Ifrit et Léviathan tome 1

Chapitre 12

2467 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 01/12/2022 13:28

En même temps que le soleil du mois de mai arriva, la relation entre Léo et Sélène s’illumina peu à peu. Cela faisait maintenant un peu plus d’une semaine que les deux tourtereaux avaient commencé leur relation secrète. Incapables de se passer l’un de l’autre, l’un comme l’autre avait décidé de rester à Rennes. Ils espéraient que leurs familles ne poseraient pas trop de questions, mais le week-end du 1er mai, ils avaient dû se séparer pour les rassurer.

En ce 4 mai, Sélène et Léo s’étaient accordé une pause secrète pour visiter la ville de Rennes. Ils avaient bien besoin de sortir soit dit en passant. Car en restant dans le vase clos de l’hôtel et de la salle d’entrainement, les deux amants finissaient par respirer leurs phéromones. Et donc invariablement par faire l’amour, parfois la journée entière sans rien faire d’autre. Cependant, Sélène comme Léo ne souhaitait pas baser toute leur relation sur le sexe. Ils devaient prendre l’air, sortir ensemble, aller au cinéma et au restaurant, faire ce que font les couples en somme.


Aujourd’hui, ils avaient opté pour une longue promenade dans la ville, et peut-être dans la soirée aller au cinéma. Sélène était vêtue d'une robe vert émeraude, longue, mais légère. Léo quant à lui avait opté pour un pantalon gris et un t-shirt bleu.


Les deux conjoints trouvaient leur moitié encore plus séduisante que d'habitude. Ils avaient commencé leur marche par le canal qu'ils avaient visité quelques jours auparavant. Léo était serein et heureux. Depuis qu’il avait eu sa première fois avec Sélène, il avait retrouvé son équilibre. Il dormait chaque nuit d’un sommeil de plomb. Une chose qu’il pensait à jamais hors de sa portée. S’il avait su que le sexe pouvait lui apporter une telle sérénité, il aurait fait l’amour plus tôt.


Sélène était aux anges, la compagnie du jeune homme lui procurait un bonheur inimaginable. Pour le sexe, et bien, c'était… Transcendantal, quasiment divin. Certes, elle avait eu d’autres amants et amantes avant Léo, mais là le lien qui les unissait rendait leurs unions plus intimes, plus mystiques. En dépit des craintes de Léo, Sélène et lui marchaient bras-dessus bras-dessous, d’un pas nonchalant. Ils avaient quitté le canal à présent et se dirigeaient vers le centre-ville. La jeune femme était un peu inquiète qu’on la reconnaisse. 

Elle était loin des territoires de ses parents, tant qu’elle n’était pas au cœur d’un énorme évènement et qu’elle n’userait pas de ses pouvoirs, on ne ferait pas attention à elle. Tout du moins, elle l’espérait. Ils traversaient à présent une rue pavée en direction d’une place, ou une foule disparate se mouvait. Sans y prêter gare, le couple s’engouffra dans la foule. Léo se concentra sur le contact de la main de Sélène afin d’ignorer le brouhaha : il n’avait jamais aimé se mêler à la foule, il préférait l’observer depuis son food-truck. Mais avec sa compagne à ses côtés, il se sentait capable d’affronter n’importe quoi.

Le couple approchait à présent du centre de la place. Léo était concentré sur sa conversation avec Sélène, lorsque qu’une détonation déchira l’espace ! Léo sentit une douleur fulgurante lui transpercer le bras, avant de s’écrouler au sol, on venait de lui tirer dessus ! Sélène réagit au quart de tour et déploya un anneau aqueux qui bloqua un second tir. La foule hurlait de terreur, un troisième coup fut tiré, Sélène dévia la balle une fois de plus.

Le sang de Léo couvrait à présent les pavés de la place. La plaie commençait déjà à cicatriser, mais la douleur était atroce, cela rappela au jeune homme les blessures du crash. La foule était à présent complétement dispersée et les deux amants étaient bien visibles. Les sirènes résonnaient au loin et les coups de feu avaient cessé. Sélène patienta quelques minutes avant de finalement totalement reporter son attention sur Léo. Dans un premier temps, horrifiée, elle constata que la balle avait atteint son compagnon à l’épaule, il allait s’en sortir.

Autour d’eux, les passants se rapprochaient, leur smartphone à la main. Léo se redressa, malgré les imprécations de Sélène et lui souffla :

           ─ Il ne faut pas qu’ils nous voient ensemble Sélène.

Mais la jeune femme ne bougea pas, la préservation du secret de leur relation était bien peu de chose comparé à une tentative de meurtre

           ─ Je reste avec toi Léo, on va à l’hôpital ensemble.

Malgré son stoïcisme de surface, à l’intérieur une véritable tempête se déchaînait dans l’esprit et dans le cœur de Sélène. Cet incident allait, sans aucun doute, provoquer des interrogations au sein des triades et du peuple de la forêt. Il fallait espérer que les choses n’aillent pas trop vite. La jeune femme déploya une bulle d’eau autour d’eux afin de tenir les curieux à distance, elle ne la rompit que lorsque les ambulanciers arrivèrent.

Sélène et Léo montèrent dans l’ambulance aussi vite qu’ils le pouvaient. Pour les deux amants, le voyage jusqu’aux urgences, tout se passa dans une sorte de brouillard opaque et silencieux. Qui avait tiré sur Léo ? Les triades étaient-elles derrière cette attaque ? Ou quelqu’un d’autre ?

Cette attaque venait de briser la petite bulle d’insouciance que les deux jeunes gens s’étaient créée. À présent, la situation leur échappait totalement, et leur avenir était plus qu’incertain.

***

Le souffle court, Radost Markovitch s’affala sur le tabouret de son petit appartement. Il poussa une demi-douzaine de jurons russes et donna un coup de pied dans le meuble de sa cuisine. Il l’avait manqué ! Il avait manqué sa cible. Son premier tir avait fait mouche, mais ensuite, cette petite garce s’était mise sur son chemin.

Il avait eu beau tirer, aucun de ses tirs n’avait pu passer son mur d’eau. Radost avait alors été contraint de s’enfuir et de laisser son fusil et une bonne partie de son matériel sur place. Sans pouvoir effacer ses empreintes ! La police allait très vite faire le lien ! Près d’un mois de préparation et d’observation, fichu en l’air à cause de l’intervention d’une petite pute avec des pouvoirs !

Le mafieux n’avait plus le temps de maugréer, il sortit de sa poche son téléphone intraçable et appela l’unique numéro enregistré. La tonalité sonna deux fois avant que le destinataire ne décroche.

─ Radost ? que se passe-t-il ?

─ Oncle Dusan… Je suis désolé, j’ai tenté d’abattre la cible… Mais ce petit salopard de Mercier est toujours en vie… La police ne va pas tarder à être après moi.

Un lourd silence se fit entendre à l’autre bout du fil. Puis, il y eut un bruit sec et la liaison, fut coupée.


Dublin, Irlande, Royaume-Uni de Camelot


Dusan Markovitch venait de jeter son téléphone clandestin contre le mur en béton de sa cellule. Dans le corps amaigri et vieillissant du mafieux, une rage incommensurable brûlait. Une colère sourde et inextinguible qui prenait forme depuis huit longues années. Huit ans passés en prison, huit ans volés à cause d’un accroc dans son plan. Un plan qui aurait dû le propulser au sommet de la mafia d’Europe de l’Est en éliminant tous ses concurrents d’un seul coup. Au lieu de ça, il avait été mis en cage et tout son réseau était tombé en lambeau. À cause d’un seul petit grain de sable dans les rouages de ce plan parfait. Pendant toutes ces années, il s’était demandé quel pouvait être ce grain, et maintenant ce grain avait un nom : Léo Mercier. Ce « survivant », qui aux yeux de Dusan ne pouvait pas être étranger à l’échec de son plan. Et à présent, il devait payer pour l’enfer qu’il vivait et ce, jusqu’à sa mort. Dusan devait montrer au monde ce qu’il en coûtait de se mettre sur sa route.


Il avait mis les quelques hommes qui lui restait sur le coup dès qu’ils avaient pu sortir de prison. Très vite, ils avaient découvert que Mercier avait bel et bien des pouvoirs, et Dusan ne s’était pas gêné pour dévoiler cela à la presse people. Cela avait eu l’effet escompté : les médias étaient à présent déchaînés contre Léo Mercier. Dusan comptait faire souffrir ce petit merdeux puis le tuer de façon spectaculaire.

Mais cet imbécile de Radost avait tout fait foirer en prenant l’initiative de le tuer maintenant. À présent, il serait sur ses gardes et les flics allaient être en effervescence. Le vieux mafieux allait devoir revoir ses plans s’il voulait laver sa réputation. Une chose était certaine : le sang allait couler à flot.

***

 

Léo passa la nuit aux urgences, le lendemain matin sa famille arriva et le ramena à Bois-Cors, Sélène rentra à Avalyon.


Avalyon 5 mai 2039

Xiong Mao reposa la bouteille d’alcool de riz et avala son cinquième verre d’une seule traite. La situation était des plus inquiétantes, Sélène avait été prise dans une fusillade et son « disciple » en était la cible. Le Léo Mercier était sorti des urgences sans trop de dommages heureusement. Mais la simple présence du jeune homme avec sa fille en plein centre-ville soulevait des interrogations légitimes.

La cheffe des triades brûlait de poser plusieurs questions, plus qu’intrusives et indiscrètes, à sa fille, mais elle n’osait pas le faire. Sa fille était une adulte et elle pouvait fréquenter qui bon lui semblait. Mais les chiens enragés des triades et du peuple de la forêt rendaient la situation comparable à un baril de poudre.

Xiong Mao devait clarifier la situation, mais elle savait que sa fille ne lui dirait rien, même s’il y avait quelque chose. C’est pourquoi elle avait fait appel à un ami, ce dernier venait justement d’arriver. On toqua à la porte, son invité était là.

─ Entre Sablon, lança Xiong Mao d’une voix fatiguée.

La porte en bois décorée de dragons s’ouvrit sur un homme grand, à la peau sombre, coiffé d’un turban et au visage masqué par un voile.

─ Tu m’as appelé Xiong Mao ?

─ Oui, j’ai besoin de ton aide, vieux camarade.

Le berbère interrogea l’eurasienne du regard.

─ Il faut que je sache ce que ma fille et son « apprenti » font durant leur temps libre.

***

Les deux amants durent attendre le début de la semaine suivante avant d'enfin pouvoir reprendre l’entrainement, et plus important se revoir. Ils firent l’amour dès leur retour à l’hôtel. Ils avaient terriblement besoin d’être près l’un de l’autre, c’était un besoin vital. Ils avaient eu toutes les peines du monde à dissimuler leur solitude lorsqu’ils étaient chez eux. À présent, ils se soignaient avec le seul remède qu’ils connaissaient : le contact.

Allongés sur le grand lit de la chambre de Sélène, les deux amants étaient enroulés dans les draps, serrés l’un contre l’autre. La jeune femme passa la main sur la blessure de Léo, la plaie était déjà refermée.

─ Tu as encore mal ? demanda-t-elle.

Le jeune homme répondit par la négative, lui-même était étonné. Sa vitesse de guérison avait été fulgurante. Lorsque la balle l’avait frappé, il avait senti son feu intérieur affluer en lui à toute allure. Son entrainement avec Sélène portait clairement ses fruits.


Les deux amants étaient inquiets, l’incident de la place avait attiré l’attention des triades et du clan de la forêt. C’est pourquoi ce soir, Sélène comptait bien mettre sur le tapis un sujet primordial. Elle se redressa, s’assit à califourchon sur son compagnon et le regarda droit dans les yeux. Le jeune homme comprit très vite qu’elle ne tolérerait aucune interruption de sa part avant la fin de sa tirade.

─ Léo, je sais que tu n’as aucune envie de devenir un héros. Mais à présent, avec la divulgation de tes pouvoirs et ce qui vient de se passer, tu ne penses pas que ça serait une bonne chose que tu y repenses, rien ne t’empêcherait de reprendre tes activités de cuisinier après ça. Je rentre à la FEAH cette année, je pense pouvoir faire en sorte que tu y entres toi aussi malgré le peu de temps qu’il reste.

Un long silence accueillit la proposition de la jeune artiste martial. Léo ne pouvait nier les grands changements qu’il y avait dans sa vie. Sa relation avec Sélène, la montée en puissance de ses pouvoirs. Entrer dans une université de héros pourrait l’aider dans une certaine mesure. Mais il était tout de même inquiet : s’entrainer à l’abris des regards avec Sélène était une chose, prendre des cours dans un campus rempli de plusieurs centaines de personnes était une autre histoire.

Sélène interrompit sa réflexion :

─ Bon, prends au moins le reste du mois pour y réfléchir. Ma seconde question est plus compliquée : je sais que notre lien, notre relation plus précisément, est complexe. Autant pour toi que pour moi. Mais je te le demande : est-ce que tu tiens à moi ? est-ce que tu as envie de rester avec moi ? Je parle d’au-delà de notre lien.


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