Sentiments et Ressentiments

Chapitre 9 : Chapitre 8 - Branle-bas de combat ! Trouver Karin et Yuzu !

14809 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 10/11/2016 06:12

Chapitre 8 : Branle-bas de combat : trouver Karin et Yuzu !

 

Très tôt le lendemain matin, Ichigo s'affairait dans la cuisine. Le jour n'était pas encore levé mais étant donné qu'il devait aller travailler plus tôt que coutume, il s'était levé de bonne heure afin de préparer le petit déjeuner de sa femme et sa sœur. Il disposait sur la table de la cuisine des tartines beurrées avec le pot de confiture de fraises avec deux verres de lait chaud et la bouteille de jus d'orange.

Tandis qu'il terminait sa besogne, le jeune homme entendit des bruits de pas. Il retint discrètement son souffle et poussa un soupir de soulagement en constatant qu'il s'agissait seulement d'Orihime, les yeux encore pleins de sommeil.

_ Bonjour, Ichigo, fit la rousse en réprimant un bâillement. Tu es déjà debout ?

_ Oui, il faut que je sois au château plus tôt ce matin, expliqua-t-il en souriant légèrement. Installe-toi, je vais réveiller Karin.

Alors que sa moitié prenait tranquillement place sur une chaise, le roux sortit de la cuisine et se dirigea sans hâte vers la chambre de Karin. Il était vraiment content qu'elle habite avec eux, à présent. Seulement, son bonheur serait complet une fois que Yuzu serait revenue parmi eux. Il mourrait d'envie de faire sa connaissance.

Mais en montant les escaliers, un frisson de mauvais augure courut le long de sa colonne vertébrale. Ichigo accéléra donc le pas et se retrouva devant la porte de la chambre de sa cadette en moins de temps qu'il n'en aurait fallu pour le dire.

Le régisseur frappa trois à fois à la porte et entendant aucune réponse, il l'ouvrit lentement. Ce qu'il vit le figea d'effroi. Le lit était défait, le bureau renversé et la fenêtre ouverte en grand. Un drap manquait sur le lit. Alors qu'elle aurait dû être dans son lit, sa sœur n'était pas là. Il ouvrit la porte de la salle de bain et là, même constat.

Mais comment avait-il pu ne rien entendre ?

_ Espèce d'enfoiré ! Tu vas me le payer très cher ! siffla-t-il entre ses dents pour ne pas alerter sa femme.

Sans toucher à rien, le jeune homme posait ses yeux effarés sur la pièce en désordre et descendit à toute vitesse dans le salon.

Entendant le vacarme fait par son mari, Orihime le rejoignit et vit que Karin n'était pas avec lui. Elle mit une main devant sa bouche. Oh non ! Elle avait peur de comprendre.

_ Ichigo ? Où est Karin ? demanda-t-elle, ne voulant pas croire à son intuition.

_ Pas là.

Il frappa violemment le mur juste en face de lui avec son poing.

_ Elle a été enlevée cette nuit, sous notre nez, gronda le jeune homme, ses yeux noisettes lançant des éclairs. Karin, Yuzu, je vous retrouverai, je vous le jure.

Orihime était sous le choc de cette nouvelle. Comment avait-il pu réussir cette fois ? Elle se sentait défaillir sous le coup de l'émotion. Ses jambes flageolaient et Ichigo la rattrapa avant qu'elle ne tombe par terre. Il l'installa doucement sur le canapé et la fit tourner vers lui.

_ Hime, je t'assure que ce salaud va payer, fit le roux en la regardant dans les yeux. Essaie de rester calme, le stress n'est pas bon pour toi et le bébé. Je m'occupe de tout.

Il partit dans son bureau, culpabilisant de laisser sa femme seule dans un moment pareil. Il prit une feuille et une plume puis écrivit un message à l'intention de Renji pour qu'il vienne tenir compagnie à Orihime en lui expliquant dans les grandes lignes ce qu'il venait de se passer. Ensuite, le jeune homme écrivit deux autres missives à l'intention du duc Hitsugaya et de son père.

Ichigo poussa un profond soupir de colère et de désespoir mêlés. S'il tenait celui qui avait enlevé ses sœurs, il lui ferait passer un mauvais quart d'heure. Mais tout de même, quel lien y avait-il entre le duc, sa fiancée, Karin et Yuzu, et leur père ? Il ne comprenait toujours rien mais une chose était sûre, cependant : il fallait retrouver ses deux petites sœurs et vite !

 

Au même moment, chez les Kuchiki...

Renji et Rukia se tenaient devant le bureau de Byakuya, tendus et pleins d'espoir à la fois. Le duc ne daignait pas leur accorder le moindre regard et le vicomte commençait à s'impatienter devant le silence du ténébreux.

_ Nii-sama, pourquoi nous avoir fait venir ici ? s'enquit timidement Rukia en lissant les pans de sa robe violette.

Au son de la voix de sa sœur adoptive, Byakuya releva la tête et toisa le vicomte Abarai froidement. Personne ne savait vraiment ce qu'il pensait et la situation devenait de plus en plus pesante. Il poussa un discret soupir et consentit enfin à donner la raison de leur présence.

_ Je vais vous communiquer ma réponse concernant votre mariage, annonça-t-il de but en blanc.

Dans son dos, la jeune fille croisait les doigts en espérant que la réponse de son frère serait celle qu'elle attendait depuis longtemps. Mais connaissant Byakuya comme elle le connaissait, Rukia se doutait que rien n'était aussi simple, avec lui.

_ J'ai décidé de consentir à votre union, mais à une condition.

Le duc Kuchiki fusilla Renji d'un regard polaire et celui-ci se mit à déglutir en voyant la menace contenue dans ses prunelles.

_ Si jamais un jour j'apprends que ma sœur est malheureuse, j'annule ce mariage immédiatement. Est-ce clair, vicomte ?

_ Oui, Votre Grâce, acquiesça le pauvre Renji au garde à vous.

Le visage de Rukia s'était éclairé d'un sourire lumineux à l'annonce de sa décision. Byakuya se dit qu'il ne s'était pas trompé, une fois de plus.

_ Les bans seront publiés d'ici deux jours, termina le duc en fermant le dossier qu'il tenait à la main.

_ Merci, Nii-sama, fit la jeune fille d'une voix émue.

Lorsque sa sœur souriait ainsi, elle lui rappelait sa femme Hisana – Dieu ait son âme – et cette idée le fit esquisser un sourire en coin.

Les deux nouveaux fiancés prirent congé en se tenant par la main, ce qui fit soupirer tristement le duc. Lui aussi avait connu ce bonheur, avant qu'il ne lui soit brutalement arraché. Il avait encore du travail, il fallait qu'il cesse de songer au passé. Seul le bonheur de sa sœur adoptive lui importait et il avait rempli sa mission. À son futur mari, maintenant, de prendre le relais.

 

Depuis le lever du soleil, Toshiro se trouvait dans son bureau en train de relire la lettre envoyée par son père à titre posthume. Derrière lui se trouvait le portrait de son père, le cinquième duc. Il ne cessait de jeter des coups d'oeil brefs à ce tableau. Le duc n'arrivait pas à se décider s'il devait ouvrir ou pas la cachette indiquée par son père dans cette lettre.

Mais la curiosité était trop forte : il bougea la peinture et découvrit la fameuse cachette. Dire qu'il ne la connaissait même pas avant tous ces événements. Le jeune seigneur ouvrit lentement le coffre et découvrit à l'intérieur une boîte en carton, somme toute banale.

Cependant, entendant des bruits de pas s'approcher à toute vitesse, le duc Hitsugaya remit rapidement tout en place avant de s'installer à son bureau, comme si de rien n'était. Bien lui en prit car quelques minutes plus tard, le majordome entra dans la pièce.

_ Votre Grâce, j'ai une missive très urgente de Monsieur Ichigo qui vient d'arriver à l'instant, fit Shin d'une voix fébrile.

_ Merci, dit Toshiro en prenant la lettre.

Aussitôt après avoir saisi l'enveloppe, le jeune homme aux cheveux de neige eut un très mauvais pressentiment. Son régisseur lui envoyait rarement des messages, donc ce devait être très important. Et le fait que son majordome soit si stressé n'était pas anodin. Son instinct lui disait qu'il y avait un problème. Sans attendre plus longtemps, Toshiro ouvrit donc la missive et se mit à déchiffrer son contenu.

 

Votre Grâce,

 

Ma sœur Karin a été enlevée, cette nuit. Ni ma femme, ni moi n'avons entendu quoi que ce soit. Cette ordure paiera très cher de s'en prendre ainsi à ma famille. Voilà, je pense que vous devez être au courant.

 

Ichigo Kurosaki.

 

Cette nouvelle lui fit l'effet d'une bombe. Le duc ne s'y attendait vraiment pas. Le souffle court, il alla se positionner devant la fenêtre avant de l'ouvrir. Il avait besoin d'air.

Laissant errer ses prunelles de glace sur le jardin de sa mère, Toshiro serra les poings de colère. Qui donc pouvait bien vouloir s'en prendre aux sœurs de son régisseur ? Le fait de ne pas avoir encore de réponse mettait les nerfs du jeune homme en pelote.

_ Bon sang ! jura-t-il en serrant les dents. Karin...

Une peur sourde s'empara de lui à l'idée de ce que la jeune fille pouvait endurer, en ce moment-même. Le duc ne voulait pas la perdre, pas maintenant qu'il savait ce qu'il éprouvait pour elle. À la pensée de ne plus jamais voir son sourire, Toshiro laissa couler une unique larme sur sa joue. C'était au dessus de ses forces.

Secouant la tête, il reprit ses esprits avant de refermer la fenêtre. Ce n'était pas le moment de se laisser aller ainsi. Le noble alla s'installer sur le canapé mais, à peine était-il assis que quelqu'un frappa à la porte de son bureau.

_ Entrez !

Shin entra doucement dans la pièce et ferma la porte.

_ Votre Grâce, la police est là et aimerait vous parler, l'informa son fidèle majordome.

_ Conduisez-les à mon bureau.

Le domestique hocha la tête et alla chercher ses visiteurs. Pendant qu'il attendait, Toshiro se sentait perdre pied face aux événements. Une sensation très désagréable pour lui qui avait toujours tout contrôlé. Le mieux qu'il avait à faire était d'attendre. Il se sentait tellement impuissant et le pire de tout était qu'il ne savait pas comment tout cela allait finir.

_ Bonjour et désolé de vous importuner, Votre Grâce, le salua un homme blond, grand et sec.

Il était accompagné par une jeune femme, blonde également.

_ Je suis l'inspecteur Shinji Hirako et voici ma collègue, l'inspecteur Hiyori Sarugaki.

_ En quoi je peux vous être utile, inspecteur ? demanda le jeune duc en fronçant les sourcils.

_ Et bien voilà...

 

Deux heures plus tard, le duc Hitsugaya était en route pour la maison de son régisseur. Il ne parvenait pas à rester en place alors que les jeunes filles couraient un grave danger. Voilà qu'il se mentait à lui-même maintenant, ironisa Toshiro intérieurement en fermant les yeux.

Il se trouvait tellement pitoyable, en ce moment. Comment avait-il fait pour ne rien voir venir ? C'était à prévoir pourtant ! Dire qu'on louait sa grande intelligence, il y avait de quoi rire.

Puis tout à coup, un flash se fit dans son esprit tourmenté. Et si... ? Non, impossible. Elle était certes détestable mais elle n'irait pas mettre la vie de deux jeunes filles en danger volontairement. Ou alors il ne la connaissait pas si bien que ça.

Il était vrai que sa fiancée se faisait de plus en plus empressée auprès de lui, depuis l'apparition de Karin dans sa vie. Y aurait-il un rapport ? Craignait-elle d'être remplacée ? Peut-être, après tout, la crise de jalousie qu'elle lui avait faite le lendemain du bal allait dans ce sens.

_ Je commence vraiment à divaguer, soupira-t-il doucement. J'ai vraiment besoin de sommeil.

Perdu dans ses pensées, le jeune seigneur n'avait pas vu qu'il était arrivé à destination plus vite que prévu. Il descendit donc prestement de voiture et alla frapper à la porte des Kurosaki en congédiant son cocher. Non loin de lui, un bout de tissu blanc dans l'herbe verte attira soudain son attention. Il se souvenait que la brune en portait un similaire à celui-ci.

Mais il n'eut pas le temps de réfléchir davantage à sa trouvaille car la porte s'ouvrit rapidement, si vite que Toshiro sursauta.

_ Votre Grâce ? Venez, entrez, l'invita son régisseur, aussitôt la surprise passée.

Les deux hommes se dirigèrent dans le salon où ils retrouvèrent Orihime prostrée sur un fauteuil. Le roux rejoignit aussitôt sa femme et la serra contre lui.

_ Hime, je te promets qu'on va les retrouver, assura Ichigo en serrant les poings.

Même s'il ne savait pas comment tenir cette promesse...

_ Je sais que vous attendiez votre sœur, dit Toshiro dans un souffle. Mais je suis venu vous voir car je voulais vous le dire en personne : la police est venue me rendre une petite visite tout à l'heure.

À ces mots, Orihime releva ses yeux pleins de larmes contenues et fit face au duc avec une expression d'étonnement sur son beau visage. La police ? Mais pour quelle raison irait-elle voir le duc ? Il n'avait rien à voir dans cette affaire ! Quelque chose clochait.

Sans le savoir, Ichigo était d'accord avec sa femme. Ce n'était pas normal, se dit-il en serrant les dents. S'il tenait entre ses mains l'ordure qui a osé enlever ses deux sœurs, il ne ferait pas long feu.

Le jeune régisseur se sentait terriblement coupable. Il n'avait pas été capable de protéger Karin alors qu'il lui avait promis qu'il ne lui arriverait rien. Quel idiot ! La peur de perdre ses sœurs cadettes le prenait aux tripes et il se sentait incapable de prendre la moindre décision.

Mais il devait se reprendre, Yuzu et Karin avaient besoin de lui. Cette pensée lui donna le coup de fouet dont il avait besoin. Ichigo secoua la tête et se concentra de nouveau sur la conversation entre sa femme et le duc.

_ De quoi voulaient-ils vous parler ? demanda la jeune femme d'une voix tendue.

_ Les questions habituelles, répondit le noble aux cheveux d'argent en prenant place sur le fauteuil en face de la rousse.

Le silence tomba instantanément après cette phrase. Chaque personne présente se sentait mal et leurs nerfs étaient à fleur de peau. Le problème était qu'ils n'avaient aucune piste plus ou moins sérieuse à exploiter. De quoi rendre folles les personnes les plus raisonnables...

Puis le fameux ruban blanc revint à l'esprit du duc. Il fit signe au couple de le suivre à l'extérieur et les mena au bout de tissu se trouvant devant un buisson.

Avisant le ruban de sa sœur dans l'herbe, Ichigo devint fou de rage et frappa de toutes ses forces un arbre qui se trouvait à proximité.

_ Je vais le trouver et je vais buter cette ordure ! fulmina le jeune homme en frappant le tronc de plus belle.

_ Calmez-vous, Kurosaki, lui intima le duc d'une voix froide qui cachait mal son extrême inquiétude. Ce n'est pas en perdant votre calme de cette manière que vous allez pouvoir aider vos sœurs. Et pensez à Orihime : elle a besoin de vous.

_ Ichigo, je t'en prie, renchérit sa femme en entourant la taille du roux de ses bras. Arrête de te faire du mal !

La voix pleine de détresse de la rousse calma tout de suite le régisseur qui cessa ses coups de poings. Ses deux mains étaient en sang mais la douleur qui les parcouraient n'était en rien comparable à celle qui lui empoignait durement le cœur.

Ichigo avait perdu le contrôle de ses émotions et il détestait ça. Le jeune homme prit le mouchoir que le duc lui tendait avec reconnaissance et entreprit d'ôter le sang coulant sur ses mains blessées.

_ Pardon, s'excusa-t-il en baissant les yeux, envahi par la honte.

_ Votre réaction est légitime mais ce n'est pas le moment de craquer, fit remarquer Toshiro avec un léger sourire.

Tel frère, telle sœur, se disait-il. Ils étaient aussi impulsifs, l'un que l'autre. Un voile de tristesse apparut sur son visage en pensant à Karin. Mais que pouvait-elle subir, en ce moment ? Le jeune duc serra les poings, impuissant. De savoir la femme qu'il aimait dans les mains de ce fou le rendait malade.

Ichigo aperçut le changement d'expression sur le visage froid de son employeur. Il était bien plus atteint par cette nouvelle qu'il n'aurait pu l'imaginer. Se pourrait-il que... ? Possible. Après tout, il n'était plus à ça près.

Un bruit de galop fit sursauter tout le monde. Sans prendre le temps de saluer le duc, le cavalier se dirigea au pas de course vers son fils en le secouant comme un forcené.

_ Où est Karin ?

C'était la première fois de sa vie qu'Ichigo voyait son père aussi affolé. En même temps, il y avait de quoi.

_ Je ne sais pas, Papa, répondit-il en retirant les mains d'Isshin de ses épaules.

Isshin inspira profondément, espérant ainsi retrouver son calme. Mais en se tournant vers sa belle-fille, le patriarche remarqua enfin la présence du duc Hitsugaya, se tenant légèrement en retrait. Mais que venait-il faire ici ? Il ne comprenait pas.

_ Votre Grâce, le salua-t-il tout de même avec un hochement de tête.

_ Monsieur Kurosaki.

Prenant le bras de sa femme, Ichigo invita tout le monde à le suivre dans la maison. La fraîcheur de l'air ne les aidait pas à réfléchir sur la situation dans laquelle ils se trouvaient. Il fallait vraiment trouver une solution sinon jamais il ne reverrait ses deux sœurs vivantes. La course contre la montre était lancée.

 

Pendant ce temps, une jeune fille brune était en compagnie d'un homme tout ce qu'il y avait de plus détestable. Les mains attachées solidement dans le dos, elle était sur l'épaule de son ravisseur dans une position très inconfortable. Ils se trouvaient dans une forêt non loin de chez elle, Karin reconnaissait cet endroit pour y être venue avec Rukia. En songeant à son amie, un sourire triste étira légèrement ses lèvres. Et dire qu'elle n'aurait peut-être plus l'occasion de la revoir. Non, elle allait s'en sortir ! Il le fallait !

L'homme la jeta à terre et ce contact brutal avec le sol faillit lui arracher un gémissement de douleur. Mais elle ne voulait pas lui faire ce plaisir. À la place, elle se contenterait d'être aussi insupportable qu'elle pouvait l'être. Il allait payer !

_ Non mais t'es complètement malade ! On ne t'a pas appris à traiter les jeunes filles avec délicatesse ? vociféra-t-elle en se relevant tant bien que mal.

_ Toutes mes excuses, princesse, se moqua-t-il de sa voix mielleuse en s'inclinant.

_ Tu peux te mettre tes excuses là où je pense, cracha Karin en lui lançant un regard noir.

_ Voilà qui n'est pas digne d'une jeune fille de la haute société, fit son ravisseur, narquois. On est arrivé.

À cette nouvelle, le sang de la sœur d'Ichigo se glaça. Oh non ! Pas déjà ! Elle eut à peine le temps de se lamenter sur son sort que l'homme la prit par le bras et la tira pour la faire avancer.

_ Oh doucement, abruti ! Tu m'arraches le bras !

Il ne répondit pas, à son grand étonnement. Entrant dans la maison délabrée, Karin ne manquait aucun détail. Le bâtiment était en très mauvais état et l'air pouvait passer à travers des trous dans le toit. Les murs étaient détruits à certains endroits et l'atmosphère qui régnait était vraiment lugubre. La jeune fille avait l'impression d'étouffer dans cet endroit. Le ménage n'avait pas dû être fait depuis très longtemps, se dit-elle en remarquant la couche de poussière sur les meubles.

Soudain, des cris de souffrance l'arrachèrent de ses sombres pensées. Ces hurlements provoquaient des frissons désagréables dans le corps de la brune. Mais où était-elle tombée ? Tout ça ne lui disait rien qui vaille. Karin avait peur de ce qui pourrait lui arriver et en plus, Yuzu était depuis longtemps sa prisonnière. Elle craignait de la retrouver dans un piteux état. Si cette enflure lui avait fait du mal, elle ne répondrait plus de rien.

_ Je te souhaite la bienvenue dans mon humble demeure, fit l'homme avec mesquinerie. Suis-moi, je t'amène à ta chambre.

_ Si tu crois que je vais te suivre, tu es encore plus bête que je ne le croyais, balança la brune acerbe.

En entendant sa réplique, son ravisseur tourna la tête vers elle et lui chuchota à l'oreille :

_ Mais qui te dit que tu as le choix ?

Il la porta sans prévenir comme un sac à patate et se dirigea vers une porte dans un coin très sombre de la pièce à pas vif.

_ Non mais lâche-moi, fumier ! cria Karin en se débattant comme une lionne. Tu vas payer pour tout ça !

Les menaces de sa captive ne l'inquiétaient pas le moins du monde. Il se savait à l'abri de tout soupçon, tant que sa fille ne le trahissait pas. Ce n'était pas dans son intérêt, de toute façon et elle le savait. Et de toute façon, qui irait soupçonner un gentleman de campagne qui soutenait les bonnes œuvres d'enlever et torturer des jeunes filles innocentes ?

Un rire machiavélique sortit de sa gorge tandis qu'il avançait dans le long couloir éclairé par quelques torches.

_ On se croirait à la préhistoire, j'ai vu mieux en matière de décoration d'intérieur.

_ Nous sommes arrivés, princesse, l'avertit-il en ouvrant une porte de cellule.

Dans la cellule, aucune lumière et le sang séché sur le sol était vraiment inquiétant. La pièce était vraiment petite. Karin pouvait apercevoir une maigre couverture dans un coin mais rien pour les besoins élémentaires. En plus de ça, le confort était quasi-inexistant. Aucune couchette, elle devrait donc dormir à même le sol. Super, ironisa-t-elle dans son for intérieur.

Son hôte la jeta durement sur le sol.

_ Sale ordure ! Je vais t'apprendre les bonnes manières moi !

_ Je reviens dans quelques heures, annonça le geôlier. D'ici là, profitez de vos retrouvailles.

L'homme ferma la porte à clés et il s'éloigna pour gérer la suite des opérations. « Enfin, elle est entre mes mains. J'ai hâte de voir ce que cette petite teigne a vraiment dans le ventre ! » Des frissons de pur délice parcoururent sa peau à cette douce pensée. Les bruits de pas disparurent au bout de quelques minutes.

Complètement sonnée, Karin mit quelques instants à reprendre ses esprits. Puis la phrase de l'homme lui revint aussitôt en mémoire. Mais quelles retrouvailles ? Puis elle aperçut dans le fond de la pièce une silhouette attachée au mur par les bras. Elle s'approcha lentement, craignant ce qu'elle allait découvrir.

_ Oh non ! Yuzu !

Celle-ci ouvrit péniblement les yeux et vit sa sœur jumelle en face d'elle. Mon Dieu ! Il avait réussi à les avoir toutes les deux !

_ J'aurais... préféré que... tu n'atterrisses jamais... dans cet endroit, articula-t-elle difficilement.

_ Yuzu ! Qu'est-ce qu'il t'a fait ?

Karin ne reconnaissait pas sa sœur jumelle. Toute sanguinolente, pleins d'écorchures sur son corps trop frêle. Elle avait considérablement maigri, son état était vraiment préoccupant. Son regard clair, habituellement si doux et vivant, était vide, comme si elle était résignée.

_ Karin, je suis contente de te revoir avant...

Avant quoi ? La jeune fille avait peur de comprendre.

_ Non, tu ne vas pas mourir ! Ichi-nii va nous retrouver ! Tiens le coup !

Elle était vraiment désespérée. Maintenant que l'adrénaline était retombée, la peur revenait de plus belle. Karin secoua la tête vivement, elle devait se reprendre. Il fallait qu'elle donne à sa jumelle un peu de son courage et de sa force.

_ Ça fait combien de temps que tu es enfermée ici ? demanda-t-elle plus calmement.

_ Je ne sais pas vraiment, j'ai perdu la notion du temps, répondit Yuzu en levant la tête vers sa sœur. On est quel jour ?

_ Le 20 mars.

Et le duc Hitsugaya se mariait dans exactement deux semaines, ajouta-t-elle in petto. Cette pensée la fit trembler et les larmes menaçaient de couler mais Karin les retenait farouchement. Il était hors de question qu'elle craque maintenant. Ça ferait trop plaisir à ce sadique de ravisseur.

Cela faisait donc plus de trois mois qu'elle se retrouvait dans cet endroit ! Yuzu avait l'impression que ça faisait des années. Il fallait qu'elle pense à autre chose. Même si l'endroit n'était pas idéal, elles étaient enfin réunies, depuis le temps qu'elle attendait ça... Elle se mit donc en devoir de lui poser des questions :

_ Dis Karin, comment est notre frère ?

La curiosité dans la voix de la jeune fille aux yeux noisettes rassura quelque peu Karin. Ce trait de caractère n'avait pas disparu.

_ Si tu veux tout savoir, on a pratiquement le même caractère, lui avoua-t-elle les yeux dans le vague. Et en plus, tu ne peux pas le manquer, il a les cheveux oranges...

_ Orange ? la coupa Yuzu abasourdie.

Sa sœur jumelle hocha la tête pour confirmer. Elle continua à lui décrire Ichigo, sa femme, leur père et ses amis. Sans oublier sa belle jument, Tsuki. Mine de rien, quand on était avec une personne qu'on aimait, le temps passait plus vite. La discussion allait bon train et on pouvait entendre les deux sœurs rire, retrouvant leur complicité là où elles l'avaient laissée.

Mais Karin garda une chose sous silence : elle ne lui parla pas de celui qui faisait battre son cœur, le duc Toshiro Hitsugaya. Ce n'était pas encore le moment.

 

Trois coups furent soudain frappés à la porte des Kurosaki, cela fit cesser les conversations entre les occupants. Ichigo se leva, accompagné par son père, et se dirigea lentement vers l'entrée en jetant un coup d'oeil inquiet dans le trou de la serrure. Il ne connaissait pas cette personne.

Il ouvrit la porte avec précaution et se tenait devant lui et Isshin un homme leur remettant un message discrètement. Il partit aussitôt qu'Ichigo tenait l'enveloppe en main, comme si il avait quelque chose à se reprocher.

_ Bizarre, souffla-t-il à son père.

_ Restons sur nos gardes.

Les deux hommes retournèrent dans le salon où se trouvaient Orihime et le duc. La jeune femme était parvenue plus ou moins à se calmer et se concentrait sur sa broderie pour ne pas devenir folle.

_ Hime, on a reçu un message, l'informa Ichigo.

La rousse posa son ouvrage et leva les yeux vers son mari. Le duc, lui aussi, était très intéressé par cette nouvelle. Peut-être allaient-ils avoir des nouvelles des deux sœurs ? Ce n'était qu'une supposition mais elle n'était pas à exclure.

_ Ouvre-le, mon fils, intervint Isshin le visage grave.

Le jeune homme roux obtempéra de mauvaise grâce, il appréhendait ce qu'il allait y découvrir. Il en commença la lecture à voix haute :

« Bonjour à tous ! J'ose espérer que tout va bien pour vous. » Sale ordure ! « Comme vous le savez sans doute, je détiens Karin et Yuzu Kurosaki. Pour le moment, elles sont vivantes même si la petite Yuzu n'est plus très en forme. »

Ichigo s'interrompit brusquement, les mains tremblantes. L'émotion le submergeait et il avait l'impression qu'il allait exploser. Isshin lui prit alors la feuille des mains et continua de déchiffrer le message, non sans colère :

« Il faut dire qu'elle me tient compagnie depuis un moment, déjà. Seulement, elle n'était pas la cible. Elle n'était qu'un appât pour avoir votre attention. Maintenant que sa sœur l'a rejoint, j'en viens à la suite.

Votre Grâce, tout ceci est indirectement votre faute. Une certaine personne de mon entourage n'apprécie pas votre attachement envers la petite Karin. Elle voulait donc vous le faire payer. Et non, je ne dénoncerai pas mon complice. Mais vous devez vous en douter, ce serait trop facile sinon.

Sur ce, je vous souhaite une agréable journée et souvenez-vous : le Diable n'est jamais loin. »

Isshin posa la feuille sur la table basse, essoufflé par sa lecture. Cet homme était encore plus tordu qu'ils ne l'avaient imaginé. Ce qui n'était pas pour rassurer le père de famille. Retrouverait-il ses filles vivantes ? Rien n'était moins sûr.

_ C'est à n'y rien comprendre, maugréa le roux en mettant sa main sur son front.

Toshiro n'en menait pas large, non plus. Où était la logique du ravisseur ? Que mijotait-il à la fin ? Il y avait de quoi perdre l'esprit.

_ Ce qu'il faut réussir à éclaircir, c'est la raison pour laquelle cette lettre m'est directement adressé, mentionna le duc en se levant.

Puis le duc se souvint d'une phrase en particulier : « Une certaine personne de mon entourage n'apprécie pas votre attachement envers la jeune Karin. » A sa connaissance, seule une personne aurait un intérêt quelconque à voir Karin Kurosaki disparaître de sa vie. Cette déduction lui fit l'effet d'un choc.

Pourquoi irait-elle aussi loin ? Et surtout, comment avait-elle découvert ses sentiments ? Il ne les avait jamais avoué à qui que ce soit. Elle ne le connaissait pas assez pour voir au plus profond de son cœur. Et surtout quelle sorte de lien pourrait-elle avoir avec le ravisseur des jumelles Kurosaki ?

Ou plus simplement, elle voulait éliminer une potentielle rivale... Ce serait plus crédible, en effet. Et plus dans sa manière d'être, mais jamais il n'aurait pensé qu'elle irait jusque là.

Le duc Hitsugaya ne pouvait décidément pas concevoir qu'une personne soir prête à en venir à de telles extrémités pour éliminer quelqu'un. Ce n'était pas digne d'un être humain digne de ce nom.

_ Bon sang ! jura Ichigo. Cette histoire est complètement dingue !

Le jeune régisseur faisait les cent pas, comme un lion en cage. Ils étaient complètement à la merci de cet homme. Mais il était hors de question d'abandonner tout espoir de les retrouver, il l'avait promis à ses sœurs. Un toussotement venant de sa gauche l'arracha à ses pensées.

_ Une chose est sûre : cet homme est vraiment sûr de ne jamais se faire prendre, fit remarquer le père d'Ichigo.

On verra s'il fera autant le malin lorsque je lui aurai mis la main dessus, grommela le roux en serrant les poings si forts que les jointures en devenaient blanches.

En voyant son employé bondir vers la porte d'entrée, sans doute dans l'espoir d'aller faire sa fête au ravisseur, le duc se positionna devant lui, l'empêchant ainsi d'aller plus loin.

_ Kurosaki, nous ne devons pas nous précipiter ou nous allons faire exactement ce qu'il attend, tenta de le raisonner Toshiro.

Le jeune homme soupira devant la remarque du duc. Il le savait parfaitement mais entre le savoir et le faire, il y avait un monde. Son caractère impulsif le conduisait souvent à des catastrophes mais cette fois, la vie de ses sœurs cadettes étaient en jeu, alors il ne devait pas échouer. À aucun prix !

 

Une silhouette féminine vêtue d'une longue cape noire s'engouffrait sans un bruit dans une maison sinistre. Cet endroit lui inspirait toujours autant de dégoût, se dit-elle en faisant la moue. Mais ce n'était pas la raison de sa présence en ces lieux.

Le message qu'elle avait reçu le matin même l'avait à la fois étonnée et ravie. Ainsi donc, il était déjà passé à l'action. Cela ne l'étonnait pas du tout de lui, ses plans étaient parfaits.

Donnant son manteau à un domestique passant dans le coin, la jeune femme se dirigea dans l'antre du maître de maison. Elle frappa deux fois avant d'entrer dans le bureau puis referma la porte derrière elle.

_ Bonjour, père, le salua-t-elle avec un sourire lumineux. Comment vous portez-vous aujourd'hui ?

L'homme releva la tête et à la vision de sa fille, une chaleur peu commune apparut dans ses yeux marrons habituellement si froids.

_ Ma chère fille, je suis content de te voir ici, assura-t-il en se levant de sa chaise. Quel bon vent t'amène ?

La lueur d'espoir dans les prunelles de la jeune femme ne lui échappa pas un instant. Il se doutait de la raison de cette visite mais il voulait l'entendre dire.

_ Alors ? C'est fait ?

Le maître de maison hocha la tête, un sourire satisfait ornant ses lèvres. Le visage heureux de sa fille était ce qu'il y avait de plus important pour lui sur cette Terre. Il était capable de tout pour assurer son bonheur, même des pires bassesses.

_ Depuis cette nuit, confirma l'homme.

La jeune femme poussa un immense soupir de soulagement. Le moment qu'elle attendait depuis si longtemps était enfin arrivé : sa plus grande rivale n'était plus qu'un lointain souvenir, à présent. Elle pouvait vraiment faire confiance à son père pour trouver une solution à tous ses problèmes. Quelle chance elle avait !

Quelques coups discrets furent frappés à la porte. Lorsqu'il entendit ça, l'homme cacha sa fille dans un passage secret, le temps de recevoir son visiteur. Il se composa un visage dur comme l'acier avant de dire de sa voix mielleuse :

_ Entrez !

Un homme d'environ une trentaine d'années pénétra dans la pièce avant de s'incliner respectueusement devant lui. La crainte que le ravisseur de Karin et Yuzu pouvait lire sur son visage ne pouvait que le ravir.

_ Maître, je suis allé chez les Kurosaki porter le message que vous m'avez donné et le duc Hitsugaya était présent, également, lui apprit-il.

_ Je m'en doutais un peu, fit le maître calmement. Et comment se porte notre nouvelle invitée ?

_ Je les entendais rire, elle et sa sœur.

Rire ? Allons bon. Il pouvait bien leur laisser quelques heures de répit avant le grand final, n'est-ce pas ?

_ Très bien Kaname, tu peux retourner à ta surveillance.

Le sbire acquiesça et sortit sans un mot. Le maître retourna à son bureau comme si de rien n'était, attendant que les bruits de pas s'éloignent davantage. Lorsqu'il n'entendit plus rien, il dit :

_ Momo, tu peux sortir, il est parti.

La brune au chignon ouvrit le passage secret connu seulement par eux deux et le referma derrière elle. Il ne manquerait plus que quelqu'un découvre son existence. Ce serait très mauvais. Ensuite, elle prit place sur un fauteuil en face de son père.

Son père était resté très bel homme, malgré les années qui passaient, songea la jeune femme. Elle comprenait aisément pourquoi les femmes le trouvaient à leur goût. Bien sûr, elles ne connaissaient pas le côté sombre qu'il ne montrait qu'à elle.

Ses yeux marrons, ses cheveux châtains, son corps athlétique... Elle était vraiment fière d'être la fille d'un tel homme.

_ Dites, père ?

_ Hum ?

_ Qu'allez-vous donc faire de ces deux filles ?

L'homme posa sa plume et regarda sa fille dans les yeux. Elle était vraiment belle, elle ressemblait de plus en plus à sa défunte mère – dont elle portait le nom. Aucun lien ne devait être fait entre eux. En société, il se présentait sous le nom de Monsieur Hinamori, pour ne pas alimenter les mauvaises rumeurs.

Ses beaux-parents étaient dans l'autre monde et la famille de sa défunte femme n'existait plus, donc il n'y avait personne pour revendiquer ce nom.

_ Ne t'en fais donc pas pour ça, la rassura-t-il en posant sa main sur son épaule. Je m'occupe de tout.

D'accord.

Alors qu'elle se levait pour prendre congé, son père la retint doucement par le bras.

_ Si tu veux rendre une petite visite de courtoisie à nos deux invitées, j'ai préparé une petite escorte qui t'y emmènera, l'informa-t-il avec un sourire carnassier.

_ Pourquoi pas ? acquiesça la jeune femme, son sourire faisant écho à celui de son père.

Cette idée n'était pas du tout pour lui déplaire, en tout cas. Elle y avait pensé, bien sûr, mais n'avait pas osé en faire la demande. Ils sortirent ensemble du bureau et le maître de maison appela un de ses hommes afin qu'il conduise la fiancée du duc auprès de leurs prisonnières.

_ Êtes-vous sûr que c'est une bonne idée de me confier à lui ? s'inquiéta Hinamori en voyant l'homme approcher.

_ Rassure-toi : c'est le meilleur homme dont je dispose et il est parfaitement apte à te protéger, ma fille.

La réponse de son père apaisa la jeune femme qui lui fit un signe de la main avant de suivre le sbire qui l'amènerait là où elle devait se rendre.

Ils marchèrent pendant quelques minutes dans un silence profond, lui regardant partout autour de lui. En effet, dans ce genre d'endroit, les jeunes filles n'étaient pas en sécurité. D'ailleurs, le maître avait dû donner des ordres stricts interdisant de toucher aux deux prisonnières sous peine d'être froidement exécuté. Ce n'était pas de cette manière qu'il voulait les faire souffrir.

_ Nous sommes arrivés, Mademoiselle, annonça l'homme de main en s'inclinant très bas. Je vous attendrai à quelques mètres.

La future duchesse hocha la tête pour le remercier et lui montrer son assentiment. Alors qu'elle s'approchait lentement de la cellule où étaient retenues les deux sœurs d'Ichigo, l'excitation montait graduellement. Enfin elle allait la voir de ses propres yeux. Depuis le temps qu'elle rêvait de cet instant, sa patience allait enfin être récompensée.

Quand elle fut assez prêt pour distinguer quelque chose, elle vit sa rivale en train de caresser les cheveux de sa sœur endormie. Pour attirer son attention, elle donna quelques coups sur les barreaux de la cellule.

En entendant ce bruit, Karin se retourna vivement et vit quelqu'un devant elle, la fixant de manière ostensible. Elle s'éloigna de sa jumelle pour accueillir – si on pouvait dire ça ainsi – ce visiteur. La sœur d'Ichigo n'arrivait pas à apercevoir le visage mais une chose était certaine pour elle : il s'agissait d'une femme.

La silhouette retira sa capuche et la surprise de Karin était totale. Ça alors ! Si elle ne la voyait pas devant elle, elle n'y aurait jamais cru !

_ Vous ?

L'étonnement mêlé de colère contenu dans la voix de la captive ravit Hinamori à un point inimaginable. Elle posa la main droite sur les barreaux et prit la parole sur un ton que Karin ne lui avait jamais entendu :

_ Eh bien, eh bien, te voilà à ta vraie place.

_ Pourquoi faites-vous ça ? Et qu'est-ce ma sœur a à voir la-dedans ? cracha la jolie prisonnière.

_ Oh mais rien, c'était juste pour attirer votre attention ailleurs, et je dois reconnaître que ça a été au-delà de mes espérances, affirma la fille du ravisseur.

Karin n'en croyait pas ses oreilles. Ainsi donc, Yuzu se retrouvait mêlée à cette histoire sordide alors qu'elle n'était même pas concernée ? Ils allaient le lui payer très cher !

_ Pourquoi en venir jusque là ? demanda Karin d'une voix bien trop calme. À cause de votre fiancé, c'est ça ?

À ces mots, Hinamori écarquilla les yeux. Comment cette fille avait-elle pu deviner la raison ? Il fallait se méfier, elle était plus intelligente qu'ils ne l'avaient cru.

_ C'est vraiment risible, se moqua amèrement la sœur d'Ichigo. Dois-je vous rappeler que vous êtes fiancés ? On ne rompt pas des fiançailles aussi facilement que ça. Même une idiote comme moi le sait.

L'énervement de la future duchesse monta d'un cran. Non, mais pour qui se prenait-elle pour ainsi se moquer d'elle ? Elle ne l'emporterait pas au paradis.

_ Profite tant que tu peux de ta sœur parce que ça ne va pas durer, crois-moi, la menaça-t-elle, le regard lançant des éclairs.

_ Si tu crois que tu m'impressionnes, tu te fourres le doigts dans l'oeil bien profond, la provoqua Karin. Je me permets de te donner un conseil : fais attention à toi, le duc Hitsugaya est loin d'être stupide.

Il n'y avait pas à dire : le fait de la voir s'énerver pour si peu était vraiment amusant, songea la jeune fille.

Que voulait-elle dire par là ? La femme au chignon n'était pas sûre de comprendre l'allusion. Jamais son fiancé ne pourrait deviner quoi que ce soit, elle avait parfaitement accompli son rôle, pensa-t-elle. Elle voulait lui faire peur mais c'était inutile. Elle allait bientôt devenir duchesse et rien ne lui ferait plus plaisir.

_ Tu ne sortiras jamais de cet endroit, lança la brune au chignon en s'éloignant.

_ A ta place, je ne compterai pas là-dessus.

Hinamori sortit de la pièce en fulminant, le garde sur les talons. Cette petite peste allait regretter amèrement de l'avoir provoquée de la sorte. Elle ne s'en sortirait pas comme ça. « C'est moi qui vais épouser le duc et cette idiote n'aura plus que ses yeux pour pleurer » songea-t-elle mauvaise.

Cette pensée avait remis ses idées en place et la fiancée du duc Hitsugaya avait hâte de savoir ce que son père avait dans la tête. Elle en frémissait même d'impatience.

 

Dans la maison des Kurosaki, un silence pesant régnait en maître. Ichigo ne tenait pas en place, Isshin réfléchissait encore, Orihime retenait ses larmes en tentant de broder et Toshiro, lui, sentait l'inquiétude monter en lui telle une vague déchaînée.

Le jeune seigneur ne cessait de ruminer ses sombres pensées et de songer que sa fiancée pouvait être mêlée de près ou loin à cette terrible histoire n'était pas pour lui plaire. Mais en même temps, tant qu'il n'en aurait pas la preuve formelle, il lui laissait le bénéfice du doute. Voilà pourquoi il ne révélait rien de ses soupçons.

Soudain, on frappa à la porte, réveillant tout le monde.

_ Enfin ! s'impatienta Ichigo en allant ouvrir.

Sur le seuil se tenait les deux personnes qu'il attendait. Ils en avaient mis du temps ! Il fit entrer les deux inspecteurs de police et les conduisit dans le salon, où tout le monde avait pris place.

_ Nous sommes venus dès que nous avons reçu votre message, fit l'inspecteur Hirako, essoufflé.

_ Merci, inspecteur, soupira le père des jumelles disparues.

Ichigo s'éloigna pendant un instant afin de se rendre dans son bureau. Les lettres de menaces se trouvaient dans cette pièce et il devait les remettre en main propre à la police. Il revint quelques instants plus tard, les deux feuilles dans les mains.

_ Voilà les lettres que nous avons reçu du ravisseur, dit Ichigo en les remettant à Shinji.

Celui-ci prit le temps de les déchiffrer complètement avant de froncer les sourcils. Il les donna à sa collègue et se retourna vers le couple.

_ Je vois, marmonna-t-il. J'aimerais voir la chambre de votre sœur, c'est possible ?

_ Bien sûr, vous pouvez même fouiller dans toute la maison si ça peut vous aider.

L'officier hocha la tête, montrant son accord. Il entreprit de fouiller le rez-de-chaussée de fond en comble mais ne trouvant aucun indice probant pendant une heure de recherches, il monta à l'étage accompagné par l'inspecteur Sarugaki.

_ Dis Shinji ? demanda Hiyori tout bas.

_ Quoi ?

La jeune femme blonde prit garde que personne n'écoutait et chuchota dans son oreille :

_ Cette histoire ne me dit rien qui vaille.

Shinji ne répondit pas, c'était inutile. Il pensait exactement la même chose. Ça ne sentait pas bon, c'était certain.

Pendant que la police faisait son travail à l'étage, Orihime était partie à la cuisine préparer quelques rafraîchissements pour ses invités. Elle ne cessait de penser aux sœurs de son mari. Elle avait vraiment peur qu'il leur arrive quelque chose de grave.

La rousse secoua vivement la tête. Non elle ne devait pas penser à de telles choses, ce serait leur porter malheur. Elle devait y croire de toutes ses forces.

_ Reprends-toi, Orihime, s'admonesta-t-elle. Ce n'est pas ton genre de voir tout en noir.

Quand les inspecteurs redescendirent, deux heures plus tard, ils avaient une mine sombre. Bien plus qu'en montant.

Voyant le visage fermé des deux policiers, Ichigo n'en menait pas large. Il avait un très mauvais pressentiment. Vite il fallait qu'ils disent quelque chose, n'importe quoi !

_ Avez-vous touché quoi que ce soit dans la chambre de Karin ? demanda soudain Shinji.

Le jeune homme roux s'attendait à cette question et il avait bien fait de ne toucher à rien. Ce qu'il s'empressa de dire à l'officier.

_ Non, rien du tout.

_ Il y a quelque chose qui cloche, annonça soudain Hiyori.

_ Quoi donc ? s'enquit enfin Isshin.

La jeune femme regarda son collègue qui hocha la tête avant de poursuivre d'un ton préoccupé :

_ En apparence, on pourrait penser que votre fille s'est débattue, expliqua-t-elle en regardant le père des disparues. Mais cela ne correspond pas.

Toshiro écoutait attentivement ce qui se disait mais ne comprenait pas vraiment. Qu'est-ce qui n'allait pas avec cette théorie ? D'autant plus que la jeune sœur de son régisseur avait un caractère trempé, donc elle ne se serait pas laissée enlevée sans rien dire. À moins que...

_ S'agirait-il d'une mise en scène créée de toute pièce par le ravisseur ? fit soudain le duc s'attirant le regard de toutes les personnes présentes.

_ J'en ai bien peur, confirma le blond en soupirant. Aucune trace sur le sol, seulement la pièce en désordre, il se moque de nous. Ça ne fait aucun doute.

Le frère des jumelles ferma les yeux un instant, le temps d'assimiler ce que l'inspecteur venait de dire. Cette ordure ne reculait devant rien, il prenait un malin plaisir à jouer avec leurs nerfs. Et il sentait qu'il allait craquer, et pas plus tard que maintenant.

_ Bordel ! jura le jeune régisseur en frappant le mur. Je vais lui faire la peau !

_ Ichigo, calme-toi, tenta de le raisonner Orihime en posant une main sur son bras. Laisse la police faire son travail.

Shinji sourit tristement à la rousse. Comment faire son travail quand on disposait de si peu d'indices ? Ce n'était pas une mince affaire. Il ne fallait pas désespérer, il avait connu des situations pires que celle-ci et tout s'était bien terminé.

_ Inspecteur Hirako, je voudrai vous montrer quelque chose à l'extérieur, lui annonça le duc en ouvrant la porte d'entrée.

Sans un mot, le policier blond et sa collègue le suivirent à l'extérieur et virent sur l'herbe le ruban de Karin. Sans doute tombé durant la fuite du ravisseur...

_ Il s'agit bien du ruban de Karin ?

Toshiro hocha la tête sans répondre. Il espérait vraiment que cet indice allait aider la police à trouver une piste sérieuse. Mais il était trop tôt pour nourrir de tels espoirs.

Hiyori ramassa le ruban avec une pince et le déposa dans un sachet en plastique avant de le remettre à Hirako.

_ Nous reviendrons vous voir si nous avant du nouveau.

Sur ces mots, la police prit congé dans un silence de plomb. Il n'avait plus qu'à attendre. Mais le temps était un luxe qu'ils ne possédaient pas. Combien de temps avant que ce ne soit trop tard ?

 

Des rires résonnaient étrangement dans un coin sombre du manoir délabré. On ne pouvait pas vraiment s'attendre à ce genre de choses dans un endroit aussi lugubre.

_ Tu es sérieuse ? fit Yuzu entre deux rires.

_ Mais oui, on dirait deux gamins, je te jure ! confirma Karin en essuyant ses larmes dues au rire. Ichi-nii a donné un coup de poing à notre père et il a recommencé à faire le pitre !

Cet intermède heureux faisait vraiment du bien à Yuzu. Voilà bien longtemps qu'elle n'avait pas ri autant. Elle voulait vraiment faire la connaissance de sa famille paternelle mais elle ignorait si elle en aurait un jour l'occasion.

À cette pensée, son visage s'assombrit. Non, il ne fallait pas qu'elle se laisse abattre de la sorte. Ce n'était pas le moment de flancher, elle devait tenir, coûte que coûte !

Au moment-même où l'aînée des jumelles allait prendre la parole de nouveau, un bruit de serrure se fit entendre. Les deux sœurs tournèrent aussitôt la tête et virent apparaître leur ravisseur, complètement enveloppé dans une cape noire, pour changer.

Karin ne put résister à l'envie de le provoquer et lança d'une voix narquoise :

_ Pas trop chaud toute l'année dans cet accoutrement ?

L'homme s'approcha d'elle, exultant à l'idée de ce qu'il allait faire à cette brune un peu trop sarcastique à son goût. Mais il n'était pas encore dans le bon endroit pour ça, il lui fallait attendre.

_ Je viens prendre des nouvelles de mes chères invitées, annonça-t-il de sa voix mielleuse. Comment vous portez-vous ?

La jeune fille sentit ses poils se hérisser sur son corps. Dieu qu'elle le haïssait ! Mais elle voulait jouer un peu et il allait lui en fournir l'occasion :

_ Je m'attendais à mieux que ça, je suis déçue. La nourriture est exécrable, le service n'est pas vraiment à la hauteur et le confort, n'en parlons pas.

L'homme ne s'attendait pas du tout à une telle réponse. Mais il ne s'en laissa pas compter et entra dans son jeu :

_ Oh, veuillez me pardonner mais c'était la dernière chambre disponible.

Mince, pesta intérieurement Karin. Il ne s'était pas énervé comme elle l'aurait voulu. Tant pis.

L'ambiance dans la cellule changea tout à coup. Elle devenait de plus en plus oppressante. Enfin de compte, elle avait bien réussi à lui faire perdre patience mais ça ne lui disait rien qui vaille, cette affaire.

_ Puisque tu aimes jouer, je t'emmène avec moi, tu vas découvrir comment moi, je m'amuse, lui chuchota-t-il à l'oreille.

Yuzu avait entendu les paroles de leur ravisseur et elle n'était pas du tout rassurée quant au sort de Karin. Si il lui faisait la même chose qu'elle avait subi elle-même, sa sœur allait terriblement souffrir. Cette idée lui donna la nausée. Elle se sentait tellement impuissante.

_ A tout à l'heure !

Sans laisser le temps aux deux filles de parler, le maître de maison tira le bras de la brune et la sortit de sa cellule.

_ Aïe ! Mais tu es complètement malade !

Entendant la protestation de sa sœur jumelle, Yuzu esquissa un sourire amusé. Elle n'avait vraiment pas changé et si comme elle le disait, leur frère lui ressemblait, la jeune fille ne serait pas dépaysée.

Son sourire s'évanouit quand elle pensa de nouveau à ce que Karin allait devoir subir beaucoup plus loin. « Tiens le coup, petite sœur. Tu es plus forte que moi ! » Puis Yuzu perdit connaissance à cause de son état de faiblesse très avancé. Il valait mieux, de toute façon. De cette façon, elle n'entendrait pas les cris de sa jumelle.

Sans prendre la peine de lui répondre, l'homme la conduisit dans un couloir encore plus sombre et ouvrit une porte en fer. En voyant ce que cette pièce contenait, Karin écarquilla les yeux d'horreur. Étaient entreposés pêle-mêle des marteaux, des clous, des scalpels et autres objets tranchants.

La réaction de la jeune fille ne manqua pas de le réjouir et il l’amena jusqu'à la table avant de l'attacher dessus. Un léger rire se fit entendre dans la pièce et Karin ne put retenir un frémissement d'angoisse. Qu'est-ce que cette ordure allait lui faire ? Elle n'avait pas envie de le savoir.

_ Bienvenue dans ma salle de jeu préférée, chantonna l'homme en attrapant un objet qu'elle ne pouvait voir.

« Seigneur, faites que je sois assez forte pour supporter ce qui va suivre, il le faut ! » Il ne fallait surtout pas qu'elle le supplie, ni qu'elle crie sa douleur. La brune tenta de se débattre dans l'espoir vain de lui échapper, mais ce bandit avait tout prévu : elle ne pouvait quasiment pas bouger.

_ Commençons, tu veux bien ? fit-il mine de demander, un sourire dans la voix.

_ Non, pas vraiment, répondit-elle avec une grimace de dégoût.

La sœur d'Ichigo se retenait à grand peine de lui cracher dessus. Voilà qui n'allait pas arranger ses affaires. Il valait mieux éviter pour le moment. Puis la jeune fille songea soudain à son amie Rukia. Est-ce qu'elle était au courant de la nouvelle ? Est-ce que son frère adoptif avait enfin consenti à son mariage ? Karin voudrait tellement le savoir.

Mais elle ne put songer à ça plus longtemps car une vive douleur apparut son bras gauche. En y regardant de plus près, la brune vit une longue coupure qui s'étendait du coude au poignet.

_ Sale fumier, gronda-t-elle en serrant les dents. Qu'est-ce que ça t'apporte ?

_Je veux simplement te poser quelques questions, lui apprit le ravisseur sur le ton de la conversation.

La réponse de l'homme lui fit lever les yeux au ciel. Il était vraiment stupide, ou quoi ?

_ Ce n'est pas la meilleure manière de procéder si tu veux des réponses, surtout avec moi.

Karin n'allait certainement pas lui faciliter la tâche, même si ça la mettait en danger. C'était sa manière à elle de lutter contre lui.

_ Comment as-tu rencontré Hitsugaya ?

_ Mon frère est son régisseur, répondit-elle laconiquement. Et pourquoi veux-tu savoir ça ? Je ne pense pas que ça te concerne.

À peine avait-elle fini sa phrase qu'elle se reçut un coup poing dans le ventre, la faisant cracher du sang. Il n'y allait pas de main morte, l'enflure.

_ Eh bien... ta façon de... te comporter avec les femmes... est vraiment... déplorable..., balbutia péniblement la jeune fille.

La réaction de sa prisonnière ne plaisait pas du tout au tortionnaire. Il s'attendait à des cris, des gémissements de douleur, des supplications, pas à des provocations. Mais il venait de commencer à jouer, rien était encore terminé.

_ Ce n'est pas la bonne réponse, lui fit-il savoir. Comment as-tu rencontré Hitsugaya ? répéta-t-il plus sèchement.

_ Le duc... Hitsugaya, tu veux dire ? le reprit-elle narquoise. Appelle-le par... son titre.

Bordel, ça faisait un mal de chien, elle avait beaucoup de mal à respirer correctement. Mais le voir perdre son sang-froid comme ça était vraiment drôle. Comme avec la peste de future duchesse, d'ailleurs. Ça lui ferait presque oublier la situation précaire dans laquelle elle se trouvait.

_ Tu te crois maligne, c'est ça ? s'impatienta le maître de maison. Si tu veux jouer, on va jouer ensemble.

Même dans cet état, elle continuait de le provoquer. Cette fille était vraiment quelqu'un, quand même. Sa sœur jumelle était beaucoup moins amusante.

Durant les deux longues heures qui suivirent, Karin subissait de nombreux coups, de nombreuses blessures. Elle ne poussa pas un seul gémissement, au grand déplaisir de son tortionnaire. Elle serrait simplement les dents et continuait ses provocations.

Ce qui l'aidait à tenir, très simple. Il s'agissait de sa famille, de ses amis et du duc Hitsugaya. Elle ne sombrerait pas maintenant, elle devait être forte.

L'homme la ramenait aux côtés de sa sœur jumelle dans un état pitoyable, son cri le lui disait. Oui, elle devait vraiment faire peur à voir. Pleine de bleus et de coupures, elle avait connu mieux.

_ Ne t'inquiète pas, Yuzu, la rassura péniblement la brune. Il m'en faut plus que ça pour flancher.

Puis elle tomba dans l'inconscience après avoir vu une dernière fois le visage inquiet de Yuzu. À en juger par sa pâleur, elle devait avoir perdu pas mal de sang. « Mon Dieu, mais qu'est-ce qu'il t'a fait ? » L'aînée des sœurs n'avait jamais vu Karin dans un tel état, leur geôlier avait dû s'en donner à cœur joie. Quelle ordure !

Yuzu n'avait jamais haï quelqu'un aussi fort que cet homme. Elle ne comprenait toujours pas pour quelle raison obscure il s'en prenait à elles mais quelque chose lui disait de se méfier. Il ne lui restait plus qu'à prier pour que cette histoire se termine au plus vite ou ce serait la fin pour elles.

 

Cela faisait à présent quatre jours que Karin était dans les mains du ravisseur. Depuis lors, Ichigo et Orihime – pour ne citer qu'eux – ne dormaient presque pas. Ils vivaient comme des automates mais tenaient le coup, si on pouvait dire ça ainsi.

Ichigo allait travailler tous les jours, espérant se changer les idées mais en vain. Le jeune duc était dans un état similaire au sien. Et chaque soir, en rentrant chez lui, il demandait à sa femme si il y avait eu des nouvelles. Mais la même réponse impitoyable revenait sans cesse : non.

Mais ce jour-là, Orihime ne se sentit pas très bien. Une sorte de prémonition l'avait alertée et depuis, elle tremblait sans arriver à se calmer. Une sensation désagréable lui disait de se méfier, que quelque chose de grave allait se produire d'ici peu de temps.

Elle finissait tant bien que mal de préparer le dîner quand la rousse entendit la porte d'entrée claquer si fort qu'elle aurait pu en sortir de ses gonds.

_ Orihime, tu es là ? fit la voix inquiète de son mari.

_ Dans la cuisine, répondit-elle.

Quelques minutes après, la jeune femme vit apparaître Ichigo, complètement essoufflé. Décidément, cette histoire épuisait tout le monde, se dit-elle tristement.

C'était dans ces moments-là qu'elle aurait aimé que Renji soit là... Mais le vicomte était parti en voyage voilà quatre jours et il n'était pas encore rentré. Lui seul aurait été capable de le calmer, dans l'état actuel des choses.

_ Hime, j'ai vraiment besoin de ton avis, fit soudain le jeune régisseur en prenant place sur une chaise.

Orihime acquiesça, signe qu'elle l'écoutait attentivement. Elle plongea une dernière fois la cuillère en bois dans le pot-au-feu qu'elle était en train de préparer et s'assit en face de lui, prête à l'entendre.

_ Mademoiselle Hinamori est vraiment bizarre, en ce moment, confessa-t-il en nouant ses mains.

_ Pourquoi ça ?

Le frère des jumelles soupira avant de plonger son regard noisette dans les perles grises de son épouse.

_ Elle est vraiment de plus en plus empressée auprès de Sa Grâce et elle vient le voir tous les jours.

_ Rien de bien méchant, assura Orihime. Il est normal qu'elle ait envie de voir son fiancé, surtout que le mariage approche à grand pas.

Ichigo ne le savait que trop et il voulait éviter que cette calamité ait lieu. Une chose était sûre : le duc n'était pas du tout enchanté de cette chose.

_ Je ne sais pas mais quelque chose me gêne, chez elle en ce moment.

Il ne savait pas comment s'expliquer clairement mais une chose le rebutait chez cette femme. Elle n'était celle qu'elle paraissait être, il en était certain. Mais comment le prouver ?

_ Tu sais, je ne l'apprécie pas non plus mais ce n'est pas une raison, fit la rousse en soupirant. Je suis d'accord avec toi, tout de même... Quelque chose en elle a changé.

De savoir que sa femme partageait son sentiment de malaise n'était pas vraiment pour lui déplaire.

De son côté, Orihime se demandait si elle devait faire part de son mauvais pressentiment à son mari. Il était déjà assez en colère sans qu'elle en rajoute.

_ Ichigo, je dois te dire quelque chose, annonça-t-elle d'une voix mal assurée.

_ Je t'écoute, Hime.

La jeune femme prit une profonde inspiration et se lança, en fermant les yeux :

_ J'ai un très mauvais pressentiment depuis quelques temps mais tout ce que je sais, c'est que ça pourrait avoir un rapport avec tes sœurs.

Le régisseur écarquilla les yeux. Les intuitions de sa femme étaient souvent juste, voilà qui ne le rassurait pas. Il prit sur lui pour ne pas montrer son inquiétude mais la rousse n'était pas dupe.

En voyant son homme partir à toutes jambes, Orihime l'appela en criant :

_ Ichigo, ne fais rien d'inconsidéré !

_ Promis !

La porte d'entrée claque de nouveau, lui annonçant que le régisseur était parti. Qu'avait-il l'intention de faire ? Orihime n'était pas sûre de vouloir le savoir.

La police ne les avait toujours pas contacté et le fait de n'avoir aucune nouvelle lui mettait les nerfs à rude épreuve. Un coup de pied du bébé lui changea les idées pendant un bref instant.

_ Ne t'inquiète pas, mon ange, susurra-t-elle d'une voix douce. Nous retrouverons tes tantes, je te le promets.

Caressant son ventre distraitement, la rousse alla ouvrir la fenêtre de la cuisine et laissa errer ses prunelles grises sur l'herbe verte qui reprenait ses droits.

_ Le printemps est là mais mon cœur n'est pas à la fête, soupira-t-elle. Karin, Yuzu, restez en vie.

 

Pendant ce temps, Ichigo galopait à travers champs, dans l'espoir d'apercevoir un indice. Il priait Dieu de lui accorder un peu de chance dans sa recherche. Le roux n'avait rien dit à sa femme concernant ses projets, ne voulant pas l'inquiéter davantage.

Au bout d'une heure, il n'avait rien trouvé. Il décida donc de reprendre plus tard et retourna chez lui, épuisé et abattu. La police mettait trop de temps et le temps était un luxe qu'ils ne possédaient pas. Le jeune régisseur avait donc décidé de prendre les choses en main, pendant les moments où il ne travaillait pas.

Comment savoir par où commencer ? Ichigo n'en avait aucune idée mais il ne baissait pas les bras. Ses sœurs avaient besoin de lui et il se devait de faire tout ce qu'il pouvait pour leur venir en aide.

La nuit tombait lentement lorsqu'il arriva enfin en vue de sa maison. Il descendit de cheval et l'amena à l'écurie, juste à côté de Tsuki.

_ Viens Zangetsu, fit le roux en tirant sur la bride de son cheval.

Après lui avoir donné de l'eau et à manger, il lui flatta l'encolure et sortit du box.

La jument de Karin hennit lorsqu'il passa devant son box. Ichigo la regarda tristement, il sentait que l'animal ne se sentait pas très bien. Une aura sombre l'entourait, comme si elle savait ce qui se passait.

_ Oui ma belle, elle te manque aussi, je le sais, chuchota-t-il en lui caressant le dessus de la tête. Mais elle reviendra, je te le promets.

Après une dernière caresse, le jeune homme se dirigea vers l'entrée de la maison d'un pas traînant. Arrivant à la porte, Ichigo tourna légèrement la tête, ses prunelles fixant le lointain. Après quelques secondes, il se décida enfin à rentrer à l'intérieur.

En entendant des bruits de pas à l'entrée, Orihime alla voir de qui il s'agissait. Elle fit face à son mari, une expression de souffrance comme elle en avait rarement vu sur son visage.

_ Où es-tu allé, Ichi ? lui demanda-t-elle d'une voix douce.

_ Essayer de voir si je trouvais quelque chose, soupira le jeune homme roux en enlaçant sa moitié.

La réaction du régisseur montra à Orihime qu'il avait fait chou blanc. Elle se sentait tellement mal et de ne pas savoir la rendait folle.

_ J'en ai assez de ne pas avoir de nouvelles alors j'ai décidé de mener ma propre enquête, l'informa Ichigo en la lâchant.

_ Je ne sais pas si c'est une bonne idée, même si je te comprends.

_ Je le sais bien mais je ne supporte plus de rester sans rien faire alors que mes deux sœurs sont entre les mains d'un fou furieux, gronda-t-il en frappant le mur de son poing.

Alors qu'il allait réitérer son geste, la rousse prit la main d'Ichigo et embrassa chacun de ses doigts, dans l'espoir de le calmer. Ça avait l'air de fonctionner, il semblait plus détendu. Rassurée, la maîtresse de maison le lâcha et l'invita à le suivre dans la cuisine où elle avait dressé la table pour eux deux.

_ C'est fou comme c'est silencieux quand Karin n'est pas là, soupira son frère en fermant les yeux.

_ C'est vrai, vos chamailleries me manquent, confirma la rousse en étouffant un sanglot.

Jamais le couple n'aurait imaginé à quel point la maison serait vide sans la présence de Karin. Ichigo et Orihime ne seraient seulement une fois que les jumelles Kurosaki soient avec eux, bien vivantes. Cette attente était vraiment horrible ! Comment ne pas craquer ?

 

_ Bordel, il me soûle, ce type, s'impatienta un policier blond en tapant du poing sur son bureau.

Quatre longs jours que Karin Kurosaki avait été enlevée sous le nez de son frère et sa femme et toujours pas le moindre indice sur le coupable. Manifestement, il était tombé sur un as. Shinji soupira en prenant place à son bureau où un dossier était ouvert au nom des deux disparues.

Sa tête allait exploser à force de réfléchir, il en était certain. Mais il n'avait pas l'intention d'abandonner, ce n'était pas son style. Plus une affaire était difficile, plus il mettait d'acharnement à la résoudre.

Il entendit plus qu'il ne vit Hiyori entrer dans son bureau. Hirako releva la tête vers sa collègue et la vit aussi fatiguée que lui. Cette pénible affaire n'épargnait personne.

_ Shinji, je crois que je tiens quelque chose, annonça la jeune femme en posant une feuille devant lui.

_ Un témoin ? s'étonna le blond après l'avoir déchiffré.

_ Il paraît, confirma-t-elle en soupirant. Mais il faut aller sur place pour en être sûr.

L'espoir que représentait cette nouvelle fit sourire Shinji. Il espérait vraiment qu'il ne s'agissait pas d'une mauvaise blague comme cela arrivait parfois.

_ Il faut tout même rester prudent, tempéra le jeune homme.

_ Je sais, dit Hiyori avant de sortir de la pièce.

Une fois seul, Shinji se leva pour aller à la fenêtre. Le ciel printanier réchauffait son cœur, c'était peut-être son intuition qui se concrétisait. Mais tout même, qui aurait le cœur assez noir pour oser entreprendre une telle action ?

De toute façon, il devait d'abord se rendre chez l'employeur de l'aînée des jumelles, Yuzu. Il était le dernier à l'avoir vu avant son enlèvement et il espérait obtenir de lui une aide précieuse.

 

Le lendemain matin, le duc Hitsugaya était sur la route pour se rendre à la Cour, son royal cousin l'ayant invité. Pourquoi maintenant ? Enfin, ça lui fournissait une occasion de penser à autre chose – ou presque.

Ses yeux de glace se posaient sur le paysage qui l'entourait avec mélancolie. Cinq jours... Cela faisait à présent cinq jours qu'il n'avait pas eu de nouvelles de Karin. Cinq jours qu'il dormait à peine. Il devait vraiment faire peine à voir. Le noble aux cheveux d'argent donnerait tout ce qu'il avait pour le revoir une dernière fois mais c'était un beau rêve.

Toshiro ne savait plus vraiment où il en était, en ce moment. Entre l'enlèvement des deux sœurs de son régisseur et la possibilité que sa fiancée en soit complice, tout ça le rendait malade. Il espérait avoir le fin mot de toute cette histoire assez rapidement car de ne pas savoir était vraiment insupportable.

_ Oh regardez ! Le carrosse du duc Hitsugaya ! entendit-il à l'extérieur.

Le voilà donc arrivé à la capitale. Déjà, pensa-t-il tristement. Tellement plongé dans ses sombres pensées, le temps était passé très vite. Le duc poussa légèrement le rideau qui lui masquait la vue et posa ses prunelles turquoises sur ce qui l'entourait. La ville de Kawase n'avait pas changé depuis sa dernière visite, il y avait de cela trois ans. Elle était la même que dans ses souvenirs.

Une dizaine de minutes plus tard, le palais royal se dressait devant lui, aussi impressionnant que magnifique. Pressé par le temps, Toshiro ne prit pas le temps de l'admirer et entra à l'intérieur afin d'aller annoncer son arrivée au Roi. Devant la porte qui menait à la salle du trône, un majordome se tenait bien droit. En le voyant arriver, il s'inclina devant le duc et clama d'une forte :

_ Sa Grâce, le duc Toshiro Hitsugaya !

Les portes s'ouvrirent au même moment pour le laisser entrer.

_ Mon cousin, quel plaisir ! tonna une voix d'homme.

_ Votre Majesté, le salua le duc Hitsugaya en s'inclinant devant le couple royal. Le plaisir est partagé.

Lorsque son jeune cousin releva la tête vers lui, le Roi put apercevoir pendant un bref instant une expression d'intense souffrance sur son visage. Mais elle disparut si vite qu'il n'en n'était pas certain.

_ Suivez-moi, cousin, l'invita le chef de l'état d'une voix sans réplique.

Réprimant un soupir d'impatience, Toshiro emboîta le pas au couple royal, non sans se demander ce qui l'attendait. Cette requête si soudaine n'était pas pour le rassurer. Qu'est-ce que le Roi pouvait bien avoir en tête ? Il n'était pas pressé de le savoir.

Dans les appartements royaux, le duc ne se sentait pas vraiment à l'aise. Le regard instant de son cousin y était pour beaucoup.

_ Toshiro, qu'est-ce qui se passe ? demanda-t-il soudain, le visage sérieux.

Il y avait bien longtemps que le jeune duc aux cheveux d'argent n'avait plus vu cette expression si sombre sur le visage du Roi, habituellement orné d'un sourire si particulier. Cette occasion remontait à l'enterrement de ses parents.

_ Pas de blagues vaseuses, cette fois, Gin ? soupira Toshiro.

_ Tu ne m'auras pas avec ça, cousin. Quelque chose te tracasse et je veux savoir quoi.

Le ton définitif employé par le Roi ne poussait pas à la discussion. Le duc savait que s'il voulait être tranquille, il devrait répondre sans détour. Mais il n'avait pas vraiment le cœur à raconter tous ses malheurs.

_ Rien de bien important, fit-il en se levant du canapé. Pourquoi voulais-tu me voir ?

_ Pour avoir de tes nouvelles, voyons ! Quoi d'autre ?

_ Je vais très bien.

Gin ne paraissait pas vraiment convaincu par cette réponse. Mais il décida d'appuyer là où ça faisait mal, pour avoir une réaction. Il savait exactement comment il allait procéder.

_ Dis-moi, ton mariage approche à grand pas, non ? Comment va ta chère fiancée ?

La réaction de son cousin ne le déçut pas : Toshiro s'était raidi.

_ Gin, intervint doucement la reine. Tu ne devrais pas insister...

_ Voyons, Ran-chan !

Rangiku esquissa un sourire d'excuse à l'intention de son cousin par alliance. Celui-ci n'était pas vraiment offensé mais préférait éviter de parler d'Hinamori.

_ Il y a quelque chose qui me tracasse et j'aimerai avoir ton avis, déclara soudain Toshiro.

_ Je t'écoute.

Le duc Hitsugaya raconta alors tout ce qui s'était passé depuis sa rencontre avec Karin Kurosaki jusqu'à son enlèvement, sans omettre ses sentiments forts pour la jeune fille.

_ Je vois... Mais pourquoi ta fiancée ferait une chose pareille ?

_ Par jalousie et malveillance.

Le Roi ne connaissait pas bien la future duchesse mais les deux seules fois où il l'avait rencontrée, elle avait été vraiment trop gentille pour être honnête. Il comprenait les soupçons de son cousin.

_ Je vais aller me reposer, ce voyage était fatiguant, dit le jeune duc en s'inclinant devant le couple.

_ Kira va t'amener à tes appartements, annonça le Roi avant d'appeler son domestique.

Toshiro prit donc congé, perdu dans ses pensées. Dans quel état allaient-ils retrouver Karin ? Il n'était pas pressé de le savoir.

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