Si Vis Pacem...

Chapitre 6 : IV -Path

Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/11/2016 21:06

 

IV –Path
 
 
Un mur. Une paroi verticale, un empilement de ravins, de falaises et de pics drapés dans un linceul blanc, perdus entre l’azur et la brume. Côtoyant ses sœurs de vapeur, la montagne s’élevait à des hauteurs infinies, crevant le ciel. Et sur ses pentes noyées dans les nuages, une silhouette peinait.
 
 Katenbau n’avait pas imaginé que la montagne puisse être aussi immense. Du village nuskri, les deux pics semblaient moins distants du village que le village ne l’était lui-même de la plaine. Katenbau avait choisit, plus ou moins au hasard, d’escalader le pic de l’est. Au bout d’une semaine, il s’était rendu compte que ses yeux l’avaient trompé. Il lui était à présent impossible d’estimer la hauteur à laquelle il se trouvait, car les nuages lui masquaient le sol.
 Cette nuit-là, il avait trouvé abri dans une grotte. Le froid était mordant, et malgré les épais vêtements qu’il portait sous son armure, et les peaux qui la recouvraient, il l’endurait à peine, lui qui était pourtant habitué aux longues traques immobiles dans la steppe.
 Il se réveilla brusquement et jeta un coup d’œil à l’entrée de la grotte. Le ciel semblait s’être dégagé. Après s’être étiré, il quitta la petite caverne. Le glacier en bordure duquel elle se trouvait était d’un blanc uniforme, qui remontait en pente forte vers un col, puis serpentait entre deux élancements rocheux. Délimité sur ses côtés par deux dénivelés couverts de glace, où l’on pouvait trouver de nombreuses ouvertures dont la taille variait de la simple faille à des grottes de taille moyenne comme celle où il avait passé la nuit, le glacier s’achevait de façon abrupte en plongeant dans le vide quelques dizaines de mètres plus bas.
 Pour la première fois depuis qu’il avait commencé l’ascension, le ciel était dégagé. Le sommet de la montagne se détachait nettement sur l’azur, à une hauteur qu’il estima à près de mille cinq cent mètres au dessus de lui. La partie inférieure de la montagne était masquée par une couche uniforme de nuages qui s’étendait jusqu’à l’horizon, dont seules émergeaient les deux montagnes Kerus-an-Ammôn, tels des récifs au cœur d’une mer paisible. Katenbau se détourna, et, avec un soupir las, repris son ascension.
 
 Au sommet de la vallée, le glacier se glissait entre deux saillies rocheuses qui se rejoignaient pour former une arche de granit couvert de glace d’où pendaient de longues stalactites qui lui donnaient l’air d’une gueule aux crocs dégoulinants de salive. Katenbau s’y arrêta aux alentours de midi, lorsque le soleil était à son zénith, et mangea une partie de la viande que lui avaient offert les villageois avant son départ. Le froid avait au moins pour avantage de conserver la nourriture, et il avait des vivres pour encore un bon mois. Alors qu’il s’apprêtait à repartir, son regard fut attiré par de larges empreintes à l’ombre de l’un des pieds de l’arche. Elles étaient si larges et profondes qu’un enfant aurait pu y patauger à son aise. La patte qui l’avait laissé avait trois orteils dirigés vers l’avant, et un quatrième, plus petit, dirigé vers l’arrière. Quel bête monstrueuse avait pu laisser une pareille trace ?
 Une image s’imposa bientôt à son esprit. Les pattes du dragon que chevauchait Omatir possédait trois orteils dirigés vers l’avant et un vers l’arrière. Se pourrait-il que d’autres dragons aient existé en dehors de Scosglen ? Katenbau écarta cette pensée et reprit sa marche.
 Après être passé sous l’arche, le glacier remontait en pente douce jusqu’à une immense falaise de glace. Katenbau se trouva à son pied au milieu de l’après-midi.
 
 Il ne s’agissait pas en fait d’une véritable falaise de roc, mais d’une immense masse de glace, charriée par le glacier au cours de sa descente, comme les icebergs sont mus à la surface des mers boréales par les courants qui agitent leur sein.
 Il repéra une ouverture dans la haute paroi, et s’engouffra à l’intérieur du massif de glace. Il se retrouva dans un tunnel étroit qui s’engouffrait à l’intérieur du glacier. Autour de lui, les parois, le plafond et le sol de glace avaient une légère teinte bleu pastel, et parfois la glace scintillait, et une nuée d’étoiles se reflétait sur l’argent de la Lame des anciens. Mais malgré sa beauté singulière, cet endroit oppressait Katenbau. Le froid y était mortel, et nul bruit ne s’y faisait entendre. Il avait l’impression que le moindre de ses pas provoquait un vacarme que l’on pouvait entendre partout sur la montagne, que son seul souffle faisait plus de bruit que celui de cent coureurs venant de terminer un marathon.
 Il arpenta le tunnel pendant une durée inestimable, et finit par se demander s’il ne s’agissait pas d’un cul-de-sac.
 Alors qu’il parcourait avec une anxiété croissante les galeries depuis un temps qu’il était de moins en moins capable d’estimer, il sentit un courant d’air l’effleurer à travers les épaisses peaux qui le protégeaient à peine du froid mordant extérieur. Ce n’était pas un cul-de-sac !
 Il s’élança, impatient de revoir la lumière froide mais néanmoins réconfortante du soleil. Le courant d’air se mua en brise, puis en un vent glacial alors qu’il arriva à la fin du tunnel. Celui-ci ayant monté en pente douce depuis le départ, Katenbau se retrouva sur le sommet du massif de glace. Mais nul soleil ne l’y attendait.
 Il se trouvait au milieu d’une vaste étendue plane, au bout de laquelle se dressait le dernier éperon rocheux, et, environ sept cent mètres au dessus de lui, le sommet de Kerus-an-Ammôn. L’ultime plateau se trouvant à son pied, où se tenait le barbare, était couvert d’un linceul uniforme de glace et de neige qui brillait à la lumière de la Lune. Celle-ci se détachait derrière l’autre sommet telle une ombre derrière un parapet chinois, par delà la mer de nuages, énorme et d’une pâleur cadavérique et gibbeuse, si proche que Katenbau avait l’impression de pouvoir la toucher, de pouvoir palper sa surface morte et craquelée en étendant le bras.
 
 Tandis que Katenbau se mettait en route vers le dernier sommet, la lumière lunaire s’évanouit comme si l’astre des nuits souffrait de quelque éclipse. « Un nuage », pensa Katenbau. Puis la lumière revint. C’était trop rapide pour être un nuage. Le bruissement de titanesques ailes rompit le silence millénaire. Le barbare se retourna.
 La bête se posa. Il dégaina la Lame des Anciens.
 
 
 
 
……………
 
 
 
 
 Les deux bâtons s’entrechoquèrent avec un bruit mat. Metras se remit en garde, et dévia l’estoc de son adversaire avant de se retourner et de frapper en force du haut vers le bas. Le coup balaya la garde de Keelarwen, qui dut éviter la suite de l’enchaînement à la hâte, sans avoir le temps de placer aucune contre-attaque. Il termina par un coup de pied retourné qui atteignit la jeune combattante au plexus, lui coupant la respiration, et lui faisant échapper son simulacre d’arme sous le choc. Metras s’interposa entre elle et le bâton. Elle feignit un mouvement sur sa droite, puis partit sur la gauche en effectuant une roulade. Le jeune homme anticipa son mouvement et plaça son propre bâton sous sa gorge.
« Très bien, fit Menarnar, tu as gagné, Metras.
 La salle se fendit en applaudissements assez peu enthousiastes. Depuis quelques semaines, le traditionnel duel de fin de séance, qui opposait les deux meilleurs élèves de la journée, était monopolisé par Metras et Keelarwen. Les autres n’étaient pas mauvais, pensa Menarnar, mais ils ne sauraient sans doute jamais faire mieux que défendre leur vie bravement sur le champ de bataille. Seuls ces deux-là paraissaient vraiment doués au combat; seuls ces deux-là paraissaient capables de devenir un jour de grands combattants, ceux qui étaient à même de faire la différence lors des batailles les plus indécises.
-Ton geste était trop risqué, Keelarwen, ajouta Menarnar. Lors d’un vrai combat, tu aurais eu la gorge tranchée.
-Sur un vrai champ de bataille, j’aurais pu récupérer l’arme d’un mort plus facilement, répliqua-t-elle.
-C’est vrai, admit-il après une certaine hésitation.
 Les autres novices se turent. Jamais le professeur n’avait cédé à un élève auparavant. Menarnar sentit le changement d’ambiance.
-C’était un bon combat, Metras, ajouta-t-il pour faire bonne mesure.
 Alors qu’il allait annoncer la fin de la leçon, celui-ci répondit :
-Professeur ?
-Qu’y a-t-il ?
-Puis-je t’affronter ?
 Il y eut à nouveau une pause, plus longue celle-ci.
-Je ne crois pas que tu sois prêt, répondit-il simplement.
-Ne puis-je au moins essayer ? insista Metras.
 Menarnar eut une idée.
-Soit, fit-il en se dirigeant vers un coffre retenu fermé par d’épaisses lanières de cuir. Il en sortit une épée longue, qu’il lança à Metras.
-Dans ce cas tu ne vois pas d’inconvénient à ce que nous nous battions avec de véritables armes.
 Le jeune homme ne répondit rien. Menarnar dégaina Sorrow.
-Hé bien, qu’attends-tu ? »
 
 Metras passa à l’attaque. Menarnar ne bougea pas d’un cil, et, à la dernière seconde, bloqua, avant de repousser brutalement son adversaire, qui recula de plusieurs mètres. L’autre ne se démonta pas et feinta deux fois avant d’attaquer, mais son épée ne fendit que l’air.
 Menarnar avait esquivé le coup avec une vivacité inhumaine. Il laissa son adversaire se retourner, et dit :
-J’aurais eu le temps de te tuer quatre fois !
-Alors pourquoi ne le fais-tu pas ? répondit Metras avant de se lancer dans un long enchaînement de dix attaques puissantes et rapides, qui s’acheva sur un revers de lame dévastateur –le même qu’il avait utilisé pour battre Keelarwen, que Menarnar esquiva un reculant d’un pas. Metras n’eut pas le temps de se rétablir. Le pommeau de l’épée de son adversaire se dirigea à toute vitesse vers son nez.
 
 Le sang jaillit, faisant sursauter les autres élèves. Leur condisciple recula de quelques pas avec un hoquet de douleur. La blessure était mineure, mais elle saignait abondamment.
-Maintenant, je vais te montrer ce qu’est un véritable enchaînement.
 Menarnar fit tournoyer Sorrow, décrivant de grands arcs de cercle, tout en chargeant Metras. Naturellement, tout cela n’était que de l’esbroufe. Il avait frappé son élève au cartilage, ce n’était donc pas une blessure sérieuse, mais en revanche, c’était impressionnant pour un spectateur non averti. Il commença par un coup du haut vers le bas, puis il se retourna, frappa du bas vers le haut, feinta à droite, puis à gauche, puis à nouveau à droite, puis il se fendit, et toucha Metras à l’épaule. L’épée s’enfonça peu profondément, ce qui lui permit de la retirer et de poursuivre son enchaînement à une allure de plus en plus frénétique. Son adversaire para cinq, puis dix, puis vingt, puis trente attaques, avant de commettre une erreur.
 
 Metras ne suivait plus le rythme de son maître. Il comprit que ce dernier ne faisait que jouer avec lui. Il n’aurait pas du l’affronter. Il ne faisait pas le poids.
 Après une série interminable de parades, il suivit une feinte. L’erreur fut fatale. Une demi-seconde plus tard, il était désarmé, une seconde plus tard, il était à terre, une seconde et demi plus tard, L’acier froid de Sorrow se posait sur sa gorge.
-C’est bon ? demanda Menarnar.
-C’est bon, grommela-t-il.
-Très bien.
 Menarnar l’aida à se relever, puis s’adressa à tous.
-Si vous croyez que vous êtes là pour jouer, vous vous mettez le doigt dans l’œil jusqu’au poignet. Vous êtes jeunes. Il n’est pas normal, il n’est pas juste que vous alliez à la guerre.
 Mais l’ennemi est là. Il se constitue une armée, une armée terrible qui va déferler sur le monde. Cela aura lieu dès que les glaces seront assez épaisses pour que ses troupes puis traverser à sec.
 Il marqua une pause.
-Savez-vous combien il y a de soldats et d’hommes en âge de combattre à Scosglen ?
 Le silence fut la réponse.
-Il n’y en a pas trente-deux centaines ! Nos ennemis ne viendront pas à moins de dix mille ! Vous devrez combattre, que vous le vouliez ou non. Les vieillards devront se battre. Les infirmes devront se battre. Les enfants devront se battre.
 Vous allez devoir vous battre. Et la guerre n’a rien, rien du tout à voir avec ce que nous faisons là. Lorsque vous serez sur le champ de bataille, au milieu des décombres, de la poussière, des cendres et de la ruine, lorsque tout autour de vous ne sera que mort et déroute de l’humanité, lorsque vous serez environnés par le fracas des combats, de l’acier contre l’acier, des os brisés, lorsque les appels des mourants et les cris et les suppliques vous entoureront au point que vous mettrez à croire que votre dernière heure est venue, lorsqu’il vous faudra marcher dans les entrailles et le sang mêlés de vos ennemis et de vos amis d’enfance, lorsque vous verrez la mort dans les yeux d’un camarade avec qui vous plaisantiez la veille encore, lorsque vous reconnaîtrez fugitivement, sous la suie, la poussière, le sang et la terre, le visage d’un père, d’un frère, avant que les corbeaux ne se posent sur lui pour le dévorer encore vif, vous n’aurez plus qu’une envie : fuir, le plus loin, le plus vite possible. Mais dans une bataille, il n’y a nulle part où fuir. Alors vous fuirez, l’épée au poing, vers l’avant, vers l’ennemi, tuant et tuant encore jusqu’à ce que la mort veuille bien vous emporter. Ce que nous faisons ici est sérieux, mais il y a peu de chance que ce soit suffisant. L’espoir est bien maigre. Ne le tuez pas en prenant mon enseignement à la légère. »
 
 
 
 
……………
 
 
 
 
 La tache de lumière s’élargit jusqu’à devenir une sphère lumineuse de la taille d’un boulet de canon. Le sifflement qui avait accompagné son apparition diminua, et une voix émana de la sphère.
« J’ai eu bien du mal à te trouver.
-C’est volontaire.
 L’autre interlocuteur était un homme au visage masqué par l’ombre que produisaient les rayons de la lune qui s‘engouffraient dans la chambre miteuse par une fenêtre aux volets moisis.
-Je regrette que nous ne nous soyons plus parlé depuis ce jour, il y a treize ans.
-Pas moi.
-Tu sais sans doute pourquoi je suis venu.
-En effet.
 Un son étrange, comme un rire, s’échappa de la lumière.
-Tu ne pourrais pas au moins faire un effort de courtoisie ?
-Je ne t’ai pas invité dans ma chambre.
-Ce n’est pas la tienne.
-Je l’ai louée.
-Ca ne change rien.
-Vas donc dire ça à l’aubergiste. Il m’en a pris six-cent pièces d’or.
 Un faisceau lumineux jaillit de la sphère et inspecta l’ensemble de la pièce.
-Il t’a escroqué.
-C’est ce que je lui ai dit.
-Il t’a quand même hébergé ?
-Je l’ai menacé de mort.
-N’as-tu pas honte ?
-Pas du tout. Mais tu n’es pas venu pour me parler de ça, ni du bon vieux temps, n’est-ce pas ?
-Du bon vieux temps ? Essaierais-tu de ressembler de te faire passer pour un honorable vieux briscard, alors que tu n’es qu’un jeune voyou ?
-Viens-en au fait. Je n’ai pas le temps d’échanger des plaisanteries de mauvais goût.
-Je veux que tu sortes de cette retraite honteuse, pour venir au secours de Katenbau et écraser Scatar, et ainsi devenir le héros que tu as toujours mérité d’être.
-C’est donc cela ? Tu veux que j’aille me faire massacrer par le Seigneur-démon, en espérant que je l’estropie suffisamment avant de mourir pour que les forces du paradis puissent avoir leur chance dans l’affrontement final ? Désolé, mais je ne marcherai pas. Tu as peut-être réussit à manipuler Katenbau, mais ça ne fonctionnera pas avec moi. J’ai vu immédiatement qu’ils t’avaient changé.
 Toi qui prônais toujours l’équilibre, qui prétendait soutenir la cause des hommes et non celle des anges, regarde-donc ce que tu es devenu ! Tu es le pantin du paradis, le docile serviteur de tes nouveaux maîtres ! Tu en es venu à trahir ton disciple et ami !
-Je ne te laisserai pas dire cela !
-C’est pourtant la vérité, non ? Tu l’envoies affronter l’être le plus puissant de la création, sans même savoir si son pouvoir lui permettra de survivre ! N’as-tu donc plus d’honneur ? Lëkor, ton corps est désormais plus puissant que jamais, mais ton esprit rampe à quatre pattes comme une bête, entravé par les fers que t’on posé les archanges.
-Tu refuses donc de m’aider, c’est cela ?
-Je dois la vie à Lëkor, et je ferais tout ce qu’il m’ordonnera, mais tu n’es pas le Lëkor dont je parle. Tu n’es pas celui que je considérais comme mon frère. Je ne t’aiderai pas.
 Il y eut une silence dans la pièce. La sphère rétrécit lentement jusqu’à n’être plus qu’un point lumineux, d’où s’échappa une voix, puis disparut :
-Jamais je n’aurais pensé que mon petit frère deviendrait un lâche.
 L’autre bondit hors de l’ombre, mais la lueur avait déjà disparu.
-Je t’interdis !… »
 La lumière de la Lune éclairait à présent son visage, faisant luire fugitivement les larmes amères qui s’y écoulaient.
 
 
 
 
……………
 
 
 
 
 Katenbau s’éveilla en sursaut. Son bras droit le lançait terriblement. Il voulut le bouger, mais une douleur terrible l’en dissuada. Il inspecta du regard la pièce dans laquelle il était allongé; c’était une hutte de forme assez primitive, semblable aux yourtes que bâtissaient les tribus nomades du nord des steppes barbares, à ceci près que celle-ci était bâtie pour une seule personne. Les montants étaient faits d’une fourrure qu’il identifia comme étant celle de rennes, soutenus par une structure en bois, probablement de conifère. Le sol était également couvert de peaux de bêtes. Il s’apprêtait à se relever, lorsque la tente s’ouvrit, en face de lui, et qu’un vieil homme, dont le visage n’était qu’une succession de rides d’expression à la convergences desquelles on devinait tout juste un nez droit, des yeux rieurs et une bouche étirée en un sourire accueillant.
« Bienvenue dans mon humble demeure, jeune pèlerin. Serait-ce discourtois de vous demander votre nom ?
-Katenbau, articula-t-il péniblement. Katenbau Orkhayne.
-Enchanté, Katenbau. Je me nomme Keorisnakar-Samatyarrhaonik’asamehawakri’lleldrikyas. Néanmoins, je ne m’offusquerai pas si vous m’appelez Keo.
 Le barbare sourit.
-Je vous remercie de votre hospitalité, Keo. Cependant, pourrais-je savoir comment j’ai atterri ici, le bras cassé ?
-Bien entendu. D’ailleurs, comment va-t-il? Je m’en suis occupé comme j’ai pu, Katenbau, mais à dire vrai, vous et votre bras étiez en plutôt mauvais état lorsque je vous ai retrouvé, il y a deux jours de cela.
-Deux jours ?
 Keo acquiesça.
-Vous étiez étendu au milieu du plateau que surplombe l’endroit où nous nous trouvons en ce moment.
-Sommes-nous au sommet ?
-Pas tout à fait, mais nous n’en sommes pas très loin, sourit le vieillard. Lorsque je vous ai trouvé, la neige commençait à vous recouvrir, et seule votre épée dépassait. Je me suis rendu compte que votre bras était cassé, apparemment à cause d’une chute. Cependant, il n’y avait nulle part d’où tomber aux alentours. Je comptais sur vous pour éclairer ce mystère.
-Je peux assurément l’éclairer, murmura Katenbau. La mémoire me revient à présent, par bribes.
 J’étais venu ici pour trouver le sommet. On m’a dit que je devais y trouver quelque chose qui m’aiderait à accomplir une certaine quête.
-Voilà ce que l’on appelle être évasif, Katenbau, sourit le vieil homme. Vous n’avez rien à craindre de moi. Je connais la nature de votre quête. En fait, il se trouve que je suis le « quelque chose » -ou plutôt le quelqu’un, que vous cherchiez.
 Le barbare haussa un sourcil.
-Je comprends que tout ceci vous paraisse douteux. Mai vous devez me croire. On vous a envoyé ici parce que j’y réside, Katenbau. Et parce que moi seul peux vous permettre de vaincre Scatar. Mais ne brûlons pas les étapes. Commencez par me raconter ce qui vous est arrivé. »

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