Les belles histoires du Père Makarof, ou Fairy Tail en trente-et-un mots

Chapitre 1 : Froid polaire

963 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 12/11/2020 11:19

Froid polaire

 



Grey se frictionna nerveusement les bras ; l’air chaud sitôt échappé de ses lèvres dans un souffle se transforma en volutes de fumée blanche qui s’élevèrent haut dans le ciel argenté.


C’était officiel, il allait mourir gelé.


Cela faisait déjà un certain temps, quelques semaines ou quelques mois environ, qu’il avait commencé son apprentissage sous la direction d’Oul, la mage de glace la plus connue du royaume de Fiore. Et le moins que l’on pouvait dire, c’était que ses méthodes étaient pour le moins particulières. Il fallait comprendre par là qu’elle les obligeait, lui et son autre disciple, Léon Bastia, à se mettre en sous-vêtements pendant de longues heures par des températures négatives. Soi-disant, ils ne devaient faire qu’un avec le froid pour apprendre à maîtriser la magie de modelage ; Grey n’était pas franchement convaincu de l’efficacité des techniques de sa mentore, mais ce n’était pas comme s’il pouvait décider de tout plaquer, puisqu’à présent, il n’avait nulle part où retourner, de toute façon : plus de famille, plus d’amis, plus de maison, plus de village, plus rien.


L’organisme du petit garçon peinant encore à s’adapter à l’air glacé du dehors, il avait rapidement enfilé quelques habits sur lui – une veste crème et un pantalon sombre, notamment – et s’était empressé d’aller rejoindre Oul dans le bois avoisinant. La forêt, constituée essentiellement de sapins, était entièrement recouverte de blanc, et pour ne rien arranger, il neigeait à gros bouillons, et il chuta à plusieurs reprises dans la poudreuse, mais ce n’était pas ce qui avait découragé l’enfant : il avait encore énormément à apprendre auprès de sa professeure, et puisque Léon était encore à l’intérieur de la maison, il allait pouvoir avoir Oul rien que pour lui, et cela n’avait pas de prix.


Enfin, ça, c’était ce qu’il avait cru.


–        Grey, espèce de traître ! Tu pensais profiter d’Oul sans que je le remarque ? Tu n’as pas le droit !


Le garçon serra les dents. Maudit Léon. Évidemment qu’il n’allait pas rester à attendre bien sagement, il fallait s’en douter. Ils étaient rivaux, tous les deux, après tout, rêvant l’un comme l’autre d’apprendre de nouvelles magies et de dépasser un jour leur maître. Leur relation était assez compliquée à décrire, en fait.


–        Ne te mêle pas de ça ! lui lança Grey, sans s’arrêter de courir.


Malgré leur course-poursuite effrénée, la neige crissant sous leurs pieds, les deux garçons avaient toujours autant l’impression d’être congelés, lorsqu’ils débouchèrent dans la large clairière où leur enseignante s’entraînait, et le fait qu’il fût encore tôt dans la matinée n’arrangeait rien, bien au contraire.


Ils saluèrent tous deux gaiement la jeune femme, mais avant même d’attendre sa réponse ou un quelconque retour de sa part, ils étaient partis dans des chamailleries, et ce fut elle qui se retrouva contrainte de les calmer en haussant le ton, comme elle le faisait lorsque cela était nécessaire. Oul avait une taille de guêpe, des traits fins et des cheveux courts noirs, lisses et soyeux ; en soi, aucunement l’apparence de quelqu’un d’intimidant, en revanche quand elle se mettait vraiment en colère, elle ne faisait pas semblant.


Aussi, dans leur intérêt, les deux disciples s’excusèrent platement, mais rapidement, Léon se moqua du fait que Grey grelottait – ce qui était vrai, même si lui non plus n’en menait pas large – et ils auraient manqué de peu de se taquiner à nouveau, si l’air glacé n’avait pas été aussi mordant.


Ni l’un ni l’autre ne s’étaient attendus à ce que leur mentore prît les devants, encore moins en dénouant avec assurance son écharpe à franges en soie jaune pâle à leur attention, alors qu’elle ne portait déjà pas grand-chose, à part un veston court qui laissait clairement voir son nombril et un jean slim. Certes, le froid n’avait aucun effet sur elle, puisqu’elle était une redoutable mage de glace ; elle en avait vu d’autres, mais tout de même…


–        Vous avez froid ? demanda-t-elle d’une voix douce, en nouant la longue écharpe autour de leurs deux cous, les amenant ainsi à se rapprocher l’un contre l’autre. Et voilà, elle va vous réchauffer un peu.


Léon toucha le textile d’un air intrigué, comme s’il peinait à croire ce qui était en train d’arriver. Grey, qui, pour sa part, sentait les flocons de neige s’incruster dans sa chevelure et dans ses habits, regarda avec grande attention Oul terminer d’attacher précautionneusement le vêtement, avant qu’elle ne relevât la tête, un sourire doux sur les lèvres. Il y avait quelque chose de terriblement maternel dans le regard qu’elle posa sur lui, ce qui n’était pas surprenant, puisqu’elle avait eu une fille, dans le temps. Il plongea ses yeux dans les siens, désireux de seulement la remercier, mais à sa grande frustration, aucun mot ne sortit de sa bouche ; bientôt, il sentit ses joues rougir.


Et cette fois, ce n’était pas à cause du froid.

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