Hope Station

Chapitre 5 : Entrée 05

7513 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 01/12/2022 09:25

Entrée 05


Journal de Sissela Ragnuson, numéro d'équipage 4878

Date d'enregistrement : Inconnue

Lieu d'enregistrement : Hope Station, localisation inconnue


Bien que j'avais eu l'occasion de passer une journée de rentrée des plus intéressantes et surtout des plus riches en enseignements, j'avouerai que l'ennui me guettait énormément sur cette station. Durant notre formation, on nous avait déjà prévenus que ce serait une éventualité énorme mais je ne pensais pas que ce serait aussi rapide. En fait, selon les professionnels, l'ennui aurait du se faire sentir bien plus tardivement mais je devais être à part. Je me rappellerai toujours ce que l'on nous avait dit par rapport à l'ennui: il était censé arriver après que nous soyons hors de portée des signaux terrestres car à cet instant là, nous n'aurons plus rien de nouveau. Toujours en théorie, c'était pour cela que des artistes avaient également été conviés à se joindre à la mission si ils réussisaient les tes évidemment. Ils devraient être capables de créer des représentations théâtrales ou même des films sans trop de budget car nécessitant principalement des holoprojecteurs pour tout recréer. Tout était prévu mais cela n'empêchait rien, je m'ennuyais plutôt énormément. J'essayais de tuer le temps avec mon petit frère qui ne réclamait que cela dans son cas. Nous avions des jeux évidemment mais également des hologrammes d'activités pour enfants en bas âge. Heureusement, je pouvais littéralement passer des heures à m'occuper de lui mais j'avais eu une autre idée. J'avais une accréditation pour participer aux activités de l'antenne médicale et ce jour là, près d'un mois après le décollage, j'avais décidé de saisir cette occasion. Je m'étais donc rendue au centre médical situé pile au centre de Hope Station. La position de l'antenne médicale avait été très soigneusement pensée même si elle répondait à des critères militaires à l'origine. En plaçant les antennes médicales au plus profond des navettes spatiales, les militaires s'assuraient que les blessés ne risquaient pas de voir leurs blessures empirées par une attaque ennemie. Bon normalement, les attaques ennemies et bien on en risquait pas beaucoup après tout mais c'était une norme quasiment obligatoire. M'y rendre avait été assez simple même si il n'existait pas grand chose d'accessibles aux civils autour de cette même antenne médicale. Il y avait bien quelques faux espaces verts autour, pour que les malades puissent se dégourdir les jambes mais il n'y avait besoin de rien d'autre. En effet, les zones commerciales du vaisseau et les logements n'étant pas non plus si loin, cela restait une navette spatiale certes gigantesque mais une station spatiale quand même, ils pouvaient rentrer chez eux ensuite. J'étais passée outre les contrôles à l'accueil, mon accès me permettant déjà d'entrer et je m'étais directement dirigée vers la section qui, sur Terre, devait servir de zone d'urgence.

- Mademoiselle ? m'interpella alors une infirmière qui me sortit de ma contemplation du service.

- Oui? répondis-je doucement.

- Je peux peut-être vous renseigner ? Vous cherchez quelqu'un ? demanda-t-elle rapidement désireuse d'être utile.

- Non, pas du tout, dis-je sans réfléchir plus que cela.

L'infirmier m'avait regardée avec beaucoup de suspicion après ma réponse, c'était évident.

- Et que faites vous ici? demanda-t-elle soudainement méfiante.

- Ho désolée... Je suis Sissela Ragnuson, la fille du Docteur Ragnuson, précisai-je rapidement. J'ai une accréditation pour l'assistance médicale.

- Ho Sis c'est cela? demanda l'infirmière. Je connais beaucoup plus ta maman, dit-elle rapidement sur un ton beaucoup plus sympathique.

- Je me doute, la rassurai-je.

- Ton père est au fond du couloir, s'empressa de préciser l'infirmière. Et merci de ton aide.

- Mais de rien, dis-je en souriant.

J'avais ensuite traversé ce fameux couloir, lentement et tranquillement, regardant à quel point la zone semblait à la pointe de la technologie médicale. Même si ce n'était que le service dédié aux urgences, chaque espace d'auscultation permettait un contrôle extérieur, pour surveiller ceux placés sous contrôle sans pour autant rentrer dans la chambre. C'était pratique à mes yeux car entrer pouvait avoir tendance à réveiller les gens. J'avais poursuivi mon chemin en regardant les gens passer et repasser dans le couloir, sans faire trop de bruit pour ne pas les déranger. J'étais aisément arrivée à destination et le sas menant au bureau de mon père était grand ouvert. J'avais simplement frappé sur le mur pour attirer son attention.

- Besoin d'une consultation ? demanda mon père à son bureau.

Il était en train de me tourner le dos et de rédiger des rapports sur les consultations qu'il avait dûs déjà pratiquer dans la journée.

- J'espère que non, dis-je en souriant.

Mon père s'était retourné immédiatement et m'avait souri en me découvrant. Il se recula de son bureau et me fit signe de m'installer sur la chaise.

- Ça va ma puce ? demanda mon père.

- Oui, je m'ennuyais dans notre logement, dis-je sans hésitation.

- Ta mère est partie se reposer après son service c'est ça ? demanda mon père très compréhensif.

- Oui, elle allait dormir avec Bjorn quand je suis sortie, lui précisai-je. Elle semblait très fatiguée.

- Je la comprends, fit mon père en se frottant les yeux. Nous avons beaucoup de cas d'hyperconnexion.

J'avais regardé mon père légèrement étonnée, ce genre de cas étaient plus rare d'habitude. Et puis, bêtement, je m'étais rendue compte que je ne devais pas être la seule à m'ennuyer comme jamais sur cette station. L'hyperconnexion portait très bien son nom en réalité car c'était bien cela, des gens restés connectés trop longtemps. En général, on pouvait tenir trois ou quatre heures grand maximum sur les branchements des implants, après il valait mieux faire des pauses. La plupart des symptômes étaient assez faciles à repérer, des tremblements aux extrémités, une grosse fatigue qui se matérialisait principalement par des yeux grandement irrités mais surtout des migraines de compétition. Il n'existait pas réellement d'implants permettant de tenir des heures et des heures même si, sur Terre en tout cas, il existait des rumeurs d'implants spéciaux provenant du marché noir. Je n'avais jamais su si ces rumeurs étaient vraies, le marché noir disposant de tellement de modifications corporelles totalement illégales que cela n'était pas impossible. Nous avions cependant tous passé des contrôles médicaux extrêmement poussés et les implants n'avaient pas dérogé à la règle et donc, si la présence d'un implant douteux avait été détectée, leurs porteurs avaient déjà été recalés depuis longtemps. Soigner une hyperconnexion ne demandait aucunement de grandes connaissances médicales, il suffisait d'un peu de repos, de deux ou trois doses de médicaments et d'un branchement apaisant dans l'implant qui poussait le corps à se remettre en forme.

- Je dois pas être la seule à trouver le temps long, avouai-je rapidement.

- Effectivement, me fit mon père en riant.

- Toi je parie que tu n'as pas le temps de t'ennuyer en fait, certifiai-je à mon père.

- Et bien détrompe toi, fit-il rapidement pour me répondre.

- Ha bon? lui demandai-je rapidement.

- Et oui, les antennes médicales ne sont pas trop débordées, assura mon père. Tant mieux tu me diras.

- Oui évidemment, confirmai-je rapidement. Pas d'accident du travail ?

- Et bien à peine deux depuis le décollage, bien évidemment je ne pense pas qu'ils viendront au moindre petit bobo non plus, fit mon père.

- Je peux savoir ? demandai-je.

Mon père m'avait regardée comme intrigué, il savait que je voulais poursuivre la carrière familiale, comme ma sœur en réalité même si cette dernière avait plus de prédisposition pour la chirurgie que la traumatologie d'urgence qui avait ma préférence. Je savais déjà qu'il allait me le dire mais pas me montrer le dossier, je n'y avais pas accès.

- Une découpeuse au plasma, pour le premier cas, fit-il rapidement.

- Ho... C'était grave? demandai-je rapidement et assez angoissée.

Une découpeuse au plasma permettait de découper des plaques de blindage assez épaisses alors sur un être humain, c'était plutôt impressionnant.

- Il avait déjà une prothèse robotisée, son bras droit, pour un expert en technologie tu me diras que c'est souvent le cas, fit mon père tandis que je confirmai d'un hochement de tête.

- Donc il s'en est pas rendu compte avant de la trancher? Logique, dis-je sans attendre de réponse. Autre chose ?

- Quelques accidents basiques, écrasement osseux pour ceux transportant des charges, un peu de coupures pour les responsables de la restauration... Rien de grave en somme, précisa mon père. Et quelques cas d'anémie, marmonna mon père.

J'avais regardé mon père avec beaucoup de surprise en entendant cela. Je me demandais comment cela était possible, après tout nous avions été très lourdes suivis médicalement parlant.

- Ce serait la période d'isolement ? demandai-je intriguée.

- Non, en théorie, fit mon père. Ils sont juste épuisés mais c'est assez léger. Je me demande si ce n'est pas une réaction indépendante des corps dans l'espace... À cause de l'isolation totale. On a peut-être fait des bonds incroyables en médecine durant ces derniers siècles mais le cerveau humain reste plein de mystère.

- Rakel est où ? demandai-je rapidement et plutôt méfiante.

- Elle fait les aller-retour en orthopédie, fit mon père. Elle n'aime pas trop cette discipline.

- Je sais, dis-je amusée que ma sœur se fasse chier. Elle préfère la chirurgie cardiaque.

- Mais elle doit voir absolument toutes les disciplines, je me rappelle avoir détesté les stages dans les services de santé mentale..., fit mon père pensif et prit d'un petit frisson.

- Par rapport à la cyberpsychose? demandai-je intéressée.

La cyberpsychose, le pire fléau de mon époque d'un point de vue psychiatrique. Certaines personnes devenaient littéralement dépendantes des modifications cybernétiques mais malheureusement le cerveau, et ses mystères, ne supportait pas des augmentations trop complexes. Si vos prothèses cybernétiques que se faisaient greffer les gens, volontairement j'entends comme pour améliorer leurs performances au travail, chose choquante à mes yeux et pourtant j'y étais habituée, n'étaient pas à design traditionnel, cela pouvait devenir dangereux. En effet, aussi avancées que soit les technologies, le cerveau humain avait du mal à gérer des concepts non naturels, des mains à six doigts ou plus, des jambes capables de se plier dans des angles complexes et autres choses bizarres, ce n'était pas normal pour le cerveau. Trop d'augmentations diverses et variées finissaient par faire oublier au porteur qu'il était avant tout humain et le rendait à la fois dangereux et surtout imprévisible. À part les placer sous camisoles technologiques ou médicamenteuses, il n'y avait pas de traitements très efficaces, même si les consultations psychiatriques pouvaient finir par donner de bons résultats.

- Je pourrais pas non plus, avouai-je.

- Malheureusement, on fonctionne comme sur Terre, et puis ce sera encore plus obligatoire d'être polyvalente ma chérie, précisa mon père.

- Je sais Papa, je sais, dis-je donc.

- Et tu veux que je te trouve une petite occupation ? demanda mon père.

- Ouais... Histoire d'une heure ou deux, marmonnai-je.

- Tu veux vérifier la réserve médicamenteuse? demanda mon père.

- J'ai pas l'accréditation Papa, lui rappelai-je.

- Tu peux le faire de mon bureau, fit-il amusé. Un extrait hors connexion datant d'hier, la liste d'ordonnance et le stock, sans même t'approcher de la réserve.

- Ha c'était dans ce sens là, compris je. Effectivement, pas besoin d'accréditation...

- Et même pas besoin de scanner ton accès, fit mon père.

- Tant mieux, dis-je alors en attrapant une chaise.

C'était un détail un peu particulier, il y avait deux postes de travail dans un bureau pour un seul médecin. En réalité, il était possible qu'un autre médecin dirigeant les urgences quand mon père était de repos, faut bien dormir, puisse venir en avance ou partir plus tard pour s'occuper des dossiers et il fallait donc deux postes de travail. J'étais en train d'attendre tranquillement, mon père récupérant le document de données hors connexion. Il déposa la feuille de données transparentes à côté de moi et alluma le poste se servant de son code d'accès.

- Tu sais quoi faire ? me demanda mon père.

- Je dois vérifier le stock d'hier, le stock actuel et consulter les ordonnances pour être sûre qu'il n'y a pas d'erreurs ? proposai-je légèrement vexée.

- Parfait, c'est très important tu sais, me fit mon père. Les synthétiseurs de médicaments sont beaucoup plus lents que tous les autres et on essaye de les faire tourner le plus possible tant qu'on a des matières premières.

- J'espère qu'on pourra en fabriquer aussi sur la planète, parce qu'il va valoir tenir le temps que le propulseur orbital soit installé... Ce qui prendra longtemps, dis-je alors inquiète.

- On a quand même du stock pour plus d'un équipage entier, m'assura mon père. On veut juste être très prudents.

- Ok... Je m'y mets, assurai-je rapidement.

- Prends ton temps ma puce, tu l'as largement, me fit mon père.

- Oui sauf que chaque ordonnance modifie le stock, donc je devrais refaire plusieurs lectures, dis-je amusée.

- Navré, me fit mon père en embrassant mon crâne. Je vais faire une tournée d'inspection, je reviens.

- Pas de problème, précisai-je.

L'avantage de cette tâche, c'était peut-être qu'elle ne demandait que de l'attention. Techniquement, mon accréditation me permettait de fournir les premiers secours et d'activer les processus d'examens sur les bots. Je ne pouvais faire aucune intervention à proprement parler sauf si elle entrait dans la catégorie premiers secours. Je ne pouvais même pas faire une prise de sang, en tout cas pour l'instant, et forcément je n'avais aucun droit de faire des prescriptions.

- Alors... Amenocellular..., marmonnai-je en commençant la liste.

Un simple spray qui permettait d'accélérer la cicatrisation en appliquant une fausse peau synthétique. Elle se désagrégeait d'elle même quand il était temps. Cela faisait partie des traitements extrêmement basiques et tout le monde en avait dans sa pharmacie personnelle. Le décompte s'était avéré correct et j'avais pu poursuivre la liste. J'avais été légèrement énervée quand, alors que je venais de vérifier un traitement pour les migraines, de le voir remonter dans la liste des sorties suite à une prescription, j'étais bonne pour revérifier. J'avais cependant réalisé que Papa n'avait placé que son accès limité car, alors que je pouvais voir la description des ordonnances, les sections liées à l'identité du patient me restaient cachées.

- Comme si j'allais espionner, marmonnai-je.

J'avais alors continué ma tâche avant de tomber sur un nom de médicaments qui m'était connu mais qui me choqua, surtout sa présence. Il s'agissait d'un implant temporaire de Paeneprotect, l'équivalent de la pillule du lendemain de nos ancêtres mais avec une efficacité encore plus grande. J'étais consternée mais je me rendis compte que certains rompaient l'ennui d'une drôle de façon. Et surtout qu'oublier de se protéger restait assez stupide.

- Ça avance ? demanda mon père une fois revenu.

- Tranquillement... J'en suis à vingt entrées... Bon ben dix-neuf, dis-je en remarquant un nouveau déplacement.

- Navré, fit mon père en riant.

- Ce n'est pas grave, assurai-je en vérifiant.

Mon père avait pensé à m'amener des cubes de restaurations, saveur beurre de cacahuète et j'en pris un pour manger un peu. Ces cubes étaient succulents mais permettaient à des diabétiques de les consommer. Parfois, avec mon père, nous avons discuté de choses et d'autres, principalement des cours en fait et puis soudain, il m'avait surprise par son propos.

- Au fait, j'ai validé ton inscription, me fit mon père.

- Mon inscription ? demandai-je alors que je fermai l'espace de contrôle en finissant le travail donné.

- Oui, tu nous l'as demandé alors j'ai fini par accepter, fit-il légèrement vexé quand même.

- Je vous ai demandé quoi? demandai-je en essayant de comprendre.

- Le mating, répondit mon père.

J'avais oublié ce détail, je pensais trop à Louis pour imaginer m'inscrire. Je m'étais sentie mal à l'aise à la suite de ce propos. Mon système de messagerie finirait donc par m'indiquer un garçon capable de me plaire et avec beaucoup de points communs. C'était pas forcément la chose la plus romantique du monde mais bon.

- Il y a un soucis ? demanda mon père.

- Ben en fait, marmonnai-je gênée. J'ai... J'ai rencontré un garçon.

Je l'avais dit sans trop oser regarder mon père et il avait réagi un peu stupidement.

- Déjà ? Dis-donc c'est encore plus efficace qu'avant, fit-il alors.

- Hein? dis-je surprise avant de comprendre son propos. Non je veux dire... À l'ancienne...

- Ho..., fit juste mon père.

- Il ne s'est rien passé du tout, m'empressai-je quand même de dire. Mais...

- Mais? insista mon père intrigué.

- Je crois que je lui plais, avouai-je.

- Ce n'est pas surprenant, fit mon père dont le propos fut touchant.

- Mais je ne suis pas sûre en fait, dis-je quand même.

- Tu sais que ce n'est pas incompatible avec le mating, le choix final t'appartiens toujours, me fit mon père.

- Je sais... Mais c'est pas gênant ? demandai-je rapidement.

- Rien t'oblige à rencontrer les propositions non plus, me fit mon père.

- Mais normalement... La compatibilité est assurée, alors que comme ça, marmonnai-je inquiète.

- Parfois il y a des déclics avec des gens totalement à l'opposé de nous, le défaut du mating est de ne prendre en compte que les centres d'intérêts communs, les passions, les parcours... Mais parfois une personne à l'opposé peut aussi être un bon choix, développa mon père.

- Moui... Peut-être... Mais le mating est plus sûr, dis-je alors. D'un point de vue avenir...

- Chérie... J'ai rencontré ta mère hors mating, et depuis le temps ça marche toujours, me fit mon père.

- Je sais bien..., dis-je gênée.

- Et ce garçon... Il s'appelle comment ? demanda mon père intéressé.

- Louis... Louis de Tourvel, dis-je alors en regardant mon père un peu gênée.

- Hmmm..., fit mon père pensif.

- Toi aussi tu penses que c'est bizarre ? demandai-je inquiète.

- Ben en quoi cela le serait ? s'étonna mon père.

- Il est beau... Enfin je veux dire qu'il peut avoir une fille plus belle, dis-je toute rouge.

- Chérie..., me réprimanda mon père.

- C'est vrai! me défendis je. Il pourrait avoir...

- Et si tu lui plais, tu le prends en compte quand même ? demanda mon père.

- Oui... Mais je peux pas être sûre qu'il soit sincère, dis-je alors consternée.

- Mais si tu penses cela, tu n'arriveras jamais à rien, me fit mon père.

- Comment ça ? demandai-je étonnée.

- Chérie, fit mon père en soupirant. J'ai envie de dire que dans n'importe quelle situation tu peux être prise d'un doute, tu ne pourras jamais être totalement sûre mais si tu ne laisses aucune chance à ce garçon ou même à un autre, tu n'en sauras jamais rien et tu pourrais même passer à côté d'une belle histoire.

- Oui mais ici, marmonnai-je alors. Si ça ne marche pas ou si il se moque totalement de moi, je ne pourrais jamais l'éviter... Tu vois?

- Je comprends que tu sois inquiète mais tu crois franchement qu'il n'a que cela à faire ? Draguer une fille pour se moquer d'elle? demanda mon père.

- Ne le prends pas mal mais les hommes sont des salauds, dis-je le surprenant un peu. Il veut peut-être juste une...

- D'accord je comprends, fit mon père dans un éclair de lucidité. Mais j'ai eu l'impression lors du gala qu'il était le genre de garçon à avoir été éduqué...

- Oui... Sans doute, marmonnai-je.

Mon père n'avait pas totalement tort non plus. Louis semblait réellement gentil et sincèrement intéressé par ma petite personne. Si je restais bloquée sur mes peurs, je risquais de finir seule même avec le mating vu que le choix final m'appartenait toujours. Inconsciemment, j'étais en train de peser le pour et le contre au beau milieu du bureau de mon père. À l'origine, j'avais eu envie de demander des conseils à Rakel mais elle aurait été du genre à me dire de m'amuser sans me soucier des conséquences. C'était vrai aussi que Louis me plaisait mais ça, ce n'était pas très compliqué. J'avais ensuite décidé de prendre congé.

- Je vais y aller si tu n'as plus besoin de moi, dis-je alors.

- Non ça ira, fit mon père.

- Bjorn risque de se réveiller et je préfère l'occuper et laisser Maman se reposer, dis-je en me préparant à sortir.

- Ne te surmène pas trop non plus, profite de ta jeunesse, me conseilla mon père. La plupart des jeunes de ton âge explore la station tu sais.

- Je sais, Himiko arpente sans cesse les coursives, précisai-je. Bonne journée.

- À toi aussi, répliqua mon père.

Les jeunes exploraient la station, d'accord mais en même temps il n'y avait pas des millions d'activités non plus. Il y avait bien quelques espaces commerciaux et ressemblant à ce qui se faisait sur Terre, quelques salles de jeux également et même des cinémas dernière génération. Jaina m'avait déjà proposé un peu de shopping mais je n'étais pas très motivée. Je préférais rester en famille, c'était comme ça. J'étais ensuite assez rapidement ressortie du complexe médical et j'avais eu l'envie de profiter du petit parc artificiel. Cela n'était qu'un petit espace à traverser mais c'était déjà ça. Et là, je m'étais figée de surprise. Au milieu de la zone, il y avait Louis. Je me demandais ce qu'il pouvait bien faire là, à toucher un des arbres. Pour une coïncidence, c'était une sacrée coïncidence après tout. J'avais parlé de lui il n'y pas longtemps et maintenant, il était là près de moi. J'avais envie de l'observer discrètement et il regardait sa main comme dépité après avoir touché cette arbre. Je trouvais cela étrange et je m'étais rendue compte qu'à l'observer comme cela c'était bien moi qui devait alors être la plus bizarre. J'avais envie d'aller lui parler, mais comment l'aborder sans avoir l'air intéressée ? Tant pis, autant avoir l'air naturelle.

- Salut, dis-je en m'approchant en essayant d'avoir l'air naturelle.

- Ça va? me demanda Louis sans même sursauter de surprise. En promenade ?

- Je vais bien merci, dis-je rapidement. J'ai une accréditation médicale pour aider mes parents.

- Donc tu cherches une occupation, fit-il en me souriant.

- Et... Tu fais quoi avec cet arbre? demandai-je intéressée en me plaçant près de lui.

- Je me demandais si il était synthétique... Et il l'est, me fit Louis.

- Ha bon? demandai-je plutôt surprise.

- Et d'autres non, dit-il alors.

- Et comment tu le sais? demandai-je encore plus surprise.

- Donne moi ta main, me conseilla Louis en me tendant la sienne.

J'avais hésité en l'observant cette main qu'il m'offrait. Ce n'était qu'un simple contact alors, je l'ai prise, me rendant compte que sa main n'était pas très chaude. Je m'étais dit que c'était le gros problème de ne pas pouvoir avoir d'implants, il ne pouvait pas réguler sa température avec des tenues conçues pour cela.

- Touche le, me fit Louis en guidant ma main.

J'avais touché le premier arbre sans regarder celui-ci, préférant observer attentivement Louis. Ce dernier me fixait droit dans les yeux, sans même regarder ce qu'il faisait. Soudain il me guida vers un autre arbre et me fit le toucher.

- Tu sens la différence ? demanda-t-il sans lâcher ma main.

- Oui... C'est plus rugueux, dis-je alors après avoir fait très attention aux différences.

- Dire qu'on a détruit une planète entière, fit-il simplement.

- On a clairement épuisé les ressources, dis-je en regardant ce garçon qui ne me lâchait toujours pas la main.

- Tu penses que l'on sera capable d'éviter de faire de même ? demanda soudainement Louis.

- J'espère... Ce serait dommage, dis-je en regardant ma main et la sienne aussi d'ailleurs.

- Tu as la peau très douce, fit alors Louis m'obligeant à écarquiller les yeux.

- Oui... Hum... Merci, dis-je en rompant le contact. Tu étais en pleine exploration ?

- Effectivement, mais je m'apprêtais à rentrer, dit-il alors légèrement intrigué par mon comportement.

- Je faisais de même, avouai-je.

- Alors il est de mon devoir de raccompagner une jeune fille, fit-il en m'adressant un clin d'œil.

- Tu n'es pas obligé, dis-je alors. Tu peux continuer ta promenade.

- Et si celle-ci m'amène à t'accompagner... Tu y vois une objection ? demanda Louis.

- Non, tu peux, dis-je en souriant. C'est très distingué de ta part.

- Le monde actuel est si dangereux pour une femme, et encore plus si elle est séduisante, fit-il en m'indiquer de marcher à ses côtés.

Il était si distingué, si poli, c'était plaisant. Et en plus il me complimentait encore ce qui fit que je me sentais à l'aise. Nous avions discuté de tout et de rien durant le trajet, ce dernier me parlant de la Fédération Romane tandis que je répliquais en comparant avec mon pays. Et puis sans savoir pourquoi, j'avais posé une question.

- Au fait, tu es inscrit pour le mating? demandai-je soudainement avant de me sentir idiote.

- Non, me fit Louis simplement, peut-être surpris. C'est ton cas?

- Oui, j'avais demandé à mes parents, concédai-je.

- Je trouve que cela enlève tout le plaisir, me fit Louis en me regardant. C'est tellement mieux de découvrir la personne.

- Encore faut-il qu'il y ait une personne à découvrir, dis-je en réponse.

J'avais alors remarqué qu'il s'était arrêté et j'avais fait de même, l'observant attentivement. Je venais de réaliser ce que j'avais dit et cela pouvait donc être un aveu clair et net de mon manque d'habitude avec les garçons.

- Tu...

- Pas de questions là-dessus s'il-te-plaît, l'ai-je presque supplié.

- D'accord... Mais sache que dans ton coin, les garçons sont des crétins, me fit Louis.

- Je peux te demander pourquoi tu me complimentes tout le temps ? demandai-je sans hésiter.

Il me regarda attentivement, calmement, sans même se vexer.

- Je dois réellement justifier le fait que je trouve... Attirante? demanda-t-il comme proposant le terme.

- Pourquoi ce ton? demandai-je étonnée mais touchée quand même.

- Disons que j'hésitais sur le terme, pour ne pas passer pour un vulgaire goujat, me fit Louis.

- Ho..., dis-je en reprenant la marche.

Il était donc réellement attiré par moi, c'était tellement invraisemblable que je ne savais littéralement plus où me mettre. Louis continua de marcher à mes côtés, me laissant à mes pensées. Je n'avais plus aucune idée de ce que je pouvais dire ou faire sans passer pour une fille intéressée.

- Tu es impatiente de savoir qui le programme te réserve ? demanda soudainement Luis alors que nous approchions de mon cylindre de logement.

- Je... Je ne sais pas... Je ne pense pas, dis-je alors légèrement gênée.

- Alors pourquoi vouloir t'y inscrire? demanda Louis qui ne lâchait pas le morceau.

- Je n'avais pas encore réalisé que je pouvais plaire à un garçon extrêmement intéressant, dis-je alors en essayant de faire un compliment également.

- C'est plaisant à entendre, fit-il à mon oreille.

- Tu ne me feras pas croire que toi, tu n'es pas sûr de toi avec les filles, cela se voit à ta façon de parler. Je dirai même que tu as de l'expérience.

- J'avoue, me fit simplement Louis. Est-ce rédhibitoire ?

- Pour? demandai-je interloquée.

- Susciter ton intérêt, précisa enfin Louis.

Je l'avais regardé alors que nous avions atteint le sas d'entrée de mon cylindre. Dans d'autres circonstances, cela m'aurait presque effrayée mais Louis était si différent des garçons que je connaissais.

- C'est déjà le cas, avouai-je rapidement avant de proposer autre chose. Tu veux monter?

- Je ne tiens pas à déranger, dis-je alors.

Je l'avais regardé plutôt étonnée. J'avais réalisé juste après l'avoir dite que cette phrase pouvait porter à confusion mais il n'avait pas sauté sur l'occasion.

- Tu sais que ma mère et mon frère sont là ? demandai-je intriguée.

- J'imagine assez difficilement que tu me fasses confiance au point d'être seule avec moi dans un logement clos et insonorisé, me fit Louis.

- Je... Je voulais juste te proposer quelque chose à boire, dis-je alors.

- Cette proposition est... Intéressante, j'accepte, me fit Louis avec un sourire charmeur.

- Par contre, en entrant, évite de faire du bruit, ma mère se remet de son service, elle dort peut-être, précisai-je.

- Je serai aussi silencieux qu'un cadavre, me fit Louis.

Je l'avais regardé plutôt étonnée du propos mais j'avais fini par hausser les épaules. C'était peut-être une expression de chez lui alors, inutile de poser la question. J'avais pris la décision d'entrer la première quand le bot d'accueil apparût devant nous sans crier gare.

- Bonjour jeunes gens, fit le bot en regardant vers Louis.

- Ho oui... Stella Ragnuson, précisai-je pour le registre numérique. Louis de Tourvel me raccompagne.

- Précision enregistrée, précisa le bot. Bonne journée.

J'avais haussé les yeux au ciel artificiel, consternée de devoir me justifier. J'avais regardé vers Louis et il me sourit tout aussi consterné.

- Je te jure, ils en font trop, me fit Louis.

- Je crois qu'ils misent énormément sur notre sécurité, dis-je quand même.

- C'est vrai que tu risques beaucoup de choses, me fit Louis en entrant dans l'ascenseur.

- Franchement, je pense être en sécurité avec toi, dis-je rapidement, peut-être trop rapidement même.

J'avais immédiatement remarqué son sourire, peut-être satisfait de ma confiance en lui. J'avais donc souri également avant de réaliser que j'amenais pour la première fois de ma vie un garçon chez moi. La porte de l'ascenseur s'ouvrit et je m'étais empressée d'approcher de la porte pour éviter de croiser un des deux voisins. J'avais immédiatement ouvert avec ma puce d'identification avant de l'inviter à entrer.

- Sois...

- Discret ? J'avais compris, me précisa Louis.

Je ne voulais vraiment pas réveiller Maman alors je suis entrée discrètement et j'ai immédiatement enlevé mes bottines. Louis m'avait alors regardé et avait immédiatement fait de même. J'avais souri de son respect.

- Tu veux quoi à boire? demandai-je tout bas.

- Ce que vous avez, cela me conviendra, concéda Louis.

- SynthéCoffee? proposai-je alors tandis qu'il acceptait.

Ni une ni deux, j'avais programmé la machine pour qu'elle nous prépare deux cafés, deux imitations bien sûr. Je lui avais rapidement tendu un mug avant de lui préciser quelque chose.

- Je vais voir si ma mère dort d'accord ? demandai-je rapidement.

- Vas-y, fit-il poliment.

Je m'étais dirigée dans le couloir des pièces nocturnes et je m'étais approchée du sas de ma mère, celui-ci n'était pas verrouillé et j'avais pu l'ouvrir pour y découvrir ma mère endormie, mon petit frère tout aussi endormi à côté d'elle. Ils allaient bien et j'avais donc refermé le sas en retournant timidement dans l'espace dédié au salon. Un garçon qui me plaisait était chez moi et je ne savais pas quoi dire pour ne pas avoir l'air trop empotée. Quand j'étais revenue dans le salon, Louis regardait notre projecteur de photos souvenirs qui faisaient défiler les photos habituelles. Il semblait observer ceux-ci avec amusement. Et puis, j'avais eu honte. Une projection d'une photo de vacances où j'étais en maillot de bain était apparue. Je m'étais rapidement approchée de lui.

- C'est gênant, dis-je alors.

- Non, c'est intéressant, les souvenirs de famille sont importants, me fit Louis. Nous on en a pas énormément.

- Vous n'avez pas fait beaucoup de photos ? Pourtant je pensais que vous auriez beaucoup voyagé..., dis-je en chuchotant.

- Pas vraiment, je parle de garder des souvenirs, précisa Louis en chuchotant.

C'était agaçant de chuchoter, je n'avais pas saisi immédiatement chaque mot et j'avais dû compléter entre guillemets. Je ne voulais pas déranger ma mère en faisant du bruit et j'avais pensé à la fonction insonorisation de ma chambre. Je voulais lui proposer pour discuter tranquillement mais c'était plutôt gênant.

- Louis... Ce n'est pas une invitation, dis-je tout bas. Mais tu veux venir dans ma chambre ? Y a l'insonorisation...

- Pour éviter que ta mère ne se réveille ? demanda Louis. Tu ne risques rien?

- Comment ça ? demandai-je surprise.

- Tes parents ne t'interdisent pas d'amener un garçon dans ta chambre ? me demanda Louis.

- Non... Enfin, le sujet n'est jamais venu, marmonnai-je.

- En tout bien tout honneur, j'accepte, me fit alors Louis.

Je lui avais indiqué d'avancer discrètement tandis que nous avions emprunté le couloir de la partie nuit. J'avais l'impression de faire quelque chose d'interdit en fait, comme si je m'apprêtais à aller trop vite et beaucoup trop loin avec Louis. Mais je n'y allais réellement que pour être tranquille pour discuter. Il était d'ailleurs extrêmement silencieux en avançant et j'espérais vraiment que Louis ne se faisait pas d'idées farfelues ou déplacées. Il pénétra ainsi dans ma chambre et j'avais verrouillé la porte à la seconde tout en activant l'insonorisation.

- Très intéressante ta décoration, fit alors Louis en l'observant.

J'avais souri, c'était une chambre d'adolescente classique avec ses chanteurs à la mode, souvent torses nus évidemment, ses posters d'holofilms ou d'holoséries, ce genre de choses. J'avais soudainement réalisé que je n'avais rien pour nous installer à part... mon lit. Je ne m'étais pas sentie très bien en regardant le lit et Louis en alternance. Je l'avais alors entendu soupirer.

- Oui désolée, on va devoir s'asseoir sur mon lit ou par terre, me suis-je empressée de préciser.

- Ce ne serait pas très convenable si je m'installais avec toi sur ton lit non? demanda Louis.

- Je..., hésitai-je. Je n'y vois pas de problème...

Mais qu'est-ce que je pouvais bien être en train de faire, je n'en savais absolument rien. Il ne manquerait plus que je mette de la musique. J'avais alors indiqué mon lit à Louis et il était parti s'asseoir dessus. Je l'y avais rejoint en évitant de le regarder.

- Tu n'as que des livres holoprojetés? demanda Louis.

- Euh... Oui, dis-je surpris. Tu as de vrais livres? demandai-je alors choquée.

- Nous les avons laissés au Nouveau Louvre de Paris, me dit Louis. On en avait quelques uns en fait.

- Des livres papiers... Incroyable... T'es vraiment riche en fait, dis-je bêtement en le regardant.

- Disons que l'argent n'a plus de valeur ici, me fit Louis. Mais ma famille n'a jamais vraiment aimé afficher sa fortune.

- C'est dingue de vouloir quitter la Terre, dis-je alors.

- Parce que nous sommes riches ? demanda Louis. Tu sais... Je te trouve plus riche que moi.

- Quoi? m'étonnai-je perdue.

- Votre lien familial... Une richesse spirituelle, dit alors Louis. Et pour moi la plus grande richesse est celle qui est intellectuelle.

- D'accord..., marmonnai-je plutôt perdue.

- Je sais que c'est toujours plus facile à dire que l'argent ne fait pas le bonheur quand on est plus riche que nécessaire, avoua Louis. Moi j'aime savoir ce que les gens lisent, ça me parle.

- Tu as envie de voir ma bibliothèque ? demandai-je alors extrêmement convaincue par ses propos.

- Si tu veux partager ce jardin, dit-il alors.

J'avais immédiatement placé ma main sur une des plaques d'activation pour projeter par hologramme la liste de mes livres. Louis me regarda en souriant.

- Tu mets un visuel ? demanda Louis.

- Oui... Si tu veux, marmonnai-je.

J'avais alors activé le visuel "bibliothèque ancienne", faisant apparaître des rayonnages dans ma chambre. J'avais trouvé cela étrange qu'il désire un visuel, la plupart des gens aimant cela faisaient partie du troisième âge. J'avais vu Louis se lever et avancer dans le rayonnage, le suivant immédiatement.

- Beaucoup d'auteurs modernes, me fit Louis.

- C'est mauvais ? demandai-je en souriant.

- Non, il faut vivre avec son temps, fit Louis en riant.

- Ça veut dire que toi tu es littérature ancienne je suppose ? demandai-je légèrement mesquine.

- Je plaide coupable, dit alors Louis. Ton livre préféré ?

- Karen Parker, l'exploratrice des mondes, dis-je immédiatement.

C'était peut-être cliché mais cette saga littéraire où une jeune fille découvrait lors de son adolescence qu'elle appartenait à un autre monde et partait en quête de ses origines en rencontrant plein d'êtres différents, c'était vraiment la meilleure œuvre de la génération à laquelle j'appartenais. Je n'aurais pas l'occasion de voir les adaptions des volumes deux à dix-sept en holofilms mais le premier avait été absolument génial, battant les records d'entrée en salle depuis l'invention du cinéma.

- Extrêmement bien écrit, fit Louis. Et permettant à l'imagination de divaguer, très utile dans cette époque...

- Parfois tu parles comme un vieux, dis-je alors amusée.

- Je sais, Agathe me dit de vivre avec cette époque, confirma Louis.

J'avais grimacé en entendant son prénom, je ne l'avais pas trouvée très sympathique lors du gala. Et savoir qu'une fille aussi magnifique vivait avec lui alors qu'ils n'avaient pas de sang en commun me rendait honteusement jalouse.

- Et toi alors? demandai-je aussi. Quel est ton livre préféré ?

- Moi? Les Liaisons dangereuses, précisa Louis.

- Oula... Je...

- C'est de la littérature classique française, me précisa Louis. Très vieille.

- Et...

- Ce que cela raconte? comprit immédiatement Louis. Cette œuvre littéraire majeure du xviiie siècle, qui narre le duo pervers de deux nobles manipulateurs, roués et libertins du siècle des Lumières, est considérée comme un chef-d'œuvre de la littérature française, bien qu'il soit tombé dans un quasi-oubli durant la majeure partie du xixe siècle, avant d'être redécouvert au début du xxe. Roman inscrit dans la tradition du libertinage de mœurs.

- Ça doit être particulier, dis-je alors étonnée.

- Cela montre qu'un être mauvais peut aimer, fit Louis en continuant d'arpenter la bibliothèque.

- Comment cela? dis-je en le voyant s'approcher.

- Le vicomte de Valmont, l'un des personnages, n'hésite pas à manipuler pour obtenir ce qu'il veut. Principalement les... Les attentions de Cécile de Volange, me fit Louis.

- Cela parle de sexe? demandai-je immédiatement en rougissant.

- Évidemment, fit Louis en s'approchant de moi. Même l'être le plus mauvais peut ressentir l'amour.

Je l'avais regardé avec attention, remarquant que sa main s'approchait d'une de mes mèches de cheveux pour la remettre en place.

- Qu'est-ce que tu fais? demandai-je surprise.

- Il n'y a de telle beauté que celle qui ignore ce qu'elle ressent, fit-il sûrement en français vu que je n'avais rien compris.

Je n'avais certes rien compris mais la situation était évidente. Louis devait avoir dit quelque chose de romantique car il était en train de me sourire tendrement. J'avais immédiatement réalisé qu'il s'approchait doucement, penchant sa tête vers moi. J'avais tenté de tourner la tête sur le côté en stoppant l'holoprojection, afin sans doute de lui rappeler où nous étions. J'avais alors senti sa main sous mon menton qui me poussa à le regarder droit dans les yeux.

- Louis... Que..., dis-je en déglutissant.

- Qu'importe les conséquences ou le châtiment, je n'ai qu'un désir, me dit-il tout bas en s'approchant encore plus. Goûter tes lèvres...

J'avais ouvert la bouche de stupeur, Louis venait de me dire, de façon étrange quand même, qu'il voulait m'embrasser. J'étais plutôt sous le choc.

- Ce... Ce n'est pas... Ce n'est..., baffouilai-je alors.

- Dis que tu ne veux pas, fit-il en redressant encore mon menton.

J'étais en train de regarder ses yeux toujours aussi gris et profond quand je le vis se pencher pour m'embrasser. J'avais encore une chance de l'arrêter mais non, je n'avais pas pû. Je m'étais contentée de fermer les yeux, légèrement intriguée et stressée quand doucement ses lèvres se posèrent sur les miennes. Un simple baiser très chaste, qui laissa la place à un second. J'étais complètement perdue quand ses lèvres se posèrent bien plus franchement, s'emparant de la pulpe des miennes avec avidité. C'était la première fois qu'un garçon avait envie de m'embrasser et surtout qu'il le faisait. J'étais simplement passive quand j'avais senti sa main se placer sur ma nuque et m'attira à lui. Et là, je l'avais sentie, cette langue qui s'immisça dans la bouche pour venir caresser la mienne avec désir. Je ne savais pas comment faire mais lui, il n'hésita pas du tout rendant ce baiser incroyable. Quand il mit fin à ce baiser, j'étais restée immobile, la bouche légèrement entrouverte avant de le regarder.

- Louis..., murmurai-je.

- Elles sont parfaites, me dit-il.

J'étais en train de craquer littéralement, complètement, espérant qu'il y revienne même.

- Je..., murmurai-je.

- Je vais devoir y aller, on m'attend, me fit Louis me décevant totalement.

- Ho... D'accord..., dis-je clairement déçue.

Louis se pencha alors à mon oreille pour m'adresser sur un ton des plus séducteurs:

- Je te veux mienne, me susurra Louis tout bas. J'attendrai que tu sois convaincue.

- Je...

- Je connais le chemin, fit-il en m'embrassant sur la joue. Je suis impatient de te revoir.

Et là, il était parti me laissant seule avec mes questions et surtout mes petits papillons dans le ventre et également le rouge de mes joues. Louis venait de m'offrir mon premier baiser et son propos indiquait clairement qu'il allait me montrer bien d'autres choses. J'étais perdue et ce n'était pas peu dire.




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