Le Sacre

Chapitre 11 : LA PRINCESSE DES TUNNELS IV

4927 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/01/2016 14:56

Grégoire avait refusé de lui dire où il s'était procuré la voiture. Après la troisième fois, elle avait arrêté d'insister, même si elle était à peu près sûre qu'il l'avait volée quelque part.

C'était un vieux modèle, qui fonctionnait encore avec quatre roues. De fait, il arrivait fréquemment que la voiture bondisse suite à une imperfection de la route, surtout à la vitesse à laquelle il conduisait. Sahane était certaine que c’était illégal mais il n'y avait plus personne pour faire respecter ça.

Ils avaient passé plus d'une semaine là-dedans, dormant tantôt à la belle étoile, tantôt dans un petit hôtel. Plume et elle avaient continué de se relayer pendant les nuits pour s'assurer que rien n'arriverait. Le chat prenait de plus en plus de tours de garde car il se reposait de jour, dans la voiture, là où Sahane n'y arrivait décidément pas. Elle avait craint au début de s'endormir sous l'ennui que présentait un voyage pareil, mais quelque chose l'en empêchait. Peut-être était-ce le souvenir de sa dernière expédition en voiture, peut-être la crainte de laisser tout contrôle à son coéquipier imposé.

Ses nuits étaient toujours aussi agitées, cependant. Elle se réveillait parfois en sueur, parfois les larmes aux yeux, et chaque fois plus tendue. Il était impossible que Grégoire ne l'ait pas remarqué, mais il n'avait pas fait la moindre remarque à ce sujet.

« Peut-être qu'on aurait dû prendre à droite plus tôt. »

Il marmonnait dans sa barbe – avait-elle seulement poussée depuis qu'elle l'avait rencontré ? - et elle avait appris à ignorer ça quand il conduisait. Le soldat n'attendit pas vraiment de réponse et elle n'en avait pas à lui donner de toute façon. Son regard sombre retourna plutôt à sa contemplation du paysage, même si contempler était un bien grand mot.

A mesure qu'ils s'étaient éloignés de la capitale, ils avaient traversé des petites villes de plus plus touchées par la nouvelle situation. Cela avait d'abord étonné Sahane, surtout après avoir constaté l'effervescence de la capitale de l'Est, qui semblait ne pas souffrir de la domination démoniaque. En ville, un semblant d'ordre régnait encore mais ici, dans les campagnes, les bandits s'en donnaient à cœur joie. Certains villages étaient à moitié vides, des maisons éventrés les seuls restes de la civilisation. D'autres étaient simplement fantômes, les habitants ayant fuis depuis longtemps. Ils avaient même dormis au sein d'une maison capsule au toit défoncé par un tir de roquette, entourée d'autres habitats semblables.

Ils avaient eu la chance de ne croiser personne et, depuis plusieurs heures, même les habitations devenaient une vision rare. Sahane était sûre d'avoir aperçu une maison isolée, au détour d'un virage, mais elle était bien trop loin pour voir si elle était encore habitée. La région était désertée, pourquoi elle n'en savait rien.

« Ah ! »

L'exclamation satisfaite de son conducteur l'arracha à ses pensées et elle se tourna aussitôt vers l'arrière, mais tout allait bien : Plume continuait de dormir paisiblement. Grégoire en profita pour lui adresser un grand sourire et désigner du doigt la petite forêt dans laquelle il s'engageait. Ce n'était pas une route, décida Sahane, pas même un chemin. La voiture s'y enfonça tout de même, bondissante et tremblante. Il lui était difficile de croire que le chat réussissait encore à ne pas se réveiller. En quelques secondes, ils furent entourés d’arbres hauts et de buissons denses qui bordaient la route comme pour faire une haie d'honneur.

« Je t'avais dit qu'on finirait pas le retrouver. »

Elle s'en fichait. La jeune fille détourna de nouveau le regard vers sa fenêtre et haussa les épaules. C'était ainsi qu'elle s'adressait à lui la plupart du temps et il avait progressivement abandonné l'idée de commencer une conversation avec elle, à moins que ce ne soit réellement nécessaire. Aujourd'hui, toutefois, il était plus motivé.

« Je ne sais pas si je te l'ai déjà dit mais tu es chanceuse. »

Elle n'en avait pas le souvenir mais ne voulait pas vraiment savoir en quoi. Quelque chose en elle lui hurlait d'exploser, de lui mettre sous le nez les morts qu'il avait provoqué, encore une fois. Elle savait que ce serait inutile et se contenta de se tourner vers lui en silence. Le soldat prit ça comme une autorisation à continuer.

« Le général Brastra sera présent pour t'accueillir mais on m'a dit que notre instructeur sera là aussi, l'équivalent de ton maître, mais de chez nous. »

Il ne lui avait pas donné cette information avant de partir ce matin. Non que cela change quoi que ce soit, mais la mention de l'instructeur de l'Est avait suffit à lui faire relever les yeux, plus alerte. Elle ne l'avait jamais rencontré, ni ses élèves, mais en avait suffisamment entendu parler.

« Son élève aussi sera là, continua Grégoire sans se rendre compte du trouble de la jeune femme.

- Son ? Il n'en a qu'un ? »

Grégoire détourna totalement les yeux de la route, ce qui avait le don de stresser Sahane, même si elle avait appris que lui faire remarquer ne servait à rien.

« Oui, depuis longtemps maintenant. Il a dit que les autres n'étaient pas dignes de son enseignement et qu'il préférait se concentrer sur une seule élève. »

Elle n'en était pas vraiment surprise. De ce qu'elle avait entendu de lui, c'était tout à fait cohérent. C'était un homme sûr de sa force et de son enseignement, mais qui avait surtout une forte notion d'individualité. Là où Yamcha avait toujours préféré qu'ils s'entraînent en groupe, pour que chacun fasse progresser les autres à sa matière. Elle savait bien sûr que chaque enseignant avait son élève « favori » ou « fétiche ». Celui qu'on jugeait le plus à même de se battre contre les démons. Elle était celle du centre et se souvenait encore d'Hagon, dans le Nord. Peu-être avait-elle déjà entendu le nom de celui de l'Est mais il lui échappait.

« On m'a dit que c'était un homme très dur. » finit-elle par lâcher.

Le sourire qui fendit les lèvres de Grégoire ne lui disait rien qui vaille. Il fit même un effort pour contenir un rire, ce qui était encore pire.

« La seule chose que je peux contredire à ce sujet, c'est qu'il est plus une machine qu'un homme, à présent. »

De ça aussi, elle en avait entendu parler mais elle n'osait pas imaginer à quoi cela ressemblait. La jeune fille brûlait soudainement de poser des questions à son sujet, sans trop savoir lesquelles étaient correctes et ce qu'elle devait demander en premier. Grégoire ne lui en laissa pas le temps.

« Nous y sommes. »

Les soubresauts du véhicule l'avait complètement empêchée de prendre conscience qu'ils ralentissaient. Les parages étaient toujours aussi sombres, entourés qu'ils étaient, mais devant eux s'ouvrait une grotte, trop large pour être complètement naturelle. Ce n'était pas une entrée très discrète. Grégoire dû tout de même sortir pour pousser deux rochers trop gros sur le côté, puis il avança la voiture à l'intérieur.

Les phares éclairaient un tunnel qui rétrécissait rapidement, jusqu'à se terminer à seulement dix mètres de l'entrée. Sahane fronça les sourcils. Sans y faire attention, Grégoire éteignit les phares, puis les ralluma deux secondes, avant de les éteindre à nouveau. Elle le regarda faire sans comprendre pendant un moment avant de saisir qu'il s'agissait d'un code. Ils attendirent moins d'une minute avant qu'un déclic ne se fasse entendre depuis la radio du véhicule. Le soldat braqua immédiatement le volant vers la gauche et accéléra. La jeune femme faillit se jeter sur lui pour l'en empêcher avant de se rendre compte que le mur avait disparu.

Il se referma derrière eux et les plongea dans le noir pendant quelques secondes, avant que la roche ne laisse place à des parois de béton parfaitement lisse. Des néons blafards étaient installés au plafond, projetant une lumière trop blanche sur eux alors que la voiture avançait. Sahane dû contenir un sourire sarcastique.

Je suis de retour à la maison.

Sans Pietro, sans les autres. Elle était de retour après un échec comme jamais elle n'en avait connu. Elle ferma les yeux et laissa le souvenir lui étreindre le cœur.

Le trajet ne dura que quelques minutes et ils arrivèrent bientôt dans un gigantesque hangar souterrain, conçu pour accueillir trois fois plus de véhicules qu'il n'y en avait à l'heure actuelle. Une femme se tenait devant une porte, en uniforme vert complet. Ses cheveux blonds lui rappelèrent Lapias, car elle les portait en queue de cheval, soigneusement rangés dans son dos. La femme se mit au garde-à-vous dès qu'ils sortirent, puis se tourna successivement vers Grégoire et Sahane.

« Caporal Shaini, Mademoiselle, commença-t-elle avant d'hésiter en voyant Plume, sans savoir comment le saluer. Je vais vous escorter jusqu'au bureau du Général, il vous attend. »

Elle avait oublié de se présenter. Sahane voulut lire le nom sur son uniforme mais elle se détourna avant qu'elle ne puisse le faire et ils se mirent à la suivre en silence. Les couloirs étaient presque identiques à ceux qu'elle avait connu dans le Centre. Une différence lui sauta tout de même aux yeux au bout de quelques secondes : la lumière artificielle des néons éclairaient des bandes colorées sur les murs, qui devaient servir à se repérer dans la base. Elle nota rapidement qu'ils étaient en train de suivre la ligne bleu.

Leur chemin prit fin quand ils arrivèrent dans un cul de sac, où la signalisation terminait sur une porte. Un jeune homme était planté devant, en uniforme vert simple mais dont l'épaule était garnie de médailles. Leurs significations échappaient à Sahane mais elle devinait qu'il ne s'agissait que de décorations puisque l'homme était assigné à garder une porte. Grégoire et la femme qui les accompagnait se raidirent en approchant et se mirent au garde-à-vous face à lui.

« Mon général. »

La surprise écarquilla les yeux de la jeune fille. Un général ? Il paraissait si jeune pourtant... ou ! Une fois proche, elle le regarda plus attentivement. Il avait la peau cuivrée, comme la sienne, et le visage fin parfaitement imberbe. Sa coiffure était tout ce qu'on pouvait attendre d'un militaire ; les cheveux noir, arrangés en brosse. Ce n'est que lorsqu'il se mit à sourire qu'elle aperçut enfin, à la commissure de ses lèvres et aux coins de ses yeux, les rides qui trahissaient son âge. Avant qu'elle n'eut le temps de prononcer un mot, l'officier avait attrapé sa main droite entre les siennes. Sa poigne était molle, en complet contraste avec sa voix.

« Mademoiselle Sahane ! Je suis sincèrement, profondément désolé de ce qui vous est arrivé. Nous sommes en contact avec Archibald pour nous assurer que ça n'arrivera définitivement jamais plus. »

Alors qu'il se détachait enfin d'elle, Sahane nota qu'il remarquait seulement Plume. Tout comme la soldate de tout à l'heure, il semblait ne pas savoir comment s'adresser à lui, mais au moins il ne l'ignora pas.

« Monsieur, je vous présente également nos sincères excuses. »

Manifestement soulagé d'être débarrassé de cette formalité, le général se retourna sur Grégoire et posa brusquement ses mains sur ses épaules. Le geste semblait un peu trop familier à Sahane mais cet homme avait semble-t-il décidé de la surprendre.

« Lieutenant Shaini, entonna-t-il sur le même ton un peu trop enthousiaste. Vous avez réagi intelligemment et efficacement. Je ne saurais trop vous en remercier, mais nous en discuterons un autre jour. Prenez un peu de temps pour vous reposer.

- Bien mon général. »

Grégoire se tourna vers Sahane avec un mince sourire et lui fit un signe de tête. L'instant d'après, il disparaissait déjà dans le couloir. Sahane prit alors conscience que leur accompagnatrice s'était également volatilisée. Il ne restait plus que Plume et elle, sans qu'ils n'aient prononcé le moindre mot.

« Oh euh... Enchantée, général, monsieur Brastra. »

Il éclata d'un rire un peu absurde compte tenu de la situation et se retourna d'un coup pour ouvrir en grand la porte de son bureau.

« Je ne vais pas vous retenir très longtemps, rassurez-vous. Installez-vous confortablement tous les deux, je vais juste mettre quelques choses au point. »

Sahane partagea un regard interloqué avec Plume. Elle qui s'était attendue à parler avec un clone du général Archibald ne savait pas trop comment réagir face à cet homme souriant et affable. Même maintenant qu'elle pouvait voir qu'il n'était pas aussi jeune qu'il pouvait le laisser paraître, elle n'arrivait pas à croire qu'il possédait un grade aussi élevé. Et pourtant. Greg s'était mis au garde-à-vous devant lui et il avait été pardonné. Pire, Brastra n'avait pas du tout mentionné l'horreur de ce qui était vraiment arrivé. La jeune fille savait qu'elle ne devait pas se laisser aveugler. Aussi souriant qu'il puisse être, le général était un militaire comme les autres et il n'envisageait ses hommes qu'en terme de pertes.

Avec une profonde inspiration, elle vint s'installer sur la première chaise venue dans le bureau. Plume la suivit sans discuter et Brastra referma les portes derrière eux. La salle était tout aussi sobre que pouvait l'être le bureau d'Archibald, là-bas, chez elle, mais quelques tableaux aux murs redonnaient quelques couleurs. Elle n'était pas sûre de savoir ce qu'ils figuraient, ni même s'ils étaient sensés représentés quelque chose, mais leurs couleurs chaudes la rassurait d'une certaine façon.

« Dès qu'on m'a averti, j'ai immédiatement envoyé un message au général Draco, ainsi qu’à ton responsable. Nous allons tout mettre en œuvre pour que la suite de ton voyage se déroule parfaitement, mais en attendant nous t'avons réservé des quartiers ici. »

C'était encore le moins qu'ils puissent faire. Sahane nota qu'il était naturellement passé au tutoiement mais ne s'en offusqua pas. Son regard se posa simplement sur le général ; il arborait toujours le même demi-sourire et elle commençait à se demander si ce n'était pas sa façon à lui de ne rien montrer. Archibald parlait doucement et conservait toujours un air neutre. Lui, il la bombardait de paroles et de sourires, mais les deux cachaient la même chose.

« Quand pourrons-nous partir ? » questionna-t-elle froidement.

Cela le prit au dépourvu et pour la première fois depuis le début de leur conversation, il détourna le regard sur quelques papiers posés à sa gauche.

« Eh bien, vraisemblablement, nous devrions pouvoir tabler sur un convoi sécurisé d'ici deux à trois semaines... normalement. »

Peut-être perçut-il son agacement, car il s'empressa de fouiller parmi ses papiers.

« Mais en attendant, tu devrais pouvoir t'entraîner avec notre instructeur. Il a été averti de ton arrivée et son élève est très enthousiaste à l'idée de te rencontrer. D'ailleurs, ils nous rejoindra expressément sous peu. »

Elle n'était pas sûre d'être aussi contente qu'eux à cette idée mais préféra ne pas en faire la remarque au général. Celui-ci fit glisser vers elle un plan grossièrement imprimé sur un papier qui donnait l'impression d'avoir été froissé et défroissé plusieurs fois avant de finalement lui être confié. Des instructions y étaient tracées d'une écriture manuscrite précise et délicate.

« Monsieur, j'avoue qu'on ne m'avait pas informé de votre présence, fâcheusement. Désirez-vous des quartiers à part ? termina-t-il a l’intention de Plume, avec le même ton gêné que sa subordonnée.

- Oh non, ça ira, merci, répondit timidement le chat.

- Est-ce que le général Archibald était au courant des méthodes d'infiltration employées ici ? »

Sahane avait bien conscience qu'elle interrompait probablement le général dans sa série de questions inutiles mais il était des choses dont elle voulait discuter immédiatement. Il pouvait bien sourire de tout son soûl, ça ne ramènerait pas Pietro et les autres. Elle n'oublierait pas cela.

Brastra sembla un peu pris au dépourvu pendant un temps, mais il se raidit rapidement sur sa chaise. Son ton avait changé, plus sérieux. Peut-être se décidait-il enfin à lui parler comme à une adulte.

« Tout à fait, Sahane. Je pense d'ailleurs très sincèrement qu'il emploi le même genre de méthode. Évidemment, il y a des inconvénients et cela est dangereux, mais nous avons une fenêtre sur les activités de Daïmao et de ses gosses, ce que nous ne pouvons décemment pas négliger. »

Un léger silence s'installa suite à cette explication. Sahane attendait. C'était tout ce qu'il avait à lui dire ? Des inconvénients ? C'était comme ça qu'il voulait en parler ? Elle commença à s'avancer sur son siège, le général reculant du sien comme par réflexe, quand ils furent soudain interrompus.

La porte se retrouva catapultée avec force, claquant violemment contre le mur métallique. Le coup de tonnerre que cela produisit fit se retourner Sahane et Plume d'un seul mouvement. Elle levait déjà les bras en position de défense.

« Bonjour ! » entonna une voix enjouée.

La jeune fille qui se tenait dans l'encadrement de la porte posa la pied qu'elle avait utilisé pour ouvrir celle-ci et s'avança aussitôt dans la pièce. Le général ne l'avait pas invitée à le faire mais il ne semblait pas s'offusquer.

« Bonjour, Renys. » répondit-il comme si de rien n'était.

Avant que Sahane n'ait eu le temps d'abaisser sa posture, la jeune femme l'avait rejointe. De grands yeux verts inquisiteurs se posèrent sur elle.

« C'est toi, Sahane ? Je suis Renys, c'est moi la plus forte ici ! Enfin, Païoh ne prend qu'une élève mais c'est moi, donc je suis la plus forte. Tu as été entraînée par Yamcha, non ? Tu dois être super forte. C'est vrai que tu as le bâton magique ? »

Elle enchaînait si vite les questions qu'elle en était essoufflée. Du moins c'est ce que crut Sahane pendant une seconde, puis elle prit le temps de l'observer. Renys portait une tenue d'entraînement noire, renforcée aux épaules et aux genoux mais laissant ses bras nus. Ses cheveux roux étaient coupés courts et en bataille. Sa peau blanche étaient perlés de sueur et elle exhalait une odeur citronnée de transpiration. Cette Renys devait sortir d'une session de combat.

« Euh... Oui c'est moi et oui, j'ai le bâton. Enchantée, je suppose. »

La rousse se mit à bondir sur ses deux pieds et sourire comme une gamine dans un parc d'attraction.

« C'est super ! Je peux le voir ? Je peux ? Oh pardon, je parle trop encore et je dois t'embêter. »

Elle se tourna vers Plume comme si elle venait de le remarquer.

« Oh, bonjour ! Tu es Plume ? »

Sahane profita que la tornade d'énergie se désintéresse d'elle pour jeter un coup d'oeil au général, mais celui-ci s'était détourné d'elle pour suivre du regard la jeune fille. Il était inutile d'insister pour le moment, alors l'élève de Yamcha revint à l'empêcheuse de questionner en rond. Si Sahane ne s'était jamais trouvée très grande, elle était impressionnée par cette fille qui réussissait l'exploit de faire une tête de moins qu'elle.

Elle resta ainsi quelques secondes, interdite, avant que la fille ne se tourne vers elle, comme si elle avait senti son regard.

« En tout cas, c'est super de t'avoir ici. On va être partenaire d'entraînement, tu vas voir ! Ce sera super ! »

Renys avait posé les poings sur ses hanches d'un air qu'on ne pouvait pas contredire. Même après avoir rencontré Brastra, son enthousiasme était déstabilisant. Elle n'était pas toujours comme ça quand même ?

« Hum. Oui, Yamcha nous recommandait de varier nos partenaires alors je pense que ce nous sera utile à tous les deux. » tempéra Sahane.

Le sourire de la rousse troublait les quelques tâches de rousseur qu'elle arborait aux joues.

« Païoh va être content de te voir aussi, même s'il ne te le montrera pas. Tu as le bâton avec toi, au fait ? »

La facilité avec laquelle Renys changeait de sujet était assez déconcertante, mais au moins savait-elle s'imposer. Et puis, songea Sahane, c'est peut-être la seule personne que je puisse à peu près comprendre ici. Elle n'était pas une militaire, après tout.

D'un coup d'épaule, la jeune fille ramena son sac devant elle et l'ouvrit.

« Bâton, grandis. »

Ses doigts se refermèrent sur le manche dès qu'elle le vit sortir et elle laissa tomber le sac. Le bâton avait repris sa taille habituelle et elle le tendit à sa future coéquipière. Renys le prit du bout des doigts, comme s'il s'agissait d'un artefact sacré qu'elle avait à peine le droit de toucher. Un soupir impressionné échappa de ses lèvres alors qu'elle inspectait attentivement la surface de l'arme.

« C'est dingue, reprit-elle, étonnamment bas. C'est vraiment le bâton qu'a utilisé Son Goku contre Piccolo ?

- Aucun doute. »

Sahane avait ouvert la bouche pour répondre mais quelqu'un avait pris l'initiative. Une voix aux étranges consonances métalliques, comme si elle résonnait derrière un masque. Les deux jeunes filles se tournèrent immédiatement vers l'encadrement de la porte. Une silhouette était plantée là, les toisant toutes les deux.

Elle aurait pu passer pour humaine, engoncée dans sa tenue traditionnelle. Une sorte de veste longue et verte qui lui descendait jusqu'aux genoux, les manches étaient jaunes et amples, suffisamment amples pour cacher entièrement ses bras. Au centre du torse était affiché un symbole que Sahane reconnu comme celui de l'école de la grue. Seul son visage était dévoilé mais c'était largement assez. Sa tête avait été remplacée par des plaques de métal assemblées pour donner l'apparence d'un visage, les deux viseurs ronds figurant les yeux et le haut du crâne était un genre de dôme grisâtre. Ne restait d'organique que son menton et sa bouche, surmontée d'une petite moustache. Cette même bouche qui se tordit d'un sourire mauvais alors que les faux yeux se tournaient vers elle.

« Je ne vois pas pourquoi ils ont jugés que nous avions besoin de ce joujou, mais ils ont bien décidés qu'ils avaient besoin de toi.

- Païoh ! » le réprimanda Renys avant d'adresser à l'autre jeune fille un sourire d'excuse.

Tao Paï Paï rentra dans la pièce sans faire un bruit et son regard vide passa de son élève à Sahane, avant de retourner au général. Il n'accorda même pas un coup d’œil à Plume.

« Je vais voir ce que je peux faire d'elle. »

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