VIKINGS - Le sang des Dieux
Voilà un moment qu'ils sont en chemin, recroquevillée au fond de la charrette, Alya n'ose plus dire un mot. Elle est épuisée mais la peur de ces barbares la maintient éveillée. Elle observe les frères un à un, tous ont les yeux rivés sur l'horizon, ne détournant pas une seule seconde le regard, tous sauf celui qui est assis avec elle dans la charrette, Ivar.
Allongé sur le dos, les yeux vers le ciel, il croque dans ne pomme, le sourire aux lèvres, comme s'il ne faisait qu'une simple promenade un dimanche après midi. Son visage, contrairement à celui de ses frère est propre. Du moins, il n'est pas recouvert de terre ou d'éclaboussures de sang, ce qui lui donne un air un peu plus sympathique que les autres.
Après de longues heures à voyager, les besoins humains se font ressentir chez Alya.
Elle croise les jambes en essayant d'oublier cette pression en bas du ventre, espérant que le voyage arrive bientôt à son terme.
- Qu'as tu à te tortiller comme ça ? Demande Ivar d'un air agacé en recrachant un pépin de pomme par dessus la charrette.
- Je crois qu'elle a envie de pisser, dit Ubbe, on va s'arrêter cinq minutes.
- On va s'arrêter ? Répète Ivar, mon cher frère, tu as tant de choses à apprendre. Que crois tu qu'elle va faire si elle s'arrête ?
- Pisser, répond Ubbe en soupirant.
- Elle va s'enfuir le plus vite possible, corrige t-il comme s'il n'avait pas entendu la réponse de son frère.
- Très bien, alors si elle pisse dans la charrette tu sera le premier à le savoir, reprend Ubbe en haussant les épaules.
Ivar grimace puis lève la main en l'air en faisant un geste rapide. Aussitôt, les chevaux s'arrêtent. Ubbe s'approche de la charrette en tend son bras pour aider Alya à descendre.
- Tu as deux minutes, dit-il en montrant la foret sur la droite.
- Hvitserk, suis la s'il te plait, ajoute Ivar, toujours assit dans la charrette, si elle tente de s'enfuir, tue-la.
Le visage d'Alya pâlit, ces mots lui glacent le sang, elle et comprend qu'elle ne dois pas faire un pas de travers si elle veut survivre.
Elle pose douloureusement sa jambe sur le sol et ne peut s'empêcher de grimacer. Derrière elle Ivar pouffe de rire en la voyant ainsi, ce qui n'échappe pas à Ubbe qui lui lance un regard autoritaire.
- Je voulais savoir ce que ça fait de se moquer d'un estropié, c'est vrai que c'est amusant, dit Ivar en se recouchant dans la charrette.
- Ne l'écoute pas, chuchote Hvitserk en proposant son bras à Alya pour l'aider à marcher.
Toujours aussi terrifiée, elle aurait aimé pouvoir se débrouiller seule, mais malheureusement, elle en est incapable. Elle s'appuie sur l'avant bras du viking et remarque qu'il doit bien faire une tête de plus qu'elle. Elle n'est rien à côté d'eux, ils l'écraseraient en quelques secondes.
Une fois dans la forêt, Alya vérifie qu'elle est assez cachée par les arbres et les buissons puis lâche le bras du viking.
- J'espère que tu as bien entendu, ce qu'à dit Ivar, dit-il, ne t'enfuis pas, ça nous arrangerai tout les deux.
Sur ces mots, il s'éloigne pour laisser de l'intimité à Alya.
Une fois ses besoin satisfait, la jeune femme rejoint en boitant le viking qui lui tournait toujours le dos.
- Merci, dit-elle en baissant les yeux.
Il ne répond rien et lui propose à nouveau de s'appuyer sur son bras pour rejoindre les autres.
- Ah ! S'exclame Ivar en les voyant revenir, j'espère que tu en as bien profité Hvitserk ! Nos autres guerriers voudront surement en profiter aussi.
Alors voilà ce qui attend Alya, une vie d'esclave à être rabaissée, violée... Cette idée lui donne des vertiges, elle manque de tomber et se rattrape rapidement au bras de Hvitserk.
- Vu leur tête, il y a peu de chance qu'elle en ai envie, répond Ubbe en remontant sur son cheval.
- Et alors ? pouffe Ivar. C'est une esclave.
Une esclave. Alya se dit qu'elle aurait mieux fait de tenter de s'enfuir, quitte à être tuée, il n'y a rien de pire que ce qui l'attend.
La jeune femme remonte dans la charrette, le regard vide comme une condamnée à mort. Le voyage reprend. Ne pouvant plus lutter contre la fatigue pesant sur ses paupières, Alya se laisse emporter, bercée par les mouvements de la charrette. Elle se dit qu'au moins, le sommeil lui permettra d'oublier où elle est, même si son réveil ne sera que plus difficile.
- Lève toi, on est arrivés.
Alya ouvre difficilement les yeux et aperçoit le viking Ubbe devant la charrette.
- Dépêche toi on n'a pas la journée, ajoute t-il d'un ton pressé.
Rapidement, Alya se lève, sa jambe lui faisant légèrement moins mal elle se dit qu'au moins ce n'est pas ça qui la tuera. Elle descend de la charrette et est soudainement tirée par le bras et entrainée vers un grand campement bondé de viking plus repoussants et terrifiants les uns que les autres.
- Je t'explique rapidement, on ne restera pas longtemps ici donc pour l'instant tu vas surtout t'occuper de la cuisine, nous verrons une fois à York ce qu'on te fera faire, en attendant, contente toi d'obéir et tout ira bien.
- York ? Reprend-elle, vous comptez attaquer York ?
Une seconde après avoir sortit ces mots, elle se rend compte qu'elle aurait dû se taire.
- Ce ne sont pas tes affaires, dit-il sèchement. Voilà où tu vas dormir - il montre une petite cabane en bois, de la taille d'une niche de chien, le sol recouvert de paille humide - Ah et puis veille à ce que le feu devant la grande tente là bas reste allumé, s'il te faut du bois, il y a une forêt un peu plus bas.
Après ces instructions, il abandonne la jeune femme au milieu du camp.
Le soleil se couche et les hommes se mettent à boire, que fêtent-ils ? Alya ne le sait pas mais elle suppose que c'est quelque chose de grand. Elle se promène entre les tentes en s'appuyant sur un bâton trouvé par terre. Elle aperçois des hommes et des femmes devant des petits feux en train de trinquer, rigoler, s'embrasser. Des hommes suivent des femmes dans leur tente, cinq minutes après un autre homme entre dans la même tente. La jeune femme préfère ne pas trainer devant et continue à marcher.
Elle arrive au centre du campement et voit un grand feu autour duquel sont assis les frères Vikings, Ivar, Hvitserk et Ubbe. Eux aussi boivent, mais ils sont bien plus calmes que les autres vikings. Alya reste quelques minutes à les observer, eux qui sont ses ravisseurs, eux qui finiront par la tuer après l'avoir surement violé.
Ses jambes se mettent à trembler quand elle croise soudainement le regard d'Ivar. Étonnement, son regard n'est pas froid comme elle aurait pu s'y attendre, mais plutôt rempli de pitié. Il lève son verre vers elle, dit quelque chose à ses frères qui se tournent tout de suite vers elle.
Apeurée, elle détourne le regard et disparaît derrière les tentes.
- Eh toi esclave ! L'interpelle un viking qui à sa voix semble bien alcoolisé.
Alya, terrifiée, l'ignore et accélère le pas. L'homme continu de l'appeler, elle entend ses pas derrière lui quand soudain il l'attrape par l'épaule.
- C'est toi la nouvelle esclave c'est ça ? Dit en lui soufflant son haleine putride.
Il serre si fort son épaule qu'il lui fait presque mal.
- Viens dans ma tente, continu t-il.
Prise de panique, Alya sait qu'elle est prise au piège, qu'elle ne peux rien face à un viking de cette carrure. Les secondes paraissent des heures, elle aimerait disparaitre, même mourir. Tout mais pas ça.
- Je... Non... Je dois y aller, bégaye-t-elle en essayant de libérer son épaule.
- Knut ! Fait une voix autoritaire derrière elle.
Alya se retourne et voit Ubbe et Hvitserk, se tenant bien droit, le menton relevé.
- Ubbe, Hvitserk, vous ne m'en voudrez pas si je vous empreinte votre esclave une nuit ?
La jeune femme les regarde, tétanisée de la tête aux pieds, les poils qui se hérissent par la peur, les yeux remplis de larmes.
- Comme tu l'as dit, répond Hvitserk d'un ton assuré, c'est notre esclave, pas la tienne ni celle des autres. Tu ne lui fera rien sans notre accord.
- Maintenant vas te coucher, ajoute Ubbe, et ne t'avise pas d'aller la voir cette nuit sinon tu peux dire adieu à ce qui pourrait te servir à faire des enfants.
Le vikings marmonne dans sa barbe, la mâchoire serrée et s'en va.
- Merci, dit Alya, le corps encore tremblant. ne réalisant pas qu'elle vient d'être sauvée une deuxième fois par ces vikings.
Il lui font un signe de tête et partent eux aussi à leur tour.
Décidée à ne pas faire une autre mauvaise rencontre qui cette fois pourrait réellement mal tourner, Alya se rend rapidement dans sa petite cabane.
Elle se couche sur la paille, l'humidité traverse vite ses vêtements encore recouverts de son sang qui lui rappelle qu'il y a quelques heure sa vie a été réduite en miette. Son village détruit, ses parent tués, leurs hurlements sont encore bien présent dans sa tête, comme s'ils étaient là, derrière la cabane. Elle aurait voulu mourir elle aussi, la douleur dans sa poitrine est si forte, si elle avait un poignard, elle se le planterai pour soulager ce poids.
Ses jambes repliés contre sa poitrine, les larmes coulent sans même qu'elle ne s'en rende compte, suivis par des sanglots secouant violemment son corps. Plus jamais elle ne verra ses parents, l'homme qu'elle était destiné à épouser, ses voisins, ses amis, plus personne. Il n'y a plus qu'elle.