Elle s'apellera Lily

Chapitre 28

3346 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 08:47

J’attendais quelques minutes avant d’entendre un ronchonnement suivi du bruit d’une clé dans la serrure. Il m’ouvrit la porte avec son regard tout ensommeillé.

-Qu’est-ce que tu fais là ? T’as perdu ta clé ?

Me demanda-t-il en s’effaçant pour me laisser entrer.

-Mais qu’est-ce qu’ils ont fait à tes cheveux ?!

Je n’avais pas bougée d’un pouce, scotchée par cette tignasse brune hirsute et particulièrement….courte.

-Quoi ?

Me demande-t-il de son air grognon du matin. Je me décidais enfin à entrer en lui montrant sa tête du doigt.

-Oh ! J’avais oublié…

Je tendais la main pour toucher ses cheveux, mais la texture n’était pas très agréable, il avait surement dût avoir du gel de mis dedans. Ça lui allait particulièrement bien. Son visage était dégagé, ça frange que je trouvais personnellement affreuse avait disparue et la couleur noir corbeau lui allait comme un gant, même si je regrettais un peu le rouge flamboyant qui faisait aussi parti de sa personnalité. Il avait devant moi l’air d’un dieu sombre, d’une entité sauvage et obscure. J’en frissonnais de désir.

-Pourquoi tu n’a pas dormi avec moi cette nuit ?

Je sursautais. J’étais perdue dans ma contemplation. Puis je lui souriais, après tout, je m’étais posée la même question.

-C’est ce que je venais te demander en venant ici.

Je m’asseyais sur le lit, rassurée.

-Je me suis couché direct en rentrant. Toute la journée, ils m’ont trimballés dans tout les sens à faire des trucs chiant comme la mort, j’étais naze en rentrant alors j’ai demandé ma clé et j’ai fusionné avec la couette.

-Pareil pour moi, je ne pensais pas qu’il nous avait réservé chacun une chambre…

-Bof, je suppose que ça doit être une obligation légal pour Nick comme nous ne sommes pas encore majeur…

-Probablement.

Il me regardait de haut en bas.

-Ils ne t’ont pas changé grand-chose à ce que je vois…

Je passais une main dans mes cheveux en prenant une pose avantageuse.

-Que veux-tu, j’étais déjà la perfection et la mode incarnée, le bidon en plus, il ne pouvait pas faire grand-chose…

Il rigolait en me regardant avec amour. Ses yeux aciers me faisaient fondre et sa nouvelle coupe le mettait vraiment en valeur.

-C’est vrai ! ça vas ? Tu n’es pas trop fatiguée avec tout ce ramdam ?

-Juste un peu, mais je suis surtout excité pour ce soir en fait. Un concert à Paris ! Combien d’artistes en rêves sans jamais y arriver ! On a de la chance !

-Oui, j’ai de la chance.

Il s’allongea sur le lit et je me décalais pour qu’il puisse poser sa tête sur mes genoux. Il plaqua l’oreille sur mon ventre tendu, comme s’il voulait entendre ce que le demi-globule en pensait d’être à Paris. Il leva soudain la tête en me regardant.

-Je l’entends !

-Tu te moque de moi…

Il recolla l’oreille en souriant.

-Je t’assure, on a l’impression d’entendre des percussions dans un bocal, c’est fun !

-T’es sérieux là !

-Absolument ! Mon fils sera un batteur !

-Et si c’est une fille ?

-Pareil, mais avec le rythme dans la peau comme ça, ça sera forcément un pti mec.

-Dis-donc ! Dis tout de suite que les filles n’ont pas le sens du rythme !

-Si, mais ce n’est pas le même.

-Mais bien sur !

-Salut Kirk !

-Pourquoi Kirk ?

-Comme le guitariste de Metallica, Kirk Hammet ! Où ça peut être Kurt, comme Kurt Cobain…

Poc dans le bidon.

-Tu vois, il aime déjà son prénom.

-Moi je crois plutôt qu’il ou elle voulait te frapper pour dire des bêtises pareilles…

On se regardait avec tendresse tout les deux. Je ressentais son émotion autant qu’il devait partager la mienne face à ce petit bout d’avenir tout proche. Un coup fort frappé à la porte nous stoppa dans ce moment privilégié.

-On se retrouve en bas dans 20 min !

-Ok ! Répondis-je. Tu devrais aller prendre ta douche…

-Tu viens la prendre avec moi ?

Il avait le regard taquin de celui qui sait combien il peut être désirable.

-J’adorerais, mais je n’ai pas mes affaires avec moi et c’est une journée trop importante pour qu’on la commence en retard. Allez file, je t’attends.

Il se releva, m’embrassa avant de récupérer ses affaires pour aller se doucher. En l’attendant, je m’allongeais sur le dos en caressant mon ventre, sentant à travers la peau les mouvements du bébé qui se faisait au fil des semaines de plus en plus sentir. J’avais ronchonné pour Kurt, mais j’aimais bien… Ou alors Jimmy pour Jimmy Hendrix, ça sonnait bien aussi…Je me demande s’il entendait vraiment le bébé bouger en collant son oreille sur le ventre, je ne pourrais jamais le savoir, personne n’est assez souple pour coller son oreille contre son ventre, et encore moins une femme enceinte… Dommage…

Et pour une fille alors ? Etrangement, je n’arrivais pas à me faire à l’idée que ce serait une fille. Et Castiel avait l’air tellement convaincu que ce serait un garçon que je n’arrivais à penser qu’à des noms de garçon… En plus, dans les icones du rock, y’en avait pas beaucoup des prénoms de filles…

Castiel sortait de la salle de bain, près à descendre prendre le petit déjeuner avec les autres. De toute façon, nous avons encore le temps avant de devoir trouver le prénom du bébé… Je prenais la main qu’il me tendait puis descendait avec lui pour aller manger. Je me demandais ce qu’ils auraient fait de Lysandre et la curiosité me pousse en avant. Je m’asseyais à la table déçue. Lysandre n’avait pas changé. Rien. Nada. Toujours la même coupe de cheveux, toujours les yeux vairons, toujours ses fringues victoriennes…. C’était….frustrant ! Oui, frustrant ! J’aurais bien voulu voir ce que ça donnait sur lui un look plus normal…. Quand je posais la question à Nick, celui-ci me répondit qu’il serait le point focal du groupe après mon départ et que changer une identité si marquée serait une erreur. Pas faux, mais ça ne m’empêchais pas d’être déçue…

La journée défila à toute vitesse, dans l’après-midi, nous répétions les chansons qu’on devrait interpréter le soir même, en particulier « Forget me, love me » dont on avait retravaillé les arrangements et qui serait notre prochain single.

Lorsque maquillée et habillée, j’attendais derrière le micro la levée de rideau sur scène, j’étais stressée comme je ne l’avais jamais été. On pouvait entendre à travers le velours bordeaux les frottements de pieds, les joyeuses bousculades et les voies joyeuses  de nombreuses personnes venues s’amuser pour le nouvel an…. Vraiment nombreuses…J’entendais le chauffeur de salle commencer son speach qui allait nous annoncer. Je prenais une grande inspiration, secouait mes bras en tournant la tête pour détendre les muscles crispés de mes épaules et du haut de mon dos, posais ensuite la main droite sur les mains sur le micro en penchant la tête avant que le spot n’illumine l’endroit où je me trouvais. Dans mon dos, les premières notes s’élevèrent, dans mon ventre, le bruit des basses semblait plaire au bébé qui me donnait l’impression de taper en rythme.Je souriais et laissais ma voie ce mêler à cette harmonie étrange et fabuleuse. Transmettant au public tout l’amour que j’éprouvais en cet instant.Les échos du concert étaient plutôt favorables d’après Nick qui nous rejoignait pour le petit déjeuner. Nous repartions pour Amoris dans deux heures à peu près, j’étais sciée par le concert d’hier et j’avais eu beaucoup de mal à dissimuler mes valises sous les yeux de ce matin. C’était jouissif d’entendre le tonnerre d’applaudissements à la fin du spectacle, les spectateurs nous ont même demandé de rejouer la dernière chanson ce que nous avions fait malgré notre épuisement physique. Je dois bien dire que si j’avais pût rester au lit, je ne m’en serais pas privé. Les garçons aussi n’étaient pas très frais.

Lorsqu’enfin l’avion atterri et que je découvrais Marc et Elisa qui étaient venus nous chercher, je me sentais soulagée. Je n’avais qu’une hâte, retrouver mon chez-moi et mon train-train quotidien. Les parents de Castiel avaient l’air inquiet, probablement à cause de nos têtes de déterrés. Une remarque sur la nouvelle coupe de cheveux de Cast détendait l’atmosphère. Je m’endormais dans la voiture qui nous ramenait à la maison.

Je finissais de dévorer mon petit déjeuner le lendemain quand les parents de Castiel entrèrent dans la cuisine et s’assirent en face de moi, l’air sérieux.

-Arthémis, il faut qu’on te parle.

Ça sent pas bon cette histoire.

-Oui ?

-Tes parents ont appelés il y a deux jours. Ils rentrent de Chicago dans un mois. Ton père a obtenu une nouvelle mutation.

Je reposais la tartine que je m’apprêtais à manger.

-Qu’est-ce qu’ils veulent ?

-Que tu retourne vivre avec eux. Ecoutes, quand on leur a apprit pour le bébé, ils voulaient qu’on t’incite à avorter. Nous leur avons répondus que c’était ta décision et que personne ne pourrait te forcer à faire ce choix. Ils refusent d’entendre parler du bébé. Ils nous ont dit qu’il viendrait te récupérer et qu’il le ferait adopter si nécessaire.

Les pensées se bousculaient dans ma tête. Quitter Amoris, quitter Castiel et ma vie ici ? Faire adopter mon bébé ! Mais pour qui ils se prenaient. Je commençais à pleurer mais pas de résignation, d’une rage puissante et incontrôlable.

-Qu’est-ce qu’il se passe ?

Castiel venait d’apparaitre dans la cuisine, ébouriffant ses cheveux comme il le faisait toujours quand il n’est pas réveillé.

-Nous expliquons à Thémis que ses parents reviennent en France.

-Quoi ?!

Bah là, il est réveillé… Je me retournais vers Marc.

-Qu’est-ce qu’on peut faire ? Je ne veux pas quitter ma vie d’ici.

-J’ai pris la liberté de contacter votre avocat. Il nous conseille de demander ton émancipation auprès d’un juge au plus vite. D’après lui, ça ne devrais pas poser de problèmes. Tu es sérieuse, tu as de bons résultats scolaires et tu arrive à mener de front ta scolarité, ton travail et ta grossesse. Sans compter que tu seras majeure d’ici moins de 3 ou 4 mois…

-Nous allons faire ça alors, je ne veux pas partir d’ici.

-Très bien, je vais appeler l’avocat alors.

Elisa et Marc quittèrent la pièce, Castiel s’approcha de moi, passant ses bras autour de mon cou, nichant son visage dans mes cheveux.

-ça va aller, nous ne te laisserons pas partir.

-J’espère que ça ira…

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Assise dans un fauteuil, je faisais face à mes parents avec une impression de déjà vue désagréable, excepté le fait que Castiel avait la main de posée sur mon épaule et était debout derrière moi, près à me soutenir. J’étais aussi plus sereine. Les derniers mois m’avaient fait grandir plus vite.

-C’est de la folie Arthémis. Tu vas gâcher ta vie.

-J’ai pourtant l’impression de n’avoir jamais été aussi heureuse. J’ai de bonnes notes et un avenir professionnel qui s’annonce prometteur. Je ne vois pas en quoi ça pourrait gâcher ma vie.

-Tu sais bien que je ne parle pas de ça.

-Oui, je le sais. C’est de mon bébé que tu parles. Tu as peur qu’il compromette ma carrière comme j’ai compromis ta carrière de mannequin.

-C’était une autre époque. Toi, tu as le choix.

-Ne me reproche pas tes décisions Maman, toi aussi tu avais le choix, la seule différence entre nous, c’est que moi, je l’assume. Je ne reprocherais jamais à cet enfant ma décision, jamais.

Mes parents avaient demandés à me voir deux jours après que le juge m’ai jugé apte à être émancipée. A la surprise générale, j’avais acceptée. J’avais besoin de mettre les choses au point avec eux. Pour moi-même et pour mon bébé. Je devais être en paix dans la relation qui m’unissait à ma mère avant d’en créer une avec mon enfant. J’avais le sentiment que c’était important. Un silence gêné s’installa dans la pièce.

-Alors tu ne changeras pas d’avis.

-Non, pour rien au monde je ne changerais d’avis. Ma décision est prise depuis un moment déjà.

-Tu es décidément aussi bornée que ton père.

Je me demandais bien qui dans cette pièce était la plus bornée de tous. Je jetais un regard à mon père qui restait là à regarder ses mains jointes et serrées sur ses genoux.

-Puisque nous nous sommes tout dit…. Viens Richard, nous partons.

Elle se leva et partit sans dire un mot. Mon père se leva ensuite, je lui trouvais d’un seul coup l’air très vieux. Las.

-Alors ?!

-J’arrive !

Ma mère avait déjà atteint l’entrée et elle houspillait mon père de l’extérieur lui enjoignant de se dépêcher. Il hésita quelques instant, sortit une enveloppe de sa poche et la déposa dans mes mains sous mon regard ébahi puis il partit sans dire un mot rejoindre son dragon de bonne femme. J’attrapais la lettre et l’ouvrait pour la lire. Les parents de Castiel s’éclipsèrent silencieusement.

-Qu’est-ce que ça dit ?

Je reniflais un bon coup puis tendait la lettre à Castiel avant d’éclater en sanglots, laissant des larmes incontrôlables s’extirper de mon corps.

Ma chérie.Je sais d’avance que les choses ne vont pas se passer comme je l’espérerais. J’hésite et je doute à l’instant même où je t’écris cette lettre, car je me demande si nous nous reverrons après cette dernière rencontre. J’aime ta mère, je l’ai toujours aimé et je l’aimerais toujours. Elle n’a pas toujours été ainsi, crois moi. Je m’en veux parfois de l’avoir forcée à te garder mais quand je me remémore le premier regard que nous avons échangés alors que tu n’avais pas quelques minutes de vie, mais regrets s’envolent comme poussières sous le vent.Je te donne l’adresse du siège de ma boite, ils me font parvenir tout mon courrier qui arrive là-bas en fonction de mon lieu de travail. Si tu trouve la force de pardonner ma faiblesse, j’aimerais beaucoup que tu m’envois au moins une photo de ton bébé et des nouvelles de toi.Sache que moi, je t’ai toujours aimé.Ton père.

Castiel fit le tour du canapé pour me prendre dans ses bras, je pleurais, mais ces larmes n’étaient pas si amères… 

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