L'histoire que l'on veut écrire.

Chapitre 5 : "La vie n"est qu'un gros pâté de merde !"

Chapitre final

766 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 27/10/2019 02:11

Zo avait dit "dans deux heures", mais préféra anticiper son retour. Après tout, s'il fallait partir, autant le faire au plus tôt. Et puis, il n'aimait pas savoir Leo seul avec cette ordure de Riario. Lui, il savait que la bête était toujours enfouie quelque part dans ce monstre. Quarante ans de débrouillardise lui avaient appris que la naïveté est un défaut qui peut être fatal.

En effet, une fois à quelques mètres de l'atelier, il entendit des cris et se précipita pour intervenir. Hélas, la porte était verrouillée. Restaient les grands interstices entre les planches de bois qui servaient de mur...

De l'autre côté, Leo suspendit son geste et rempocha la lanière de cuir dont il avait caressé son prisonnier dans une brutalité amoureuse consentie et même souhaitée. Il s'approcha, posant à dessein la paume sur le ventre dénudé du Comte pour lui souffler à l'oreille : " L'idée pourrait te plaire, on nous observe." Souffle au creux du cou qui envoya en effet sur-le-champ un coup de désir dans les reins du captif. Bâillonné, mais pas inaudible

pour autant, il émit une plainte de pure délectation en imaginant la suite. Le plaisir d'être l'objet de son amant n'en était que plus intense.

La nature profonde de Girolamo n'avait jamais été à la discrétion. Il savait que son physique plaisait ou impressionnait et aimait à se montrer, à user de son élégance pour marquer son public... Qu'il fût vêtu ou, pour cette occasion, nu comme à son premier cri.

Les coups, Zo aurait pu les supporter, mais Leo changea de registre et se mit à tourmenter son prisonnier d'effleurement de ses lèvres, de douces morsures. Les supplications de l'autre à travers le bâillon devinrent insupportables, il se détourna pour donner un coup de pied rageur à la première chose qui croisa sa route, en l'occurence, un pauvre chat famélique et lui-même plutôt mal en point : " Ma putain de vie n'est qu'un gros pâté de merde ! Et il m'en sert jusqu'à plus faim !"

Depuis longtemps, Zo avait cessé de se demander pourquoi il aimait Leonardo, qui ne donnait en échange que ce que à quoi pouvait consentir un corps. Pas d'amour dans la transaction, du moins, pas de son côté.

Depuis longtemps, Zo avait cessé de se promettre de le quitter, de le laisser démuni devant les nombreuses exigences de ses entreprises.

Depuis longtemps, son coeur et l'image qu'il avait de lui-même se morcelaient, doucement, par tout petits éclats, pour mieux prolonger l'agonie.

Parfois, il rêvait qu'il avait l'occasion de rencontrer Leonardo pour la toute première fois, afin de lui tourner le dos et de le fuir aussi vite et aussi loin que possible.

Il décida d'aller laver les images qui lui défilaient en tête au "Palais des Plaisirs" de Madame Singh.


Une heure plus tard, Girolamo plaidait : "Permets-moi de te dire que sous une autre forme, tu sais te montrer aussi cruel que moi, l'artiste. Malgré mon antipathie pour lui, j'imagine ce que ressent ton amant de longue date... Tu es conscient qu'il t'aime, non ?

Leo leva la tête de ses genoux pour le regarder en face avec une expression amusée :

  • Mais non ! Enfin, où vas-tu chercher ça ? Zo est mon plus fidèle ami, mais à part les petits à-côtés sexuels, il n'est pas question d'amour !
  • Et toi, es- tu son plus fidèle ami ?

Leo se leva vivement :

  • Tu me fais la morale ?
  • Je te pose une question. Simple, sans décorum... Pour préciser le sujet, envisageons les outrances : t'interposerais-tu entre mon couteau et la poitrine généreuse de ton ami ?

Leo fronça les sourcils. La question l'embarrassait de plus en plus au fur et à mesure qu'il se jouait la scène en pensées. Il ne lui restait qu'un soupir pour admettre :

  • Non. Je le défendrais, je t'empêcherais d'aller jusqu'au bout, mais je ne donnerais pas ma vie pour lui.
  • Contrairement à lui. Il le ferait, Leo, dit le Comte d'une voix plus douce.

Leonardo ne détourna pas les yeux et dit :

  • Je sais... Je vais le chercher pour partir d'ici, le mettre à l'abri... J'ai une idée assez précise de l'endroit qui lui aura permis d'oublier ce qu'il a vu.
  • Oui. Vas-y. Moi, je tenterai de mordre dans mon orgueil quand il m'insultera les jours qui viennent. Pas trop longtemps, je ne suis pas capable de promettre longtemps. Mais au moins pour quelques jours... "


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