Game of Thrones : Fire and Ice.

Chapitre 7 : Une ombre dans la nuit. (Tyrion Lannister)

2732 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 29/03/2020 04:11

CHAPITRE NUMERO SIX : TYRION LANNISTER.


   Tyrion ressentait de vives douleurs aux pieds, ayant perdu l’habitude d’avoir à parcourir d’aussi longues distances. Il en était certain il devait avoir des ampoules aussi grosses que son pouce mais ne tenait pas plus que ça à s’assurer de ses assertions, la souffrance seule suffisait à montrer que son supplice était réel. Qui plus est, avec les courtes jambes qu’il se trimbalait la tâche de devoir parcourir tous ces miles jusqu’à Moat Cailin risquait par finir de le rendre fou et ce n’était là que la première étape du voyage qu’il devait entreprendre.


« Par les Dieux, grommela-t-il, si l’on continue à ce rythme je vais me voir forcé de poursuivre votre train en allant sur mes quatre pattes.

-Ne voilà-t-il pas une chose qui serait marrante à voir, un nain se prenant pour un chien, ricana le Limier.

-Voilà qui me permettrait alors de voir le monde à travers votre point de vue bien que de moins haut, répliqua Tyrion ce qui, à sa grande satisfaction, ferma le clapet de Clegane. »


   Il n’en demeurait pas moins que sa situation ne s’était pas améliorée pour autant. Tyrion se prit à imaginer qu’il aurait été mieux pour lui de demeurer à Blancport auprès du Seigneur Manderly et de Varys plutôt que d’avoir à crapahuter sur des dizaines de lieues pour se rendre jusqu’à Moat Cailin puis Winterfell où il devait y régner un froid terrible.


« Je serai bien mieux à Volantis à profiter du bon vin, du soleil et des putes. »


   Nul ne répondit à cette réplique. Ses compagnons de route ne transpiraient pas une franche camaraderie. Le Limier se plaignait constamment du froid qui allait croissant. Bien que pour l’heure ils pouvaient tous s’estimer heureux de n’avoir pas à subir les méfaits de la neige qui permettait aux routes de rester à découvert alors que d’après ce que Tyrion avait entendu dire, il avait neigé sur Port-Réal. Tyrion aurait aimé voir comment sa sœur Cersei gérer les problèmes de l’hiver.

   Venait ensuite Jorah Mormont. L’homme était tout aussi taciturne qu’à l’accoutumé. Un sentiment exacerbé par le fait que Jon s’en était allé seul avec Daenerys, chacun ayant décidé de prendre un dragon pour se déplacer plus rapidement. De fait Jorah ne prenait jamais la parole, préférant toiser les cieux d’un air sombre. Il était connu de tous de ses sentiments qu’il éprouvait à l’égard de la reine.

   Seul Davos ressemblait le plus à un compagnon agréable avec qui Tyrion appréciait d’avoir des échanges lorsque l’ancien contrebandier daignait lui adresser la parole. Après tout Davos n’appréciait pas énormément les Lannister et il savait que c’était Tyrion qui avait établi le stratagème du feu grégeois lors de la bataille de la Néra qui avait vu la mort de tant d’hommes dont l’un de ses fils. L’expédition récente à la capitale avait certes permit un certain rapprochement entre tous deux mais de là à pouvoir parler d’amitié.

   En ce qui concernait Brienne et Podrick, il y avait longtemps que ceux-ci n’étaient plus parmi eux. En effet la grande blonde avait décrété préférait voyager de son côté et si Tyrion en jugeait par son empressement de gagner Winterfell il était persuadé que cette Brienne devait avoir parcouru la moitié du trajet à cette heure-ci. Pauvre Pod qui devait jouer les écuyers. Si Tyrion avait eu son mot à dire il aurait laissé le jeune homme en sécurité derrière les enceintes de Blancport.

   Quoiqu’il en fût, Tyrion aurait échangé ces vis-à-vis actuels contre Varys, voir même Bronn si cela aurait été possible. Son ami lui avait manqué. Lui et sa manière de voir l’amitié comme un profit financier qu’il pourrait en tirer. Bronn pas plus que Varys n’étant présent, Tyrion se voyait contraint de faire avec ce qu’il avait sous la main.


   Derrière eux se pressait la caravane et les hommes d’armes que le seigneur Manderly avait détachés pour apporter son aide à Winterfell. Outre de nombreux vivres, les chariots renfermaient bon nombre de vêtements chauds destinés à l’armée de Daenerys que la longue caravane escomptait rejoindre sur la route royale.

   Tyrion savait que les Immaculés étaient des soldats résistants et endurant, toutefois ceux-ci n’avaient jamais eu à affronter l’hiver alors qu’ils se tenaient sous la chaleur cuisante de la ville d’Astapor. Aussi Tyrion se doutait-il que beaucoup d’Immaculés risquaient de ne pas survivre bien longtemps avec des températures qui chuteraient sous les zéros degrés. Comme il l’avait judicieusement fait remarquer, Daenerys ne pouvait se permettre de sacrifier autant d’hommes, pas alors qu’elle en aurait un grand besoin pour contrer les armées des morts.


« Sans Jon jamais Manderly n’aurait consenti à se séparer de tous ces pourpoints, marmonna Tyrion pour lui-même. Cette haine pour les Targaryen et les Lannister est tenace dans le Nord. Je gage qu’il me faille encore suivre de nombreux affronts envers ma personne. »


   Et face à la perspective peu réjouissante quant à ce qui l’attendait, Tyrion se contenta de continuer à marcher, posant l’un après l’autre un pied devant lui, cherchant à ne pas penser à la souffrance qui l’irradiait à chacune de ses foulées.


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   La journée tirait vers la fin de l’après-midi et déjà la lumière du jour allait décroissante. Une halte fut ordonnée pour la nuit à venir. Ce ne serait pas encore aujourd’hui que s’effectuerait le recoupement avec l’armée de Daenerys.

   Tyrion n’y voyait pas d’inconvénient. La Grande Guerre prophétisait par Jon Snow avait beau se profiler dans un avenir proche, pour ce qu’il en savait les morts n’avaient pas franchi le Mur et à moins qu’ils leur soient soudainement pousser des ailes, les hommes seraient encore à l’abri de cette menace.

   En vérité Tyrion ne ressentait qu’un danger immédiat. Une attaque surprise de Cersei. Certes sa sœur avait promit d’apporter son aide dans les événements à venir, Tyrion ayant trouvé les bons arguments pour l’inciter à consolider une alliance avec son ennemie Daenerys. De plus, à Blancport Tyrion avait affirmé que Cersei ne les trahirait pas.

   Or il connaissait suffisamment sa sœur pour savoir qu’en effet celle-ci serait capable de fomenter une fourberie à sa façon si elle y voyait là une opportunité d’apporter un coup mortel à ses adversaires.

   Tout en se rapprochant du feu que venait de lui allumer un des fantassins de Blancport, Tyrion se mit à penser à Jaime, s’interrogeant sur ce que pourrait faire son frère si Cersei décidait de rompre la promesse d’apporter son concours dans la lutte contre les morts.


« Bah sans doute fermera-t-il les yeux comme pour ce qu’elle a fait au Grand Septuaire de Baelor. »


   Bien qu’au fond de lui Tyrion aurait volontiers giflé son frère pour justement les lui ouvrir. Une haute silhouette se dessina dans son dos et il sut de qui il s’agissait avant même que l’autre n’ouvre la bouche.


« On continue à se parler tout seul Lannister, aboya le Limier.

-Il faut bien que je m’entretienne avec les rares personnes pourvus d’esprit. »


   Le Limier grommela pour la forme avant de s’asseoir face à lui. Sandor leva les yeux en direction du ciel qui s’enténébrait de plus en plus.


« Mes avis qu’on aura bientôt droit à notre part de neige. Je déteste ça.

-Vous avez pourtant dû en voir tout votre saoul lors de votre voyage au-delà du Mur.

-Ouais et déjà avant ça, lui rétorqua l’autre d’un ton bourru. Et j’en ai eu ma claque. Le froid, la neige et les morts qu’ils aillent tous se faire foutre.

-L’hiver est là, se contenta de répondre Tyrion en repensant aux mots des Stark. Et d’après ce que peuvent en dire les Mestres de la Citadelle, ce sera le plus long et le pire depuis maintes générations.

-J’emmerde les Mestres, affirma Clegane. Ce ne sont que des fiottes qui restent bien enfermés au chaud entre leurs murs. Ils le sentiront sans doute même pas le froid bien calé devant leurs putains de cheminées. »


   Il y avait sans doute du vrai dans ce qu’avançait le Limier, Tyrion en avait conscience. L’Hiver ferait des milliers de victimes parmi les habitants de Westeros et qui n’auraient rien à voir avec la guerre à venir. Pendant ce temps-là, les Mestres resteraient devant la chaleur des foyers qu’ils se feraient alimenter régulièrement, profitant des vivres et du vin chaud qui feraient tant défaut au peuple qui souffrira de ne pas posséder ne serait-ce qu’un quignon de pain.


   Le silence s’installa entre les deux hommes et Tyrion en profita pour réfléchir à autre chose. Depuis le début du voyage devant le mener, lui et les autres, à Moat Cailin, Tyrion s’était interrogé sur Jon Snow. Il n’avait qu’entrevu ce dernier depuis que la proposition que Jon et Daenerys s’envolent sur le dos d’un dragon avait été émise. Et quand il l’avait aperçu, Tyrion avait noté que Jon chevauchait Rhaegal. Seul.

   Comment une telle chose pouvait-il être ? Jamais ces créatures n’auraient permit qu’un étranger les monte. Daenerys avait beau prétendre que ses « enfants » lui obéiraient si elle leur en donnait l’ordre, Tyrion restait dubitatif. Il s’était donc mit à théoriser sur ce mystère. Se pouvait-il que d’une manière ou d’une autre Jon ait pu avoir du sang de Targaryen ? N’importe qui se serait récrié devant une telle suggestion. Or Tyrion savait que le mystère sur la mère de Jon demeurait entier.


« Eh bien Ned si vous avez fricoté avec les Targaryen il n’est pas étonnant que vous ayez gardé cette union secrète, se déclara-t-il en aparté. »


   Il ne put aller plus loin quant aux raisonnements qu’il s’était tenu depuis qu’il avait envisagé cette possibilité pour la première fois. En effet son attention fut attirée par autre chose. Dans les ténèbres grandissantes il distingua une silhouette qui fila loin au-dessus de sa tête. Point minuscule qui se dirigeait droit vers le Sud d’après ce qu’il put en juger. Et à voir comment Sandor venait de se redresser il était manifeste que l’intéressé avait eu la même vision que lui.


« On dirait que ta reine va dans la mauvaise direction, clama-t-il. Winterfell c’est au Nord. Ou alors c’est ce Snow qui ne sait pas comment piloter son putain de dragon. »


   Tyrion ne goûta pas au timbre sarcastique dont faisait usage son vis-à-vis. Si c’était bel et bien un dragon qui venait de passer à plusieurs centaines de mètres de hauteur alors il se déplaçait bigrement vite. Tyrion avait beau avoir fréquenté ces créatures, que ce fut Drogon ou encore les deux autres, il ne leur connaissait pourtant pas une telle pointe de vitesse. Quelque chose clochait.

   Jorah fit son apparition. Lui aussi avait assisté à cette scène à en témoigner que l’homme levait le nez en l’air.


« Vous avez vu ça, demanda Mormont. »


   L’inquiétude barrait son front, il devait sincèrement angoisser qu’il soit arrivé quelque chose à Daenerys et devait bouillir intérieurement à l’idée qu’il ne puisse apporter son aide à cette dernière.


« Ouais, c’était l’un des putains de dragons de votre reine, répondit Clegane. Elle s’est peut-être décidée d’aller rôtir cette putain de Lannister. »


   Tout en affirmant cela il guetta Tyrion pour voir comment allait réagir l’intéressé. Toutefois Tyrion se contrefichait de l’affirmation du colosse à la face brûlée. Bien au contraire la perspective de voir sa sœur hurler à la mort alors que le feu la dévorerait avait quelque chose de réjouissant.

   Néanmoins il n’en allait pas de même en ce qui concernait Jorah qui voyait dans les mots « putains de dragons » un affront envers la reine de Daenerys. Et avant que Tyrion n’ait pu ouvrir la bouche pour tenter de le calmer, Mormont avait déjà tiré l’épée au clair.


« Redites donc cela chien, grogna Jorah. »


   Peu impressionné, le Limier ricana, prêt à lui envoyer une de ces piques verbales. Tyrion leva la main pour les inciter au silence. La gravité de la situation qu’il éprouvait alors n’avait rien à voir avec les deux hommes qui durent le comprendre car ils obéirent sans rechigner.

   Tyrion toisait toujours le ciel. La vue du dragon ne le rassurait pas le moins du monde. Un mauvais pressentiment avait envahi toute sa personne tandis qu’un violent frisson lui parcourait le dos et dont le froid ambiant n’était pas la seule cause.


« Par les sept Enfers, faites que ce ne soit pas ça, pensa-t-il pour lui-même avant d’ajouter à haute voix, Viserion, c’était Viserion. »


   Sandor et Jorah le toisèrent, guère convaincu.


« Viserion est mort, répliqua Jorah sur un ton glacial. Nous l’avons vu de nos propres yeux, ajouta-t-il en se désignant tout comme le Limier.

-Alors le Roi de la Nuit l’a ramené pour en faire sa monture, réalisa Tyrion avec horreur.

-Le dragon a coulé, l’informa Sandor. Comment il aurait fait pour l’extraire de cette foutue flotte ?

-Je l’ignore, concéda Tyrion Lannister. Mais je suis persuadé d’avoir vu juste. »


   Une possibilité qui n’avait rien de rassurant pour aucune des personnes présentes.



« Si c’est vrai alors qu’irait-il faire dans le Sud ? D’après Jon Snow, c’est Winterfell qui sera la première cible de nos ennemis.

-Ce que nous devons surtout comprendre c’est que si le Roi de la Nuit se trouve bel et bien ici alors c’est que d’une manière ou d’une autre il est parvenu à franchir le Mur et il y a tout lieu d’en conclure qu’il en va de même pour son armée, déclara Tyrion. Il vaut mieux reprendre la route sans plus tarder sans quoi nous pouvons tomber sur les morts avant même d’avoir atteint notre destination. »


   Une perspective qui l’inquiétait au plus haut point. Il avait pu en voir un de près lors de l’entrevue à Fossedragon, Tyrion ne se sentait donc pas enclin à renouveler cette expérience. Jorah et Sandor, qui avaient face à des milliers d’entre eux, partageaient la même opinion que le nain.

   Malgré tout, une question taraudait l’esprit de Tyrion. Qu’est-ce qui pouvait bien pousser leur ennemi à se rendre si loin dans le Sud ? Et les deux réponses qu’il envisagea alors n’avaient rien de rassurantes. Soit le Roi de la Nuit était en quête de l’armée de Daenerys pour la décimer, soit il s’apprêtait à fondre sur la capitale pour y semer le chaos, la destruction et la mort.



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