Reprends moi (Nevra - A New Era)
Chapitre 2 : Reprends moi (suite)
1679 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 17/12/2023 21:01
Il avait senti, au fond de lui, que quelque chose n'était pas normal. Son instinct hurlait, mais il ne comprenait pas pourquoi, alors il avait décidé de faire le tour du QG pour s'assurer qu'il se trompait.
Il avait commencé par les jardins et le marché mais, ne notant aucun problème particulier venant des extérieurs, il avait ensuite décidé de faire un tour par la salle du Cristal.
Et c'est là qu'il l'avait vu. Elle marchait, sans avoir conscience de l'environnement qui l'entourait, vers les grandes portes menant au diamant. Il avait froncé les sourcils, se demandant ce qu'elle pouvait bien avoir à y faire à une heure aussi tardive. Et il ne savait pas s'il devait ou non la suivre.
Finalement, il se rappela qu'il avait été le chef de l'ombre avant de rejoindre l'étincelante et qu'il pouvait la prendre en filature sans qu'elle n'en ait conscience. Et c'est ce qu'il fit.
Lorsqu'il passa les grandes portes à son tour, il se dissimula à l'entrée et se contenta de l'observer, curieux. Elle s'était arrêtée assez loin du Cristal et semblait l'observer, perdue dans ses pensées. Du moins c'est ce qu'il supposa car étant dos à elle, il ne pouvait pas voir son visage. Simplement ses beaux cheveux cascadant dans son dos.
Même avec des cheveux longs, elle était magnifique. Lorsqu'il l'avait revu il y a quelques jours et pour la première fois depuis 7 ans, il avait été subjugué par sa beauté. Le temps ne semblait pas avoir eu d'effet sur elle. La seule chose qui trahissait le temps qui s'était écoulé, était la longueur de sa chevelure.
Il lui revint en mémoire les sentiments qu'il avait éprouvés quand il l'avait revu, de son unique oeil, il y a quelques jours. De la surprise, de l'incompréhension, puis de la haine, envers elle et envers ce monde, pour son drôle sens de l'humour et ses stupides blagues.
Il avait tant souffert de sa perte. Quand il l'avait vu disparaitre dans le Cristal ce maudit jour, il s'était élancé pour l'en empêcher mais il avait été retenus par Ezarel. Il n'avait rien pu faire. Sur le moment, il se fichait bien que le monde disparaisse tant qu'elle était avec lui, alors il lui avait hurlé d'arrêter et s'était battu avec son meilleur ami, en vain.
A la suite de ça, il avait complètement pété les plombs, détruisant tout ce qui se trouvait sur son chemin, frappant les murs jusqu'à ce que ses jointures prennent une teinte rougeâtre.
Pour l'arrêter, Miiko n'avait pas eu d'autre choix que celui de l'enfermer dans les cachots, l'enchaînant comme un simple animal, terrifié à l'idée qu'il détruise le Cristal pour la faire sortir.
Il y était resté enfermé deux mois. Deux mois pendant lesquels il profitait de la solitude pour se laisser aller aux larmes et pour exprimer autrement son désespoir que par la violence physique. Deux mois à se sentir à l'agonie, implorant l'Oracle de l'achever, hanté par le souvenir de celle qu'il aimait plus que lui-même. Il lui en voulait terriblement. Pourquoi avait-il fallu qu'elle soit si altruiste, si gentille, si courageuse. Pourquoi était-il tombé amoureux d'elle ?
Après ces deux mois, chaque jour ponctué par les visites de ses amis, Ezarel avait jugé qu'il ne pouvait pas rester comme ça. Qu'elle ne reviendrait pas et qu'il devait avancer, trouver un objectif à remplir et retrouver goût à la vie. Alors il avait ouvert la porte de sa cellule et l'avait amené avec lui à l'extérieur.
Au préalable, il avait demandé à Huang Hua, qui était en train de succéder à Miiko, s'il pouvait réserver l'arbre centenaire afin de l'y amener et qu'ils se retrouvent seuls. Nevra avait de nouveau senti son coeur se déchirer à la vue de la sculpture de sa bien aimée. Partout où son unique oeil pouvait se poser, il la voyait elle ou des choses qui le ramenait obligatoirement à sa défunte personne.
Après avoir réussi à faire croire qu'il commençait à aller mieux, il avait attendu qu'on se méfie moins de lui pour se rendre dans la salle du Cristal, qui lui était encore interdite, et étudier chaque contour du diamant. Il avait pensé le détruire, il n'avait d'ailleurs imaginé que cela pendant ses deux mois d'enfermement. Mais quand il s'était approché, il avait sentie en lui un espoir renaître. Alors il avait cherché une faille, ou le moindre signe lui permettant de croire qu'elle était là, en vie, qu'elle veillait sur lui. Mais rien. Il n'avait rien trouvé.
Il avait continué son inspection tous les soirs pendant plus de deux ans, pendant que tout le monde dormait, sans ne trouver ne serait-ce qu'un seul indice. Le désespoir était de plus en plus fort, si bien qu'il perdait goût à tout, à la nourriture, à l'envie de se lever le matin.
Un soir, avant qu'il ne parte à la salle du Cristal, Ezarel c'était rendu dans sa chambre. Il lui avait avoué qu'il comptait partir, qu'il avait du mal à oublier lui aussi, bien qu'il reconnaisse que c'était à moins grande échelle que le vampire. Il lui avait demandé de partir avec lui mais ça lui était inimaginable, impensable. Il ne voulait pas passer à côté de quelque chose, d'un indice, ou de s'éloigner du dernier endroit où il l'avait vu. Et il voulait continuer d'être hanté par son souvenir, à l'imaginer sans cesse en fermant ses paupières et à supplier, chaque soir, le monde des rêves de ne jamais le laisser en partir.
Ezarel s'était attendu à cette réponse, alors il lui avait proposé, avant de partir, de lui créer une potion pour l'oublier. Il avait été révolté par cette idée, mais il était aussi arrivé à un point de sa vie où il avait du mal à savoir de quoi serait fait demain, n'en voulant même pas. Alors il avait douté un moment avant de lui dire qu'il ne pouvait pas se résoudre à accepter. Après avoir refusé, Ezarel lui avait demandé, comme cadeau de départ, de reprendre sa vie. Même si l'elfe n'aimait pas ses manies d'autre fois, il lui avait avoué que peut-être, cela lui ferait du bien de reprendre ses habitudes, au moins le temps d'aller mieux.
Alors c'est ce qu'il avait fait. Mais rien n'avait le même goût, que se soit le sang ou le plaisir qu'il pouvait prendre avec ses différentes partenaires. Mais ça le maintenait en vie. Et il avait même réussi à obtenir de Huang Hua le droit de reprendre les missions.
Et voilà que sept ans plus tard, elle réapparaissait, comme si de rien n'était. Comme si elle n'avait jamais disparu, comme si elle ne l'avait pas fait terriblement souffrir. Elle s'attendait vraiment à ce qu'il réagisse comme avant ? On l'avait enchaîné bordel, parce qu'il voulait détruire le monde qu'elle s'était donnée tant de mal à sauver, parce qu'il voulait mourir avec elle, parce qu'il l'aimait plus qu'il ne s'était jamais aimé lui-même.
La douleur qu'il avait ressentie était inimaginable et dans un sens, égoïstement, il voulait lui faire payer, à défaut de lui faire ressentir. Il l'aimait beaucoup trop pour lui souhaiter d'endurer ça mais il était en colère que le destin se joue de lui de cette façon. Alors il avait pris ses distances, autant pour lui que pour sa vengeance. Il avait besoin de remettre un pied dans la réalité, comme s'il n'était toujours pas convaincu de sa présence et parce qu'il doutait. Il l'avait perdu une fois et il ne se relèverait pas si elle venait à re disparaître.
Et là, c'est ce qu'elle s'apprêtait à faire.
- Reprends moi ! Elle s'était tut avant de reprendre en s'époumonant : je ne vois pas ce que je pourrais leur sacrifier de plus. Je ne veux pas de ton cadeau empoissonné. Qu'est-ce que tu voulais me montrer ? Leur façon de me remercier ? Ce n'est pas dans les livres d'histoire que je voulais être mais dans leur esprit, dans leur coeur. C'était trop demandé qu'ils me gardent dans un coin de leur tête ?! Alors oui, j'ai fait du bon travail, ce monde resplendi de beauté, je l'ai bien vu. Alors maintenant, reprends moi !
Il n'avait pas besoin de voir son visage pour ressentir toute sa détresse. Mais il avait du mal à en mesurer l'ampleur, le Cristal semblait lui-même ne pas pouvoir supporter le poids de toutes ses souffrances. Qu'est-ce qui avait pu lui faire aussi mal ? Lui ?
Il sentie son coeur le frapper de l'intérieur, le maudissant de s'être comporté comme un imbécile blessé. Il n'imaginait pas pire douleur que celle de la perdre à nouveau, mais il se rendit compte que de la voir se perdre dans une détresse sans fond était de la même équivalence.
Alors, dans un unique souffle et à une vitesse qu'il ne se connaissait plus, il se jeta violemment sur elle quand il la vît tendre le bras jusqu'au Cristal. Son palpitant et son esprit refusaient de la perdre à nouveau, de se perdre à nouveau.
Elle n'avait pas le droit de l'abandonner une nouvelle fois. S'il le fallait, il l'enchaînerait lui-même, l'enfermerait dans les cachots là où elle ne pourrait pas se soustraire à sa vue, à son coeur. Il ne la laisserait plus jamais partir.
- Je ne te perdrais pas une seconde fois. Il était au-dessus d'elle, maintenant ses poignets avec force et détresse tandis que de son oeil valide, il la fusillait du regard avant de reprendre : j'aurais moi-même achevé ce monde si j'avais su qu'il t'enlèverait à moi.
Et c'est vrai que s'il l'avait pu, il aurait tué la mort elle-même.