyrus, déjà penché au-dessus de ses figurines, à la recherche des plus récentes pour en faire un exposé complet à son invité. L'adolescent sourit malicieusement et déposa le paquet à pas de loup sur le lit du squelette. Il y en avait un autre rouge, plus petit, mais qui attendrait un peu étant donné qu'il était pour Sans.


"Oh, regarde Papyrus, quelqu'un a laissé un truc sur ton lit."


Surpris, le squelette se retourna. Il fronça ses sourcils imaginaires et s'approcha pour inspecter l'objet. Il prit le paquet, le retourna plusieurs fois, avant de finalement tirer avec méfiance sur le noeud bleu qui l'entourait. Le cadeau contenait une petite boîte transparente avec une petite figurine à l'effigie de Papyrus à l'intérieur dans son "corps de bataille". Sur le petit promontoire, une petite plaque était gravée : "Pour le meilleur des gardes royaux - Frisk". Le squelette fit volte face vers lui, puis courut le prendre dans ses bras en pleurant comme un bébé.


"C'est merveilleux, Frisk, merci beaucoup ! Je... Je vais le mettre avec les autres."


Il sautilla jusqu'à sa table d'exposition et poussa plusieurs super-héros pour mettre son cadeau au premier plan. L'adolescent avait visé juste. Enfin, ce n'était pas comme s'il était difficile de choisir quelque chose pour Papyrus. Même une canette vide trouvée à terre lui ferait plaisir tant qu'elle venait de quelqu'un qui lui était cher.


Frisk grimpa dans son lit et déballa les derniers objets de sa valise, dont son ordinateur portable et sa console de jeu préférée, dont il ne se séparait jamais vraiment. L'adolescent s'était donné comme défi de montrer à son colocataire temporaire toutes les subtilités des jeux vidéos d'aujourd'hui, à commencer par tout ce qu'il y avait de plus compliqué en matière de puzzles. Même si le programme s'était un peu assombri avec la menace qui planait sur Sans, il comptait essayer de ne pas trop y penser pour l'instant.


"Frisk... Est-ce que tu as parlé à Sans ?"


Eh bien, ça aura été court, songea amèrement l'adolescent. Il prit une grande inspiration avant de relever la tête vers Papyrus, assis en tailleur sur son lit. Ses yeux brillaient d'inquiétude, signe qu'il espérait beaucoup de son tête à tête avec son frère. Frisk chercha ses mots, et prit le temps de calmer les battements affolés de son coeur.


"Oui, vite fait. Il a dévié le sujet, mais je lui ai dit que tu étais inquiet. Il a dit qu'il allait essayer de faire des efforts, mais qu'il est vraiment fatigué en ce moment, et donc qu'il a besoin d'un peu d'espace."


Ce n'était pas entièrement un mensonge, quelque part, même si l'adolescent se sentit immédiatement coupable de ne pas lui avouer que Sans n'avait jamais été plus clair qu'en haut de la montagne. La situation ne lui plaisait vraiment pas, et il espéra sincèrement que Sans trouve la force de lui en parler lui-même. Papyrus parut déçu de sa réponse, comme s'il s'y attendait.


"C'est lui qui t'as demandé de mentir ?"


Frisk serra les poings sur sa couverture. Bien sûr que Papyrus savait qu'il mentait. L'adolescent s'était montré trop vague alors qu'il ne lui cachait habituellement presque rien. Le squelette descendit du lit et rejoignit l'adolescent sur le sien. Il lui prit les deux mains.


"Humain, je sais que mon frère n'est pas... Qu'il n'est pas très bavard dès que ça le touche de près. Je sais aussi que vous me cachez des choses depuis longtemps tous les deux. Mais... Je suis son frère. Je veux qu'il comprenne que je suis là pour lui, même si c'est grave, et que je ne le laisserais pas tomber. Je n'ai plus... Je ne suis plus un enfant. Alors sois honnête avec moi, Frisk, est-ce qu'il va mal ?

— Oui, répondit l'enfant à mi-voix. Il... s'étrangla-t-il."


Il renifla pour retenir les larmes qui menaçaient de couler de nouveau. Il avait fait une promesse à Sans, il ne comptait pas la déshonorer, mais il ne pouvait pas non plus garder ça pour lui.


"Ce n'est pas à moi de t'en parler, reprit difficilement Frisk. Je le veux, je le veux vraiment, mais il m'a fait promettre de ne rien dire.

— Je comprends. Ne... Ne trahis pas sa confiance. Il... S'il te parle, c'est déjà une bonne chose. Moi... Ah... Je finirais bien par découvrir tôt ou tard ce qu'il me cache. Mais, humain Frisk, si ça devient trop dur à porter, parle-moi. Je n'aime pas te voir triste, et j'ai bien vu que ce n'était pas une allergie là-haut. J'ai fait semblant pour ne pas inquiéter Undyne, avoua-t-il dans une moue boudeuse."


Frisk lui sourit et vint se blottir dans ses bras. Papyrus le serra contre lui en poussant un discret "Nyeh eh eh", avant de reculer et de s'éclaircir la gorge.


"Le grand Papyrus va aller se reposer les yeux maintenant.

— Je vais aller regarder la télé en bas, à tout à l'heure !"


L'adolescent récupéra sa console et sortit de la chambre en fermant doucement la porte derrière lui. Il descendit les marches et s'avança vers le canapé bleu. Sans était toujours à l'intérieur, son bras dépassait du dossier. Frisk prit donc l'autre bout du siège. Le squelette ne bougea pas d'un os, même lorsque l'adolescent grogna pour installer ses longues jambes dans le peu de place qu'il restait.


A la télévision, Mettaton animait le journal, comme la majorité des autres programmes d'ailleurs. Il présentait les sorties cinématographiques de la semaine avec un grand sérieux. Le premier film avec des acteurs humains et monstres sortait cette semaine, et il y avait foule aux portes des cinémas pour aller à l'avant-première. La fête était néanmoins gâchée à l'extérieur de la capitale des monstres par des rassemblements haineux. Frisk serra les dents, légèrement irrité par le manque de civilité de son peuple. Parfois, il espérait se réveiller en squelette pour ne plus avoir à subir les bêtises des siens et vivre enfin une vie normale. Tout paraissait plus simple ici.


Il détourna un instant le regard vers Sans. Le squelette dormait, mais pas d'un sommeil profond. Il poussait régulièrement une plainte sourde en se tenant la poitrine, ce qui inquiéta immédiatement l'enfant. Délicatement, il tira les bras de Sans hors de sa poitrine, puis ouvrit le gilet qui masquait ses côtes.


Il se figea net. Dans la poitrine du squelette, son âme brillait de sa couleur bleu pâle habituelle. A l'exception près qu'une grande fissure le traversait de part en part. Elle n'avait pas encore atteint le bout de son organe de vie, mais ne tarderait pas à le faire. Frisk n'avait aucun mal à imaginer ce qui se passerait lorsque ce serait le cas, pour l'avoir vécu des dizaines de fois. Il savait aussi à quel point une âme fissurée était douloureuse. Comment Sans parvenait-il à supporter cette douleur sans ciller ?


"C'est moche, hein ?"


Frisk sursauta et retira précipitamment sa main. Sans rit doucement avant de tirer une grimace de douleur. Il referma le gilet d'un geste sec et haussa les épaules.


"Je suis désolé, je ne voulais pas te réveiller.

— J'allais me réveiller de toute façon. Il faut que je fasse ma marche quotidienne, Alphys dit que c'est nécessaire pour éviter la paralysie."


L'adolescent baissa les yeux. Il n'aimait décidément pas cette nouvelle liberté d'expression de son ami. Il préférait l'ancien Sans, celui qui cachait tout et qui ne lui faisait pas entièrement confiance. Les choses étaient plus difficiles, mais quelque part, ils n'auraient pas eu ce genre de conversations. Frisk posa la console sur la table, alors que Sans se redressait.


"Papyrus se doute de quelque chose, avoua l'adolescent à mi-voix. Je n'aime pas me retrouver entre vous deux comme ça. Il sait que tu lui caches des choses et que je suis dans la confidence et pas lui.

— Alors tu dois être plus convaincant. Regarde-toi, on dirait un chien battu. Relève la tête, soldat. Je te l'ai dit, je ne veux pas qu'il garde cette image de moi. C'est ta nouvelle mission. Alors fait ton truc avec ta détermination et garde-le loin de moi. Je sais que c'est dur, mais... Il n'a pas besoin de savoir. Ca lui ferait trop mal de savoir que j'ai gardé ça pour moi tout ce temps. On fera passer ça pour un accident, tu n'as pas à t'inquiéter de lui expliquer après."


Sans poussa un soupir.


"C'est mon rayon de soleil, sourit-il. S'il s'éteint, qu'est-ce qu'il va me rester pour combattre la saloperie qui me bouffe la vie ? Ne le fais pas pour moi. Fais-le pour lui.

— Il y a pas si longtemps, c'est toi qui me disais qu'il fallait parfois accepter d'avoir fait une bêtise et relever la tête pour l'assumer.

— Et je t'ai aussi dit ce jour-là que si j'avais une faveur à te demander, tu devrais l'accepter sans remettre en cause mes mots, trancha-t-il d'une voix un peu plus menaçante."


Frisk rendit les armes, vaincu. Que pouvait-il bien répondre à cela ? Après ce qu'il avait fait, il devait bien ça au squelette. S'il avait trouvé la force de lui pardonner, peut-être que l'adolescent serait capable de tenir sa parole. Il serra les poings, avant d'hocher la tête. Sans se redressa et lui tapota gentiment sur la tête avant de se diriger vers la sortie. Frisk lança un regard vers lui.


"J'ai envie de lui en parler."


Sans se stoppa net.


"Non, répondit-il net. Il n'a pas besoin de savoir. Pas maintenant. Il ne comprendrait pas, de toute façon. Et puis, pourrais-tu seulement le regarder dans les yeux s'il savait ce que tu lui as fait ?

— Je pense que tu te trompes, Sans. C'est parce que tu ne dis rien que Papyrus se comporte comme ça. Parce qu'il ne veut pas t'inquiéter toi.

— C'est non, fin de la discussion."


La porte claqua. Frisk poussa un soupir et s'installa plus confortablement dans le canapé. Sans pouvait bien dire ce qu'il voulait. Il avait déjà pris sa décision quelques semaines auparavant et ne comptait pas s'arrêter là. Cela faisait déjà plusieurs mois qu'il voulait parler à Papyrus des routes génocide, de Chara, des "Reset". L'adolescent savait que même si ça serait dur à entendre, le squelette le pardonnerait. Sans, en revanche, ce serait une autre histoire. Le squelette s'était tellement ancré dans ses mensonges que le moindre déplacement de repères l'angoissait.


Mais peut-être que ça lui ferait du bien, au fond.


Peut-être même, qui sait, cela l'encouragerait à se confier à son tour à son frère ? De toute manière, il allait bien falloir qu'il parle. S'il ne le faisait pas, Frisk ne pourrait pas tenir très longtemps face à sa détermination à chercher la vérité.


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