Addiction

Chapitre 11

851 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 07/04/2020 20:00

Elle eut besoin de plus d'une heure pour reprendre à travailler un peu. Elle n'ouvrit de nouveau les stores qu'à 18 heures et ne reçut qu'un nombre limité de dossiers urgents, tous les autres évitaient de venir. Caïn recevait même des mails de personne présente dans la pièce d'à côté.

Le capitaine s'étonnait presque de leur perspicacité en ce moment tant personne n'avait rien vu avant. Peut-être étaient-ils plus habitués à devoir comprendre les hauts et les bas de la relation de Caïn et Lucie plutôt que s'attarder sur les humeurs de chacun, ce qui se comprenait puisque leur état d'esprit respectif jouait sur leurs interactions, autant s'intéresser directement à celles-ci donc.

- On rentre ?, lui demanda-t-il lorsque sonna 20 heure.

Lucie jeta un regard par la baie vitrée et demanda à Caïn d'attendre encore un peu. Lorsqu'il regarda lui-même dans l'open-space il comprit ce qu'elle guettait. Legrand était toujours assis à son bureau parmi la poignée d'agents encore présent. Le capitaine ne dit rien mais il savait tous les deux qu'habituellement le lieutenant était déjà parti a fortiori là qu'ils n'avaient aucun gros dossier en cours.

Caïn se cala sans protester sur le rythme de Lucie. Ils travaillèrent encore une bonne heure avant que le ventre de Lucie n'émette un ronflement sonore. Elle essaya bien de la faire taire mais il reprenait à intervalles réguliers.

- Tu as besoin de manger aller viens on y va.

- Attends encore un peu s'il te plaît.

- Tu ne vas pas trembler toute la soirée.

- Ce n'est pas ça, c'est …

- Non, je ne veux rien entendre. On se lève et on va manger. C'est un ordre.

- Tu n'as pas le droit. Je suis ta supérieure.

Mais en disant cela elle se leva sans entrain et se plaça juste derrière lui alors qu'il ouvrait la porte. Dès qu'il en eut franchi le seuil, Legrand était face à eux. Lucie se figea.

- Lucie je peux te parler s'il te plaît.

La commandante se décomposa et lança un regard désespéré à Caïn. Ce dernier avait déjà fait demi-tour dans le bureau et s'était installé de nouveau derrière sa table. Lucie avait reculé au milieu de la pièce et Legrand était rentré aussi. Une fois à l'intérieur pourtant il resta silencieux, ne ferma pas la porte et demeura tourné vers Caïn.

- J'aimerais parler à Lucie seul à seul

- Lucie je reste avec toi.

Caïn n'avait pas parlé à Legrand et avait d'ailleurs agi comme si son lieutenant n'avait rien dit. Il regardait uniquement Lucie. Cette dernière semblait mourir d'envie de lui dire de ne surtout pas partir mais Legrand était si insistant qu'elle se ratatinait à vue d’œil.

- Je préférerais que Fred reste ici, dit-elle d'une petite voix.

- Et moi je voudrais te parler de choses personnelles, répliqua-t-il en accentuant le « personnelles » à outrance.

- Tu peux tout dire devant lui.

Loin de rassurer Legrand, la simplicité avec laquelle elle avait dit cela avait fait frissonner le lieutenant. Plus encore, le sentiment d'évidence qui était clairement visible chez Lucie, le dérangeait profondément. Il se sentait mis de côté une fois encore. Il tenta de la faire changer d'avis avec un regard appuyé mais Lucie ne regardait que Fred.

- Lucie on pourrait parler chez toi sinon. Ce serait plus …

Il laissa sa phrase en suspens en voyant que la concernée avait pris un air totalement paniqué. Avant qu'il ait eu le temps de comprendre quoi que ce soit, Caïn s'était précipité. Dans un geste bien trop automatique il lui pressa un mouchoir sous le nez, Legrand perdit un peu de couleur en le voyant s'imbiber de rouge. Machinalement il fit un pas vers Lucie mais celle-ci, tout aussi naturellement, s'abrita dans l'étreinte de Fred. Le lieutenant reçut ce geste comme un coup de marteau dans l'estomac.

Pour quelque raison que ce soit Lucie avait un problème avec lui, cela il pouvait le concevoir, tous les couples avaient des hauts et des bas, ils ne faisaient pas exception. Ce qui lui tordait les tripes c'était de voir qu'elle se réfugiait dans les bras de Caïn. Il aurait voulu crier et pester, exiger de comprendre mais l'expression de Lucie autant que la présence du capitaine lui empêchait toute remarque dans cette direction.

Sous le coup de l'énervement il ne batailla pas plus et tourna les talons sans poser aucune question. Dans l'instant Lucie fut infiniment soulagée pourtant cet abandon soudain ne la rassura que très provisoirement. Caïn et elle attendirent d'être sûrs que Legrand soit parti avant de rentrer chez le capitaine. Durant le trajet ils n'échangèrent pas un mot pourtant Lucie se tenait sensiblement plus près de lui, pas assez pour être dérangeant mais suffisamment pour que cela soit notable.


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