La cour des grands

Chapitre 30 : Olliver

2131 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 14/05/2017 19:34


Olliver



Olliver attela son cheval à contre-cœur. Il avait en effet reçu l'ordre du Roi du Nord de partir pour Viergétang et d'avoir l'autorisation de poster des hommes là-bas pour empêcher les Lannisters d'accoster sur la baie des Crabes. Il n'aurait pu imaginer pire mission dans cette guerre alors que le reste de l'armée du Nord allait partir au combat dans une bataille sanglante et honorable. Au lieu de ça, Olliver était chargé de convaincre un vieux seigneur lâche. Il n'avait pourtant aucun talent en éloquence. Depuis son plus jeune âge, il était toujours silencieux et réservé. Il n'avait jamais voulu faire des discours devant une assemblée ou essayer de convaincre quiconque de quoi que ce soit hormis son père. Et il avait d'ailleurs échouer pour ce dernier. C'était sans aucun doute, pour lui, une perte de temps. Depuis qu'on lui en avait donné l'ordre, Karyl n'arrêtait pas de lui dire que cette mission n'était pas si éprouvante qu'elle en avait l'air. Pour le seigneur de Bel Accueil, cette mission était plus importante qu'elle n'y paraissait. Elle permettait d'éviter à l'armée du Nord de ne pas se faire attaquer de plusieurs côtés. De plus, elle amènerait la province dans les rangs de Robb, ce qui rajouterait des alliés supplémentaire pour la guerre. Malgré ces raisons, Olliver ne changeait pas d'avis mais son esprit était plus apaisé lorsqu'il sortait sa nouvelle épée de son fourreau. Cette nouvelle épée que lui avait offert Karyl pour sa promotion. Celle qu'il avait baptisé «Samwell» en référence au général qu'il avait tué lors de la «deuxième pluie de Castamere» et au fait que celui-ci a été son premier grand ennemi tué de ses propres mains. C'était le plus magnifique cadeau qu'on lui eut jamais offert et lord Karyl, maintenant qu'il n'était plus son seigneur, était devenu un ami cher. Olliver n'arrêtait pas de répéter à sa sœur, Hilda, la chance qu'elle avait d'avoir Karyl à ses côtés. Celle-ci le savait et n'arrêtait pas, elle aussi, de le réconforter pour sa pittoresque mission.


Dès qu'il eût fini de mettre son armure, Olliver alla aux portes du campement où les deux cents hommes, qui l'accompagneraient et feraient office de garde à Viergétang, l'attendaient. Hilda et Karyl lui dirent adieu et il dirigea son cheval en face de celle qui était désormais sa propre troupe personnelle.


-Mes amis ! Mes frères ! Cria-t-il. Nous partons aujourd'hui pour Viergétang. Je sais que ce n'est pas une destination glorieuse mais les ordres sont les ordres. Néanmoins, si ces salopes de lionnes ont pour projet d'attaquer notre armée par le nord, nous serons fier d'avoir pu empêcher que leur plan puisse être mis en place. Alors ? Qui veut sauver l'armée du Nord de la défaite ?! Qui veut empaler des lions sur les rives de la baie des Crabes ?!


Les soldats crièrent alors en chœur leur joie et acclamèrent celui qui était à présent leur général. Olliver était fier d'avoir pu provoqué un tel sentiment parmi ses soldats. Il venait de se rendre compte aussi de sa montée dans la hiérarchie de guerre. De fils bâtard devenu écuyer, il était aujourd'hui à la tête d'une troupe, certes petites mais assez pour se sentir puissant. Les soldats se mirent alors en route sous le commandement d'Olliver et prirent la direction du Nord-Est. Olliver était choqué par ce qu'il venait de se passer. En effet, il avait réussi à gagner le respect de ses hommes avec un simple discours. Lui qui n'arrêtait pas de proclamer son manque d'expérience en éloquence, il venait de se prouver à lui-même qu'il avait un minimum de talent en cet art. Chose qu'il n'avait jamais imaginé jusqu'à présent.


Le lendemain matin, la pluie battait dru sur le campement. La terre était boueuse et il fallut longtemps pour lever le camp et se remettre en route. Quand ils arrivèrent tous devant les portes du château de Viergétang quelques heures plus tard, la pluie était encore vive et les sabots des chevaux ainsi que les pieds des soldats s'embourbaient dans la boue. Olliver demanda audience auprès du seigneur du fort et celui-ci mit longtemps à venir, ce qui avait pour effet de réveiller les nerfs d'Olliver et de ses soldats. Les portes s'ouvrirent et la troupe s'engouffra dans la cour du château. Il suffisait de regarder l'allure de la cour pour voir la pauvreté de cette région. Les pierres étaient vieilles, la végétation poussait sur les murs et certaines dalles du sol avaient disparus. Même les Jumeaux étaient plus beaux que ce vieux fort. En haut des escaliers, à l'abri de la pluie, se tenaient deux vieux hommes. L'un était sans aucun doute le mestre, reconnaissable par la chaîne qu'il portait autour du cou et qui montrait son lien avec la Citadelle. L'autre devait être le seigneur du château, celui avec qui Olliver allait devoir engager une sérieuse conversation. Il était assez petit et maigre. Il semblait avoir encore de l'énergie malgré son vieil âge. Son visage était antipathique et bouffi. Sa tenue royale était une simple tunique de cuir d'assez mauvaise qualité et il fixait Olliver d'un regard scrutateur. Olliver descendit de son cheval et s'approcha en montant les marches vers le seigneur. Celui-ci lui fit signe alors de se stopper et lui dit alors d'un ton ferme :


-Que vos hommes restent dans la cour durant notre discussion. Nous n'en aurons pas pour longtemps de toute manière.


Le ton qu'avait pris le seigneur avait suscité l'agacement d'Olliver mais il obéit et fit signe à ses soldats de rester à leur place. Olliver devait faire preuve, et il le savait, de courtoisie pour faciliter les négociations. Il ne pouvait pas paraître insolent devant lui. Il suivit alors le seigneur au sein du château et les deux hommes entrèrent dans la salle du trône. Le seigneur s'installa à sa place et Olliver resta debout devant lui tandis que le mestre se plaça aux côtés de son roi, prêt à lui prodiguer des conseils, à le supporter dans les négociations. C'est celui-ci qui prît la parole en premier :


-Vous êtes en face du seigneur de Viergétang, lord William de la maison Mouton. Qui êtes-vous ?


-Vous ne le savez pas ? Demanda Olliver.


-Ce sont de simples formalités. Commencez au moins par les respecter. Cracha le seigneur.


Olliver, malgré l'énervement qu'il éprouvait pour ce seigneur, comprit qu'il avait un désavantage, à présent. Il se rendit compte qu'il n'avait pas le droit à la moindre erreur. Aussi, il se rattrapa :


-Excusez-moi, lord William. Je suis ser Olliver, de la maison Frey, et ambassadeur de l'armée de Robb, de la maison Stark, et roi du Nord, auprès de vous. Je suis ici pour….


-Stop ! Gueula William. Ayant cessé les formalités, vous n'aviez plus à parler. Moi, je vous présente le mestre Kyren. Il sera là durant tout l'échange.


-Bien, lord William. Se résigna Olliver, contre son gré.


-J'ai reçu la lettre de votre roi avant votre arrivé. Je vous écoute. Accorda enfin le seigneur de Viergétang.


-Je suis venu ici pour avoir l'autorisation de placer des hommes en garnison, dans votre fort, pour nous protéger, vous et l'armée du Nord, d'attaque Lannister voulant accoster à la baie des Crabes. Me donnez-vous votre consentement, lord William ?


-Absolument pas. Répondit catégoriquement le seigneur.


Olliver essayait du mieux qu'il pouvait de calmer sa colère.


-Mais...pourquoi donc ? Demanda-t-il. L'on m'a rapporté que vous subissiez des persécutions sur votre fort. N'avez-vous pas besoin de protection ?


-Des persécutions qui viennent certes du sud et de bandits mais aussi du nord. Fit remarquer le mestre. C'est la raison pour laquelle Viergétang est resté neutre dans cette guerre. Il n'a aucune raison d'en prendre part.


-Je ne vous demande pas d'en prendre part. Mais si vous refusez cette garnison, la guerre aura des répercussions sur vous, que vous le vouliez ou non. Voulez-vous vraiment voir votre peuple passer au fil de l'épée des lions ?


-Il est vrai que les bénéfices humains sont clairement visibles dans votre proposition néanmoins, si les Lannisters viennent nous attaquer, ce n'est pas le faible nombre d'hommes que vous nous avez apportés qui nous sauvera. Répondit Kyren.


-Avec vos hommes, nous pouvons les vaincre.


Le seigneur se leva alors.


-Vous voulez que mes hommes se battent ?! Je ne risquerai pas un seul homme dans votre pitoyable guerre !


-Vous serez bien obligé d'en risquer quand les Lannisters viendront. Répondit fermement Olliver qui commençait à perdre son sang-froid. Lord Tywin est un homme intelligent. Il a forcément prévu de prendre Viergétang pour attaquer l'armée du Nord par derrière.


-Et bien, quand ils viendront, je signerai un pacte avec eux et nous intégrerons leur armée !


Le roi alla devant une fenêtre.


-Alors vous accepteriez de vous lier à la cause des Lannisters et non à la nôtre ?!


-Êtes-vous donc aveugle, imbécile ? Ne voyez-vous pas que la guerre est perdue d'avance pour vous ? Jamais vous ne vaincrez Tywin car jamais, de toute sa vie, il ne tomba à la guerre.


-Vous avez tort. L'hiver vient et les Lannisters n'y survivront pas. Le Nord se souvient de la mort du seigneur de Winterfell, des soldats tués à la capitale. Quand le loup voit qu'il perd les siens, sa vengeance est terrible et victorieuse.


-De la maison Frey, hein. Continua William d'un ton plus calme. Tu es donc forcément un bâtard. Le bâtard de ce salopard de lord Walder Frey qui se terre dans ses murailles et qui n'attend que la fin de la bataille pour en sortir. Dès votre arrivée en ces murs, votre origine vous avait déjà fait perdre d'avance. Déguerpissez de mon château. Mon peuple n'a pas besoin de vos soldats pouilleux.


C'était le coup de trop. Olliver resta un temps immobile et répondit :


-C'est vous qui allez perdre, sale chien. Vous critiquez mon père alors que vous faîtes la même chose. Vous vous terrez dans vos murs en attendant que la tempête se calme. Vous êtes un lâche salopard qui ne sache rien faire d'autre que se cacher. Vous n'êtes pas digne de votre statut de seigneur.


William quitta la fenêtre et s'approcha d'Olliver en serrant les poings.


-Ne...revenez...plus….chez moi, bâtard.


Olliver ne réussit plus à se contrôler et vit ses bras dégainer son épée et couper la tête du seigneur au niveau du front. La partie supérieure de sa tête se détachait du corps dans un gisement de sang et de cervelle et tomba sur le sol, suivi par ce qu'il restait du seigneur. Olliver tua ensuite, dans son élan, les deux gardes qui se précipitèrent sur lui. Il arrêta alors le mestre surprit en train de s'enfuir en criant :


-STOP !! Ne partez pas ! J'ai besoin de vos services.


Le mestre s'approcha de lui, le pas tremblant.


-Vous allez envoyer une lettre au roi du Nord informant de la mort de lord William Mouton, mort de vieillesse juste avant mon arrivé. Dîtes-lui aussi que je deviens temporairement le seigneur de Viergétang et que le Nord protège désormais la baie des Crabes. Ordonna Olliver. C'est compris ?


-Oui,….mon….seigneur.


Le mestre s'en alla alors vers la volière pour obéir aux ordres de son nouveau maître. Olliver s'assit alors sur le trône. Il ne s'était plus contrôlé durant un temps. Un temps assez court pour renverser le gouvernement de Viergétang. Il commença à s'affoler et plongea sa tête dans ses mains. Que venait-il de faire ? Il n'avait jamais vu sa colère prendre une proportion telle. Et il allait dorénavant subir le lourd fardeau de devoir diriger un royaume à lui seul. Il regarda le corps du seigneur et ceux des gardes tués. Une petite voix dans sa tête lui disait : «Regarde ce que tu viens de faire. Tu vas un jour en subir les conséquences. Et ce sera de ta faute. C'est ta faute.». Et une autre lui disait : «C'est bien fait pour eux. Ce William a mérité ce qui lui arrive. Que son corps pourrisse dans les Sept Enfers.».


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