Des fragments de Riario

Chapitre 2 : La mort d'un guerrier

Chapitre final

441 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 21/01/2020 18:36

Sous les palmes arc-en-ciel de mon imagination,

mon idole attrape au vol les éclairs furieux de l’été.

Et le sang coule en cascades vers une vallée riante, 

plus propice à la féerie qu’au cirque des déluges.

Mais mon idole porte couronne de ronces

et embrasse les haleines de monstres.

Des vergers sous la lune, il n’attend pas de fruits

et les seules pierreries qui font briller ses yeux sont celles de son poignard,

fidèle compagnon, toujours à sa ceinture.

Quand la mer et le ciel se rejoignent, au loin,

ses yeux noirs ne voient pas le voyage, mais sa fin.

Dans le sable blanc, ses pas ne laissent aucune trace,

comme si, déjà, il touchait les géantes cariatides 

à la porte du purgatoire.

L’oiseau sait tout cela, quand de là-haut il voit sa route ;

l’essaim le devine, qu’il dérange en passant ;

l’enfant qu’il salue, au couchant, le pressent

et le prie de conter les terrasses des palais, 

les tombeaux des lointaines cathédrales,

que lui ne verra jamais.

Mon idole, sous les palmes arc-en-ciel de mon imagination,

est une flamme qui embrase des Reines 

et la lave sous la glace elle-même.

Il est parfois aussi un jeune tambour, qui bat le départ

vers l’éternité d’une histoire.


***


Forli, le 14 avril 1488


Très cher Leonardo,


De bien tristes nouvelles m'incitent à vous écrire, moi, que vous n'avez pourtant jamais rencontrée.

Oui, il s'agit bien de votre grand ami, mon mari, qui nous a quittés hier dans des circonstances bien dramatiques.

Depuis quelque temps, la révolte grondait, ici, à Forli et des partisans de la famille Ordelaffi se sont rassemblés pour comploter et assassiner mon très cher époux.

Convalescent, il se reposait sur une terrasse, quand six hommes armés se sont jetés sur lui, poignards et rapières au clair.

Vous, qui l'avez bien connu, savez que six soldats ne seraient pas venus à bout de mon guerrier, n'eût été cette méchante maladie qui le cloua au lit pendant deux mois.

Cher Signor Da Vinci, c'est peut-être beaucoup vous demander, mais vous me feriez très grand honneur en me rendant visite.

J'aimerais vous présenter nos enfants et et vous remettre en main propre, quelques documents que Girolamo m'avait priée de vous léguer s'il lui arrivait malheur.

Puis-je vous demander aussi de bien vouloir faire part du décès de votre très cher ami aux membres de la famille Borgia avec lesquels vous seriez en contact ?


Avec toute mon amitié, cher Artista;


Caterina Riario Sforza

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