Avant toi

Chapitre 3 : Chapitre 2

2664 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 03/11/2020 20:31

Chapitre 2.


25 juin, dans ma chambre, venant de me réveiller et me demandant comment j'ai pu en arriver là.


Mon demi-frère est décidément un boulet. Évidemment, je le savais déjà. Sa venue au monde a dû être décidée dans le but précis de me pourrir la vie.


Avec son physique avenant, ses sourires charmeurs –que je trouve surtout digne d'un attardé mental– et sa bonne humeur constante, il ressemble à un ange tombé du ciel pour tout le monde, sauf moi.


Les filles tombent comme des mouches, ne se doutant pas une seule seconde qu'elles finiront en larmes une semaine maximum plus tard. Pourtant, leurs copines les avaient prévenues. Et oui les filles, ce n'est pas parce qu'il donne l'illusion d'être le prince charmant qu'il l'est forcément. Et pourtant, est-ce qu'on lui en veut ? Non, bien sûr que non. Le pauvre a juste du mal à établir une relation stable parce que son pauvre père est mort. Évidemment, rien n'est de sa faute…



Ma mère le trouve parfait. Il faut dire que vu ses critères, ce n'est pas moi qui pourrait être sa préférée. Premièrement, Jérémy a une vie sentimentale LUI. Pas glorieuse, certes, mais lui, au moins, essaye de se caser. Ma mère est bien naïve, vraiment. Il n'essaie en rien de trouver chaussure à son pied, juste de quoi passer le temps. Deuxièmement, il a un travail... Ok, juste comme barmaid dans un petit bar mais vu que moi, je n'en ai pas, c'est plus que ce que ma mère pouvait espérer.


Même Alex réussit à lui trouver des qualités. Est-ce que je suis la seule à le voir tel qu'il est ? Un crétin fini tout juste bon à me pourrir la vie ? Il y prend tellement de plaisir que c'est malsain. À croire qu'il aime quand je le remballe en hurlant et en lui balançant toutes sortes d'objets non identifiés à la figure… Tiens d'ailleurs, maintenant que j'y pense…

Ouf, j'ai eu peur d'avoir cassé mon réveil hier pendant notre « discussion » mais c'est bon, il n'a rien. Et en plus il a fait mal à l'autre chimpanzé. Je savais que j'avais raison de l'acheté il y a trois mois.


Enfin, tout ça pour dire que Jérémy est une plaie et que maman sera contente. J'ai un travail, youpie, sortez le champagne !


Effectivement, il se trouve que l'autre abruti ne s'en sort plus au bar. Le dernier employé sur qui il pouvait compter a démissionné pour partir en lune de miel sur une île ensoleillée dont je n'ai pas retenu le nom -parce que, soyons honnête, je m'en fous. Et personne ne peut le sauver dans ses contacts puisqu'ils travaillent tous. Donc, il m'a demandé, à moi, de lui venir en aide. Dans un bar. Je veux dire, avec des gens. Vraiment pleins de gens !


J'ai eu un moment de choc, me demandant si j'avais bien entendu avant d'éclater de rire. Parce que, ça ne pouvait être qu'une blague, non ? Et ben non. Alors, je l'ai envoyé se faire voir chez les nordiques en le foutant gentiment dehors. Et il a dit cette phrase à laquelle il savait que je réagirais.


« Tu as raison, je ne savais pas à quoi je pensais, tu n'en serais pas capable de toute façon »


Sérieusement, comment j'étais censé réagir à ça ? Il m'a clairement traitée d'incapable, de looseuse, de… Enfin, voilà quoi. Alors j'ai dit oui. Et quand il a eu ce sourire satisfait, j'ai compris que je m'étais faite avoir en beauté.


Peu importe ses défauts, peu importe les options qu'on ne lui a pas apportées à la naissance, la manipulation n'a pas été oubliée elle. C'est bien ma veine. Me faire avoir par… ça ! Je l'ai peut-être sous-estimé…


Je crois que je suis malade. Ça doit être grave, peut-être que je suis mourante. Oui, c'est ça, j'ai attrapé une maladie incurable qui touche le cerveau. Ça vous fait penser des choses que vous n'auriez jamais pensées même sous la torture.


Je veux dire, je viens quand même de trouver une qualité à Jérémy Saint-Clair !


La manipulation est une qualité qui nous suit de génération en génération du côté maternelle. Et il faut croire que cette caractéristique nous colle tellement à la peau qu'elle a même réussi l'improbable. C'est-à-dire entrée dans les gènes déficients de Jéjé.


Quand je pense que je vais devoir annoncer ça à Alex... Enfin pour le job, pas pour la seule qualité de l'autre singe.




Lydia lance son journal sur son lit avant de se jeter, tête la première sur son oreiller. Il est difficile pour elle d’admettre que Jérémy lui a sauvé la mise. Sauf que la jeune fille arrivait sur la fin de ses économies. Un vestige de son précédent petit boulot dans un supermarché. Évidemment, elle se contentait de réassortir les rayons. Même le patron savait qu’il valait mieux ne pas la mettre en contact direct avec la clientèle. Si elle a été engagée, c’est d’ailleurs uniquement car le gérant devait un service à sa mère.


La rousse ne sait plus exactement pourquoi elle a été renvoyée ‑car c’est évidemment ce qui a fini par arriver ‑ mais, elle doit avouer avec honnêteté qu’elle l’avait sûrement mérité.


Lydia en est là dans ses pensées quand on toque à la porte de sa chambre.


— Pas là, grogne-t-elle de manière fort peut élégante.


Évidement, personne ne l’écoute jamais et c’est sans doute pour ça que Lucie, sa tendre mère, ouvre la porte et entre avec un sourire rayonnant.


— Toi tu as parlé à Jérémy, soupire Lydia.


— C’est une excellente nouvelle ! Tu fais enfin un pas vers l’indépendance.


— Tu es si pressée que ça que je m’en aille ?


Lucie perd son sourire car, une fois n’est pas coutume, Lydia est sérieuse. Elle fixe sa mère avec intérêt, montrant que sa question n’est pas une énième remarque sarcastique dont elle a le secret. C’est une chose à laquelle Lucie Peeters n’était pas préparée et elle ne sait quoi répondre. Cette dernière ne se souvient plus de la dernière fois où Lydia lui a parlé de cette façon, s’intéressant réellement à la réponse qu’elle pouvait obtenir. Sa fille se contente de l’ignorer la plupart du temps. Pour le reste, elle se moque ouvertement de Lucie, lui montrant clairement que son avis n’a aucune importance pour elle.


— Ce n’est pas ce que j’ai dit, finit par souffler Lucie avec malaise.


— Il y a des choses qu’on a pas besoin de dire. Si ça peut te rassurer cette cohabitation ne me remplit pas de bonheur moi non plus.


Lucie pince les lèvres. Elle retrouve Lydia mais ne sait si elle doit s’en réjouir ou non. Évidemment, Lucie a bien compris que sa fille n’éprouvait pas un amour infini pour sa mère. Mais peut-être est-ce mérité ? Après tout, cette femme ne peut pas dire honnêtement qu’elle aime sa fille aussi fort qu’elle le devrait.


— Tu m’excuseras si je te laisse fêter ça toute seule, poursuit la jeune rousse sans regarder sa mère. Je vais être entourée par tellement d’alcool à partir de maintenant que boire un verre me plongerait sûrement dans un coma éthylique.


Lucie lève les yeux au ciel et sort en claquant la porte. Lydia regarde l’endroit où se tenait sa mère, perdue dans ses pensées avant de bailler. Elle se demande alors comme diable elle va tenir éveillée dans ce bar jusqu’à…


— Bon sang, c’est vrai ça ! Je bosse jusqu’à heure, moi ? JÉRÉMY !


Et ainsi commence leur troisième dispute de la matinée.


***


Lydia pince les lèvres, irrité au plus haut point par son soit disant meilleur ami qui se retient de rire à grande peine.


— Vas-y, lâche-toi, soupire la rousse avec lassitude.


Et Alex éclate de rire. Il s'esclaffe tellement fort que certaines personnes se tournent vers lui. Pas que ça le dérange, le jeune homme aime attirer l'attention ! Lydia lève les yeux au ciel, se demandant encore pourquoi elle traîne avec cet imbécile. Enfin mise à part le fait qu'il soit le seul à la supporter bien entendu… Et qu'il pourrait éventuellement lui manquer un peu. Mais juste un peu !


Il faut dire que la situation est cocasse. Lydia, qui ne supporte pas les gens, travaille dans un bar réputé pour être plein à craquer chaque soir. Parce qu’il s’agit d’un des rares bar de ce petit village. Et ce bar à un uniforme pour ses employés. Voilà comment Lydia se retrouve avec une tête de tueuse dans un débardeur blanc qui lui colle à la peau et un short à frange noire qu’elle trouve immonde.


— Et dire que la soirée vient de commencer, marmonne Lydia d'un air pincé.


— Souris un peu, tu vas faire fuir tout le monde !


Si cette voix insupportable n'était pas suffisante pour qu'elle puisse reconnaître cet idiot, le changement de comportement d'Alex est parlant. Ce dernier bombe le torse et affiche un sourire qu'il pense sans doute charmeur. La rousse grimace en se tournant vers Jérémy, son irréprochable imbécile de demi-frère et ses remarques tellement spirituels !


— Moi au moins, je ne fais de publicité mensongère en leur laissant croire que je suis gentille, réplique la rousse en regardant Jérémy de haut.


— Je suis gentil ! proteste le brun en fronçant les sourcils.


— À en gerber, approuve la jeune femme en reniflant dédaigneusement.


Alex pouffe, attirant le regard de Jérémy. Le premier adresse alors un sourire à tomber au second qui y répond.


— Je t'offre un verre ? propose Jérémy.


— Non mais c'est une blague ? s'indigne la rousse.


— Avec plaisir, répond Alex sans prêter attention à son amie.


Celle-ci grince des dents et se détourne.


— Ben, tu vas où ? demande son soit disant meilleur ami.


— Vomir ! crie Lydia.


Les deux jeunes hommes la voient s'éloigner avant de se regarder et d'éclater de rire.


La rousse boude dans son coin, jouant à Candy Crush pour calmer ses nerfs. Elle vient de perdre sa partie et grogne de frustration –ça fait tout de même un mois qu'elle tente de passer ce fichu niveau. Mais en bonne geek qui se respecte, elle clique sur « recommencer » prête à en découdre jusqu'à passer le niveau ou jusqu'à ce qu'elle n'ait plus de vie…


Lydia en est donc là, fixant intensément l'écran de son téléphone pour trouver le déplacement idéale quand elle se fait désagréablement interrompre…


–– Bonsoir, fait une voix masculine qui lui file immédiatement de l'urticaire.


— C'est fermé de ce côté, essayez mon frangin de l'autre côté, il se tourne les pousse depuis bien trop longtemps, réplique Lydia d'une voix atone sans lever les yeux.


— Et si je veux que ce soit vous ?


— Ça a l'air d'être mon problème ? grogne la jeune fille de façon fort peu féminine.


— Vous travaillez bien ici ? interroge l'homme.


On pourrait croire à un vrai questionnement et la rousse lui aurait pardonner de façon condescendante sa stupidité naturelle. Sauf que la voix de ce type déborde d'ironie. Alors elle crispe les mâchoires mais, décide encore une fois de faire preuve de clémence.


— Vous avez un sens de l'observation incroyable mais là, je suis en pause alors allez voir ailleurs, siffle Lydia toujours sans le regarder.


— Vous êtes toujours aussi agréable ?


— C'est un don, raille-t-elle. Et vous, vous êtes toujours aussi casse-pieds ?


— C'est un don, répète-t-il avec moquerie. Mais si vous vouliez me faire l'honneur de me regarder une seconde, je pourrais m'adoucir, tente l'homme.


—Et à quoi ça vous avancerait ? demande Lydia, perplexe et énervée.


— À voir si vos yeux sont aussi agréable à regarder que le reste… enfin mise à part votre caractère, rit-il et la rousse grince des dents.


Parce que cet agaçant personnage, non content de la déranger, se permet de lui faire du rentre dedans !? Personne n'a jamais osé lui parler comme ça.


— D'accord « Casanova », réplique Lydia avec verve. Qu'est-ce que tu veux au juste ?


Elle termine sa phrase en relevant les yeux et regrette presque que la voix de ce type soit aussi agaçante.


Grand, cheveux noir, teint éclatant, ce sont ces yeux couleur océan qui attire le plus son regard. Pas l'océan pollué et coloré par le goudron. Non, plutôt l'océan d'un bleu pur qui donne envie de sauter dedans. L'homme affiche un grand sourire qui aurait pu faire craquer Lydia grâce à ces fossettes irrésistibles mais, la lueur moqueuse a plutôt tendance à l'irriter encore plus. Surtout que les dents de ce crétin finit sont –pour ne pas changer– d'une blancheur éclatante.


— Vous avez de très beau yeux, fait remarquer l'intrus. Dommage que vous ayez l'air aussi grincheuse. C'est votre air naturel ?


Lydia manque de s'étouffer d'indignation. Pour qui se prend ce Don Juan de pacotille ? Néanmoins, elle parvient encore à garder son calme et à ne pas lui sauter à la gorge.


— Si vous voulez quelque chose à boire, dites-le, grince la rousse. Sinon, libérez la place. Vous n'êtes pas tout seul !


— Vous n'étiez pas en pause ? demande-t-il avec un faux air innocent, la tête penchée sur le côté.


— Je suis prête à travailler trois jours sans m’arrêter si ça peut m’éviter de vous parler !


— Vous devriez être gentille avec les clients.


Lydia sert le poing autour de son portable jusqu'à ce qu'elle le sente vibrer. Il s'est éteint. Toute cette histoire lui a fait perdre une vie à Candy Crush ! Le regard de la rousse doit valoir la pire des réflexions car il éclate de rire –évidemment, une personne normalement constituée aurait tout simplement eu peur.


— Bien, d'accord, acquiesce-t-il, les yeux pétillants de malice. Ce sera une bière.


La jeune femme décapsule la bouteille et la claque violemment devant ce provocateur, éclaboussant le comptoir. Il prend la bouteille rapidement, effleurant les doigts de la rousse au passage qui pince les lèvres. Ensuite, il s'installe confortablement face à elle.


Mais qui est ce crétin ? Dans ce petit village perdu au milieu de nul part, tout le monde connaît tout le monde. C'est un fait rassurant, on connaît les habitudes de chacun, on sait comment se comporter avec l'autre et à qui on peut parler sans risquer de perdre sa dignité ou ses dents. Mais cet homme, Lydia ne l'a jamais vu nul part ! Et cet inconnu se permet de la défier ouvertement, la provocant comme personne n'a jamais osé le faire.


Comme pour confirmer ses pensées, il soulève sa bouteille de bière dans sa direction, lui faisant un clin d’œil avec un sourire en coin avant de boire. Le message est très clair pour Lydia.


La guerre est déclarée… 

***

Mais qui est donc ce provocateur un brin suicidaire ? *_*

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