Vasto Lorde

Chapitre 18 : Une famille

Chapitre final

2661 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 10/11/2016 09:34

   « Je crois que je dors. Je suis allongé sur le dos, immobile et les yeux fermés. Lentement, je les ouvre, éblouis par la lumière. C’est la Lune, la Lune la plus grosse. Elle est devant moi, immense et magnifique, brillant de tout son éclat. C’est alors que je réalise que je ne l’avais jamais contemplé, que je ne connais ni son nom, ni celui de la deuxième Lune, que je n’avais même pas prêté attention au fait que ces astres étaient les principales sources de lumière de cette terre et que sans les deux lunes, l’obscurité dans laquelle nous autres hollows vivons serait totale.

   Lorsque j’ai dévoré Herb, j’ai senti ma conscience s’envoler. Je n’étais plus maître de moi-même et mes gestes étaient instinctifs. Mes souvenirs ont commencé à s’estomper alors que j’étais encore en train de dévorer mon vieux maître. Je me rappelle seulement m’être ensuite couché en étoile sur le dos, comme je le suis maintenant, puis ai senti une grosseur pousser au milieu de mon torse, là où se trouvait mon trou, et toutes mes forces y ont afflué. Cela aurait probablement dû m’inquiéter mais j’étais tellement fatigué… Un puissant sommeil m’a rapidement gagné puis j’ai fermé les yeux et me suis endormi.

   Je ne sais pas combien de temps s’est écoulé mais j’ai l’impression que la mort d’Herb remonte à une éternité. Je réalise alors que de toute ma vie de hollow, je n’ai jamais dormi et que ce sommeil m’aura été vraiment réparateur puisque grâce à lui, j’ai pu prendre de la distance avec mes problèmes et réaliser qu’au final, même si cela peut être difficile au début, il n’y a rien de fatal à suivre une nouvelle voie que celle que l’on se croyait destinée. Je me suis battu, j’ai fait du mieux que j’ai pu et aurais souhaité de tout mon cœur voir mes efforts couronnés de succès.

   Néanmoins je n’évolue pas dans une œuvre fictive mais dans la vraie vie et dois accepter qu’il y ait et aura toujours des choses dans ce monde sur lesquelles je n’ai et n’aurais aucun pouvoir. Quoi que je puisse faire, il y aura toujours des choses qui se dérouleront indépendamment de ma volonté, que ce soit l’évolution de mon apparence ou la mort de membres de mon entourage. Tout ce que je peux faire, c’est accepter ce que je ne peux pas changer, en faire le deuil et vivre avec. Quoiqu’il arrive, ma vie continue et je dois m’appliquer à ce qu’elle ne soit pas creuse. »

   Soudain, alors que mes six sens s’éveillent en douceur, je perçois la présence d’un autre hollow tout près de moi. Il se tient à quelques dizaines de mètres et ne bouge pas d’un cil. Mon pouvoir ayant cru une nouvelle fois, je suis à présent en mesure de l’identifier sans même le regarder : c’est un énorme adjuchas pur-sang, tout en muscle. Il est bâtit un petit peu comme un gorille, c’est-à-dire que c’est un colosse avec des bras très grands et très puissants dont il se sert pour prendre appui. Par contre, sa tête n’est pas simiesque et sa mâchoire est énorme et carrée.

   S’il compte m’attaquer, ce sera un adversaire de taille mais je ne suis pas effrayé car j’en ai vaincu qui avaient le même gabarit. La seule chose étrange que je perçois est que l’adjuchas semble ne pas avoir mangé depuis longtemps et ne faire preuve d’aucune hostilité. Mais je n’ai que faire de lui. S’il tente quoi que ce soit, mon sixième sens m’avertira plusieurs secondes avant même qu’il n’esquisse le moindre mouvement et mes réflexes me permettront de lui échapper. Parfaitement protégé, je retourne à ma contemplation de la Lune et replonge dans mes pensées.

   « Herb a probablement raison : on ne peut pas courir éternellement après quelque chose qui n’arrivera pas. Bien sûr, si l’on a un but ou un objectif, il faut foncer, travailler dur, mettre toutes les chances de son côté et croire en soit. Bref, il faut à tout prix se donner les moyens de réussir, peu importe si c’est difficile.

   Toutefois, si l’atteinte de l’objectif a de trop nombreuses fois échouée et n’a apporté que découragement et déception, il faut parfois accepter que cela ne marche pas et trouver autre chose, autrement cela reviens à tenter de ressusciter un mort ou à forcer l’impossible, comme si l’on donnait un poison mortel à des gens en se disant que tôt ou tard, ils cesseront de mourir.

   Ce que j’essaye de dire, c’est que si les choses restent figées, alors la vie n’avance pas. Si mon but était d’évoluer en vasto lorde pour ensuite tout avoir et qu’il m’est impossible d’évoluer, alors autant tout avoir maintenant, dans l’état actuel des choses.

   Le Hueco Mundo me paraît vraiment terne et stérile mais Herb à raison : cette terre est aussi vaste que l’océan avec les hollows en guise de poissons. Il est tout à fait probable que cet endroit regorge de merveilles insoupçonnées et que si ce que je trouve dans cette région ne me plaît pas, je sois très heureux avec ce que je trouverais dans la suivante ou alors celle d’après ou d’encore après. J’ai bien réussi à trouver les terres brillantes avec leurs pierres lumineuses et éternelles qui ont même réussi à séduire Hallibel. Je peux sûrement trouver mon Eldorado à moi.

   Mais je ne pourrais pas le faire seul. Comme Herb me l'a dit, vivre seul et isolé est quelque chose de très triste. Cela devient vite difficile d’aller vers les autres et l’on est rapidement rongé par les pensées négatives qui viennent nous tenir compagnie. Il me faut des camarades dignes de confiance avec qui faire la route et retrouver le bonheur. Des alliés avec qui je pourrais tout partager et oublier les mauvaises choses… J’ai besoin d’amis. J’ai besoin d’une famille.

   Peu importe que l’on ait beaucoup de puissance ou de biens matériels, si l’on est seul, la vie est aussi creuse que le Hueco Mundo. L’important est de partager, être heureux, avancer avec des compagnons qui en valent la peine et de se relever malgré les chutes et si le Hueco Mundo est vide, c’est tout simplement pour inviter ceux qui le méritent à y bâtir quelque chose de meilleur que ce qu’il a à offrir. »

   Je ris intérieurement et pense qu’encore une fois, Herb avait raison en disant que je ne suis pas une anomalie parce qu’en effet, je suis simplement différent et ai juste besoin de trouver des personnes comme moi : différentes mais sincères. Sur les millions de hollows qui vivent ici, je n’ai que l’embarras du choix. Inutile de perdre mon temps avec ceux qui n’en valent pas la peine et autant utiliser toute mon énergie pour ceux qui le méritent vraiment.

   Soudain, alors que je me demandais si Criquet accepterait de me pardonner si je partais le retrouver et m’excuser, je réalise que le pur-sang à côté de moi est toujours immobile, ce qui est curieux car en temps normal, les adjuchas sont opportunistes et ne passent jamais à côté d’une proie.

   Je tourne la tête et vois sur son visage quelque chose que je semblais percevoir avec mon sixième sens : de la tristesse. L’adjuchas semble triste et désireux de s’approcher de moi, ce que je ne comprends pas. Je ne comprends pas sa tristesse et surtout, je ne comprends pas pourquoi il me parait aussi grand.

   Puis, alors que je regardais à nouveau la lune, je tends les bras vers elle.

« La lune est tellement belle et semble tellement proche… C’est comme si je pouvais l’attraper et… Hey mais une petite seconde, qu’est-ce que c’est que ça ?! »

   Mes mains ! Mes bras ! Ils sont minuscules ! Je me relève, inspecte mon corps et réalise que non seulement je n’ai plus du tout la même apparence, mais qu’en plus, je suis devenu tout petit !

   Sans perdre une seconde, je cours jusqu’au point d’eau qu’Herb avait l’habitude de laper et y contemple mon reflet : je ressemble presque trait pour trait à l’homme moderne avec de saillants muscles d’athlètes. Je mesure environ deux mètres et mon regard est plus profond qu’avant. Stupéfait, je porte mon regard vers l’horizon.

« Impossible… J’ai donc évolué ? »

   Dans un mélange de joie et de confusion, les questions me viennent par milliers : Pourquoi ? Pourquoi ai-je évolué alors qu’il m’était déclaré que cela m’était inaccessible ? Pourquoi suis-je devenu un vasto lorde alors que cela n’était plus mon objectif ? Que s’est-il passé ?

   Les réponses potentielles soulèvent tout autant de questions : cela me viendrait-il d’Herb ? Est-ce que dévorer un hollow qui a consommé autant d’eau noire aurait eu pour effet de me faire évoluer ? Ou est-ce qu’agir par « humanité » m’aurait fait évoluer ? Ou alors cela me viendrait-il d’Hallibel ? On dit que l’on trouve l’amour quand on cesse de lui courir après… Serait-ce la même chose pour l’évolution en vasto lorde ? Aurais-je obtenue ce résultat en ayant tout simplement cessé de le souhaiter ? Ou alors le fait que les vasto lorde ressemblent aux humains révèlerait que la partie humaine d’un individu doit prendre le pas sur sa partie hollow ?

   Toutes ces questions quant au secret de cette évolution sont rapidement balayées d’un revers de main par celle qui me vient illico : Et maintenant ?

   Et maintenant ? Qu’est-ce que cette évolution va m’apporter de plus ? Je n’ai pas…

   C’est alors que l’adjuchas s’approche lentement. Je le regarde dans les yeux et l’attends. Il s’arrête devant moi et nous nous faisons face.

- Comment tu t’appelles ?

- Loz. Je m’appelle Loz.

- Loz ? C’est un très joli nom.

- Merci beaucoup… Boss.

- Boss ?

   Mais bien sûr ! Ce pur-sang est seul, tout comme moi ! Je cherchais à me faire des amis, une famille… Et c’est quelque chose qui se fonde en en trouvant les membres un par un. Loz me considère comme son chef et s’incline devant moi.

- Voulez-vous de moi ?

- Loz… C’est avec plaisir que je t’accepte mais je ne veux pas d’un serviteur, je veux un ami.

- Alors je m’engage à être cet ami.

   Il relève la tête.

- Puis-je vous appeler par votre nom ?

- Je ne me rappelle pas de mon nom, Loz.

- Dans ce cas accepteriez-vous que je continue de vous appeler Boss ?

- Oui, ce nom me plaît.

   Je m’approche de lui et appose ma main sur son énorme poing posé au sol tout en lisant l’expression de soulagement sur son visage. Loz est sincère et ému, probablement parce qu’il a compris qu’il avait enfin trouvé quelqu’un qui ne souhaitait pas profiter de lui.

- Loz… Cela te plairait-il d’avoir des amis ?

- Oui boss. Je veux des amis.

- Cela te plairait-il d’avoir une famille ?

- Qu’est-ce qu’une famille, boss ?

- Un groupe où l’on veille les uns sur les autres. Où l’on partage les bons comme les mauvais moments et où personne n’est mis à l’écart où laissé derrière.

- Alors oui boss, je veux une famille. Laissez-moi la fonder avec vous.

- Loz… Tu en es mille fois le bienvenu.

 

 

Chers lecteurs, chères lectrices,

Merci d'avoir lu Vasto Lorde jusqu'au bout. J'envisage d'écrire une suite, Arrancar, où nous suivrions les nouvelles aventures de nos héros et qui se rapprocherait un petit peu plus de l'histoire originale tout en restant indépendante, ainsi qu'une préquelle racontant l'histoire de Herb.

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