Liz Stevens, l'énigme du phare

Chapitre 4 : Chapitre 3 - Le phare

2036 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 23/04/2018 11:03

Chapitre 3 - Le phare


« Vide de ses occupants le phare sera,

Prisonnier du temps le phare sera,

À jamais un leurre le phare sera. »

 

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La nuit était bien silencieuse. Le vent s’était calmé. Il était environ 23h30 et pourtant Liz ne dormait pas encore. Elle ressassait sans arrêt les propos du docteur Demarion. Élisabeth se retournait sans cesse dans son lit, impossible de dormir. Elle se redressa et regarda dans le vide quelques instants. « Et si j’y allais quand même ? » se demandait-elle. « Il est possible que ces gens aient besoin d’aide et que personne ne le sache. » Cette pensée l’effraya quelque peu. Si elle avait été dans une telle situation, elle aurait aimé que quelqu’un la sauve. Et si on attendait le lendemain, il sera peut-être trop tard pour leur venir en aide. Elle retira brusquement sa couverture, mit ses souliers et passa son manteau par-dessus sa chemise de nuit mauve. Elle se précipita ensuite vers la porte mais stoppa sa course. Elle regarda vers sa droite et aperçut la lampe en laiton. C’était une vieille lampe à pétrole assez lourde. Elle en saisit la poignée, l’alluma et sortit du cabanon.

 

La nuit était froide. Trewarthan était vouté d’un ciel d’encre et un petit brouillard nuançait le tout. Rien de bien rassurant pour la jeune londonienne. Mais l’idée de porter secours à ces hommes la fit sortir de son refuge. Liz marcha d’un pas vif en direction du quai. La mer était très calme. Tout au bout de l’embarcadère, elle vit une barque plutôt isolée des autres navires. Elle monta dedans sans se soucier de savoir à qui elle appartenait, largua le cordage et commença à ramer. Elle suivit l’indication donnée par l’homme qu’elle avait vu sur le dock plus tôt dans la journée. Ce ne fut pas facile de se diriger dans cette obscurité. Mais elle y parvient tout de même, comme si une force surnaturelle la guidait jusqu’au phare. Liz arriva sur la plage où la seule mélodie était le bruit des vagues. Elle descendit de la barque, mouillant le bas de sa robe et tira difficilement le petit bateau à travers l’écume blanche et mousseuse. Elle prit la lampe et recula ensuite sur le sable tout en frottant ses bras. La brise la rafraîchissait davantage. Elle éclaira son chemin et vit des débris sur la plage, des tonneaux éventrées, des caisses abandonnées. L’île avait des airs fantomatiques. Il faisait noir et la lumière de la lampe avait du mal à percer les ténèbres. Élisabeth regrettait d’être venue seule mais il était trop tard pour reculer. Liz marcha d’un pas peu assuré sur la plage en direction du rocher. Elle monta les marches et termina son avancée devant une maisonnette. Elle aussi était abritée par les ténèbres. Terrifiée, la jeune londonienne n’osa pas s’approcher davantage de la petite maison. Elle examina l’extérieur, passa sur le côté et vit une boite accrochée au mur. Elle éclaira et vit qu’il s’agissait d’un générateur de secours. Elle baissa la manivelle grinçante et une lumière jaillit de la maison. Elle vit également une échelle mais elle n’osa pas descendre. Liz retourna sur le devant du bâtiment et constata cette luminosité, cette lueur d’espoir. Mais le phare était toujours éteint. La jeune femme entra et constata qu’il n’y avait personne au rez-de-chaussée.

 

- Wouhou ?! Il y a quelqu’un ? demanda-t-elle d’une voix tremblante. Néanmoins elle n’eut aucune réponse. Eh oooh ?! tenta-t-elle une nouvelle fois.

 

L’ambiance était vraiment lugubre. Liz se disait qu’elle arrivait peut-être trop tard. Pour en être certaine, elle devait voir dans le phare. En avançant dans la maison, elle vit un autre générateur, beaucoup plus gros que celui accroché au mur extérieur et de couleur foncé. Il y avait trois manivelles à baisser pour le faire fonctionner. Mais dans quel ordre procéder ? « Droite, gauche, centre. Non, ce n’est pas ça. Gauche, centre, droite. Ce n’est pas ça non plus. Gauche, droite, centre. Non plus. Centre, droite, gauche ? » Un petit bruit retentit plus loin, dans la réserve. La tour du phare s’était allumée. L’endroit semblait moins effrayant lorsqu’il était éclairé. Mais la lampe du phare était toujours éteinte. Même si le phare était désert, Liz pouvait au moins rallumer la lampe. Toutefois cette absence de l’équipage était tout de même pesante, étrange, énigmatique. Où était-il donc passé ?

 

Pas si loin de là, une femme se tenait devant son miroir, un simple miroir qui dévoilait à Yselda ce qui se passait dans le phare. Elle le regardait attentivement, les doigts joints, tout en affichant un sourire narquois et semblant inébranlable. Elle portait une vieille robe noire avec des dentelles bordeaux sur les manches et le bord de son capuchon. Elle avait des petits yeux noirs et des mèches brunes et argentées s’échappaient de son capuchon. Elle semblait avoir une quarantaine d’années. Elle fut rejointe par une autre femme presque du même âge, avec des cheveux plus clairs que les siens. Elle portait le même vêtement que sa sœur mais avec de la dentelle verte.

 

- Un nouvel arrivant Yselda ? demanda-t-elle de sa voix rauque.

- Pas « un nouvel arrivant » Erin mais « une nouvelle arrivante », répondit la sœur.

- Une femme ? Oh mais c’est formidable. On se la partagera n’est-ce pas ?

- Si elle est là c’est grâce à mon sortilège, répliqua Yselda en fronçant les sourcils.

Erin sembla surprise par cette réponse. Elle scruta sa sœur en espérant un rire ou une autre réaction prouvant qu’elle n’était pas sérieuse dans ses propos.

- Mais je ne suis pas ingrate, reprit-elle avec un visage plus doux. J’ai promis à nos parents de prendre soin de toi. Je ne faillirai pas à ma tâche.

- Mais un phare est très peu peuplé. Je doute que ce soit une attache importante Yselda.

- C’est vrai, mais les hommes qui y vivaient nous ont permis de rajeunir bien plus que les paysans de notre autre attache. Ceux-là étaient plus fort et en bien meilleure santé. Et regarde-là, si jeune, si jolie et pleine d’énergie. Elle sera une très bonne source pour nous. Nous pourrons trouver une autre attache lorsque nous nous serons occupées d’elle.

- Tu as raison. Le trophée est bien alléchant. Elle nous éloignera pendant un moment de la sinistre faucheuse.

- Oh mais elle viendra Erin ; néanmoins pas pour nous.

- Encore faut-il qu’elle descende l’échelle et qu’elle le trouve.

- Patience Erin, patience.

 

Évidemment pas pour elle. Les sœurs réservaient le même sort pour Élisabeth que pour l’équipage. Si seulement elle savait ce qui l’attendait, Liz aurait abandonné depuis longtemps. Au lieu de cela, elle continuait à visiter le phare. Elle monta les escaliers en colimaçon, poussée par sa curiosité. Elle avait toujours cette lampe encombrante à la main au cas où elle en aurait besoin. Au premier étage, le repas était prêt sur une table en bois au milieu de cette pièce dépourvue de décoration. Les murs étaient nus et froid. La marmite était sur la petite cuisinière noire. La table était dressée pour trois personnes, des assiettes remplies de haricots, un gros formage coupé, une chaise tirée. Malgré la lumière, l’atmosphère était toujours aussi pesante. Où est passé l’équipage ? Quel est la raison qui l’a poussé à quitter la table aussi rapidement ? On voyait bien qu’il n’avait pas eu le temps de manger ne serait-ce qu’une fourchette de leur met. « Je ne trouverai aucun indice ici » pensa la jeune femme. Elle sortit donc de la pièce et se rendit à l’étage supérieur. Pendant qu’elle montait les escaliers, elle entendit un air de violon assez triste. Cela lui glaça le sang mais elle s’était dit que l’équipage était finalement présent. Elle se hâta de gravir les dernières marches et ouvrit la porte. C’était un dortoir avec un lit superposé mais personne à l’horizon. Sur une commode située sur sa gauche, Liz vit un vieux violon qui avait prit la poussière. Était-ce ce violon qu’elle avait entendu ? « Non, c’est impossible. Je n’ai vu personne sortir de la pièce » pensa-t-elle. Son imagination devait sûrement lui jouer des tours. Il y avait des lettres sur le lit du dessous. Liz les lut en diagonale mais elle ne trouva aucun indice. C’était juste des lettres de Béatrice pour James Woolf disant qu’elle s’inquiétait beaucoup pour lui. Mais si elle s’inquiétait autant, c’est qu’il y avait une raison. Le phare serait-il hanté ? Maudit ? La londonienne posa les lettres. Elle ouvrit le premier tiroir de la commode mais n’y trouva que des vêtements. Elle ouvrit le second.

 

- Partez tant que vous le pouvez ! fit une voix d’homme plutôt effrayante.

Élisabeth sursauta tout en haletant. Elle regarda autour d’elle.

- Qui est là ?! cria-t-elle.

 

Toutefois, le silence régna à nouveau. Mais d’où venait cette voix ? Autour d’elle il n’y avait pas âme qui vive. Ce phare était un purgatoire, mais Liz l’aurait bien qualifié d’enfer tant il la terrifiait. La jeune femme chercha dans le tiroir, relevant les couvertures et découvrit une feuille pliée en deux. « Qu’est-ce que c’est que ça ? » se demanda-t-elle. Elle la déplia et vit un plan avec le phare vu du dessus. Apparemment il y avait un chemin matérialisé par des planches derrière le phare. L’échelle qu’elle avait vue plus tôt devait sans doute l’y amener. Mais cela n’était pas la priorité. Élisabeth devait d’abord allumer le phare sinon les navires pourraient se fracasser contre les rochers. Mais Élisabeth commençait vraiment à fatiguer. La pauvre tenait à peine debout. Élisabeth sortit du dortoir et la voix l’arrêta à nouveau sur le palier. « Partez tant qu’il est encore temps !! » Mais Liz était trop épuisée pour ramer vers Trewarthan. Elle monta tout de même jusqu’au troisième étage et découvrit le bureau du chef des gardiens. La pièce avait l’air moins lugubre que les précédentes. C’était la seule qui était tapissée d’un papier peint rayé rouge et beige et muni de boiseries chaleureuse. La fatigue était en train de peser sur les épaules de la jeune femme. Une nuit de sommeil lui ferait le plus grand bien. Peut-être que lorsqu’elle se réveillera le lendemain sous un soleil bienveillant, elle y verra plus clair et les lieux n’auront plus l’air aussi effrayant. Quelle heure était-il ? Elle regarda la pendule qui affichait 02h01. Oh oui, il était temps de dormir. Élisabeth s’allongea sur le lit. Elle passa sa main sous sa tête et tenta de s’endormir. Bizarrement, elle n’eut aucun mal à se laisser tomber dans les bras de Morphée.

 

« C’est ça ma mignonne. Récupère tes forces. Elles nous seront très utiles. » - Yselda.

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