La forêt ensorcellée

Chapitre 1

1539 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 29/10/2021 19:42

Elanne se réveilla en sursaut, elle avait encore fait un cauchemar. Elle en faisait tout le temps le jour de son anniversaire et elle revoyait ce qui s’est passé quand elle avait trois ans. Elle avait aujourd’hui douze ans. Cela faisait déjà 9 ans qu’elle avait été recueillie par Erlun et Amerline. Elle se leva et alla voir ses parents adoptifs dans la salle à manger. Elle était décorée de fleurs de lys, sa fleur préférée, à l’occasion de son anniversaire. Il n’y avait personne.

« Papa, Maman, je suis là ! »

Personne ne lui répondit. Elle s’avança dans la salle puis une personne lui sauta dessus. C’était Amerline.

« Bon anniversaire !

- Merci. Où est papa ? la questionna-t-elle.

- Il n’a pas pu rester, expliqua Amerline, il y avait une attaque de Garocs.

- Oh...je vois.

- Que veux-tu pour ton anniversaire ?

- Comme toujours, vous le refusez, mais je veux aller à Shabila pour voir mes ancêtres et je veux venger mes parents ! s’exclama Elanne avec détermination.

- Seuls les hommes peuvent se battre, tu ne pourras pas les venger, tu le sais bien. Et pour aller à Shabila, j’ai trop peur que tu te fasses tuer en cours de route, comme tes… Elle s’interrompit brusquement avant de terminer sa phrase.

- J’en ai marre de vous, de vos règles, et de votre protection, s’emporta-t-elle, mes parents sont morts en voyageant, mais moi, j’ai survécu, et je survivrais ! »

Sur ses mots, Elanne alla précipitamment dans sa chambre, poursuivie par sa mère adoptive. Arrivée à l’étage, dans sa chambre, elle verrouilla la porte puis elle prit un sac, des provisions, un arc, des flèches et des vêtements de rechange. Après les avoir rangés dans son sac à dos et l’avoir mis à son dos, elle sauta de sa fenêtre, sortit de chez elle en courant sans qu’Amerline ne puisse la rattraper, puis elle s’enfuit dans la forêt.

Une fois à bonne distance de son logis, elle se mit à marcher et en regardant furtivement autour d’elle.

Mais au détour d’un carrefour du chemin, un garde de la forêt l’interpella :

« Eh, toi, où vas-tu de bon matin, comme ça ? »

- Je pars me battre, répondit-elle en imitant une voix bourrue de jeune homme et en glissant ses cheveux sous sa capuche.

Pour donner une preuve au garde, elle lui montra son arc.

« Tu te trompes de sentier, lui fit-il remarquer.

-Ne vous en faites pas, lui assura Elanne. »

Elle partit ensuite en courant dans les bois tout en pensant « Oh la barbe, ça va être difficile de ne pas me faire remarquer ».

Quelques minutes plus tard, elle s’arrêta et marcha silencieusement à travers les bois.

Quand ce fut midi, elle grimpa à un arbre pour s’installer manger. Elle entendit du bruit qui venait de derrière. Elle se rendit compte que c’était la patrouille de guerre de son père adoptif qui s’arrêtait pour manger. Elle constata avec horreur qu’ils étaient beaucoup moins nombreux qu’avant et elle les entendit parler avec un garde de la frontière du village :

« Ces saletés de Garocs nous ont tendu un piège sur les rives du fleuve Lorjah !

- Oui, et à cause d’eux j’ai perdu mon pauvre frère qui a succombé avec beaucoup d’autres soldats, se plaignit tristement un elfe assez maigre.

-On pourrait croire qu’ils savaient exactement où nous allions attaquer, constata rageusement un autre soldat plus musclé.

- C’est vrai, je suis sûr que c’est à cause des Gogems. »

Elanne remarqua qu’elle était près du camp de regroupement pour les batailles et qu’il lui restait deux kilomètres à parcourir dans la forêt pour l’atteindre. Elle partit donc dans sa direction.

Quand elle l’aperçut, elle fut un peu déçue, elle s’attendait à un bâtiment plus grand. Elle entra néanmoins et elle découvrit des fresques sur les murs du camp. La première illustrait des elfes dans une forêt avec des maisons dans les arbres. « Shabila », pensa-t-elle. La deuxième représentait les elfes sur des bateaux et des chevaux. « Ils partent pour Shanima ». La suivante montrait des elfes, construisant des maisons dans une forêt. « Shanima ». La dernière fresque montrait des elfes combattant des Garocs et des Gogems. Elanne s’apprêta à repartir quand elle entendit une voix dans son dos.

« C’est bon, tu as fugué, maintenant reviens à la maison pour les choses sérieuses ! »

C’était Amerline et elle n’avait pas l’air contente du tout.

« Nous faisons des efforts pour toi, la réprimanda-t-elle, alors fais-en aussi. On rentre tout de suite !

-Oui, Maman, fit-elle en baissant la tête. »

Elles sortirent donc du camp et se dirigèrent vers le sentier qui menait jusque chez elles. Amerline marchait en tête et Elanne la suivait, tête basse.

Quand elles arrivèrent, Elanne vit son père allongé sur le canapé, sa jambe saignait beaucoup.

« Que s’est-il passé ? demanda-t-elle dans un mélange d’horreur et de peur.

- Oh, rien de grave..."

Elanne savait que son père mentait mais elle ne le fit pas savoir et reprit :

"Oh, très bien si ce n'était pas grave.

- Elanne, j’aimerais qu’on ait une petite discussion, souligna Amerline avec un mélange de colère et d’épuisement, mais avant, explique ce que tu as fait à ton père ! »

Elanne baissa la tête et annonça à son père d’un ton désinvolte :

« J’ai fugué.

- Quoi, tu as fugué !

- Erlun, calme toi, lui conseilla Amerline, tu es encore blessé et j’avais prévu d’en parler seule à seule avec elle. »

Sur ses mots, Amerline entraina Elanne dans sa chambre, tout en montant le long escalier de bois qui menait à l’étage, Elanne culpabilisait pour ce qu’elle avait fait. « Mais, en même temps, il faudra bien un jour que je découvre le monde », pensa-t-elle.

Une fois arrivées en haut, Elanne et Amerline ouvrirent la porte de la chambre d’Elanne, Amerline y rentra, failli trébucher sur un crayon de papier car Elanne avait le don de laisser trainer ses affaires un peu partout. Amerline s’assit donc sur le lit d’Elanne en soupirant tandis que celle-ci prenait place sur sa chaise de bureau, dehors, on pouvait voir les bois de Shanima. « Mais pour combien de temps encore, combien reste-il avant que les Garocs nous envahissent ? A-t-on pensé à tout cela ? » pensa-t-elle.

Elle était perdue dans ses pensées quand Amerline la ramena à la réalité en lui demandant :

« Elanne, pourquoi as-tu fugué ?

- Mais parce que je veux découvrir le monde, moi ! Pourquoi resterais-je coincée ici ? Moi aussi, je veux partir, vivre des aventures ! Ce n’est pas pareil que de les rêver ou de les lire, je veux en vivre moi ! Quelque chose de palpitant pour une fois. Je parcourrais notre monde, et, surtout, j’irais à Shabila pour en apprendre plus sur mon passé. Chevauchant sous la pluie, courant dans les montagnes, nageant dans les fleuves, même au bout de mes limites, je ne lâcherais jamais mon but : tuer des Garocs et également des Gogems ! Je trouverais des alliés qui m’aideront, et, peut-être qu’un jour, eux et moi délivrerons les Lines, longtemps prisonnières de la Litine, surveillées par des Garocs, sous l’emprise des Gogems. Moi, oui, moi, je ferais tout ça ! »

Tout en parlant, Elanne s’était mise debout sur sa chaise. Amerline l’avait regardée, la laissant parler, des larmes d’émotions coulaient sur sa joue. Un jour, oui, Elanne serait prête à partir, et quand ce jour sera venu, elle, elle l’aiderait. « Je suis si fière d’être sa mère adoptive » songea-t-elle tout en regardant Elanne qui la défiait du regard, elle lui expliqua tendrement :

- Bien sûr qu’un jour tu partiras, je sais bien qu’Erlun et moi ne pourront pas te retenir indéfiniment, mais ce jour n’est pas encore venu, reste encore avec nous pendant quelques temps, et, quand tu seras prête, tu partiras »

Après cette discussion, mère et fille restèrent sans voix pendant un long moment, se regardant, en attendant que l’autre prenne la parole, finalement, Elanne lâcha enfin :

« OK. »

Un seul mot, et pourtant si expressif, le ton qu’elle avait mis dans ses paroles exprimait tout : son désir de partir mais aussi son amour pour sa mère adoptive.

Après avoir parlé, Elanne se jeta dans les bras d’Amerline en pleurant. Celle-ci la rassura, en lui murmurant des paroles apaisantes.

Elles restèrent ainsi pendant un long moment, puis elles redescendirent au rez-de-chaussée, ou elles trouvèrent Erlun, toujours affalé sur le canapé. Il ne voulait pas l’admettre, mais lui aussi, savait qu’Elanne avait raison. Un jour, elle partirait.

Laisser un commentaire ?