Mortem Regis

Chapitre 24 : Rivalités

4718 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 20/02/2021 17:20

La journée suivait lentement son cours, alors qu'une météo clémente s'était installée sur les vastes plaines de Grendia. A la résidence présidentielle, pendant qu'Othéo s'entretenait en privé avec Edgard, Ewen, accompagnée de Felicia, se promenaient dans les jardins. Harvay se contentait de marcher à leur suite, tout en contemplant cet espace fleuri et paisible. La douce odeur se dégageant des fleurs était agréable tandis qu'un calme apaisant régnait dans ces lieux. D'ailleurs, il était assez surprenant de constater à quel point cette partie de Glorië était tranquille, contrairement au reste de la citadelle qui était animé et assez bruyant.


« Vous avez un très beau jardin, dame Felicia, complimenta Ewen qui s'était accroupie pour contempler de plus près un parterre de fleurs violettes à côté duquel le trio passait.

– C'est très gentil, Ewena, répliqua l'épouse du président Grendien avec un léger sourire. Mais ce jardin ne nous appartient pas vraiment. Ce petit paradis existait bien avant que notre famille ne s'installe dans cette demeure. Néanmoins, nous avons tenu à l'entretenir comme il se doit. C'est un peu le devoir des familles présidentielles de Grendia de préserver un tel havre de paix.

– Je comprends, répondit la princesse Vopaquine en se relevant avant de reprendre la marche aux côtés de la dame aux cheveux verts. Cela fait combien d'années que votre mari préside cette nation ?

– Mon époux en est au milieu de son troisième mandat. Donc, cela fait dix-huit ans.

– J'étais à peine née lorsqu'il a occupé pour la première fois sa fonction... » en déduisit la plus jeune, qui semblait tout de même stupéfaite. Le fonctionnement politique de Grendia était très différent de celui des autres nations de Kaärann. Contrairement à ces dernières où la couronne souveraine se transmettait de parent à enfant, c'était le peuple Grendien qui élisait leur président pour une durée de sept ans. Si Edgard en était à sa troisième réélection, cela ne signifiait qu'une chose: les habitants de la grande nation devaient fortement l'apprécier. Et cela se comprenait car le président Edgard avait une excellente réputation, et celle-ci était vantée sur le continent tout entier.


Mais une réputation aussi flatteuse était-elle vraiment méritée ?


Harvay, qui demeurait auprès des dames, se posait exactement la même question. Il écoutait la conversation, mais demeurait silencieux et songeur. Il n'arrêtait de repenser à la conversation qu'ils avaient eue la veille avec le président Grendien. Mais au centre de ses pensées se trouvait la mystérieuse lettre que son majordome Louis lui avait remise, et la réaction qu'il avait eu suite à cela. Quelque chose dans ce message semblait avoir troublé Edgard. Mais quoi ? Et qui avait pu lui envoyer ce courrier ? Alors qu'il y réfléchissait, il entendit un sifflement que ferait une lame tranchant l'air. Le blond, la princesse aux cheveux bleus et l'épouse du président tournèrent leurs regards en direction d'un jeune homme blond qui, armé d'une élégante rapière, pourfendait la brise d'un geste habile et répété. Le trio reconnut rapidement Léonard, et s'approcha de lui.


« Je ne m'attendais pas à te voir t'entraîner à l'épée aujourd'hui et encore moins en ce lieu, mon fils, répliqua sa mère qui semblait étonnée de le voir ainsi.

– Voyons chère mère, un peu d'exercice en plein air n'a jamais fait de mal à personne ! » affirma le concerné tandis qu'il venait de couper d'un coup vif la tige d'une fleur rouge se trouvant non loin de lui. La frappe était si rapide qu'elle avait provoqué un courant d'air suffisamment fort pour que la fleur s'élève dans les airs. Léonard en profita ensuite pour l'attraper en plein vol, avant de s'approcher d'Ewen et lui tendre le végétal, tout en lui faisait une révérence accompagnée d'un clin d'oeil séducteur.


« Vous êtes encore plus radieuse que hier, princesse. »


Ewen demeura bouche bée, tant elle ne s'était pas attendue à un tel geste de sa part. Elle ignorait si elle devait être ravie ou blasée. La jeune fille avait remarqué que le fils du président Grendia tentait de la charmer par tous les moyens possibles depuis leur rencontre. Et elle n'aimait pas vraiment cela. Toutefois, par politesse, elle afficha un léger sourire, avant de saisir la fleur:


« C'est... très gentil, monsieur Léonard. Merci pour ce compliment et ce présent.

– Si cela ne tenait qu'à moi, je vous aurais offert un magnifique bouquet à la hauteur de votre beauté. Malheureusement, mes parents tiennent à ce jardin, et je ne veux pas les contrarier en coupant toutes les fleurs présentes. »


Tandis que Felicia avait poussé un léger soupir d'exaspération face à l'attitude de son fils envers Ewen, Harvay avait levé les yeux au ciel d'un air las. Plus le temps passait, plus son estime envers Léonard, qui n'était déjà pas bien haute, chutait. Il rêvait de lui coller une belle raclée afin qu'il arrête son cirque avec sa princesse, et qu'il devienne un peu plus sérieux. Mais sa position hiérarchique ne lui permettait pas vraiment de faire une chose pareille.


« Est-ce que votre... hum... charmant valet vous offre des fleurs ? questionna ensuite le jeune Grendien. À voir sa tête, cela ne m'a pas l'air d'être le cas. Vous devez vraiment vous ennuyer avec une compagnie pareille. Ne préfériez-vous pas la mienne, chère princesse ? »


Alors qu'Ewen et Felicia furent choquée par cette pique à l'adresse d'Harvay, celui-ci regardait son homologue masculin en fronçant les sourcils:


« Je vous demande pardon ?

– Léonard ! s'exclama Felicia. Qu'est-ce que c'est que ces manières ?

– Je ne fais que poser une question à notre invitée de Vopaqua, chère mère. Non pas que je veuille offenser son serviteur, mais...

– Harvay n'est pas qu'un simple serviteur ! s'indigna Ewen en serrant son poing, se retenant de le coller à la figure de Léonard. Il est également mon ami, alors je vous prierai de faire preuve de respect à son égard ! »


La princesse Vopaquine faisait tout pour se contrôler et garder son calme. Mais si Léonard continuait ses médisances envers Harvay, elle risquait d'user de ses pouvoirs pour l'envoyer valser dans les airs. Sentant que le comportement du Grendien agaçait la plus jeune, son serviteur posa doucement une main sur l'épaule de cette dernière pour la calmer.


« Ne t'emporte pas pour si peu, Ewen. Ses paroles ne m'atteignent pas. Par contre... »


Il dépassa la bleue tout en enlevant sa main de son épaule et s'interposa entre elle et Léonard. Il fit face à ce dernier sur un ton ferme:


« Sans vouloir vous offenser à mon tour, monsieur Léonard, la princesse Ewena n'est pas une midinette comme toutes celles que vous avez l'habitude de charmer. Vous l'importunez plus qu'autre chose en vous comportant comme vous le faites. Si vous ne voulez pas avoir de problèmes, je vous conseille d'en rester là.

– Est-ce là une menace ? lui demanda le concerné d'un sourire espiègle.

– À vous de voir... » lui répondit Harvay en le défiant du regard. Sentant une certaine tension s'installer entre les deux blonds, Felicia voulu s'interposer tout en demandant à son fils d'arrêter immédiatement son manège. Mais Léonard lui fit signe de rester là où elle était sans lâcher l'autre homme du regard.


« Voilà qui est fort embêtant, déclara Léonard sans perdre son air moqueur. Je me fais menacer dans ma demeure par un serviteur venu d'ailleurs, et c'est moi qu'on réprimande ! Harvay, c'est bien cela ? Je veux bien suivre votre conseil, même si je n'ai guère envie de renoncer au coeur de votre princesse. Néanmoins, j'impose une condition. »


Sur ces mots, il pointa le plus grand avec sa rapière.


« Je souhaite croiser le fer avec vous. Si je gagne, vous aurez l'obligeance de vous comporter comme doit le faire un serviteur, et de rester à votre place. Si vous gagnez, alors je m'en irai. »


Felicia était à la fois sidérée et honteuse. Elle avait du mal à croire que son propre fils imposait une telle chose, tout cela à cause d'une affaire de coeur et de respect. Ewen était tout aussi indignée qu'elle. Une telle proposition était absurde ! Néanmoins, elle tourna sa tête vers Harvay. Si celui-ci voulait accepter un tel défi, elle ne l'en empêcherait pas, même si elle n'en était pas très enchantée. Son serviteur, quant à lui, trouvait Léonard vraiment ridicule en cet instant, et se demandait vraiment comment réagirait Edgard en voyant son fils agir de la sorte.


Toutefois, il tenait là une occasion de lui donner une bonne correction. Il accepta donc le duel, et dégaina son épée. Celle-ci était moins longue que la rapière de Léonard, mais la lame était plus large et épaisse, même si cela la rendait légèrement plus lourde. Harvay avait donc moins de portée que son adversaire et ne serait pas aussi rapide et vif que lui, mais gardait tout de même l'avantage de la puissance et probablement de l'expérience. C'était donc avec confiance qu'il s'était mis en garde, tout en priant Ewen et Felicia de reculer, chose que les deux femmes firent à contrecoeur.


« Je suis vraiment désolée, Ewena, s'excusa la verte qui était vraiment gênée par cette situation plus qu'inattendue.

– Ce n'est pas de votre faute, dame Felicia. Ne vous en faites pas. »


Léonard était le seul fautif de cette affaire. C'était lui qu'il fallait blâmer, et non sa mère. La jeune princesse souhaitait qu'Harvay sorte victorieux de ce match, ne serait-ce que pour faire redescendre le fils du président qui avait pris de trop grands airs avec eux. Les deux blonds, face à face et en position de combat, s'observèrent longuement comme pour s'analyser.


Puis, ce fut Léonard qui attaqua le premier. Fonçant tel un éclair, il enchaîna plusieurs coup d'estocs. Harvay s'était attendu à ce que son adversaire repose sur sa vitesse fulgurante. Dans un premier temps, il choisit d'esquiver les attaques, tantôt en sautant sur les côtés, tantôt en reculant. Il lui arrivait également de parer quelques frappes avec son arme. Le serviteur de la famille royale Vopaquine se contentait de répéter les esquives et les parades, se disant que Léonard allait finir par s'épuiser à force d'attaquer sans relâche de la même façon.


Malheureusement pour lui, le jeune Grendien était plus malin qu'il ne le pensait, et avait tout à coup tenté de le faire tomber à l'aide d'un croche-pied. Mais Harvay, par réflexe, l'avait évité de justesse un faisant un léger bond en arrière. Le fils du président en fut surpris. Mais sa stupéfaction s'agrandit lorsqu'il vit le plus grand foncer vers en effectuant une succession d'attaques puissantes et variées. Léonard, qui ne s'y attendait pas, tenta de les bloquer tant bien que mal. Mais un moment arriva où la lame d'Harvay s'était stoppée à quelques centimètres de l'épaule gauche du plus petit. Un peu plus, et le serviteur d'Ewen pouvait trancher la chair du fils du président. Ce dernier, figé sur place, avait les yeux rivés sur l'épée de son adversaire pendant que celui-ci esquissait un sourire satisfait:


« Déjà vaincu, monsieur Léonard ? »


Le concerné fronça les sourcils, avant de reculer pour se mettre hors de portée du sabre. Puis, ne voulant pas s'avouer vaincu, il se remit en garde:


« Vous vous débrouillez mieux que ce que j'imaginais, admit-il en le regardant avec dédain. Mais ne croyez pas déjà avoir gagné, encore moins aussi facilement. »


Harvay s'était douté que son opposant n'aurait pas abandonné aussi vite. Mais il s'était attendu à un combattant plus redoutable, et était un peu déçu de constater que le fils du président de Grendia n'avait rien d'exceptionnel au combat. Toutefois, le jeune soldat préféra rester sur ces gardes: peut-être que Léonard possédait une botte secrète pouvant lui donner du fil à retordre.


Le plus grand des blonds se prépara à prendre une nouvelle fois l'autre d'assaut. Mais au loin, il aperçu une petite silhouette rousse armée d'un arc, qui semblait viser Ewen avec.


« Ewen, attention ! » hurla-t'il alors qu'il s'était précipité vers elle au moment où on décocha la flèche. Celle-ci se planta à l'arrière du bras du serviteur qui eût tout juste le temps de s'interposer afin de protéger sa princesse, sous les yeux horrifiés de tous.


« Harvay ! » s'écria Ewen de stupéfaction en le supportant dans ses bras pour l'empêcher de tomber, alors que son regard et ceux de Léonard et Felicia s'étaient tournés vers la provenance du tir. Ils aperçurent à leur tour la mystérieuse personne, et Léonard, toujours avec sa rapière en main, voulut foncer jusqu'à elle pour la mettre hors d'état de nuire. Mais à peine avait-il fait un pas en avant qu'une voix féminine résonna non loin d'eux:


« À ta place, je ne bougerai pas. »


Une autre silhouette, blonde et plus grande que l'autre, se tenait debout près d'un arbuste feuillu qui lui avait probablement servi de cachette. Toute vêtue d'une sorte de combinaison noire et grise à l'instar de sa complice archère, elle portait un masque en forme de papillon qui lui recouvrait une grande partie du visage. Seule sa bouche était visible, tout comme son acolyte féminin qui se rapprochait doucement en visant Léonard avec une flèche, pouvant l'atteindre à tout moment.


Mais un détail choqua tout le monde, en plus de l'apparition de ces deux femmes masquées : la plus grande des deux tenait la jeune Annette en la menaçant avec un katana sous la gorge.


« Par tous les dieux ! Annette ! » s'exclama Felicia, terrorisée en voyant son plus jeune enfant en danger. Pendant qu'Harvay arrachait d'un coup sec la flèche logée dans son bras, Ewen, fronçant les sourcils de méfiance, s'adressa à la blond au katana:


« Qui êtes-vous ? Et qu'est-ce que vous nous voulez ?

– Ce que nous voulons ? répéta son interlocutrice sur un ton légèrement moqueur. Accomplir ce qui aurait déjà être fait depuis longtemps. Nous voulons ta mort, princesse Ewena de Vopaqua. »


Cette dernière phrase surprit toutes les personnes présentes, et en particulier la princesse aux cheveux bleus. Mais celle-ci ne mit pas longtemps à comprendre: ces deux jeunes filles face à elle étaient probablement de mèche avec celui qui avait tenté de la tuer à deux reprises, c'est-à-dire Lao.


« Pour l'avoir, murmura Harvay en se tournant vers celle qui venait de parler, il faudra d'abord me passer sur le... »


Hélas, et à la stupéfaction des autres, Harvay perdit tout à coup connaissance, et s'effondra au sol.


« Harvay ?! paniqua Ewen en se précipitant vers lui pour tenter de le réveiller, en vain.

– Que lui avez-vous fait, sombres garces ?! grogna Léonard en constatant que la situation devenait de plus en plus critique.

– Votre compagnon va s'en remettre, parla l'archère rousse qui s'était rapproché de lui en le visant. Je l'ai juste endormi avec une flèche enduite d'une substance soporifique. Tout comme la plupart de vos gardes, d'ailleurs. Inquiétez-vous plutôt pour vous. »


Les membres de la famille présidentielle, en particulier Felicia, n'en revenait pas. Comment deux filles comme elles avaient-elles pu se jouer de leurs soldats de la sorte ? Mais l'heure n'était pas aux interrogations. Il fallait, d'une manière ou d'une autre, faire libérer Annette.


« Si notre père nous rejoint ici, parla celle-ci avec un regard rempli de haine, je ne donne pas cher de votre peau !

– Cela me fait de belles jambes, rétorqua la manieuse de katana. Prie plutôt pour que cette princesse ici présente se livre, car si elle ne le fait pas, je ne donne pas cher de ta petite trachée.

– Lâchez-la d'abord ! » lui ordonna Ewen. Évidemment, sa nouvelle opposante ne s'exécuta pas.


« On n'a pas besoin de la lâcher pour t'exécuter sur place ! » fit la rousse en se tournant vers la bleue, avant de tirer sa flèche vers elle. Par réflexe, Ewen tendit sa main en avant et utilisa son pouvoir, faisant apparaître une barrière aqueuse qui bloqua le projectile. Léonard profita de cette occasion pour foncer vers la rousse, et effectuer plusieurs attaques avec sa rapière. L'archère évita les attaques tant bien que mal, mais semblait ne pas pouvoir faire grand-chose au corps à corps.


« Hey ! interpella l'autre fille masquée en regardant l'épéiste. Ta frangine est entre mes mains, alors si tu veux qu'elle vive encore longtemps, tu ferais mieux de... »


Mais en voyant un puissant jet d'eau lui foncer dessus, celle qui parlait fut obligée de lâcher Annette tout reculant pour l'éviter. La fille du président en profita pour se réfugier dans les bras de sa mère, pendant qu'Ewen, armée de ses deux épées recourbées, faisait désormais face à la manieuse de katana:


« Si toi et tous tes complices désirez réellement me tuer, attaquez-moi directement au lieu de vous en prendre à des innocents.

– Bla bla bla... se moqua son ennemie en se mettant en garde. Arrête de te la jouer justicière héroïque, ça ne te va définitivement pas. Franchement, je me demande comment Seven a pu être ami avec toi. »


Ewen fut étonnée par cette dernière phrase. Parlait-elle de Lao ? Lui et Seven étaient donc une seule et même personne ? Elle n'eût pas le temps d'y réfléchir davantage car l'autre s'était élancée pour l'attaquer. La princesse Vopaquine parvint à esquiver la frappe horizontale en se baissant, avant de contre-attaquer avec une multitudes de coups rapides. La blonde au katana n'avait pas beaucoup de mal à les parer, mais affichait derrière son masque un air surpris. Elle ne s'était pas attendue à voir l'une des princesses de Kaärann se défendre aussi bien. Cela l'irritait presque. Mais elle demeura concentrée. Tout en continuant à éviter les attaques d'Ewen, elle jeta un rapide coup d'œil à sa complice rousse, qui était parvenue à planter la pointe d'une flèche dans la cuisse droite de Léonard, lui arrachant un cri de douleur.


« Léonard ! » hurlèrent de concert Felicia et Annette en le voyant tomber à genoux au sol.


« Mince... » pensa la bleue en le voyant en aussi mauvaise posture. Il fallait qu'elle lui vienne en aide du manière ou d'une autre. La princesse décida d'envoyer un jet d'eau sur son opposante actuelle pour la faire reculer tout en s'éloignant d'elle. Elle fonça ensuite vers l'archère pour la prendre d'assaut à son tour, et détourner son attention de Léonard.


« Hey ! C'est moi ton adversaire, pimbêche ! » fit la manieuse de katana en voyant son acolyte en difficulté face aux enchaînements de la Vopaquine. Elle fonça ensuite vers la bleue pour l'attaquer une nouvelle fois. Ewen, qui ne voulait pas se retrouver à affronter deux ennemis en même temps, invoqua en sa direction un jet d'eau plus puissant que le précédent. Mais...


« Compte pas là-dessus, chérie ! » pensa la combattante blonde dont le katana venait de s'électrifier. Puis, elle frappa le sortilège aqueux avec, faisait l'électricité se propager le long de celui-ci afin qu'il touche la bleue de plein fouet. Ewen se retrouva figée sur place, tremblant violemment sous l'effet du choc qu'elle venait de recevoir, et qui l'avait obligée à lâcher des armes.


« E... Ewena ? » murmura Felicia en la voyant ainsi, pendant qu'Annette aidait son frère aîné à se relever.


« Bon sang... grogna la fille du président. Mais qui sont ces filles ? »


Du côté de ces dernières justement, la rousse avait rejoint la blonde.


« Bien joué, Nineteen ! » l'avait-elle félicitée, tandis que celle-ci avança lentement vers Ewen qui s'était effondrée au sol, haletante. Elle luttait pour garder les yeux ouverts, mais n'avait pas la force de se relever dans l'immédiat. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était de tourner son regard vers celle qui allait probablement l'achever dans les prochaines secondes.


« Par pitié, ne lui faites pas de mal ! » implora Felicia en voulant aider Ewen. Mais elle se stoppa aussitôt en voyant l'archère qui la visait avec un arc en leur ordonnant, à elle et à ses enfants, de ne pas bouger de leurs positions.


« Tu vas mourir, Princesse Ewena. Ou peut-être devrais-je dire Ewen ? » parla Nineteen, qui se trouvait à present juste devant elle, l'épée levée. D'un geste, elle pouvait enfin abattre celle que le Mortem Regis cherchait à tuer depuis longtemps. Elle était sur le point d'accomplir la mission que Seven n'avait jamais été capable de réussir. Elle allait enfin en finir avec cette maudite princesse qui était l'une des raisons pour lesquelles son Sevy avait déserté l'organisation.


« Crève. » lui dit-elle ensuite. Néanmoins, son katana demeurait levé, tandis qu'une expression confuse s'était emparée de son visage caché. Elle visualisait Seven qui se tenait debout juste devant Ewen en faisant signe à Nineteen de ne pas la tuer.


« Seven ? » murmura-t'elle, à l'étonnement de la princesse, mais aussi de sa complice rousse qui avait tourné sa tête en sa direction:


« Nineteen ! Qu'est-ce que tu attends ? Achève-la ! »


Mais malgré cette petite pression de sa part, la blonde ne parvenait pas à tuer sa cible alors qu'elle était proche de ce but.


« Sixty-nine, je...

– Mais que se passe-t-il, ici ?! » résonna tout à coup la voix du président Grendien qui arrivait sur les lieux accompagné d'Othéo et d'une poignée de soldats. L'un de ces derniers visa Nineteen avec une arbalète, et tira un carreau en sa direction. La jeune fille fut obligée de se reculer d'Ewen pour l'éviter, et de rejoindre Sixty-Nine qui s'était éloignée de quelques pas en voyant que les gardes commençaient à les encercler.


« Bon sang ! » grogna la petite rousse, frustrée par ce revirement de situation. Nineteen ne dit rien. Mais elle était toute aussi énervée de devoir abandonner sa mission alors qu'elle était quasiment accomplie. Ce fut avec un certain poids sur le coeur que la blonde saisit la main de la rousse, avant d'activer une pierre de téléportation et de disparaître avec elle aux yeux de tous.


« Qui étaient ces personnes ? demanda le président en constatant avec horreur les blessées qu'elles avaient laissés derrière elles.

– Je l'ignore... lui répondit son fils en grimaçant de douleur. Mais elles souhaitaient tuer dame Ewena. »


Le regard d'Edgard se tourna donc vers Othéo qui s'était précipité vers sa fille et son serviteur. Les deux, bien qu'inconscients, n'étaient pas gravement blessés. Felicia ordonna à ses soldats de les transporter à l'intérieur de la résidence afin de les soigner.


Plusieurs heures s'étaient écoulées suite à ce drame. Les nouvelles concernant une troisième tentative de meurtre envers Ewen sur les terres de Grendia firent rapidement le tour de cette nation, et probablement du continent tout entier. Néanmoins, Seven et Shira ignoraient encore tout de ce sombre événement. Tous deux avaient parcouru une très longue distance depuis qu'ils avaient quitté Minera. Ils avaient franchi la frontière Vopaquo-Grendienne en milieu de journée, et se dirigeaient à présent vers Acturus visible à quelques kilomètres de leur position alors que le soleil commençait à se coucher.


« J'ai hâte de pouvoir plonger dans un lit bien moelleux... » confia Shira qui semblait épuisé par cette marche éprouvante qu'il avait subie en ce jour. Seven ne répliqua rien, mais partageait cette même envie de dormir dans un lieu confortable. Il se demandait à quoi pouvait ressembler le village d'Acturus. Il connaissait son nom et son emplacement, mais n'y avait jamais mis les pieds. Pour Shira, cette partie de Grendia était également inconnue. Mais un détail plutôt intrigant interpella le jeune prince:


« Je m'attendais à croiser plus de personnes sur notre route. Étant donné l'emplacement d'Acturus près d'une frontière, je pensais qu'on aurait vu des voyageurs dans le coin.

– Personnellement, je ne m'en plains pas. Mais tu as raison. C'est tout de même très étrange. »


Le duo masculin s'échangea un regard interrogateur. Ils préféraient se dire qu'à cause du Mortem Regis qui sévissait actuellement, la population de Kaärann avait peur de voyager d'une nation à une autre. Mais la vérité était bien plus sombre que cela.


Ce ne fut qu'à la nuit tombée que l'assassin et son compagnon princier arrivèrent aux portes d'Acturus. Mais à peine avaient-ils pénétré en son sein qu'ils firent face à un spectacle inattendu: Des soldats Grendien postés à l'entrée du village étaient au sol, gisants chacun dans une flaque de sang.


« Qu'est-ce que...?! » fit Shira, terrorisé par une telle vue. Seven s'approcha des cadavres pour les observer de plus près. Certains soldats avaient la gorge tranchée pendant que d'autres avaient été poignardés au niveau de l'abdomen. Quelque chose ou quelqu'un avait attaqué ce village.


Faisant signe à Shira de rester près de lui, l'homme aux longs cheveux d'ébènes s'avança lentement dans la sinistre ruelle devant lui. Il n'y avait aucun éclairage malgré l'heure assez tardive du soir, ni personne dans les environs. Les maisons étaient closes et également plongées dans le noir. De plus, le lieu semblait désert. A part les corps de soldats morts qui jonchaient le sol par-ci par-là, il n'y avait personne dans les parages.


« Mais qu'est-ce qui s'est passé, ici ? demanda le prince Xenois, effrayé par cette ambiance morbide.

– Rien de bon, visiblement. Je me demande si on ne ferait pas mieux de partir d'ici en vitesse. »


Soudain, le bruit que ferait un caillou roulant sur le sol se fit entendre, faisant sursauter les deux hommes qui s'étaient tournés vers la direction de son origine. Seven, craignant qu'un inconnu ne débarque pour les attaquer, passa devant Shira tout en restant sur ses gardes.


« Qui va là ? » demanda dit-il tandis que Shira, de plus en plus inquiet par la situation, s'était accroché à son bras. Mais tout à coup, le plus jeune sentit un picotement à l'arrière de son cou.


« Lao...? » l'appela-il alors qu'il s'affaiblissait au fil des secondes, jusqu'à s'écrouler au sol.


« Shira ?! »


L'assassin remarqua alors une petite fléchette plantée dans la nuque de son compagnon. Celle-ci était probablement imprégnée d'un somnifère ou d'une substance assommante. Mais alors que l'homme vêtu de vert était sur le point de chercher du regard d'où provenait ce projectile, il sentit une vive douleur, différente de celle que ferait une telle fléchette, derrière sa nuque. Puis, plus rien. C'était le noir total pour Seven, qui venait de s'effondrer au sol à son tour, juste à côté du prince Xenois.



Laisser un commentaire ?