La prophétie du roi déchu: Le seigneur oublié
La Prophétie du Roi Déchu
Le seigneur oublié
« Aujourd’hui mon fils, l’heure est venue que tu apprennes quelle est l’histoire de nos ancêtres. Grâce à leur sacrifice, nous pouvons marcher sur cette terre et sentir ses fleurs. Un jour, un guerrier sombre du nom de Warda brandit sa lame contre les ténèbres alors que tout espoir était perdu. Mais il n'était pas seul dans cette bataille, car à ses côtés se joignirent Taläsna et Galro, mais aussi un puissant seigneur oublié depuis des temps immémoriaux. Ensemble, ils affrontèrent l'ennemi juré de Natal: Kaös, le destructeur. »
Chapitre premier: Les deux rois
Le ciel rouge était encore illuminé par un rubis incandescent tombant inlassablement vers l'horizon, contrastant avec le noir des plumes des oiseaux charognards attirés par l'odeur faisandée de la mort. Depuis le ciel ils pouvaient voir des cadavres entassés les uns sur les autres sur bien au moins trois hectares à la ronde. Les créatures messagères de la mort se posèrent sur les armures brillantes en battant bruyamment des ailes et se proclamèrent par des cris stridents et grinçants qu'ils étaient maîtres de ce festin. Tout en cherchant la faille de ces carapaces métalliques pour en tirer leurs butins, ils chassaient leurs congénères affamés. Hystériques par la faim, ils ne remarquèrent qu'au dernier moment un guerrier à l'allure terrifiante marchant juste à côté d'eux. Les rapaces sombres lâchèrent un croassement grincent contre l'intrus avant de finalement s'envoler vers un autre tas de viande. Sur son heaume de métal qui masquait entièrement son visage, trois rubis étincelants de la taille poing étaient incrustés profondément. La seule chose que l'on pouvait discerner sous l'acier furent ses deux yeux jaunes à la rétine de reptile. Et à travers ces deux pupilles on pouvait voir briller la flamme de la colère. Sur son large plastron composé d'écailles de drake était maculé du sang séché de ses victimes. Sur ses gantelets de fer, il avait fait forgé deux dagues courbées capables de trancher la gorge d'un homme d'un seul geste. Et d'après les perles de rubis qui coulaient encore sur le fil de ces terribles rasoirs, il n'était pas dur de s'imaginer à quel point elles étaient redoutablement efficaces.
Ses pas lourds se frayaient un chemin entre les cadavres d'elfes et d'orques. Il regarda les corps défunts délaissés par le carnage qui avait eu lieu il avait encore peu de temps. Il leva son regard, sa colère était si grande que l'on pouvait entendre son cœur de géant frapper à grands coups dans sa poitrine. Il arracha d'une main ferme une lance plantée dans un mort juste à côté de lui et se dirigea vers le dernier ennemi toujours en vie. Un elfe aux cheveux argentés était adossé contre le corps puant d'un orque, tenant de ses deux mains une plaie dont le sang coulait le long de son flanc gauche jusqu'au sol. Son armure d'or et d'argent semblait fine et légère, mais elle était bien plus résistante que ce qu'elle laissait croire. Celui qui lui avait infligé cette blessure devait être très fort et habile. L'immense guerrier aux yeux jaunes regardait le survivant de la bataille, une aura meurtrière flottait autour de lui, invisible et opaque à la fois. L'elfe leva ses yeux, et malgré la gravité de sa blessure, il le défia du regard. Il tenta de prendre son sabre encore plantée dans le corps d'un orque au prix d'un grand effort, mais une fois qu'il eut l'arme en main, le guerrier qui se dressait debout au-dessus de lui frappa la lame de l'épée qui fut projetée hors de portée du dernier elfe.
_Tu ne peux plus tenir ton épée elfe, dit le colosse aux yeux jaunes. Cette victoire est nôtre, rend toi à l'évidence.
L'elfe se tut, il se contenta de lancer un regard méprisant envers son ennemi en guise de réponse. Il fut secoué par une quinte de toux et du sang s'échappa de sa bouche. Avec le pointe de sa lame, le géant obligea l'elfe à redresser sa tête.
_ Ton visage ne m'est pas inconnu, dit la profonde voix jaillissant du casque du géant. Je sais qui tu es, et je sais que tu mérites de mourir ici et maintenant, par ma lame.
_Je sais qui tu es aussi, lui répondit l'elfe tout en essuyant ses lèvres par un revers de main. Je sais que ce devrait être toi qui devrait agoniser ici, à ma place, pendant que je te transpercerai le cœur.
_ Certes, mais ce n'est pas le cas, roi elfe. Tu es la cause de notre malheur, ta race se croit supérieure parce qu'elle est la seule à pouvoir faire appel aux pouvoirs magiques qu'elle s'est octroyée. Vous vous êtes laissé imaginer que votre devoir en tant qu'êtres suprêmes était de dominer toute vie sur cette terre. Sachez que vous avez tort, nous refusons de vous laisser dominer ce monde par la force de vos pouvoirs. Votre égoïsme et votre égo surdimensionné ont fait de vous des sauvages, des barbares civilisés, des démons devant lesquels tous doivent s'incliner. Moi, Thaarg, le roi et seigneur vénéré des orques, j'ai reçu la mission par le pouvoir qui me fut conféré de vous empêcher de réduire cette terre en esclavage. Qu'as tu à me dire avant de mourir, roi Raldir ?
Le roi des elfes regarda le ciel pourpre, les oiseaux noirs volaient en cercles au-dessus de sa tête. Bientôt, il fera partie du grand festin, au même titre que tous les guerriers qui se sont affrontés ici. Il baissa ensuite son regard vers Thaarg qui brandissait contre sa gorge la pointe de sa lance.
_Nerdrën endala Fardeleraän. Vaudrên em ken duil. (Retrouvons nous au sein du royaume des morts. Tue moi par l'épée).
_ Puisque ainsi est ton dernier souhait, roi Raldir.
Le roi orque lâcha sa lance, saisit le fourreau de son épée accroché à sa ceinture et en fit jaillir une longue lame d'acier dentée. Les derniers rayons du soleil reflétaient ses deux tranchants de fer réclamant leur dû. Il posa la pointe de son épée sur sa gorge qu'il allait bientôt trancher. Alors que Raldir était prêt à mourir honorablement, une perle céleste traversa les huit cercles formés par les oiseaux noirs qui planaient et tomba sur son front. L'orque qui s'apprêtait à décapiter celui qui était la cause de toute cette guerre remarqua la goutte de pluie. Il regarda le ciel, huit cercles noirs tourbillonnaient au-dessus d'eux, et aucun nuage. Il éloigna son arme de la gorge du roi elfe et rengaina son arme. Raldir ne comprenant pas ce qui venait de se produire regarda son bourreau et lui dit:
_Qu'attends-tu pour me tuer ? Ma mort ne devait pas mettre fin aux malheurs de ton peuple ?
_Je ne peux te tuer.
Le guerrier à l'armure d'écailles de drake tourna le dos au souverain et commença à partir. Raldir tenta de se relever, mais sa plaie douloureuse le plaqua contre le sol. Il s'égosilla en voyant son ennemi juré s'en aller:
_ Pourquoi m'épargnes-tu ? Pour quel raison tu refuses de me tuer ?
L'orque, qui ne pouvait ignorer ces appels désespérés se tourna vers le roi et pointa de son doigt le ciel.
_ Une larme de Natal t'a gracié aujourd'hui, roi Raldir. À partir de ce jour, pour payer ta dette, tu devras te racheter de tes péchés. Lorsque nous nous retrouverons roi Raldir, à moins que tu ne te soit racheté, aucune larme ne tombera sur ton front.
L'orque reprit sa route, vers son royaume, portant fièrement son heaume qui deviendra par la suite légendaire. Le roi Raldir parvint à se dresser sur ses genoux malgré la douleur, regarda tout autour de lui. Après avoir compris qu'il était le dernier survivant, il lâcha un hurlement.