Un monde brisé

Chapitre 37 : Un rendez-vous secret

Chapitre final

4391 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 23/09/2022 14:33

Partout sur Azeroth et jusqu'en Outreterre à présent libéré de toute emprise maléfique, on célébrait la nouvelle victoire de la Horde et l'Alliance sur la Légion Ardente, et on acclamait tous ceux qui avaient contribue à cette victoire.

Parmi ses héros, certains profitèrent a cœur joie de cette occasion pour faire la fête et ainsi vanter leur mérites, soit demandèrent juste à rentrer chez eux pour prendre un repos bien mérité et réparateur.

Il fallait bien admettre que cette "ardente croisade" n'avait pas été de tout repos. Ce qui rendait sa fin que plus jouissif.

Mais tous n'avaient pas le cœur de célébrer cette victoire, ni même de rentrer chez soi en paix.


Toujours évincé du Cercle druidique Cénarien et ayant appris que sa fille comptait rester avec ses frères d'armes dans les Royaumes de l'Est, Fyrvas avait décidé de ne pas rentrer à Darnassus ni même sur Teldrassil où plus rien ne l'attendait désormais à part une maisonnette dans laquelle il se sentirait seul.

À la place, il rentra à Theramore avec Harrina qui avait accepté de l'héberger en attendant que le vieil elfe se remît de sa dernière dispute avec Gahahli.

Depuis cet incident, Fyrvas avait dû se remettre en question et en était venu à l'évidence qu'il en avait peut-être trop fait. Il continuait de s'auto-convaincre qu'il n'avait rien fait d'autre que d'assurer la sécurité de sa fille. Mais celle-ci avait certainement atteint un âge où elle n'avait plus besoin ni de sa protection ni de son approbation mais davantage d'indépendance. L'en privait ne ferait que détériorer leur relation.

Manque de pot, le druide l'avait compris trop tard. Et maintenant, il était clair que Gahahli ne rentrerait jamais avec lui sur Teldrassil tant qu'elle lui en voulait d'avoir tenté de garder le contrôle sur sa vie.

Fyrvas n'arrivait toujours pas à se faire l'idée que sa fille n'était plus une enfant. Ces derniers mois, elle avait pourtant bien fait ses preuves et démontré une certaine autonomie, même s'il restait encore beaucoup à faire la concernant. Mais pour un elfe ayant plus d'un millier d'années d'existence, "quelques mois" ne faisaient aucune différence. À ses yeux, la Gahahli d'aujourd'hui n'était guère plus mature qu'une enfant sept ans.

De ce fait, il ne s'était pas rendu compte qu'elle avait grandi malgré tout. Peut-être pas assez pour être considérée comme une adulte responsable et autonome,mais assez pour qu'elle pût se passer de la tutelle de son père.

Maintenant, Fyrvas était sûr de ne plus jamais la voir grandir et devenir une vraie adulte... étant donné qu'à cause de son entêtement elle avait décidé de couper les ponts avec lui.

Il sentait au fond de lui qu'il avait tout gâché.

Et il était persuadé que plus jamais il ne l'a reverrait. La seule et unique famille qui lui restait. Tout ça par sa faute.

— Ne dites pas ça, bien sûr que vous la reverrez, un jour ou l'autre, tenta de le rassurer Harrina. Il faut juste lui laisser le temps de digérer et de vous pardonner. Elle sera ainsi plus disposée à revenir vers vous.

— Le temps... Combien temps ça va lui prendre ? se lamenta Fyrvas défaitiste une bouteille de bourbon à moitié vide à la main. Chez nous, on peut tenir rigueur à quelqu'un durant tout un millénaire. Peut-être même plus.

— Je ne pense pas qu'elle vous en voudra aussi longtemps, tenta de relativiser la magicienne. Certainement pas après que vous ayez du sacrifier votre immortalité. Et puis je commence à la cerner la petite Lili... Je veux dire, votre fille.

— De quoi vous parlez ?

—Je sais qu'elle est encore jeune, même pour une elfe. Et j'ai remarqué qu'elle avait un esprit vif et un sens de l'adaptabilité hors du commun. Le genre qui apprend vite et mieux que certains...

— Je ne vois toujours pas où vous voulez en venir...

— Ce que je peux vous dire c'est que je ne la pense pas assez têtue pour vous tenir rancœur pendant milles ou dix milles ans. Les temps changent et les cœurs avec. Et Gahahli ne dérogera pas à la règle. Vous verrez, elle vous pardonnera avant même que vous n'ayez eu le temps de vous pardonner à vous même.

— J'espère que vous ayez raison...

— Bien sur que j'ai raison ! Et puis cessez de vous lamenter sur votre sort et lâchez moi cette bouteille ! Vous faites peine à voir ! Il faut vous changer les idées ! Il faut vous une occupation !

— Ah oui ? Et qu'avez vous à me proposer ?

— Certainement mieux que passer la journée assis sur cette chaise à vous morfondre et vous beurrer la gueule à coup de bibine. Jaina vient de m'informer qu'il y avait du grabuge au Nexus, la forteresse du Vol draconique Bleu. De ce que j'ai compris, Malygos le Gardien de la Magie est en train d'y faire des siennes et veut déclarer la guerre aux races mortelles. Et comme nous deux nous avons acquis une certaine expérience avec les dragons...

— Donc encore un dragon dérangé à corriger ?

— Certes, mais aussi d'autres qui viendront nous soutenir pour changer. Dont certains appartenant à un vol auquel vous et vos confrères sont très familier.

— Et c'est où le Nexus au juste ? C'est loin d'ici ?

— Si c'est loin ? Ha ! Non seulement c'est loin mais il faudra s'habiller chaudement ! Vu que c'est au pays des mammouths.


*****

Dans la région montagneuse des Hinterlands sur l'autre continent, ce fut une toute autre ambiance qui se manifestait.

Les aventuriers de l'Alliance, parmi lesquels Gahahli, Baelbo et les autres, venaient se rendre à la capitale des nains Marteau-hardi, le Nid de l'Aigle, pour célébrer leur victoire contre la Légion Ardente en faisant la tournée des bars.

Située sur à flanc de montagne à l'extrême nord-ouest de la région, cette cité naine à ciel ouverte, contrairement aux autres villes naines comme Forgefer ou Ombreforge qui étaient entièrement souterraines, était reconnaissable à l'imposante statue d'aigle qui surplombait la ville de toute sa hauteur et dépassant d'une tête la chaîne de montagne formant la vallée ôu était nichée ville. La statue semblait y veiller comme un vrai aigle veillant son nid et sa progéniture, donnant ainsi son nom à la cité.

Les aventuriers se rendirent au donjon de la ville qui faisait également office d'auberge et dans laquelle la fête battait déjà son plein, grouillant aussi bien de nains Marteau-hardi résidents que d'étrangers tel des nains de Forgefer, des humains de Hurlevent et des gnomes de Gnomeregan venus également faire la fête.

Car ici, la bière coulait à flot, la ripaille s'étalait sur les tables à foison et des femmes naines aux mœurs plutôt légère se faisaient un plaisir d'écouter le récit des exploits héroïques de leur invités en échange d'un peu de leur chaleur.

Et les aventuriers ne s'en privèrent pas. Pas même Batël qui bien qu'ayant été un nain marié n'était pas contre l'idée de passer une soirée avec une charmante compagnie.

Seul Ouladre, qui à présent faisait partie de l'équipe à temps plein, ne semblait pas intéressé par le charmes des naines présentes ni d'aucune présence féminine, se contentant simplement des victuailles et de la boisson non sans louer la Lumière pour tous les bienfaits que lui procuraient toute cette boustifaille. Par curiosité, Baelbo lui demanda si par hasard le draeneï n'aurait pas une préférence pour les hommes, ce à quoi l'intéressé répondit qu'il n'éprouvait d'attirance pour aucun des genres, confessant qu'il n'en éprouvait ni le besoin ni le désir.

À la grande surprise de ses frères d'armes, Bartelo aussi semblait se désintéressée des femmes naines qui lui faisaient du charme. Il les snobait même et ce malgré leur chaleureuse présence et leur formes généreuses. Le paladin s'était pourtant forgé une réputation de coureur de jupon depuis probablement l'adolescence et ne refusait aucune charmante compagnie fût elle de race humaine, naine ou gnome. Mais depuis son retour de l'Outreterre, c'était comme si plus aucune femme n'était à son goût, pas même pour un coup d'un soir. Et le paladin lui-même n'arrivait pas à expliquer à quoi c'est dû.

Encore plus étrange encore, il touchait à peine à sa nourriture, lui qui d'habitude était plutôt du genre bon vivant, se contentant de se souler en vidant cul-sec des chopes de bières.

Batël attendit que le paladin s'en alla au bar commander un autre tonnelet de bière pour discuter de son état au gnome et au draeneï :

— Vous voulez savoir ce que je pense ? Je crois que notre ami l'humain est amoureux !

— Tu crois ça ? rétorqua Baelbo incrédule.

— Je le pense aussi, vint confirmer Ouladre. Il en a l'attitude typique.

— Reste à savoir de qui ? dit le nain pensif.

— Dites, savez vous où est dame Gahahli ? demanda soudain le draeneï.

— Elle est partie prendre l'air avec son tigre, répondit le gnome. Elle a franchement du mal avec la foule et le bruit.

— Je pensais, justement, suggéra le draeneï. Vous croyez que c'est d'elle que notre ami paladin serait...?

— Non, aucun risque ! rétorqua le nain. Il nous a clairement fait comprendre qu'il n'était pas du tout attiré par les elfes de la nuit et considérait la petite comme rien de plus qu'une amie.

— Même que ça avait un peu fait de la peine à Lili, ajouta le gnome.

— Ah ?

— Après, ne le demandez pas pourquoi ces elfes-là ne l'attirent pas, s'empressa d'ajouter Batël. Perso, j'ai jamais compris les attirances interraciales.

— "Ces elfes-là"... ? répéta Ouladre pensif.

— Deux qui refusent les avances de ces charmantes naines, un qui touche à peine à sa bouffe et Lili partie prendre l'air... Vous savez ce que ça veut dire ? demanda Baelbo.

— Ouaip ! Plus de bouffes et de femmes pour nous, p'tit gars ! répondit Batël.

— Ouais ! À la santé de l'Alliance !


*****

Gahahli aimait passait du temps avec ses frères d'armes fraîchement retrouvés. Elle prenait plaisir à écouter les récits de leurs exploits durant cette "croisade ardente", n'ayant eu à son grand regret que peu contribué ("Tu auras plus de chance la prochaine fois, c'est pas grave !" lui avait assuré Baelbo pour la rassurer). Et elle appréciait d'autant plus leur compagnie si cela pouvait lui faire oublier sa récente dispute avec son père avec qui elle avait décidé de couper les ponts. Ou son incident avec Illidan qui continuait de la tourmenter.

Mais le gnome avait raison à son sujet, elle avait tendance à s'effaroucher dès lors qu'il était question de se mêler à la foule, surtout quand elle était en pleine effervescence.

Tant de mondes, de bruits et d'animations dans un lieu aussi restreint semblaient faire un peu beaucoup pour Gahahli et son Sabre-de-nuit qui avaient toujours préféré le calme et les grands espaces. Passer une heure dans une pièce entouré d'une dizaine d'hommes bruyants, excités comme des puces et ivres morts auraient soulé l'elfe de la nuit avant même qu'elle n'eut eu à voir une seule goutte d'alcool.

Elle préférait s'enivrer de la fraîcheur de la nuit, de l'odeur du pin et de l'herbe sauvage avec un ciel parfaitement dégagée pour la lune et les étoiles, et enfin pour seule ambiance le chant des grillons et parfois celui d'un hibou. D'autant qu'elle se sentait bien plus dans son élément que sous terres et entre quatre murs creusés la roche.

Et puis, elle avait un autre projet pour ce soir et pour célébrer sa victoire contre la Légion Ardente. Et elle avait de trop bonne raisons de ne pas en faire part à ses compagnons d'armes, quitte à laisser en plan à l'auberge et s'amuser sans elle, sous prétexte de devoir faire sortir son Sabre-de-nuit.


Accompagné de Jakua, elle se fraya un chemin à travers la forêt de pins qui occupait la majeure partie de la région et s'arrêta devant un large étang situé à quelques kilomètres du Nid-de-l'Aigle, plus en aval dans la région au beau milieu d'une clairière. L'endroit paraissait désert mais d'une beauté à coupé le souffle. Le ciel étoilé se reflétait sur les eaux de l'étang comme sur un miroir.

— Avec ma famille, on venait souvent passer nos vacances dans la région et nous baigner dans les étangs comme celui-ci, annonça une voix qui venait de derrière les arbres. Du temps où notre mère était encore de ce monde...

Le cœur de Gahahli s'emballa quand elle reconnut la voix.

Il se tenait juste assis au bord de l'étang, le regard perdu dans ses eaux et se relevait tout juste pour recevoir l'elfe de la nuit qui s'empressa de le serrer fort dans ses bras, folle de joie. Même le Sabre-de-nuit s'empressa de se frotter contre les jambes de l'elfe de sang pour lui témoigner sa joie de le revoir.

Peu de temps après la défaite de Kil'jaeden au Puits du Soleil, elle l'avait déjà donné un rendez-vous à Bathris — par l'intermédiaire de Velen après qu'elle avait à nouveau brisé son arc dans la bataille — dans un endroit reculé de l'île à l'abri des regard, dans le but pur et simple de se revoir... Au cas où ce serait la dernière fois.

Mais tout ne s'était pas passé comme prévu, Gahahli s'étant finalement faite repérée par ses compagnons d'armes victorieux et durent donc reporter le rendez-vous. Ce fut Bathris qui avait proposé l'étang comme lieu de rendez-vous.

— Ça le fait tellement plaisir de vous revoir ! dit Gahahli toute émoustillée.

— C'est un plaisir partagé, dame Gahahli ! lui répondit Bathris.

— Allons, pas de "dame" ou de "madame" entre nous ! lui rétorqua l'elfe de la nuit. Vous pouvez m'appeler "Lili" si ça vous plaît.

Au début, elle avait du mal à supporter ce "diminutif" qui lui avait été attribué par Bartelo incapable de prononcer son nom. Mais avec le temps, elle s'y était habituée si bien qu'elle préférait que ses amis l'appelaient ainsi.

— Comme vous voudrez... Lili, dit Bathris. Hé, je vois que vous avez un nouvel arc.

— J'ai... Un peu forcé le précédent, quand nous étions au Puits, lui confessa Gahahli.

— Ce n'est pas grave ! s'empressa de la rassurer l'elfe de sang. J'ai moi même brise mon épée et mon bouclier durant la bataille. Et puis ce qui compte, c'est que vous soyez en bonne santé.

— Oui... Si vous le dites... Heureusement...

— Ça ne va pas ? Je vous sens préoccupée...

— Ce n'est rien ! ... Sincèrement !

— Aurait-ce un rapport avec votre père ?... Vous voyez êtes embrouillé avec lui, c'est ça ?... Ah, si vous saviez comme je me sens coupable...

— Non, ne le soyez pas ! Notre relation commençait à battre de l'aile avant que vous... Et puis je crois que c'est mieux ainsi... Que nous vivions nos vies chacun de nos côtés... Sans interférer avec l'autre... J'espère quand même qu'il ne m'en voudra pas.

— C'est votre père ! Je suis sûr qu'il ne vous en voudra pas. Je vous garanti même que tout finira par s'arranger. Et puis j'ai vite compris à quel point il tenait à vous.

— Je me demande quand même... Si j'étais restée une chasseuse de démon à moitié comme Illidan, est-ce qu'il tiendrait toujours à moi ?

— Oh, sûrement. Il ne serait pas un bon père dans le cas contraire.

— Quand je pense que j'ai été à deux doigts d'entrer dans son manège... J'en ai encore des frissons. À ce propos, vous pensez que je deviendrai comme lui ?

— Comme Illidan ? Quelle idée ! Pourquoi ?

— Et bien... Je connais un peu son histoire et... Je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer que... On n'avait pas mal de points communs. Et je dois dire que ça me fait peur.

— Je crois savoir ce que vous devez ressentir... En fait j'ai eu le même ressentiment avec Kael'thas.

— Ah ?

— Mais un ami très sage m'a expliqué que si le fait de devenir comme quelqu'un comme Kael'thas ou Illidan m'effrayait tant, c'est selon lui un bon signe. Ça démontre que j'ai conscience que ça pourrait m'arriver et si ça devais se produire, au moins j'aurais été préparé psychologiquement et je saurais quoi faire pour que ce ne soit pas irrémédiable, voire que je fais déjà des efforts pour ne pas reproduire leurs erreurs et même pour être meilleur qu'eux. Enfin, c'est ce qu'il dit, lui.

— Et... Vous pensez que ce raisonnement peut s'appliquer à moi ?

— Ce que j'en pense, c'est que la question ne devrais pas se poser dans votre cas.

— Vous croyez ? Même si je me retrouvais avec des cornes et des ailes de dragon ?

— Franchement, même si ça devait se produire, ce dont je doute fort, vous ne serez jamais aussi maboule qu'Illidan ou Kael'thas.

— C'est pourtant ce qu'on dit de moi dans mon entourage, que je suis un peu du genre maboule...

— Et après ? On s'en fiche de ce que pensent les autres ! Et puis vous au moins vous ne vous servez pas des autres comme des pions pour parvenir à vos fins ! Vous ne forcerez jamais quelqu'un d'autre à faire quoi que ce soit de trop dangereux pour que vous le faisiez vous même, si ?

— Jamais de la vie ! Mais il faut dire que j'ai un peu trop le goût du risque...

— Appelez ça le goût du risque, moi j'appelle ça de l'abnégation ! À mes yeux, vous êtes un idéal d'héroïsme et de bonté ! Je défie quiconque me dire le contraire !

— Vous le pensez vraiment ?

— Bien sûr que je le pense ! Vous êtes la personne la plus gentille et la plus dévouée que je connaisse ! Et surtout, vous n'avez pas besoin d'une super force ni de pouvoirs magiques ou chaotiques pour être quelqu'un de spéciale ni déplacer des montagnes. Vous y arrivez à vous seule. Vous êtes spéciale.

Il n'eut à peine le temps de finir sa phrase que Gahahli s'était jetée à son cou et venait poser ses lèvres sur les siennes.


C'était spontané et complètement irréfléchie de sa part.

Mais toutes les éloges de l'elfe de sang à son égard avaient fait naître une pulsion qu'elle n'avait pu contenir, la poussant à lui témoigner son affection en guise de remerciement.

Ce n'était pas souvent qu'elle recevait autant d'éloges de la part d'un type comme Bathris Feusoleil.

Le baiser avait à peine trois secondes. Et quand elle retira ses lèvres, elle ne put que constater qu'elle avait pris l'elfe de sang au dépourvu à la vue de son visage figé par la surprise.

— Je... Je suis désolée, balbutia Gahahli rouge de honte quand elle se rendit compte de ce qu'elle venait de faire. C'était plus fort que moi... Je n'ai pas pu m'empêcher... Je...

Ce fut au tour de Bathris de l'interrompre quand il dégagea délicatement ses longs cheveux bleus de son visage avant de plaquer avec la même délicatesse ses doigts sur ses joues et les yeux plongés dans les siens, posa ses lèvres sur les siennes.

Les deux elfes s'enlacèrent et s'abandonnèrent à ce baiser durant ce qui semblait durer une éternité, savourant à chaque seconde ce contact de lèvres pressées les unes contre les autres ainsi que de la chaleur de leur corps qui se serraient l'un contre l'autre sans tenir compte du temps qui passait. Et qui les faisaient oublier tous les tracas qui les avaient tourmentés durant ses derniers jours. Ce fut un instant de pur bonheur pour les deux elfes.

Heureusement pour eux, il n'y avait personne dans les environs, à part Jakua qui se couvrait les yeux de ce moment trop intime avec ses pattes ainsi que quelques animaux nocturnes. Mais aucun qui n'aurait fait de scandale en voyant deux elfes supposés être ennemis s'échanger leur salive et ainsi gâché ce moment si spécial.

Le baiser aurait pu durer une éternité mais si les deux elfes n'avaient pas distraitement relâcher leur étreinte une petite seconde.

— Whoa ! s'exclama Bathris.

— Vous m'ôtez les mots de la bouche ! confirma Gahahli.

— Dites, vous ne trouvez pas qu'il fait chaud tout d'un coup ?

Les deux elfes réalisèrent aussitôt que non seulement ils étaient tous les deux rouges comme des tomates mais que malgré la fraîcheur de la nuit, ils avaient chaud jusqu'à la pointe de leur oreilles. Tellement chauds que la nuit leur parut trop tiède. Cela était sans nul doute dû à leur embrassade passionnée.

Puis en contemplant l'eau calme de l'étang et voyant qu'il n'y avait toujours personne dans les environs, l'elfe de la nuit eut une idée encore plus folle que la précédente.

— Un petit bain de minuit pour vous rafraîchir ? proposa-t-elle

— Pardon ? s'exclama Bathris pris au dépourvu.

— Vous disiez que vous vous baignée dans ses étangs avec votre famille ! lui fit rappeler Gahahli qui commençait déjà à déboutonner ses vêtements. Pourquoi le refaire là ? Tant qu'on est que tous les deux ?

— Mais... vous voulez dire... sans vêtement ? demanda l'elfe de sang de plus en plus gêné.

— Bien sûr, quelle question ! lui répondit Gahahli qui continuait de se déshabiller. Vous prenez vos bains avec vos vêtements, vous ?

— Euh... Non bien sûr que non, mais... C'est que je n'ai pas de maillot de bain...

— Et alors ? Moi non plus ?

— Attendez... Vous parlez vraiment de...

— Quoi, ça vous pose un problème, une elfe nue ?

L'elfe de sang n'eut nullement besoin de répondre davantage. Son silence et son sourire gênés ainsi que le regard fuyant le teint de son visage en disait suffisamment long. Et son malaise n'était pas aidé par la vision de l'elfe de la nuit en petite tenue.

Décidément, les gens avaient un problème avec la nudité dans ce pays ! songea-t-elle légèrement dépitée.

— Bon ben... si vous gêne tant que ça, je ne vais pas vous forcer la main, dit-elle en gardant la tête haute. Vous n'aurez qu'à regarder ailleurs. Moi je vais me baigner. Et quand je me baigne... (elle retira ses sous-vêtements) C'est nue comme un ver.

Se sentant libérée de ses vêtements, elle s'étira et inspira l'air frais de la nuit venant caresser son corps avant de s'approcher de l'eau et y tremper ses doigts de pieds pour en tester la fraîcheur. Elle n'avait pas ressenti une telle sensation depuis sa tendre enfance, quand elle et ses parents avaient pour habitude de prendre leur bain dans les lacs et rivière d'Orneval en toute insouciance.

— Prévenez-moi quand vous changerez d'avis ! dit-elle à Bathris avant de plonger dans l'étang.

Elle savoura la fraîcheur de l'eau dans laquelle elle immergeait jusqu'au cou et en profita pour faire quelques longueurs quand elle entendit l'elfe de sang resté sur la berge crier :

— Et puis zut !

L'elfe de la nuit tourna la tête vers la berge où il se tenait et se retint de rire en voyant Bathris se déshabiller à son tour. Elle en profita pour se rincer l'œil et constater que l'elfe de sang était plutôt musclé pour quelqu'un de son gabarit.

Il s'arrêta néanmoins quand lui vint le moment de retirer son caleçon et demanda timidement à l'elfe de la nuit dans l'eau :

— Euh... Ça vous ennuierait de regarder ailleurs ?

Gahahli haussa les épaules avec un rictus et prit une grande inspiration avant de plonger la tête dans l'eau les yeux fermés. Si elle n'avait pas de souci à révéler son anatomie à des gens en qui elle avait suffisamment confiance, elle respectait néanmoins leur intimité.

Elle attendit d'entendre un "plouf" avant de remonter, de rouvrir les yeux et vit l'elfe de sang à son tour immergé jusqu'au cou, sans avoir eu le temps d'apercevoir ses parties intimes.

— Brrrr ! Ça vrai que ça rafraichi ! s'exclama l'elfe de sang grelottant mais toujours aussi rouge qu'il était avant de plonger.

— Vous voyez ? Ce n'est pas une si mauvaise idée ! Au fait, qu'est ce qui vous a fait changé d'avis ?

— Je venais de me rappeler d'un autre conseil que... m'avait prodigué mon ami très sage.

— Ah ? Et qu'est ce donc ?

— On ne vit qu'une fois !


Les deux elfes, libérés de leur tracas comme de leur vêtements, passèrent une bonne partie de la nuit à barboter dans l'étang, à s'éclabousser, à faire des longueurs ainsi que des concours d'apnée sous le regard attentif de Jakua, resté sur la berge au sec. Puis le reste de la nuit à se sécher et se rhabiller avant les premières lueurs du jour.

Devant impérativement retrouvé ses compagnons d'armes à l'auberge du Nid-de-l'Aigle à l'aube, Gahahli fut contrainte de prendre congé mais promis à Bathris qu'ils se reverraient un autre jour et resteraient en contact. Non sans lui laisser un dernier et langoureux baiser.

Un sentiment d'excitation envahissait la jeune elfe de la nuit quand elle s'en retourna au Nid-de-l'Aigle avec son Sabre-de-nuit, à l'idée de s'embarquer dans une nouvelle aventure totalement inopinée et pleine de risques... Exactement comme elle les aimait.

En la regardant s'éloigner, Bathris fut quand à lui empli d'un sentiment qu'il n'avait pas ressenti depuis des lustres. Un sentiment de bonheur et d'espoir.

"À très bientôt, Lili..." murmura-t-il le sourire au lèvres avant de voir l'elfe de la nuit disparaître à travers la forêt de pins tandis que les rayons du soleil levant illuminèrent les Hinterlands.

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