TOME 1 - Un bout de chemin ensemble

Chapitre 14

7204 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 07/08/2020 22:15


Chapitre 14

«Sommes-nous encore loin ?» Emerys posa la fameuse question. Elle se retint de lever les yeux au ciel aux vibrations du rire profond qui résonna dans son dos suite à cette question pourtant sans motif d’humour.

Son cheval ayant péri lors de la dernière attaque par des chasseurs de prime, la jeune femme était une fois de plus dans l’obligation de monter sur Stranger devant le Limier. Bien-sûr, l’homme avait catégoriquement refusé qu’elle monte avec Arya sur son cheval blanc, par peur que les deux filles ne prennent la poudre d’escampette à la moindre petite occasion … Malgré les dernières péripéties qui assuraient du contraire. Mais il suffisait d’un seul moment d’imprudence et ses deux garanties pour recevoir une belle somme d’argent s’envolaient à tout jamais. Hors de question !

A moins que ce n’était qu’une simple excuse ? Dans tous les cas, ce n’était pas légitime.

«Nan et je serais bientôt débarrassé des moulins à paroles.» Se moqua Sandor en levant les yeux d’un sourire taquin. Pour l’embêter d’avantage, il resserra son avant-bras autour de son ventre jusqu’à ce qu’elle ne rechigne.

«Que vous devez être impatient ! Je n’imagine pas la joie qui vous consume à l’idée de vous retrouver seul en cavale.» Rétorqua sarcastiquement Emerys en imitant l’expression agacée de l’homme dans son dos avant de se décaler pour mettre un peu de distance.

Néanmoins il était vrai qu’elle était devenue nettement plus détendue qu’elle ne l’avait jamais été en sa présence, et qu’elle commençait même à apprécier les quelques dialogues crus échangés. Elle se sentait plus en sécurité avec lui qu’avec n’importe qui d’autre dans ce monde. La façon qu’il les protégeait elle et Arya était unique en son genre certes, mais aussi d’une très grande bravoure qu’il sous estimait fréquemment. D’un soupir, Emerys se laissa lentement glisser sur la selle jusque contre son armure thoracique tandis que les bras et les jambes qui l’entourait l’empêchait de s’enfuir. Ou de tomber, peut-être avec un peu de chance s’il était de bonne humeur.

Sandor baissa un instant les yeux sur la tête argentée se blottissant sous son menton puis laissa un petit sourire nostalgique s’emparer de ses lèvres. Une fois arrivé aux Eyrié chez la Lady du Val, il ne la reverra sans doute jamais. Pareil pour la petite louve au caractère bien trempé qu’il appréciait secrètement. Toutefois, il ne pensait pas un seul instant qu’une telle pensée puisse lui faire autant de mal, lui, un homme sans état d’âme ... Son sourire s’effaça inopinément de son visage lorsqu’il remarqua qu’Arya le regardait depuis son cheval, lui haussant un sourcil prétentieux alors qu’il se raclait la gorge pour se débarrasser de ce moment très gênant.

«Je n’ai qu’une seule hâte. Recevoir ce qui me revient de droit et poursuivre mon chemin jusqu’au Mur. Auprès de vrais guerriers, mais loin des femmes. Le cauchemar sur terre, il n’y a pas pire endroit que ce trou à merdaille.» Déclara-t-il, son visage se contractant de dégoût.

«Alors pourquoi vous y allez si vous pensez que c’est le pire endroit ?» Interrogea Arya en prenant la parole pour la première fois de l’après-midi.

«J’ai des fautes à me faire pardonner, et ils ont besoin d’hommes.» Le Chien recula sa tête quand la femme devant lui enleva une mèche de cheveux loin de son visage. Il aimait bien l’odeur que sa chevelure dégageait, cependant il aimait moins les manger par inadvertance.

«Vous vous exilez ? C’est une longue route pour la rédemption … Il y a d’autres moyens vous savez. Beaucoup d’hommes meurent au Mur.» Assura Emerys d’un haussement de sourcils. Elle entendit le Limier s’esclaffer derrière elle, ce qui la rendit perplexe car elle ne voyait pas en quoi ce qu’elle venait de dire était drôle.

«Tu parles, c’est n’importe quoi. Mon frère ne m’a pas tué, alors ce n’est pas là-bas que je crèverai. Par contre, la seule chose qui me fasse vraiment chier c’est leurs serments à la con ...» Gémit-il pitoyablement d’une grimace rebutée en s’affaissant plus loin dans la selle de son étalon noir.

«Celui où vous vouez votre honneur ?» Arya, vraiment intéressée par la conversation, tendit l’oreille à la future réponse du mercenaire désolé. Elle savait que le Chien détestait les histoires de Chevaliers et d’honneur, donc elle supposait qu’il parlait de cela.

«Non. Ce stupide vœu de chasteté qui empêche d’avoir des femmes. C’est l’horreur ! Je n’ose même pas imaginer les nombreux petits suceurs de queues qu’il y a à ce maudit Mur de glace.» Répliqua incessamment Sandor d’un frisson de dégoût qui serpenta le long de son dos, entraînant un rire jovial chez la femme sagement assise devant lui.

Son cœur défailli à ce son particulier.

«Décidément, il vous en faut peu.» Emerys pinça les lèvres mais son sourire était authentique. Son cynisme pouvait parfois se montrer très drôle ! Surtout dans des situations périlleuses où le sérieux était de mise.

Son sourire se résorba doucement de son visage lorsque ses yeux noirs se posèrent sur les ruines d’une ferme cachée parmi les arbres de la forêt. Il y eut tout à coup comme un froid sur le trio. Toute l’infime joie qu’Emerys avait ressentie jusqu’à présent venait tout à coup de s’envoler à l’odeur désagréable du sang et de la cendre froide emportée par le vent du Nord. Son expression s’assombrit peu à peu tandis que le Limier conduisait son cheval entre les décombres de cette ferme anéantie par la haine gratuite. Inconsciemment, elle se plaqua contre l’armure de Sandor alors que ce dernier était occupé à visualiser les lieux ainsi que les possibles dangers qui s’y cachaient.

«Il y a peut-être de la nourriture.» S’exclama le Chien à l’arrêt et à une bonne distance de sécurité des ruines.

«Il y a peut-être des soldats.» S’empressa de clarifier Arya après avoir stoppé sa monture à côté de la sienne, l’air sceptique.

«Alors, que faisons-nous ?» Emerys soupira d’exténuation puis leva les yeux sur les ruines fumantes de la ferme en pierre où seules quelques poutres noircies de la toiture tenaient encore en place.

En réponse aux deux filles concernées, Sandor tira son épée de son fourreau à sa hanche. Après tout, ils n’avaient pas vraiment le choix s’ils voulaient manger quelque chose ce soir … Il garda habilement la lame contre la cuisse d’Emerys pendant qu’il ordonna à Stranger d’avancer pour jeter un œil aux alentours et éventuellement trouver des rations utiles à la survie. Mais, il ne restait rien de plus que des cadavres d’animaux charcutés ainsi que des charrettes pillées par les bandits de passage, apparemment. Maintenant au milieu de tous ces décombres, Arya, Sandor et Emerys descendirent de leurs chevaux pour inspecter les lieux complètement désertés. Ni soldats, ni survivants.

Enfin presque …

Un vieil homme entaillé à l’estomac était adossé contre un puits de l’autre côté du bâtiment encore fumant, hoquetant de douleur et à peine conscient. Il gardait ses deux mains ensanglantées sur la vilaine blessure qui déversait continuellement son sang sur son pantalon boueux. Se battant vaillamment pour prendre des inspirations en travers ses petits gémissements, l’homme leva la tête avec difficulté vers le Limier quand le mercenaire en question apparut sur sa gauche. Puis sur l’enfant Stark. A l’apparence épouvantable du fermier, les deux rangèrent rapidement leurs épées de retour à leurs ceintures pour ne pas l’effrayer d’avantage. Ils ne lui voulaient aucun mal et il était en train de mourir, donc il n’y avait aucune raison valable pour rester armé.

Emerys s’arrêta net dans ses recherches au moment où elle vit le vieil homme affalé sur le sol aux pieds de ses deux compagnons de route. Son cœur battit douloureusement, sa gorge se contracta. De ce qu’elle pouvait voir de là où elle se tenait, la blessure était trop profonde mais surtout trop vieille pour espérer une guérison, le sang ayant d’ores et déjà coagulé sur le tissu déchiré. Il était clair que le pauvre homme attendait que la mort ne vienne l’emporter pour abréger ses terribles souffrances. Attristée par cette image, elle avala la pression qui s’était formée dans sa gorge puis s’approcha calmement des autres tout en gardant ses mains bien apparentes.

«Vous ne devriez pas rester assis là comme ça.» Indiqua Arya, les sourcils froncés au vieillard mourant.

«Où voulez-vous que j’aille …» S’essouffla le fermier, la tête pendante sur le côté. Il regarda ensuite la femme qui venait de s’agenouiller à son niveau avant de prendre une profonde inspiration sifflante ; «J’ai essayé de retourner dans la cabane, mais j’avais trop mal. Je me suis ensuite souvenu qu’ils l’avait brûlée.»

«C’est qui ils ?» Requit prestement le Limier, la main sur le pommeau de son épée par précaution.

«J’ai cessé de me poser la question.» Le fermier grimaça lorsqu’il pressa plus fortement ses mains sur les multiples coups de poignard à son ventre. L’odeur cuivrée du sang lui faisait presque tourner de l’œil.

«Vous permettez ?» Invita Emerys en désignant la plaie. A l’accord silencieux du vieil homme, elle retira délicatement ses mains de son estomac pour évaluer les dégâts mais comme elle le pensait, il n’y avait plus aucun espoir de le sauver. Elle tressaillit un peu quand elle sentit la main moite du fermier se poser sur la sienne.

«Vous êtes d’une grande beauté. Jamais je ne penserais voir une pareille créature avant de mourir.» Glorifia-t-il d’un petit sourire suivit par un gémissement à la vague de douleur qui le foudroya de plein fouet.

D’une oreille attentive, Sandor s’accroupit aux côtés d’Emerys puis sourit de compassion à l’homme délirant qui faisait de son mieux pour garder les yeux ouverts. La barbarie n’avait malheureusement plus aucune limite dans aucune contrée de Westeros, et il haïssait de plus en plus la maison qu’il avait servi autre fois. Pour lui, il ne s’agissait là que de l’œuvre des soldats Lannister. Car ils avaient la fâcheuse tendance à charcuter les animaux de ferme au lieu de les embarquer pour nourrir leur campement, trouvant cette activité cruelle largement plus enrichissante et amusante. Le Limier échangea un regard avec Emerys, cependant celle-ci secoua la tête dans la négativité.

«Ça risque pas de guérir.» Il souligna l’évidence en pointant du doigt la plaie sanglante au bas-ventre du fermier.

 «Je crois pas non plus.» Répondit le vieillard d’une pointe d’humour.

«Pas terrible comme mort. T’en a pas marre ?» Soupira le Chien avec un semblant de pitié dans ses yeux, sa voix grave d’une tonalité plus calme que d’habitude.

«Ouais je sais, il est temps pour moi de partir. Pour une fois il faut que ce soit moi qui décide. Cette idée-là m’a traversé l’esprit ...» Acquiesça tranquillement le paysan affalé contre le puits.

«Alors pourquoi continuer ?» Arya s’accroupit à son tour après que le Limier se redressa. Elle plongea son regard inexpressif dans celui de l’homme souffrant, voulant connaître sa réponse malgré la sévérité contenue dans les yeux noirs d’Emerys à cette question impitoyable. Le fermier lui répondit finalement que c’était par habitude.

«Il ne doit rien avoir de pire que ça.» Finit-elle par dire avec tristesse, ses doigts jouant avec le pommeau de son Aiguille à sa ceinture.

«Peut-être que rien n’est pire que ça.» Affirma rapidement l’homme, le front sillonné. Devant lui, la jeune femme aux cheveux argents ouvrit la bouche pour prendre la parole mais la fillette à ses côtés la devança.

«Rien n’est meilleur ou pire que quoi que ce soit. Rien, c’est seulement rien.» Dévoila Arya en retrouvant son impassibilité. Il y avait néanmoins une pointe de mélancolie dans sa voix, ses mots reflétaient un vécu dramatique qui la rendait d’autant plus mystérieuse dans ses sombres propos.

«Vous êtes une enfant courageuse. Je le vois, dans vos yeux. Et vous, vous êtes une très belle femme avec un grand potentiel. Ne l’oubliez jamais.» Le fermier s’adressa aux deux filles accroupit face à lui avant de lever la tête vers le mercenaire silencieux qui le surplombait de sa taille impressionnante ; «protégez-les et aimez-les comme il se doit. Un jour, quelqu’un viendra vous prendre votre femme et votre fille si vous n’êtes pas assez méfiant.»

Arya observa la réaction d’Emerys pour savoir s’il fallait dire la vérité au paysan. Mais la femme à ses côtés se contenta de serrer la mâchoire, n’ayant pas la force de briser les croyances de l’homme sur leurs identités. Une famille unie qui cherchait la sécurité quelque part dans les Eyrié, fuyant la guerre et la politique dépravée de ces tyrans. Quant au Limier, mise à part sa légère confusion passagère, offrit un simple petit hochement de tête d’approbation pour faire plaisir à l’homme sur le point de mourir. C’était étrange de penser à eux comme une famille … Peut-être une idée pas si folle que cela au final. Après tout, ils vivaient ensemble depuis quelques temps et l’image d’Emerys étant sa femme n’était pas déplaisante non plus.

«Il n’y a pas plus grand courage que d’affronter la mort droit dans les yeux.» Récita Emerys en attrapant la main du vieillard pour lui apporter son soutien au travers de cette terrible épreuve qu’était la mort.

«Je me suis toujours tenu au principe du juste échange dans tous mes commerces. Tu me donne, je te donne. C’est juste, équitable. Il n’y a plus rien d’équitable.» Déplora ce dernier, le menton posé sur sa poitrine.

Les yeux d’Arya s’égarèrent sur le sol tandis qu’Emerys changea de genou pour pouvoir rester dans cette position et continuer de tenir la main du fermier dans la sienne le temps nécessaire. Ses paroles censées résonnaient dans leurs esprits, ils ne pouvaient qu’être d’accord avec ce qu’il venait de dire sur la triste réalité d’aujourd’hui. Plus rien n’était juste dans ce monde, tout fonctionnait avec la peur et le pouvoir par des gens imbus de leur propre personne où l’égoïsme rimait avec perfidie. Et malheureusement, ce n’était pas prêt de changer tant que les Lannister siégeaient sur le Trône de Fer et régnaient sur les Sept Royaumes.

«Je peux avoir à boire ? Mourir, ça donne soif ...» Demanda l’homme d’une voix graveleuse, coupant ainsi le train de pensée de trois voyageurs.

Le Limier hocha la tête puis récupéra sa gourde à sa ceinture avant de s’agenouiller à côté de lui pour l’aider à prendre des gorgées de son eau. Ce fermier imposait le respect après toutes ces années d’affrontement pour pouvoir espérer vivre correctement de son commerce équitable, mais tout compte fait, cela n’avait servi à rien. Rien d’autre qu’à la souffrance et la peur constante. L’équitable valait-il vraiment la peine pour finir de cette horrible façon ? Non. Le Chien ressentit tout de même une forme de peine pour ce pauvre vieillard qui avait eu espoir que la vie ne fonctionnait pas toujours sur le fil de la barbarie. Donc, après qu’il eut fini de boire, il attrapa soudainement son poignard à sa ceinture et le planta sans attendre dans son cœur pour qu’il n’ait pas le temps de réfléchir.

Il lui rendait un grand service.

Emerys plissa les yeux aux bruits étranglés qui s’échappa des lèvres gercées du paysan alors qu’il remerciait Sandor à l’aide de ses yeux pour l’avoir aidé. Le sang se déversa abondamment sur son vêtement, glissant le long des doigts de la jeune femme détenant la main du fermier qui venait tout juste de succomber contre le puits. C’était particulièrement difficile à voir. Elle pouvait sentir le regard insistant d’Arya sur elle et elle savait parfaitement pourquoi elle la regardait ainsi avec déception à peine dissimulée derrière son visage de marbre. Toutefois Emerys choisi de l’ignorer, jusqu’à ce que la louve ne se relève pendant que le Chien retirait sa lame de la poitrine du vieillard immobile pour l’essuyer contre l’épaule de ce dernier.

«Le cœur, c’est là qu’il est. Ça se tue comme ça, un bonhomme-» Sandor ne put cependant terminer sa phrase car un homme surgissant de nulle part lui bondit brusquement sur le dos.

Hurlant de douleur atroce lorsqu’il sentit une paire de dents s’enfoncer dans la chair de sa clavicule, le Limier se débattit avec celui qui le tenait fermement à la gorge à l’aide de ses deux bras. Il l’étreignait si fortement qu’il ne pouvait même plus respirer, de plus que son poids était suffisant pour le faire vaciller d’un côté à l’autre. Mais d’où sortait-il, celui-là ?! Comment avait-il fait pour passer inaperçu derrière lui ?

Abasourdis à cause de l’attaque imprévisible, les deux filles s’éloignèrent de quelques pas au moment où le Chien réussit à avoir une bonne poigne sur la chevelure de l’homme sauvage puis qu’il usa de ses hanches pour le faire basculer en avant et directement sur le sol boueux. Dès l’instant où il fût libéré de son supplice, il posa ses deux mains sur son cou là où il manquait dorénavant un lambeau de peau après que l’inconnu le lui ait arraché avec ses dents. Ça faisait mal comme l’enfer ! Le sang chaud dégoulinait sur ses doigts ainsi que le long de sa clavicule, lui volant plusieurs grognements de douleur et d’agacement.

«Baissez votre arme !» Ordonna Emerys en pointant son doigt vers le second homme armé d’une épée. Deux paysans qui avaient réussi à les prendre par surprise.

«Putain, mais qu’est-ce que vous foutez !» Bouillonna Sandor, les yeux plissés à l’élancement de son cou. Il s’adressa directement à l’étranger qui gardait son épée levée vers lui, l’autre étant hors d’état de nuire étendu à ses pieds.

«Ta tête est mise à prix ! Tu es le Limier.» S’écria l’homme à l’allure de sauvage tout en gardant une position défensive, les yeux rétrécis à sa forme imposante.

«Faut croire que c’est ce qu’on gagne quand on dit au Roi d’aller se faire foutre.» Maugréât le Chien d’un rictus. Il jeta ensuite un petit coup d’œil à ses doigts ensanglantés suivit par un soupir d’exaspération. Ce petit salopard l’avait sacrément bien mordu !

«T’es pas au courant ? Il est mort, le Roi. Il a bu du vin empoisonné le jour de son mariage. La prime sur ta tête, c’est parce que tu as tué des soldats Lannister. Cent cerfs d’argents ! Une jolie prime.» Expliqua l’inconnu d’un petit sourire malicieux, s’imaginant d’ores et déjà comme l’heureux propriétaire de cette somme.

«En voilà une belle mort … Ce prix me rappelle vaguement quelque chose.» Renifla Emerys d’une touche de sarcasme en croisant les bras sur sa poitrine, un sourcil arqué. Arya compris tout de suite son allusion lors de sa propre vente avec ce marchand de prostitués quand le Limier cherchait à récolter une généreuse bourse de pièces.

«Qui a fait ça ?» Questionna Sandor, ignorant délibérément la piqûre de rappel d’Emerys sur sa transaction.

«Le petit monstre. Le gnome et sa femme de la maison des Stark ! Le nain attend son procès.» L’espèce de chasseur de prime de pacotille cracha au sol pour montrer son indignation.

«Qu’en est-il de Lady Sansa ?» Emerys prit un autre pas en avant, appréhendant la réponse. Mais Sansa Stark était probablement en sécurité et peut-être même déjà sur les routes de Westeros pour rejoindre Winterfell.

«C’est quoi toutes ces questions ?! Va donc sucer des queues, la putain !» L’homme la scruta dédaigneusement de haut en bas, le nez froissé de dégoût.

«Répondez plutôt à ma question au lieu de sortir de pareilles sottises de votre bouche concernant mon travail imaginaire !» S’indigna aussitôt Emerys en serrant les poings à ses côtés, les nerfs à fleur de peau. Elle s’approcha du chasseur de prime dans la ferme intention de s’y frotter, mais Sandor posa rapidement sa main non gantée sur son épaule tout en lui demandant de se calmer.

Pourquoi tous les hommes qu’ils croisaient pensaient systématiquement qu’elle était une prostituée ? C’était pénible, à la fin !

«La dame t’as posée une question. Tu dois lui répondre.» Ajouta froidement Arya en se mettant au même niveau qu’Emerys d’une main sur la poignée de son épée Aiguille. Mais l’homme gras s’esclaffa à sa piètre tentative de lui faire peur jusqu’à ce que la grosse voix bourrue du Limier ne s’exprime à son tour.

«T’avises plus de leur manquer de respect, sinon, je serais obligé de te sortir les boyaux et de t’étrangler avec, connard ! Alors vaudrait mieux pour ta petite cervelle que tu obéisses.» Réprimanda-t-il sévèrement d’une expression livide. Il se sentait dans l’obligation de prendre la défense d’Emerys, agissant sous le coup de l’impulsion car il ne supportait plus d’entendre ce genre de propos aberrants.

Emerys et Arya furent pour le moins surprises par cette prise d’initiative innovatrice. Etait-il en train de se soucier de quelqu’un d’autre que lui-même ? Il y avait une première fois à tout apparemment. Les deux filles le fixèrent pendant un instant, hébétées de le voir aussi protecteur envers elles tout à coup. Décidément, l’homme au visage marqué n’était plus du tout le même depuis qu’il voyageait avec une Stark et une étrangère à la chevelure des Targaryen, de quoi leur donner espoir sur un possible changement positif. D’un léger sourire admiratif, Emerys revint à l’homme menaçant lorsque ce dernier reprit la parole avec nettement moins d’agressivité dans sa voix.

«J’en n’ai aucune idée. Tout ce que je sais, c’est que le nabot va enfin avoir ce qu’il mérite. La fille a disparu.» Révéla-t-il en se léchant les lèvres, toisant la jeune femme aux côtés de la gamine aux cheveux noirs. Il dévisagea à nouveau le Chien puis leva le menton dans sa direction ; «les soldats Lannister sont tous à ta recherche, Limier. Cette prime est à moi !»

«Et toi, t’as pensé que tu les toucherais ? T’as pas pensé des masses, hein ?» Se moqua allègrement Sandor tandis qu’Arya vint tranquillement se positionner à sa droite.

«Je vous connais. Vous étiez les prisonniers de Yoren quand il m’emmenait vers le Mur. Celui-là m’avait dit qu’il me baiserait jusqu’au sang avec un bâton.» Rappela-t-elle d’une haine sans merci.

«Cette journée se passe pas comme prévue, décidément. Il y est lui, sur ta liste ?» Le Limier  jeta un coup d’œil à la louve tout en gardant sa main sur la blessure à son cou. Cette situation commençait à l’amuser.

«Il pourrait pas y être. Je sais pas son nom.» Arya esquissa un sourire sournois alors qu’elle plissait les yeux à l’homme en surpoids dubitatif.

«C’est quoi ton nom ?» Demanda le Chien.

«Rorge !» Répondit-il fièrement, ne sachant pas à quel point sa vie était dorénavant menacée.

Arya l’en remercia. D’un geste extrêmement rapide et précis, elle planta le bout de son épée dans le torse de l’homme qui n’eut même pas le temps de réagir. Touché en plein cœur, il étouffa un gémissement tandis que son sang s’écoulait abondamment du petit trou qui venait d’être fait dans sa poitrine. Les yeux écarquillés sous le choc, il tomba lentement à genoux sur le sol puis son corps tout entier s’étala dans la boue aux pieds du Limier et de son assassin plus rapide que la lumière. Incroyablement satisfaite par la vue de tout ce sang, Arya laissa son sourire morbide étirer plus largement ses lèvres, au grand désarroi d’Emerys qui n’approuvait pas cette technique barbare. La femme écœurée par ce geste détourna les yeux de la scène.

«T’apprends vite !» Félicita le Limier en se dirigeant vers les chevaux pour chercher un chiffon et nettoyer sa blessure.

«Je vais chercher de l’eau.» Emerys secoua la tête pour effacer l’image de tout ce sang versé. Elle devait garder ses pensées sous contrôle, quoi qu’il puisse se produire. Alors elle s’empressa de récupérer les gourdes dans les sacs pour aller les remplir au puits de l’autre côté du bâtiment en pierre. Elle remarqua tout de suite qu’elle était suivit par nulle autre qu’Arya Stark, cependant elle ne se retourna pas pour faire face à ses reproches qui ne tardèrent pas.

«Pourquoi ne l’avez-vous pas sauvé ?! Qu’est-ce qu’avait le Limier en plus que ce pauvre homme n’avait pas pour mériter votre aide !» Fulmina la louve au bord de l’hystérie en levant les bras à ses côtés tout en suivant de près la jeune femme inébranlable. Elle voulait savoir, elle voulait comprendre … Pourquoi choisissait-elle qui avait le droit de vivre ou non et surtout, pourquoi elle donnait une seconde chance aux mauvaises personnes ?

«Ce n’est pas si simple ! Sa blessure était trop ancienne. Ce paysan était condamné. Son sort appartenait aux Dieux, désormais. Chaque fois que j’utilise mon don je me rapproche un peu plus de la mort, alors je dois faire un choix. Je suis constamment confrontée à ces choix difficiles. Et crois-moi, ce n’est pas évident de prendre une telle décision.» Admit Emerys avec peine en posant les gourdes sur le rebord en pierre pour commencer à les remplir. Elle ferma les yeux au prochain cri scandalisé.

«Vous gaspillez votre énergie pour des gens qui ne le méritent pas !» Reprocha haineusement Arya une fois derrière la femme. Toutefois, elle referma la bouche lorsque cette dernière se retourna brusquement vers elle d’une expression terrifiante, n’étant pas préparée à ce changement soudain de personnalité.

«Mais qui es-tu pour en décider ! Ne t’es-tu jamais posé la question si les personnes qui figuraient sur ta liste n’agissaient pas par choix mais par contraintes ? Que peut-être, elles ne cherchaient qu’à survivre ? Est-ce que cet homme méritait de mourir parce qu’il avait besoin d’argent ? La peur te pousse à faire des choses impardonnables, Arya. Il n’y a ni bonnes ni mauvaises personnes, tout n’est qu’une question de survie. Toi, moi, le Limier, nous sommes tous pareils ... Alors, s’il te plaît, ne me regarde pas comme si j’étais une abomination.» Protesta tristement Emerys en claquant ses bras contre ses hanches, des larmes contenues dans ses yeux noirs. Elle passa rapidement sa manche sous ses yeux puis retourna à sa tâche en veillant à ne pas faire tomber les gourdes à cause de ses tremblements.

Arya avait perdu sa voix. Elle n’avait jamais vu Emerys aussi désespérée, c’était quelque chose de particulièrement déroutant. C’était la peur qui parlait à sa place mais la peur de quoi, exactement ? Que cachait-elle qui la rendait aussi instable à la moindre provocation ? Dans sa voix suintait de nombreux regrets qui la torturaient inlassablement, c’était flagrant. Emerys ne connaissait presque personne sur sa liste de condamnés à mort, donc elle ne pouvait qu’en conclure qu’elle parlait pour elle-même en ayant justement peur qu’elle finisse par apparaître sur cette liste maudite.

Alors pour quelles raisons obscures pourrait-elle finir par apparaître dessus ?

«Vous pourriez ramener les morts ?» S’interrogea Arya d’une faible voix compressée par les émotions. Ses propres larmes naissaient dans ses yeux quand Emerys prit une profonde inspiration et que son dos se contracta.

La femme se retourna lentement pour dévoiler un visage dévasté par les remords. Ses joues étaient humides par les gouttes salées, son corps tremblait doucement. Il y avait une véritable mélancolie dans ses yeux qui donna une pression douloureuse au cœur d’Arya incapable de retenir ses sanglots silencieux plus longtemps. L’enfant bouleversée hoqueta tandis qu’Emerys s’approcha calmement jusqu’à se tenir agenouillée devant elle pour pouvoir poser ses deux mains sur ses épaules, plongeant son regard chagriné dans le sien rempli d’espoir.

Son père ... Sa mère … Son frère …

«J’aimerais, je t’assure, mais je ne peux pas.» Regretta-t-elle, sa voix se frayant difficilement un chemin au travers de ses lamentations. Elle resserra sa prise sur les épaules de la louve lorsque cette dernière pinça les lèvres puis que plus de larmes furent libérées sur son visage affligé par le deuil.

La déception dans ses yeux gris était comme une lame saillante.

Mais incapable d’être raisonnée, Arya sortit hâtivement de son emprise pour courir dans le sens opposé au puits. Les mains d’Emerys tombèrent lourdement au sol à côté de ses cuisses, ses yeux fixant l’endroit où avait été la Stark un instant plus tôt. L’effroi avait remplacé la mélancolie. Avait-elle réellement fait les bons choix ? Elle ne voulait pas perdre la confiance de sa jeune amie mais plus important encore, elle ne voulait pas la voir se transformer en monstre sous l’emprise de la haine et de la vengeance. Car leurs effets étaient des plus dévastateurs … Elle ne pouvait que le déplorer.

Plus tard, lorsqu’elle revint avec les gourdes remplies d’eau fraîche, Emerys vit qu’Arya et le Limier avaient d’ores et déjà rejoints leurs destriers respectifs en attente de partir. Et Sandor avait instantanément sentit la tension dans l’air à la réapparition de la louve. La gamine essayait vainement de cacher ses yeux rougis par les larmes derrière cette carapace d’insensibilité qu’elle se construisait petit à petit. Il avait décidé de ne rien dire, cependant il se demandait ce qu’avait bien pu dire la femme pour rendre Arya Stark aussi émotionnellement instable en un si court lapsus de temps. De quoi les deux filles avaient parlés pendant qu’il tournait le dos ?

«On y va. On a assez perdu de temps ici.» Ordonna le Chien en récupérant la gourde des mains d’Emerys. Ensuite, il lui tendit sa main pour l’aider à grimper devant lui sur la selle de Stranger, usant de ses hanches pour faire balancier et ne pas lui faire mal.

Emerys retint sons souffle quand elle sentit la chaleur naturelle du mercenaire se frayer un chemin dans son dos et sur ses cuisses, oubliant presque à quel point ils étaient proche dans cette position. Elle pouvait l’entendre gémir de douleur dans son oreille alors qu’il donnait l’ordre à son cheval d’avancer dans la forêt, veillant à ce que la petite Stark boudeuse ne le suive de très près. Un sourire triste se dessina sur ses lèvres. Elle ne voulait pas contrarier Arya, mais elle devait aussi comprendre que la mort avait plusieurs aspects, certains positifs. Personne ne meurt jamais vraiment … Ce n’était qu’un éternel recommencement.

La renaissance d’une âme.

Emerys croisa involontairement le regard endolori de Sandor avant qu’elle ne se détourne rapidement de lui pour regarder la route qu’ils empruntaient. Ses joues ayant pris une légère teinte rosée, elle sentit son cœur faire une embardée dans sa poitrine à cette curieuse façon qu’il avait de la regarder. Elle aimait quand cette douce sensation se propageait à l’intérieur d’elle à chaque fois qu’il posait les yeux sur elle. Cet homme avait quelque chose de spécial, quelque chose qui sortait de l’ordinaire. Un mercenaire renommé dans tout Westeros, un homme craint par tout le monde, un véritable Clegane.

Il n’était pas forcément l’homme le plus beau mais sa franchise et sa débrouillardise faisaient de lui quelqu’un d’attrayant pour Emerys. Un corps tonique, rustre et un peu sauvage certes, hors il avait également beaucoup de qualités qu’il se tuait à cacher au monde extérieur pour ne pas paraître faible aux yeux des autres. Une fatalité pour un mercenaire de son rang. Pourtant il suffisait juste de creuser un peu dans son âme, d’être attentif aux signes pour voir la véritable identité d’un homme malheureux sous l’emprise des regrets.

Mais ce qu’elle aimait le plus chez lui, c’était ses yeux ... Ils pouvaient être si expressifs par moment, comme ceux d’un chien en quête d’acceptation et d’amour après des années de maltraitance.

Un chien peut mourir pour toi, mais ne te mentira jamais.

Emerys sourit doucement à cette dernière pensée qui s’avérait être la devise de la maison Clegane. Sa culture sur les différentes maisons connues venait d’un long apprentissage et elle le devait à son ancien Maître, un homme qui avait plusieurs facettes. La maison Clegane avait une bonne valeur morale, malgré qu’elle ait prêté serment à la maison Lannister il y a des années en arrière. C’était dommage ... Mais un serment qui avait heureusement été brisé par le plus jeune fils de cette dernière après avoir volontairement insulté celui qu’il était censé protéger corps et âme.

Elle se crispa sur la selle lorsqu’elle entendit un nouveau petit sifflement derrière elle. Elle sut tout de suite que l’homme se plaignait à cause de la douleur engendrée par la plaie après cette terrible morsure humaine, l’une des plus dangereuses, car la salive humaine contenait des propriétés nocives pour un organisme étranger. Si son sang n’arrêtait pas bientôt de couler, alors il risquait une infection et peut-être même une mort lente et douloureuse. Emerys déglutit avant de se retourner pour avoir un aperçût de la blessure sanglante qui était presque entièrement cachée par son armure ainsi que ses cheveux. Une grimace compatissante tira sur les traits de son visage quand elle se rendit compte que le tissu frottait sur la plaie aux mouvements du cheval.

«Il faut absolument soigner cela. Vous risquez une mort lente sinon, si vous laissez cette plaie telle quelle.» Dit-elle au rictus qui se forma sur le visage du Limier. Le mercenaire expira longuement par le nez puis replaça sa main pleine de sang sur les rênes de son cheval Stranger afin de mieux le diriger entre les arbres. Il jeta un petit coup d’œil agacé à Emerys.

«Avec un peu de chance, tu ne sauveras pas mon cul, cette fois-ci.» S’esclaffa-t-il bêtement, sa grosse voix résonnant jusque dans sa poitrine.

Emerys mordit l’intérieur de sa joue pour ne pas jeter une réplique grossière à son visage. Un tel âne ! Les hommes et leur soi-disant invincibilité … Ils ne comprendront donc jamais qu’avoir un moment de faiblesse n’allait pas se répercuter sur leur virilité. D’un sourire enjôlé, elle tourna le dos au Chien pour reprendre sa position initiale et observer le paysage grisonnant qui menait droit au Val d’Arryn. La brume flottait au-dessus de l'herbe rêche, de fines particules de pluie descendaient des montagnes et donnaient une fraîcheur constante à l’air. Elle leva le bout de son nez pour prendre une profonde inspiration tandis que son corps fondait inconsciemment contre celui du Chien.

«Vous savez, le don de la vie est précieux. Chaque individu a une place importante dans ce monde. Bonne ou mauvaise, tout dépends des décisions prises dans notre vie. Alors ne détruisez pas ce qui vous a été si gracieusement offert à cause de votre ego surdimensionné.» Finit-elle par rétorquer.

Sandor cligna rapidement des yeux, incrédule. Il ne pensait pas qu’elle allait lui répondre avec sarcasme et encore moins avec ce ton de réprimande humiliant. Il hésitait entre sourire d’amusement et s’énerver pour son audace. Néanmoins il ravala son soupir contrarié lorsqu’il sentit la femme s’ajuster contre lui, sa tête se positionnant juste sous son menton, l’emprisonnant dans son doux parfum. Il réprima un grognement alors qu’il se redressait pour au moins mettre un peu de distance avec elle, mais c’était bien évidemment peine perdue dans cette position où il n’y avait pas de place sur la selle.

«J’ai jamais rien demandé à personne pourtant me voilà ! La vie est une pute, ça s’arrête là, point barre.» Rechigna le Limier, désappointé. C’était tellement agréable et apaisant, la sensation de son corps sinueux contre le sien. Si seulement elle n’était pas autant habillée avec ce manteau noir …

«Rien n’est perdu.» Rassura Emerys d’un murmure après avoir posé sa main sur son avant-bras pour lui apporter un peu de réconfort.

Le muscle sous sa main se tendit à son contact puis l’instant d’après, le Chien retira son bras loin de son atteinte comme s’il avait été brûlé par le feu lui-même. Il appréciait le contact, mais la peur du rejet et du dégoût continuait de sévir comme au premier jour, ce qui le rendait à priori réticent d’accepter un tel geste inoffensif. Pour lui, ce n’était qu’un jeu cruel auxquelles toutes les femmes aimaient jouer. Il n’avait pas le droit de baisser sa garde ni de lui permettre de croire un seul instant qu’il était en train de s’adoucir grâce à elle. De goûter à de nouveaux sentiments surprenants, car ce n’était dans l’intérêt de personne.

Il ne voulait que personne ne l’aime comme il ne voulait aimer personne.

Evidemment qu’Emerys se sentit un peu rejetée, hors elle comprit vite que les limites imposées continuaient de faire barrage pour une bonne raison. Elle n’insistera pas, par crainte de le mettre définitivement en rogne. Donc elle garda ses mains sur la selle et fit de son mieux pour faire une petite distance entre elle et le Limier. Une tâche extrêmement compliquée à réaliser étant donné la taille de l’animal, mais pas impossible si elle utilisait ses cuisses pour garder l’équilibre. Dans son dos, le Chien masqua un ricanement devant ses minables tentatives d’ajustements, à nouveau serein parce qu’il retrouvait cette aversion avec qui il était si familier.

Sur son cheval blanc, Arya observait pensivement la scène plutôt comique d’un air de mépris sur son jeune visage, ses sourcils se creusant à l’absurdité de celle-ci. Vivement que ce voyage se termine et qu’elle ne revoie plus jamais cet homme qui pensait être son héros en la conduisant à bon port … Elle n’avait besoin de rien, ni de personne ! Et surtout pas d’une femme aux pouvoirs extraordinaires de guérison. Elle était en colère contre Emerys, c’était un fait, mais méritait-elle réellement son blasphème ? Le doute commençait à l’atteindre. La fille aux yeux gris s’affaissa théâtralement sur sa selle puis laissa ses bras tomber le long de son corps, le visage tourné vers le ciel pluvieux.

Si seulement tout cela n’était qu’un horrible cauchemar. Si seulement elle pourrait ouvrir les yeux pour se réveiller dans sa chambre à Winterfell … Aux côtés de sa mère, de son père, de ses frères et de sa sœur, dans la chaleur d’un foyer. Malheureusement comme le disait si bien le Limier, la vie n’était qu’une pute. Arya Stark était bien loin de cette époque où tout allait bien pour elle mais aussi pour sa famille, dans le château du Nord où neige se mêlait aux loups géants des vertes forêts. Elle goûta à l’amertume dans sa bouche alors qu’elle fermait doucement les yeux pour se laisser bercer par les pas de son cheval ainsi que les gouttes de pluie fines sur sa peau frigorifiée.

Sa vie d’avant lui manquait bien plus qu’elle ne l’imaginait.

A suivre …


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