Hope Station

Chapitre 3 : Entrée 03

7617 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 21/11/2022 09:14

Entrée 03


Journal de Sissela Ragnuson, numéro d'équipage 4878

Date d'enregistrement : Inconnue

Lieu d'enregistrement : Hope Station, localisation inconnue


Le temps qui s'était écoulé depuis la soirée de gala, je le qualifierais d'extrêmement long surtout pour moi. Alors que pourtant, il ne s'était pas écoulé plus de dix jours, il s'agissait bien de dix jours d'isolement total. Moi et ma famille avions comme d'autres familles participantes à la mission était isolée dans une sorte de base militaire high-tech. En réalité, je n'avais franchement aucune idée de son apparence, de son personnel ou même des technologies qu'elle abritait. Notre seule fonction durant ces dix jours avait été de rester cloîtré tous ensemble dans une sorte de pièce bunket. Quelques lits de camps, massants quand même vu qu'ils avaient pensé au confort, des équipements de loisirs se résumant à des consoles de jeux et des holoprojecteurs et un petit bureau pour mon père. Lui, il avait pu s'occuper en lisant les dossiers des membres de la mission, tous situé sur feuille interactive. Ces feuilles, d'une vingtaine de centimètres sur quinze, étaient connectées au serveur central mais permettait également d'être verrouillée pour servir de feuille comme le faisait nos ancêtres. J'avais alors eu un nombre de loisirs tellement énorme... J'avais pu jouer avec mon frère, discuter avec Maman, dormir ( la majorité du temps) mais surtout éviter ma sœur. Bon, éviter quelqu'un qui vivait avec vous vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans une pièce de vingt-cinq mètres carrés était presque impossible mais elle saisissait chaque occasion possible pour le parler du membre d'équipage provenant de la Fédération Romane et qui, selon elle, en voulait à mon corps. Autant le dire, ces dix jours furent un cauchemar sans nom et surtout sans fin. Mais ce que pouvait me dire ma sœur commençait peu à peu à me travailler, me poussant à me poser mille questions sur ce garçon. Naturellement, je passerai outre les dizaines d'insinuations de ma chère sœur sur ce qui allait m'arriver ou encore ses nombreux conseils sur ce que l'on pouvait faire avec un membre génital masculin, avec lequel on pouvait visiblement en faire des tonnes, pour annoncer le pire de toute l'histoire. Ma sœur avait fait un pari toute seule, ce qui en soit n'avait franchement pas d'intérêt, pour me signifier que selon elle, je deviendrai une femme dans les trois premiers mois. Dix jours infernaux. Je n'arrivais même à comprendre comment j'avais pu subir tout ça mais mes parents avaient visiblement fait exprès d'ignorer nos conversations. Le plus difficile avait également consisté en l'ignorance totale du temps qui passait. Nous n'avions ni fenêtre ni horloge, peut-être pour éviter l'excitation de la mission ou le stress dû à celle-ci. En tout cas, j'estimais que si ce confinement était la notion de vacances de l'armée, ils devraient les revoir. Et puis, au bout d'un moment, une voix résonna dans la pièce.

- Message à l'attention de tous les membres de la mission Esperenza, votre embarquement est prévu dans deux heures, veuillez vous équiper des tenues de vols présentes dans les box se déverouillant dans vos logements de confinement, fit une voix robotique.

J'aurais remercié Dieu si j'étais croyante tant j'étais enfin soulagée. Mon petit frère sauta nerveusement sur le lit en hurlant.

- On va partir! On va partir! hurla t'il surexcité.

- Calme toi Bjorn, lui intima Maman.

- Qui met la sienne en premier ? demanda alors Rakel en se levant pour foncer vers les box.

- J'enfile la mienne en premier, je sais la mettre et si vous avez besoin d'aide, je serai prêt, précisa mon père.

Je le vis attraper une boîte dans le box et se diriger vers le seul endroit fermé de la pièce, les sanitaires.

- On va partir, c'est le moment, fit ma sœur intriguée.

- Vous êtes prêtes mes chéries ? nous demanda ma mère.

- Nous allons accomplir ce qu'aucun humain n'a jamais fait, quitter la galaxie, avouai-je.

- En plus on a jamais pris l'ascenseur orbital, fit ma sœur mesquine.

Je savais pourquoi elle disait cela, et je la comprenais. Moi et ma sœur avions toujours rêvé d'aller sur les stations de loisirs de la Lune mais un voyage et les réservations coûtait clairement les implants de la nuque. Même mes parents avec leurs très bons salaires auraient dû économiser longtemps pour nous le payer.

- Dire que l'on va tout quitter, marmonna ma mère. Heureusement nous sommes ensemble...

- Visiblement je ne suis pas la seule à avoir un coup de mou à l'idée de partir, dis-je alors en voyant la tristesse chez ma mère.

- Ho mais Sis n'est plus si triste que ça, lança Rakel amusée.

Immédiatement, j'avais regardé avec une grande méchanceté ma chère sœur. Ma mère l'avait regardée avec circonscription avant de me fixer attentivement.

- J'ai raté quelque chose ? demanda ma mère en dorlotant Bjorn.

- Rien du tout, grommelai-je.

- Elle a un mec, fit alors ma sœur.

- Mais non! me défendis je.

- C'est vrai? demanda ma mère avec étonnement.

- Bah vas-y sois surprise, marmonnai-je.

- Non c'est pas que tu en ais un... C'est que je ne l'ai pas remarqué, m'assura ma mère.

- J'en ai pas bon sang, m'énervai-je immédiatement.

- Bon..., fit ma mère pour calmer le jeu. L'une de vous m'explique.

- Y a un mec qui l'a draguée au gala, fit ma sœur.

- Il m'a pas draguée, assurai-je. On a juste discuté.

- Rakel... Laisse ta sœur tranquille, fit ma mère.

- Mais... Ho et puis merde, grommela ma sœur en allant déjà chercher sa tenue pour suivre notre père.

- Vous avez juste discuté ? demanda ma mère tout bas.

- Oui! confirmai-je.

- Et c'est qui? insista ma mère.

- Le fils Tourvel, assurai-je. Il ne connaissait pas les plats de notre continent, m'étais je justifiée.

Ce fut mon père qui mit un halte là à la conversation en sortant des sanitaires, juste avant que ma sœur ne file dedans. J'avais alors eu le loisir d'admirer nos tenues de vols. Celle-ci était intégralement noire et couvrait tout le corps de mon père à part sa tête. Autour des poignets et des chevilles, il y avait quelque excroissance qui de loin ressemblaient à de gros bracelets. J'avais également remarqué que cette tenue avait un branchement connecté à l'implant de nuque de mon père. Mais je restais cependant figée.

- On dirait un super-héros ! lança Bjorn.

- Merci mon chéri, fit mon père.

- Et à quoi ça sert tout ça ? demanda ma mère en le montrant.

- L'implantation dans nos ports permettra de connaître l'état complet de la tenue mais également de l'environnement, commença mon père. La tenue sera pressurisée durant le vol et en cas de besoin, il est possible d'activer un masque respiratoire constitué de nanobots. Elle recycle également l'oxygène, permettant même de tenir près d'un quart d'heure dans le vide total. Les fluides corporels sont également recyclés donc même si ce n'est pas très glamour, il est inutile de se soucier de certains soucis... Les excroissances aux poignets et aux chevilles sont constituées de compensateurs d'inertie conçus pour nous permettre de retrouver notre équilibre en gravité zéro. De plus, elles seront toutes reliées aux ordinateurs des services médicaux.

- Et ben, impressionnant, fit ma mère.

- Tu ne dis rien Sis? demanda mon père.

Moi, j'étais horrifiée par cette tenue. Quelque chose de gênant venait de me frapper en plein visage tandis que je voyais le badge imprimé de mon père sur son cœur, indiquant son code d'équipage, le quatre mille huit cent soixante-quinze, ainsi que son nom et son statut.

- Sis? insista ma mère.

- Mais c'est une horreur ce truc! hurlai-je presque.

- À ce point là ? fit mon père en se regardant.

- Mais... Mais... À un point pareil c'est même plus moulant! hurlai-je encore.

- Bah faut que ce soit pressurisé, c'est serré mais on ne la portera pas tout le temps, me fit mon père. Et puis même si il faut la porter, elle se glissera aisément sous des vêtements.

- Mais t'as oublié que j'étais grosse? demandai-je choquée.

- Chérie, marmonna ma mère.

- Je vais ressembler à un tas de viande boudiné! me justifiai-je.

- Chérie, je sais que c'est moulant, me fit mon père. Mais je t'assure que tout le monde en aura une. Mince ou gros, jeune ou vieux...

- Et c'est censé me rassurer ? grommelai-je en me levant pour aller voir la mienne.

Elle était comme celle de mon père, cela allait être horrible.

- Je comprends pas, marmonna mon père avant d'ajouter quelques mots. Ho... D'accord...

Je m'étais retournée et j'avais vu que ma mère lui avait chuchoté quelque chose à l'oreille. Visiblement elle avait parlé de Louis. J'aurais bien fait sa fête à ma sœur. D'ailleurs celle-ci sortit et j'avais eu le loisir de réaliser que sur une femme, on voyait absolu tout et c'était suggestif.

- Je suis trop sexy là-dedans, fit ma sœur. Les mecs vont être serrés dans les leurs.

- Rakel! s'offusqua ma mère.

- Ho merde, marmonnai-je.

- Une super héroïne !!! hurla mon petit frère.

- La classe ! fit Rakel sur un petit nuage.

- Sis, vas enfiler la tienne, me fit mon père comme m'annonçant que j'allais me balader nue.

- Mais...

- Allez tu seras une super héroïne ! lança Bjorn.

- Ho toi la ferme! dis-je en prenant rageusement ma tenue.

- Sis! s'énerva ma mère.

Je m'en étais moquée, elle pouvait bien me priver de sortie vu l'endroit où on allait. Je m'étais enfermée dans les sanitaires en colère et outrée avant de sortir ma tenue. Il y avait une notice en plus et après l'avoir lue, j'avais jeté cette dernière au sol. Ensuite, j'avais eu tout le loisir de me débattre avec, rageusement et surtout mal à l'aise. Il m'était alors arrivé un petit soucis qui me faisait presque littéralement craquer de rage. J'avais besoin d'aide pour me préparer.

- Rakel? appelai-je.

- Quoi? fit celle-ci quelques instants plus tard, sans doute le temps de venir près de la porte.

- Entre, j'ai un souci, grommelai-je consternée.

Ma sœur ouvrit la porte visiblement étonnée et elle referma rapidement derrière elle.

- Je te jure que t'as intérêt de te la fermer et de ne pas me vanner, marmonnai-je.

- Ok..., fit-elle méfiante. C'est quoi le soucis.

Vexée et complexée, je m'étais retournée pour montrer le soucis. En fait, j'avais réussi avec quelques difficultés à enfiler la partie basse mais la haute restait grande ouverte tout le long de mon torse. Mes seins, plutôt trop gros pour une fille de mon âge et de ma taille, ainsi que mon ventre m'empêchaient de la fermer, j'étais donc dans mon t-shirt qui me servait de sous-vêtements.

- Je..., hésitai-je. J'arrive pas à y glisser mes seins.

Ma sœur me regarda et observa mes seins. Elle allait sans doute me traiter de je ne sais quoi encore. Elle sourit alors avec mesquinerie.

- Rakel..., grommelai-je méfiante.

- C'est vrai que t'es vraiment gâtée niveau poitrine, me fit ma sœur.

- Tu parles c'est parce que je suis grosse, grommelai-je.

- Enfin bon... T'aurais pu lire la notice aussi, me fit ma sœur.

- Mais je l'ai lue figure toi! dis-je vexée.

- Et suivre les consignes ? demanda Rakel amusée.

- Mais t'es pas bien? demandai-je.

Peut-être vous demandez vous ce que pouvaient être ces fameuses consignes que j'avais refusées de suivre ? Et bien elles étaient des plus gênantes.

- Il faut être intégralement nue! dis-je vexée.

- Je sais... Honnêtement c'est quand même confortable, fit ma sœur.

- Mais... T'as vu mes seins ? T'as vu mes fesses ? Si je porte rien...

- On est tous dans la même situation... T'as une culotte ? demanda ma sœur.

- Évidemment... La gainante, avouai-je outrée.

- Enlève la tenue, et tes dessous, je te jure que cela s'ajuste facilement ensuite, me fit Rakel.

- Nœud de câblage ! hurlai-je presque en sachant que je risquais gros pour le pire juron qui existait en notre monde.

J'avais donc obéi et enlevé la tenue, puis mes dessous. Ma sœur était restée près de moi et je l'avais regardée quand je m'étais retrouvée nue.

- Tu as un petit duvet ma belle, fit-elle en souriant. Tu deviens une vraie femme.

- Tu sais où tu peux te l'enfoncer ton commentaire à la noix? demandai-je outrée en enfilant la tenue.

J'aurais bien crucifié l'ingénieur qui avait eu l'idée saugrenue d'inventer cette tenue quand je sentis la tenue s'ajuster parfaitement à mes parties intimes. En fait, effectivement c'était confortable, mais quand même... Il fallait reconnaître que ce fut pareil pour ma poitrine et la tenue put se refermer. Je pus même brancher la tenue dans mon implant, sentant toutes les informations pénétrer dans mon cerveau.

- On dirait vraiment un morceau de viande, grommelai-je en me regardant.

- Ce Louis va adorer tes seins, fit Rakel.

- Tu sais quoi ? Va voir ailleurs si je suis connectée, dis-je en la bousculant pour sortir.

Je m'étais réfugiée dans la pièce en cachant mes seins grâce à un croisement de bras, me jurant de ne pas les déplier pendant au moins un siècle. Ma mère me regarda alors que ma sœur sortait et elle sembla comprendre mon malaise.

- Je vais habiller Bjorn, fit ma mère en se dépêchant.

Dès l'instant où elle avait fermé la porte, j'avais regardé mon père avec méchanceté.

- Qu'est-ce qu'il y a? demanda-t-il intrigué.

- L'ingénieur qui a inventé cette tenue, il est à bord? demandai-je.

- Non, pourquoi ? demanda mon père.

- Il a de la chance, grommelai-je.

- C'est une tenue de vol, me fit mon père.

- C'était obligé d'être à poil? demandai-je vexée.

- Sans doute, marmonna mon père en réalisant le problème.

À part que j'avais l'air conne, il ne se passa plus rien d'important. Nous avions alors quitté notre box de confinement, sans que je ne décroise les bras, avant d'avancer vers l'ascenseur orbital. Nous n'étions pas seuls évidemment et je pouvais voir que visiblement, bien d'autres filles semblaient gênée. Je trouvais cela consternant car la plupart étaient minces et en plus elles osaient faire leurs mijorées. Qu'elles prennent mes kilos en trop et elles auraient pu parler. L'ascenseur orbital était comme sur tous les holodocs que j'avais vus, un grand cube capable de charger trente personnes comme les vieux élévateurs pré-spatiaux. Je m'étais réfugiée contre un mur pour me cacher et j'avais fermé les yeux pour les quarantes secondes de trajets. À cet instant là, je m'étais rendue compte que je venais de quitter la Terre pour toujours. Quand l'ascenseur orbital s'ouvrit, ce fut une véritable fourmilière qui s'ouvrit à moi. Des centaines de personnes se déplaçaient en meutes vers les zones d'habitation et il y avait une énorme file pour les vérifications. Nous devions donc patienter et je marmonnais dans mon coin que la situation était horrible. Pendant ce temps, j'admirais les bots de manutention gigantesque, de près de quatre étages, qui finissaient de charger le matériel à bord. Normalement, nos affaires personnelles avaient déjà été chargées dans nos logements et il s'agissait donc des denrées et du matériel de terraformation, les plus petites pièces sans doute comme des recycleurs individuels ou des purificateurs. Les plus jeunes enfants couraient un peu partout autour des bots d'intendance, ceux chargés des tâches comme le nettoyage et la cuisine. Ils ne gèreraient pas tout, la présence de programmateurs restant essentielle évidemment.

- C'est pas un peu trop, fit ma sœur.

- Hein? dis-je en relevant enfin la tête vers celle qui portait admirablement bien sa tenue.

- Regarde, fit-elle en me montrant une direction.

J'avais alors regardé dans la direction indiquée et effectivement, j'avais découvert quelque chose d'étonnant. Il y avait un énorme déplacement de matériels en cours et cet équipement était affublé du sigle UGCMC, l'Union Global of Country Military Corps, le corps d'armée de la paix sur Terre. Autant de matériels était un peu inquiétant.

- C'est peut-être pour la terraformation, dis-je alors.

- J'espère que c'est pas des armes, fit-elle ensuite.

- Autant? Sans doute pas, précisai-je sans en être sûre.

- Ouais ben je suis en train de laguer, fit-elle alors qu'elle s'ennuyait. Je vais voir les mecs en uniforme. On se retrouve après l'enregistrement.

Ma sœur s'éloigna donc de nous pour aller discuter avec des garçons, les mêmes semblant littéralement baver devant sa silhouette, les mecs... Moi, j'avais préféré rester près de mes parents malgré la proposition de ma mère de faire comme ma sœur et d'aller me balader. J'avais refusé, préférant observer la fourmilière de haute technologie autour de moi. J'avais bien envie de faire quelque chose en fait et ce serait d'aller admire l'immense baie de protection qui montrait la Terre depuis notre position, l'orbite terrestre. Mais faire cela m'obligerait à déplacer mon corps trop gros engoncé dans cette tenue bien trop moulante. Et puis, alors que bien des gens le faisaient, je vis une silhouette que j'avais déjà vue et je m'étais figée. Louis de Tourvel était seul, dans un coin, appuyé sur le pilier par un bras sur lequel il reposait son front, et il admirait la Terre.

- Sis? Hé ho Sis? m'appela ma mère.

- Hein quoi? dis-je sortie de ma surprise.

- Si tu veux aller voir la Terre vas-y, me fit ma mère.

- Non, dis-je alors.

- Bah pourquoi ? demanda ma mère en regardant vers l'immense baie vitrée. Ho... C'est pas ce garçon ?

- Si justement, marmonnai-je.

- Ben va lui parler, tu le connais un peu, fit ma mère. En plus il a l'air tout triste dans son coin.

- Mais...

- On a encore du temps, profite pour garder cette image en souvenir, me fit ma mère en souriant.

J'avais dévisagé ma mère et soupiré de lassitude. D'un pas franchement pas motivé, je m'étais donc décidée à avancer vers la baie vitrée en me cachant bien. En réalité, j'étais en train de m'approcher doucement de Louis et je pouvais voir son dos qui semblait si large. Il était en plus clairement musclé comme le montrait ses bras moulés par sa tenue. Je m'en voulais surtout de l'avoir observé attentivement alors que moi-même j'étais gênée. Je m'étais alors placée juste à côté de lui sans dire un mot et j'observais la magnifique planète qui de là où nous étions ne semblait pas en train de mourir.

- Une vue imprenable n'est-ce-pas ? fit alors Louis près de moi.

J'avais légèrement sursauté, ignorant qu'il m'avait entendue approcher, et j'avais alors tourné la tête vers lui. Ses yeux gris étaient posés sur moi avec douceur et je lui avais donc souri.

- Pas trop dur ton confinement ? lui demandai-je.

- Dix jours coincés avec Agathe, un enfer, dit-il en souriant.

- Vous ne vous entendez pas? demandai-je surprise.

- Si justement... Elle ne m'a pas lâché du confinement, fit-il. Fais moi un câlin, fais moi un massage... Je m'ennuie...

J'avais regardé ce dernier comme surprise par le mot "massage". Je me demandais surtout si ce n'était pas gênant vu qu'ils n'avaient pas de sang en commun mais après tout, il y avait leurs parents respectifs dans la pièce.

- Mon pauvre, dis-je alors en souriant. Je connais cela avec ma sœur.

Il me sourit alors et il reporta son attention sur la vue.

- Je profitais de l'instant pour observer cette planète mourante, fit alors Louis. Nous l'avons tellement saccagée, et nous partons recommencer ailleurs.

- Tu penses qu'on fera pareil ? demandai-je.

- Tu sais, au fil des siècles nous n'avons fait que ça, me fit Louis. À chaque nouvelle contrée découverte nous avons exploité plus que de raison les ressources sans compter le massacre des autochtones.

- Triste vision de l'humanité, dis-je en serrant bien mes bras.

- Tu as froid? demanda rapidement Louis.

- Quoi? demandai-je surprise.

- Tu te tiens comme si tu étais frigorifiée, fit-il en se tournant vers moi.

J'avais alors eu le doux plaisir extrêmement coupable de découvrir son torse parfaitement moulé par sa combinaison de vol. J'ignorais même qu'il était possible d'avoir autant de muscles abdominaux. J'avais même dû lutter pour le regarder dans les yeux.

- Je n'ai pas froid, dis-je alors en me tournant vers la vue.

Je pouvais sentir son regard sur moi et j'avais alors l'impression de rougir nerveusement. Je ne pouvais plus le regarder et j'essayais de me cacher encore plus.

- Ta combinaison te va bien, fit alors Louis.

J'avais tourné si brusquement la tête que j'aurais pu me briser la nuque. Je l'avais même regardé avec les yeux complètement ronds.

- T'es pas obligé de me mentir pour être gentil, dis-je alors.

- Je ne mens que par omission, dit-il alors avec un sourire.

Je l'avais ensuite regardé assez dubitativement. À quel point pouvais-je le croire? Je n'en savais rien mais après tout, qu'avait-il à gagner à faire ça ? Après tout, même si je n'y pensais pas, je n'allais pas être le genre de fille avec qui on avait des relations sexuelles pour aller se vanter ensuite. Par contre, j'avais remarqué un détail intriguant sur sa tenue, elle n'était pas parfaitement placée. Le cable de connexion pendouillait un peu.

- Tu ne l'as pas branchée, dis-je alors sans même y penser. Attends...

J'avais enfin lâché mes seins pour tendre les bras et saisir son câble de connexion. Et puis soudain, alors que lui m'avait laissé faire, je me rendis compte que je ne pouvais pas brancher la tenue dans son implant.

- Tu... Tu n'as pas d'implant ? demandai-je complètement surprise.

Bien évidemment que j'étais surprise, qui ne le serait pas à ma place. De mon temps, ne pas avoir d'implants c'était rare, extrêmement rare.

- Et non, me fit Louis.

- Tu as des allergies à l'implanter ? demandai-je sachant que vu son éducation, c'était évident que ce n'était pas un manque d'argent.

- Cela joue-t-il contre moi? demanda alors Louis.

- Pardon? demandai-je étonnée.

J'avais regardé son visage avec attention et il me regardait avec douceur et gentillesse.

- Tu as parfaitement compris ce que j'ai dit, me fit alors Louis.

- Non... Je n'ai pas de soucis avec ça, dis-je alors.

Soudain, je m'étais rendue compte que je devais offrir une vue imprenable sur ma poitrine moulée dans cette fichue combinaison. Immédiatement, j'avais replacé mes bras pour me cacher.

- Pourquoi tu es gênée ? demanda Louis.

- Tu le vois non? Je suis énorme... Et boudinée là dedans.

- " Tant de siècles et toujours des critères stupides", marmonna Louis visiblement en français.

- Pardon? demandai-je.

- Non rien... Et crois moi tu te trompes, fit-il en se posant devant moi tout en me fixant.

- Pff... C'est tellement peu crédible, grommelai-je presque vexée.

- Je trouve que tu la remplis parfaitement bien, me fit alors Louis.

J'avais pour but de rétorquer quelque chose de bien senti mais quand j'avais croisé son regard, j'étais restée la bouche ouverte de surprise. Ensuite, comprenant qu'il devait être sincère, j'avais juste souri.

- Tu.. Tu le penses sincèrement ? demandai-je.

- Devine, dit-il alors.

J'avais encore souri, contente de ne pas être trop horrible à regarder. Alors, j'avais baissé mes bras pour regarder dehors. Admirer cette vue avec lui était différent, un côté irréel mais surtout une petite touche romantique.

- On la reverra peut-être plus, dis-je quand même.

- Mémorise bien l'image, me dit Louis.

J'avais ensuite senti en moi un petit côté nostalgique en observant ma planète. Je fus même prise d'un certain élan de tristesse à cet instant. Et puis soudain, j'avais senti une main se poser sur mon épaule, celle de Louis qui voulait me rassurer.

- Tu es dans quel cylindre? lui demandai-je en parlant des cylindres d'habitation.

- Le cylindre B, me fit Louis.

- Ha on sera pile en face, on est dans le D, dis-je. Dommage on ne sera pas voisins.

- Très dommage en effet, fit Louis sur un ton plus éloquent que le mien. On se verra dans le centre éducatif, ou en dehors si tu le veux.

J'avais eu les yeux qui papillonnèrent à cet instant là. J'étais bien en train de me demander quel sens donner à ce propos et bizarrement j'espérais ne pas me tromper quand je m'étais retournée vers lui comme pour demander un petit complément d'information.

- Tu... Tu es en train de m'inviter à.. À un rendez-vous ? demandai-je alors totalement surprise et plutôt perdue.

- Je te propose ce que tu veux, à toi de transformer cette proposition en ce qui te plaira, me répondit alors Louis avec un sourire plutôt charmeur.

- Ho... Je... Hmm..., marmonnai-je en le regardant.

Ce dernier semblait à la fois désirer une réponse mais également l'inverse. C'était comme si il désirait laisser cette possibilité en suspens.

- "Cela me ferait plaisir", dis-je alors en essayant de répéter une phrase que j'avais lue.

- Tu t'es mise au français ? demanda-t-il avec un sourire encore plus charmeur.

Quelle andouille je pouvais être. J'avais en effet profité du confinement pour tenter d'apprendre quelques phrases toutes prêtes, autant dans ce genre d'éventualités mais également pour lui faire un peu plaisir.

- Quelques mots tout au plus, dis-je en essayant d'être normale.

- C'est très gentil de ta part, fit-il avant de se pencher à mon oreille pour murmurer ou même susurrer la suite. Je pourrais t'en apprendre d'autres.

Il s'était ensuite reculé et je l'avais regardé fixement. Je ne mentirai pas en avouant qu'à cet instant là, la pauvre jeune fille que j'étais, complexée et triste, était en train de tomber sous le charme de ce garçon. Peut-être était-ce la vue romantique ou même la proximité qui nous unissait à cet instant ou encore cette façon qu'il avait de me parler mais j'avais une envie folle de lui dire que je voulais un rendez-vous galant. Naturellement, je m'en étais empêchée peu désireuse que j'étais de passer pour la désespérée du vaisseau.

- Et bien nous nous verrons durant la mission, dis-je. Et j'aurais clairement une tenue plus convenable.

Je vis un léger sourire au coin de ses lèvres et il retira enfin sa main de mon épaule.

- Bon je vais y aller avant d'entendre cette chère Agathe me hurler dessus, fit-il avec un petit rire.

- Pas facile les sœurs, avouai-je en riant.

- Mais je t'assure que cette tenue n'est pas déplaisante, fit-il en s'éloignant avant de se retourner. Surtout quand on sait ce qu'il faut faire pour l'enfiler.

Et il était parti me laissant le rouge aux joues et avec de sacrées bouffées de chaleur. Ce garçon, plutôt sexy et intriguant, venait clairement d'insinuer que ma nudité sous cette tenue lui plaisait. J'avais alors dégluti en me rendant compte que lui aussi devait être nu dessous et là, l'esprit d'une adolescente vagabonda un léger et court instant. Je m'étais ressaisie assez vite avant de retourner près de la file en cherchant ma mère. Cela allait bientôt être à nous de passer et ma sœur avait d'ailleurs fait comme moi. Je m'étais donc glissée près d'eux discrètement mais clairement insuffisamment. En effet, ma sœur m'avait repérée et elle était en train de me regarder avec un sourire narquois.

- C'est quoi ce sourire jusqu'aux oreilles ? me chuchota ma sœur.

- Je souris pas, me défendis je immédiatement alors que visiblement elle disait vrai.

- Maman m'a dit que t'étais partie voir la planète... Et je l'ai vu revenir de la même direction, dit-elle décidément bien trop observatrice.

- Il m'a proposé que nous nous voyions durant la mission, dis-je alors légèrement en joie.

- Ho... Coquine va, me fit ma sœur.

- Je crois que je lui plais..., dis-je gênée. En tout cas ma tenue avait l'air de l'intriguer.

- Ta tenue ou ce qui s'y trouve ? insista ma sœur.

- Les deux, dis-je en rougissant immédiatement.

- Il aime les gros nichons, fit-elle pensive et me consternant.

J'avais immédiatement tourné mes yeux vers elle, mauvaise et en colère.

- T'as glissé un ou deux mots de français ? fit-elle en achevant de mettre la honte.

J'avais souri quand même en hochant positivement la tête. Pour la première fois de ma vie, un garçon m'avait non seulement complimentée mais également invitée à se retrouver. J'espérais malgré tout que son attirance pour moi n'était pas liée qu'à mes attributs mammaires. J'espérais que ma personnalité aussi l'intéressait, et que ce n'était pas non plus qu'un délire d'amusement avec une fille peu sûre d'elle.

- Mademoiselle, votre puce identifiante, fit soudainement une voix.

Je venais d'être sortie de pensées en tout genre, pas forcément toujours avouables mais bon. J'avais donc tendu ma main pour que mon identité soit vérifiée, détail légèrement abusif sachant que mes parents devaient quand même savoir à quoi ressemblait leur fille. Ma sœur me regarda alors en souriant de toutes ses dents, attirant l'attention de notre père.

- Mais vous avez quoi toutes les deux? demanda-t-il complètement ignorant de tout.

- Mais rien Papa, marmonna Rakel.

- Ça signifie que les disputes sont finies? demanda-t-il espérant un petit peu trop de nous.

- Mais non! fit ma sœur. Juste que j'ai des projets.

J'avais regardé ma sœur avec une sacrée méfiance mais notre attention fut attirée par le personnel de Hope Station.

- Les membres d'équipage désignés pour résider dans le cylindre D, par ici! fut un membre d'équipage dans la même tenue que nous.

- Allons-y les enfants, fit ma mère. Suivons le et restons groupés.

En même temps, nous étions bien obligés sachant pertinemment que notre sécurité pour le décollage serait dans notre logement. Ainsi l'immense meute de passager de Hope Station habitant dans le même cylindre que nous se dirigea vers le lieu indiqué. D'immenses projections holographiques en forme de flèches nous indiquaient clairement la direction à suivre et à moins d'être aveugle difficile de se perdre. Au vu des immenses couloirs tout aussi cylindriques mais larges, j'espérais qu'au moins cela resterait indiqué longtemps. Tous ensemble, nous avions marché une quinzaine de minutes, nous passant Bjorn de bras en bras par inquiétude que quelqu'un ne le blesse. Lui cela l'amusait bien et quand il fut dans mes bras, je l'avais gardé jusqu'au bout.

- Hooooooo, fit-il surpris par une lumière qui grimpa dans un immense cylindre.

- C'est l'élévateur Bjorn, on va être dedans, lui précisai-je alors.

- Youpieeeee!!!!! hurla Bjorn attirant l'attention de nos futurs voisins.

- Bjorn ne crie pas, le réprimanda ma sœur.

- Tu veux revenir dans mes bras? demanda ma mère en proie à l'inquiétude.

- C'est au tour de Sis, rétorqua Bjorn comme si c'était un jeu.

J'avais alors rigolé et continué à suivre mes parents, patiemment et longuement, attendant notre tour. Chaque famille entrait l'une après l'autre pour éviter les soucis d'embouteillage.

- Famille Ragnuson, fit enfin mon père à un bot qui se trouvait dans un immense hall.

- Bienvenue à bord de Hope Station et merci du sacrifice, lui signifia le bot en ouvrant l'élévateur.

- De pauvres jeunes filles sacrifiées, marmonna ma sœur en riant.

- T'es franchement lourde, grommelai-je.

- Ton sacrifice a plus de valeur, dans les peuples anciens c'était mieux de tuer une vierge, fit-elle en riant.

Un très long mais alors très très long soupir s'échappa de mes lèvres. Une vie entière à la supporter s'offrait désormais à moi et cela m'énervait déjà. Nous nous glissâmes tous ensemble dans l'élévateur qui mit quelques dizaines de secondes à rejoindre notre étage.

- Dix-septième, fit la voix annonçant que nous étions parmis les étages les plus hauts.

Il y avait en réalité vingt étages sur l'immense station et une douzaine de sous-sols pour les machineries. Cela faisait quand même une sacrée construction. Cela ferait donc assez haut. Nous arrivâmes dans un couloir donnant sur trois portes dont l'une était la nôtre. Mon père l'ouvrit avec sa puce et il nous laissa entrer.

- Bienvenue chez nous, fit mon père.

- Bienvenue dans le dernier logement de votre vie, fit ma sœur consternant tout le monde.

J'avais soupiré de consternation, les militaires avaient de la chance eux, ils étaient dispatchés dans des logements situés un peu partout dans la station pour pallier à bien des éventualités. J'avais ensuite passé la porte et je fus saisie par un détail surprenant.

- Euh..., fit ma sœur.

- Ça vous plait? demanda ma mère.

- C'est normal que ce soit notre appartement ? demandai-je alors complètement effarée.

- C'est le cas de la plupart des logements, ils ont reconstitué le nôtre grâce à des captures holographiques que nous leur avons fournies, expliqua mon père. C'est rendre cette mission plus facile.

Effectivement, je pouvais clairement retrouver notre canapé, notre cuisine, nos coussins bien qu'ils soient tous totalement neufs évidemment.

- Et nos chambres ? demanda immédiatement ma sœur.

- Idem, mais vos box de transports ont juste été placés, précisa Maman. Vous devrez ranger vous-même.

J'avais reposé avec délicatesse mon petit frère et échangé un regard entendu avec ma sœur. Comme des fusées, nous filâmes dans nos chambres.

- Prems!!! hurla ma sœur en riant.

- Me pousse pas, marmonnai-je en rigolant également.

La seule différence avec notre logement sur Terre, c'était peut-être que notre numéro de membre d'équipage figurait sur nos sas d'entrées de nos espaces nocturnes. J'avais passé le mien toute impatiente et effectivement je fus réjouie. Ma chambre était comme avant, à part mon gros box de transports présents tout au milieu de la pièce. Il contenait non seulement mes vêtements mais également toutes mes autres affaires personnelles. Il y avait cependant une différence entre cette chambre et celle que j'avais sur Terre. Il y avait en effet une véritable fenêtre, loin de ces simulacres qu'on avait avant. Je m'étais approchée de celle-ci, découvrant la vue qu'elle offrait sur tous les autres cylindres. J'avais ouvert la fenêtre et fait deux pas sur un petit balcon, pas gigantesque mais je pourrais y installer un fauteuil pour lire ou regarder des holoséries.

- On a un extérieur, fit ma sœur en replaçant ses cheveux déplacés par le vent factice.

J'avais tourné ma tête sur la droite pour l'admirer et je découvris qu'il y avait une plaque occultante. Je pourrais donc avoir mon intimité. Je m'étais ensuite penchée par dessus la rembarde et c'était vachement haut.

- T'as vu? dis-je à ma sœur. Y a un grand espace arboré en bas.

- Sérieux ? demanda ma sœur en se penchant. Ça va être confortable en fait.

- En plus regarde, il y a filtre de particules opacifiantes, dis-je en montrant la console d'utilisation. On peut être cachées en plus.

- Cool séance à poil sur le balcon, fit ma sœur en riant.

- Bah évite, merci, dis-je en riant de plus belle.

- On verra... Bon le temps d'amener les habitants, moi je commence à installer mes affaires, fit ma sœur en disparaissant du balcon.

Moi, j'allais au départ faire de même mais je m'étais rapidement ravisée. J'avais alors observé les tours cylindriques en fixant celle qui était la tour d'habitation B. Naturellement, je ne pouvais pas voir ou même savoir où se trouvait Louis mais j'étais restée pensive. Je m'étais demandé si il faisait de même et observé ma tour. J'étais franchement ridicule, je le reconnais, mais il me plaisait déjà je crois. Ou peut-être était-ce parce qu'il était le premier à me dire que j'étais belle, hormis ma famille forcément. Cela me faisait quelque chose, du bien tout simplement. J'avais donc fini par quitter le balcon, évitant d'être considérée comme une folle, avant de commencer à déballer mes affaires. J'avais commencé à ranger mes vêtements, tranquillement, voir très lentement pour ne pas me retrouver dans un fatras pas possible. Puis, ce que j'avais guetté tout ce temps là arriva.

- Ici le Général Smith, fit une voix qui résonna non seulement dans le logement mais également à l'extérieur. Nous nous apprêtons à partir. Rejoignez les zones destinées à la sécurisation du décollage. Pour les colons, cela signifie vos salons. Merci, nous partons dans peu de temps.

J'avais alors entendu le box de transport de mes affaires personnelles s'arrimer au sol et je suis allée le verrouiller. Me pressant plutôt deux fois qu'une, je m'étais ensuite dirigée vers le sas et j'avais traversé le couloir.

- Rakel! hurla mon père depuis le salon quand il me vit arriver.

- J'arrive, fit une voix derrière moi.

Ma sœur avait suivi et elle regarda comme moi ce qu'il se passait dans le salon. L'immense canapé s'était divisé en cinq sièges indépendants qui se plaçaient en cercle. C'était donc ça nos sièges de vols.

- C'est trop chouette !!!! fit Bjorn tout heureux.

- C'est sécurisé ? demanda ma mère.

- Évidemment, la rassura immédiatement Papa. Allez les filles, il n'y a pas de siège attitré.

- Ok, dis-je alors en m'installant dans un siège.

J'avais regardé Maman avec beaucoup d'inquiétude. Visiblement elle était partagée et même ma sœur devait stresser, elle ne faisait plus l'idiote.

- Bon vous êtes tous bien au fond ? demanda mon père.

Nous n'avions jamais été aussi coordonés qu'à l'instant T où nous avions confirmé d'un signe de tête.

- Odysseus, fit alors mon père. Activation du protocole de décollage.

Odysseus, c'était le nom de l'ordinateur central, celui qui contrôlait Hope Station en symbiose avec le personnel militaire. Un ordinateur central de dernière génération, dirigeant les bots et la sécurité, les machines et les équipements de survie, celui qui devait vérifier que nous arrivions en vie vers notre cible. Appeler l'ordinateur central comme cela était clairement un clin d'œil à l'Odyssée d'Homère.

- Vous êtes au courant qu'Ulysse a fait un très long voyage ? demanda ma sœur consternée.

- C'est pas le moment de faire des commentaires, marmonna mon père.

J'avais alors vu la lumière du logement passer à un bleu qui plongea notre logement dans la pénombre. J'avais ensuite immédiatement senti quelque chose sur mes jambes et j'avais regardé celles-ci paniquées.

- Hey...

- Ne t'inquiètes pas Sis, me fit mon père. C'est un fluide de maintien, comme dans les véhicules en cas d'accident.

- C'est quoi ce truc qui s'accroche dans mon dos? demanda ma sœur paniquée.

- C'est ton équipement de survie, répondit mon père consterné. Mais vous faisiez quoi durant la formation au décollage ?

- Ben je me maquillais, fit ma sœur narquoise.

- Je crois qu'on nous a pas parlé de cela, avoua ma mère. On a parlé de protocole pas de comment il allait se placer.

- Mouais... J'avoue, marmonna mon père.

J'étais en train de sentir ce même liquide s'emparer de mes jambes et de mes bras, puis de mes hanches. Je pouvais également sentie ma tenue de vol se mettre en fonction pour transmettre mes signes vitaux à Odysseus et réguler la température en direct. Plus cela montait sur mon corps plus j'étais angoissée. À la fin, il ne restait que mon visage hors du fluide et la sécurité nous bloqua dans le siège. Si vous voulez la vérité, une seule personne s'amusait alors que les autres semblaient effrayés : Bjorn forcément. Pour lui, cela devait être un jeu. Nous avions ensuite entendu tout le matériel présent dans le logement se bloquer et verrouiller sa position et en même temps, les fenêtres laissaient apparaître la sécurité.

- Maman... J'ai peur, dis-je alors en proie au stress.

- Je sais... Ce sera court, fit-elle pour me rassurer.

- Bon sang heureusement qu'on peut se laisser aller dans cette tenue, fit ma sœur visiblement aussi paniquée que moi.

- Calmez vous, nous partons de l'orbite, nous ne devons pas nous arracher du sol. Ce sera vite fini, assura notre père.

Je m'étais mise à respirer nerveusement et immédiatement, ma tenue compensa l'afflux d'oxygène me permettant de reprendre une respiration contrôlée. Au moins le matériel était efficace.

- Chers colons, fit alors la voix du Général Smith. Nous décollons dans cinq secondes.

- Ho bordel..., grommelai-je.

- J'espère avoir un sacré bon cocktail après, lança ma sœur.

- N'ayez pas peur, fit ma mère.

- On va être des super-héros !!!! hurla mon petit frère.

- LA FERME !!! hurlai-je en même temps que ma sœur.

- Ça va être long..., grommela mon père.

- Décollage ! fit la voix du général Smith.

Et là, je l'avais sentie la vibration des moteurs stellaires de dernières générations. Bêtement, je m'étais rappelée un détail technique franchement flippant : si les moteurs explosaient dans l'atmosphère, ils pourraient presque raser un bon morceau de continent. Flippant... J'avais donc fermé les yeux quand la pression se fit ressentir.

- Compensation en cours, fit la voix du général Smith. Passage en gravité zéro.

Éteindre les comparateurs gravifiques allait diminuer les tremblements mais la pression restait énorme. Je sentais la tenue compenser cela, évitant à mes os de se briser et à mes organes d'exploser et d'un coup, le même ingénieur que j'avais précédemment condamné... Et bien, je le remerciai de son invention. Cela dura douze secondes, douze très longues secondes quand enfin la lumière redevint normale et le fluide s'estompa en même temps que la gravité artificielle revenait.

- Mesdames et messieurs, fit la voix du général. Décollage réussi, aucun dégât recensé. Nous avons déjà dépassé la Lune... Notre grand voyage commence et comme le dit une phrase célèbre : heureux qui comme Ulysse a fait un long voyage.

- Non mais il est sérieux cet abruti avec ses phrases débiles ? J'ai cru y rester, hurla ma sœur.

Un long voyage, c'était sûr... Celui qui avait écrit cette phrase ne connaissait pas ma sœur... Et moi, j'ignorais ce qui m'attendait.


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