Apparences trompeuses
Chapitre 1 : Apparences trompeuses
6696 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 27/08/2025 13:28
Cette fanfiction participe au Défi du Forum de Fanfictions.fr Qui êtes-vous et qu’avez-vous fait de… ? (janvier à février 2023) en Seconde Chance
Apparences trompeuses
7 novembre 2008, au chalet de Tricia, en soirée.
Mélinda était arrivée depuis peu sur place. Son cœur battait la chamade, des centaines de pensées contradictoires se succédaient en son esprit : en un mot, elle craignait les pires scénarios pour son mari, Jim. Malgré le doux murmure du vent automnal et les feuilles qui tombaient gracieusement des arbres, la jeune brunette ne se laissa pas émouvoir, son regard glissait sur le paysage, pourtant époustouflant, pour concentrer toute son attention sur le petit édifice en bois au bout du pavé en pierres en retrait de la demeure principale. Cet édifice, où un danger rôdait pour son mari selon les propos de l’esprit errant qui l’avait averti, était de taille modeste avec une porte en son centre et une fenêtre de côté. Elle remarqua que leur ami policier, Carl Neely, était arrivé. Celui-ci, un homme de grande taille en uniforme aux cheveux marron et aux yeux sombres, lui fit un signe de ne pas bouger et s’avança prestement derrière l’arbre au plus près de la cabane pour mieux évaluer la situation dans celle-ci.
Deux silhouettes se disputaient un fusil de chasse près d’une fenêtre d’où filtrait de la lumière : l’une grande et élancée, l’autre plus petite et trapue — Jim et l’ancien fiancé de Tricia. Chacun tirait l’arme vers lui, déterminé à empêcher l’autre de s’en emparer.
Au moment où l’ancien fiancé faillit mettre la main sur l’arme, l’arrachant presque à Jim acculé contre la fenêtre, une troisième forme apparut derrière eux. Cette apparition gigantesque fit cesser tout mouvement des protagonistes qui s’éloignèrent l’un de l’autre, éteignant les lumières de la pièce.
Incertain et perplexe sur ce qu’il venait de voir, l’agent de l’ordre courut et ouvrit la porte d’un coup sec du pied. Il tomba nez à nez avec un monstre titanesque. Une créature féérique étrange haute de trois mètres aux écailles sombres vert forêt, au ventre écarlate et à trois têtes. Ses ailes géantes vert feuille s’agitèrent de manière désordonnée. L’inspecteur brandit son arme et parcourut rapidement du regard la salle. Dans un coin gisait, l’ancien fiancé de Tricia qui semblait grièvement blessé avec sa chemise blanche déchirée et salie aux manches et au collet, et, dans le coin opposé, Jim, arme à la main, qui se traînait debout avec difficulté. Le policier cria pour camoufler la peur qui se lisait pourtant sur son visage :
— Halte ! Mains en l’air ! Lâchez votre arme !
Jim obtempéra, repoussant le fusil au fond de la pièce, loin de la portée des mains de quiconque. Carl avança d’un pas sûr vers le Dragon et lui ordonna :
— Retirez votre déguisement et sortez vos papiers !
Le monstre, Zmeï Gorynytch, le dragon tricéphale des contes slaves, éclata de rire, vomissant un feu vers le plafond. Ce qui propagea un incendie flamboyant dans la cabine. La créature des contes attrapa Jim entre ses terribles serres et s’envola, nullement affectée par les tirs hasardeux du policier sur ses pattes ou son dos ou les coups de poing et de pieds de sa proie. Carl recula par précaution vers la sortie.
L’inspecteur appela immédiatement du renfort, aussi bien ses collègues, que des ambulanciers et des pompiers.
Mélinda, tremblante, yeux écarquillés, se déplaça vers son ami, ignorant un esprit errant à sa droite qui gesticulait frénétiquement et ne cessait de répéter « Faites attention ! »
Elle demanda au policier d’une voix hésitante :
— Où… est Jim ? Est-il… vivant ? Que vient-il… de se passer ?
— Je sais ce qui vient d’arriver et je vais vous aider, Miss Gordon, affirma une voix puissante et calme derrière son dos au fort accent slave.
La médium aperçut le visage encore plus blême de l’esprit errant qui était toujours près de l’inspecteur. Elle observa le défunt : une jeune fille(1), adolescente, grande et chétive avait un visage angélique. La chevelure brune était gracieuse, mais les yeux marron tristes apportèrent une mélancolie à son être. Elle était enveloppée dans un large peignoir bleu foncé scintillant qui flottait autour d’elle, accentuant encore plus sa maigreur quasi cadavérique. En dessous du peignoir, elle portait une simple robe blanche qui lui arrivait jusqu’aux chevilles. Mélinda détacha son regard du fantôme qui était étonné que quelqu’un puisse le voir.
— Vous me voyez ?
La petite médium ne fit que opiner discrètement du chef et se retourna, curieuse de connaître le propriétaire de cette voix, et nota, à quelques pas d'elle, un singulier énergumène. Un svelte jeune homme à l’air royal et sévère, aux yeux marron cernés, traces de ses nombreuses nuits d’insomnie, et aux cheveux noirs comme l'ébène. Il portait un étrange accoutrement qui semblait tout droit sorti des films du Moyen Âge : un manteau bleu au bord en zibeline richement décoré déboutonné et, en dessous, une longue robe aristocratique d’un temps révolu rouge et blanche ornée de pierres précieuses sur les bords et de motifs traditionnels slaves au niveau de la poitrine. Une couronne sur la tête qui lui donnait un air majestueux complétait sa tenue. Ses souliers bruns foncés ne touchaient pas le sol.
— Qui êtes-vous ? lui somma le policier, sortant un calepin et un stylo, nullement impressionné par la prestance du personnage. Déclinez votre identité !
— Non ! hurla le fantôme au bord des larmes. Fuyez ! Fuyez ! Avant qu’il soit trop tard !
— Pourquoi ? murmura la jeune chuchoteuse d’esprits, perplexe.
L’adolescente se déplaça aux côtés du singulier personnage, traits tendus, dardant un regard colérique sur lui. Esquissant un faible sourire, le nouveau venu répondit :
— Je suis Kochtcheï l’Immortel, j’habite en Alaska depuis de nombreuses années…
Il passa une main sur son menton, caressant sa barbe soigneusement entretenue.
— … En fait, depuis 1800, soit un peu plus de deux cent ans, chuchota-t-il.
Mélinda promena son regard du nouvel arrivant à la revenante.
— J’ai ma datcha là-bas ! … ou plutôt, devrais-je dire ma maison de campagne ! continua-t-il d’une voix plus assurée.
Il porta son regard incandescent sur la médium, sourire affable au visage, ce qui lui donna un air moins austère et plus convivial, voire sympathique.
— D’ailleurs, je suis le tsar du Vingt-Septième Royaume, c’est là-bas que se trouve ma résidence principale, et le monstre qui a vomi son feu dans cette cabane et qui est parti avec votre mari, Miss Gordon, est le Dragon Tricéphale, Zmeï Gorynytch, un méchant dragon qui possède des trésors et qui se complaît à voler des femmes… et maintenant des hommes, semble-t-il ! conclut-il avec ironie.
— Où se trouve le repaire de ce dragon ? l’interrogea Mélinda sous le regard soupçonneux du policier qui prenait des notes avec assiduité.
— Oui, je le sais, puisque j’ai déjà eu à l'affronter, quand il avait enlevé ma première femme Vassilissa, se lamenta-t-il. De laquelle j’ai divorcé il y a fort longtemps, plus de cinq cent ans, parce qu’elle ne me donne point d’héritier, mais c’est un autre sujet ! Je vous propose ma collaboration pour délivrer votre mari ! En toute bonne foi !
Les deux mortels s’entre observèrent ; Carl fronça des sourcils et une petite moue sceptique se dessina sur le visage de la médium. Chacun pensa « Mais qu’est-ce qu’il raconte ? Il est complètement dingue ! » Mine pensive, l’inspecteur réfléchit pendant plusieurs minutes, tambourinant le stylo contre son calepin.
— Je viens avec toi, Mélinda, affirma Carl en cessant de jouer avec le stylo. Je ne peux te laisser seule affronter un dragon ! Au moins je connais des techniques pour maîtriser des personnes armées. Je peux toujours t’être d’une aide ! Bien que je me demande comment est-il possible de maîtriser un dragon ?
Il se tourna vers le sorcier folklorique pour commenter avec étonnement :
— Mais vous, vous savez comment faire ! D’ailleurs, j’ignorais qu'il existait encore des rois et des dragons dans notre monde !
Ignorant la question, Kochtcheï chuchota, inaudible, une formule en russe qui éteignit instantanément le feu, sous le regard ébahi du gardien de la paix.
— Eh oui ! Je suis un tsar très puissant ! Jeune représentant de la maréchaussée, vous ignorez encore que le monde des contes de fées est réel ! J’ai récemment eu des pourparlers avec les maris de la Belle au Bois au dormant et de Cendrillon, dont je tairai les noms pour ne pas avoir la presse people avide de détails à mes trousses !
Les deux Américains échangèrent un regard qui semblait dire « Est-ce une blague ou la réalité ? »
— Comment savez-vous mon nom ? l’interrogea la médium.
— Secret d’État ! Mais bon, blague à part …
Le Russe tourna la tête de tous côtés pour constater que des policiers, des ambulanciers et des pompiers arrivaient de partout.
— … Et nous ferions mieux de quitter les lieux avant qu’il soit trop tard. Auparavant, faisons une halte. Venez casser la croûte dans ma demeure.
— Mais Jim ! s’affola Mélinda au bord de la crise de panique.
Elle serra ses mains en poings d’impuissance, les yeux remplis de larmes et de tristesse. Elle fondit en sanglots.
— Il est en danger !
Le mage maléfique eut un faible sourire avant de répondre posément :
— Miss Gordon, je comprends tout à fait votre souci pour votre mari, Jim Clancy, mais il vaut mieux affronter un dragon à trois têtes à ventre plein. De toute manière, je n’ai jamais entendu que des dragons se nourrissent de chair humaine, soyez sans crainte de ce côté-ci.
Carl approuva d’un signe de tête. Le sorcier prononça d’une voix de stentor une incantation en slavon en levant ses mains chargées de bagues dans les airs.
Sous le regard impuissant de l’esprit errant, Mélinda, Carl et Kochtcheï disparurent de sa vue. L’entité invisible les suivit également, ne voyant pas d’un bon œil l'attitude du mage slave.
***
Au château de Kochtcheï au Vingt-Septième Royaume.
Le sorcier, lévitant, ordonna à ses serviteurs invisibles de préparer le festin et les lits pour ses invités. Il sourit courtoisement à Mélinda, lui faisant un baise-main galant et affirma :
— Venez gente dame …
Il se tourna vers le policier qui ajustait sa ceinture autour de la taille, certain que son arme de fonction se mouvait toute seule.
— … et noble seigneur…
Kochtcheï rapporta son attention vers Mélinda et s’inclina respectueusement devant elle.
— … Entrez dans ma demeure, goûtez mon pain et mon sel, comme il sied à tous les hôtes, et quelques mets exquis. Par contre, point d’alcool ce soir. Il faut être sobre pour s’attaquer à Zmeï Gorynytch.
Les deux mortels approuvèrent d’un signe de tête et suivirent leur amphitryon sous le regard curieux de l’esprit errant qui les attendait.
Le trio entra dans la salle du trône, une immense pièce dallée de granit et aux murs de marbre sertis d’opales, de diamants et d’émeraudes. Au centre trônait une table gigantesque en amboine massif recouvert d’un élégant chemin de table en lin le plus fin et décoré de fil d’or et d’argent. Sur la table reposait un panier d’osier rempli de petits pains alléchants et agrémenté d’un autre panier en or rempli de sel de mer. Trois verres de cornaline sertis de diamants côtoyaient sagement un couvert complet en argent. Les sièges, qui s’apparentaient plus à des trônes, étaient en or massif ornés de saphirs, de rubis et de jades et décorés de gracieux coussins cousus au fil d’or aux motifs slaves traditionnels.
Dès que Mélinda s’assit, l’esprit errant se manifesta à sa droite et lui chuchota :
— Les apparences sont trompeuses !
— Jeune fille, je ne comprends rien à ce que vous dites ! Je suis Mélinda Gordon et je peux vous aider à quitter le monde des vivants… et des contes. Qui es-tu ?
— Je suis…
Elle disparut pour se manifester à la droite du tsar. Elle arracha la pomme d’or qu’il tenait entre ses doigts et s’apprêtait à la croquer à belle dent. La défunte la lança au milieu de la table renversant le panier rempli de pains. L’esprit errant revint près de la médium et lui répondit :
— … Je suis Caitlin Mahoney, la belle-fille de l’inspecteur Carl Neely. Je sais que je ne suis plus vivante depuis plusieurs mois, mais mes parents et mon beau-père l’ignorent encore !
Mélinda devint blême, des larmes lui montèrent aux yeux malgré elle.
Kochtcheï rappela la pomme d’immortalité en un geste de la main et, d’un ton mielleux, interrogea la petite brunette :
— Qu’est-ce qui vous attriste tant, gente dame, Miss Gordon ?
— C’est un défunt qui erre dans votre palais, lui répondit-elle sincèrement.
Les yeux de son interlocuteur brillèrent d’une lueur irréelle, avant de reprendre sa nuance habituelle. Son visage était demeuré de marbre.
— Je vais régler son cas ! affirma-t-il avec véhémence. Vous n’avez pas à vous faire de souci, Miss Gordon !
Caitlin, avec une grimace, se dissipa dans les airs.
***
Après plusieurs heures passées à manger des plats raffinés et à discuter d’un plan d’attaque pour demain, Carl et Mélinda partirent dormir dans leurs chambres respectives. Kochtcheï, qui ne parvenait pas à trouver le sommeil, se rendit dans la salle du trône. Il invoqua Caitlin en ces mots :
— Princesse Caitlin Mahoney, Katiouchka(2) chérie, ma bien-aimée, manifestez-vous dans le reflet de mon assiette d’argent. Et toi, pomme d’or, tourne dans la petite assiette d’argent. montre-moi la princesse susmentionnée !
Le miroir vira au doré, puis au vert pomme, avant de montrer la belle-fille de l’inspecteur.
Il lui demanda gentiment :
— Caitlin Mahoney, ma chère et douce princesse, pourquoi restez-vous encore dans mon palais ?
— N’essayez même pas de me flatter ! Comment osez-vous me poser la question ? s’offusqua-t-elle. Vous, le voleur des jeunes femmes !
Levant sa main droite aux cieux pour l’apaiser, le sorcier se défendit :
— Mademoiselle, j’ai changé ma manière de procéder, ne l’avez-vous pas remarqué ? Votre perte m’a énormément affligé et m’a amené à reconsidérer mon approche auprès des femmes. En voyant l’attitude du Dragon, j’ai décidé de réparer le tort que j’ai pu causer au cours de mon existence millénaire !
La défunte le scruta avec méfiance attentivement, mais elle ne décela aucune duplicité dans le regard ou l’attitude de son ravisseur. Elle songea que le sorcier avait peut-être changé pour de bon. L’amour ne pourrait-il pas transformer les hommes ? Néanmoins, elle conservait une certaine lucidité désabusée : un être d’un tel âge, et immortel de surcroît, ne saurait modifier ses habitudes avec une telle facilité.
— Je vais aider cette gente dame, Miss Gordon, à délivrer son mari des griffes de Zmeï ! continua le tsar énergiquement, avec une lueur de détermination dans le regard. Sur mon honneur !
La jeune fille était perplexe, mais approuva d’un signe imperceptible de la tête. Son interlocuteur se versa un verre rempli d’un liquide transparent.
— Alors, ma chérie, continua le sorcier d’une voix inhabituellement douce, me promets-tu de ne plus me hanter ? Et de me laisser seul, parce que ta présence m’attriste profondément. J’ai deviné que c’est toi qui a lancé la pomme de jouvence. Il n’y a que Katiouchka pour le faire…
Un petit sourire nostalgique se dessina sur son visage millénaire qui s’estompa rapidement.
— … D’ailleurs, ne pense pas que je ne sens pas ta présence dans mon palais ! Au contraire, pour moi, tu es vivante, mais je sais que le temps de deuil n’est pas encore passé.
Ses traits s’affaissèrent, sa voix devint plus rauque.
— Tu as sans doute remarqué que j’ai plongé dans l’alcoolisme depuis ta mort …
Il leva son verre dans les airs.
— … Cela fait quelques mois… que la vodka est devenue mon unique boisson.
— Oui, commenta-t-elle d’un ton bourru. Je m’en suis bien aperçu !
Le sorcier vida son verre d’alcool, soupira et reprit :
— Alors pourquoi t’achargne-tu sur moi ? Tu m’attristes… Pourquoi … Ne pars-tu pas enfin au-delà du fleuve Smorodina(3) ? Que crains-tu de l’autre côté de la vie ? Tu auras le droit de te réincarner, j’en suis certain !
Un silence s’installa.
— Allez ! Partez, ma chérie !
Des larmes coulèrent sur les joues du mage.
— Pomme, cesse de me montrer ma bien-aimée princesse ! ordonna-t-il d’une voix cassée.
Et le roi rangea ses instruments de voyance et sirota son verre d’alcool, réfléchissant au meilleur plan pour se débarrasser rapidement de Zmeï Gorynytch. La défunte était encore dans la salle. Il cria :
— Caitlin Mahoney, j’ai dit de me laisser seul !
L’interpellée sursauta et quitta la pièce immédiatement. Le sorcier plana jusqu’à son immense bibliothèque et fouilla dans maints grimoires pour trouver la formule la plus adéquate pour terrasser le monstre.
Une idée germa dans son esprit, un faible sourire lui étira les lèvres. Dans la pénombre où seule la lumière des candélabres apportait un jeu d’ombre et de lumière, cela accentuait encore plus la maigreur de Kochtcheï et lui conférait un air sinistre.
***
Après la conversation de Caitlin et de Kochtcheï, dans la chambre de Mélinda.
L’épouse de Jim dormait d’un sommeil agité, lorsque la belle-fille de Carl se déplaça jusqu’à elle. Depuis le seuil, l’adolescente lui murmura :
— Madame Gordon ! Madame Gordon ! Je vais vous expliquer les circonstances de ma mort.
Ouvrant péniblement les yeux, la médium se leva et s’assit sur le bord du lit, fixant Caitlin.
— Je t’écoute !
— je suis morte d’inanition dans la demeure de Kochtcheï, votre hôte. Ce dernier n’est pas tel que vous le pensez ! C’est un ravisseur immortel de jeunes femmes ! Il a l’habitude de vérifier leur virginité par lui-même, incluant l’usage de la force, selon les propos de ses serviteurs !
L’étonnement se lisait sur le visage de Mélinda qui ouvrit la bouche pour l’interroger, mais la belle-fille de l’inspecteur se dissipa dans les airs avant qu’aucun son ne franchisse les lèvres de son interlocutrice. Une sueur froide coula le long de l’échine de cette dernière, guère ravie à devoir se défendre contre un tel sinistre personnage et bien plus puissant qu’elle. Elle ne parvint plus à se rendormir et passa le reste de la nuit à fixer le plafond.
***
Le lendemain matin, Vingt-Septième Royaume.
Le sorcier, premier debout, attendit ses invités pour prendre un petit déjeuner digne des valeureux combattants de dragon : thé, café, blini, sirniki, omelettes, bacon et kacha(4).
Carl et Mélinda prirent rapidement le premier repas de la journée et s’équipèrent avec les armures que leur donna leur amphitryon. Dotés des armes les plus diverses, épées, arcs, lances, javelots et massues, les mortels n’étaient pas en manque d’équipement. Kochtcheï, vêtu de son armure rutilante, ceignant son épée à la taille, affirma d’une voix assurée, sous le regard suspicieux de Caitlin qui suivait Mélinda :
— Miss et Mister, soyons prêts à affronter le terrible et ignoble Dragon tricéphale. Je me porte garant de vous ramener chez vous une fois le Mal réduit à néant !
— Pourtant, fronça des sourcils le policier, c’est vous qui avez kidnappé ma belle-fille, Caitlin. Mon amie m’a tout expliqué ce matin. Comment pouvons-nous croire que vous n’avez pas jeté votre dévolu sur Mélinda ?
— Je vous le jure sur mon honneur que mes intentions sont nobles ! Le Ciel m’en est témoin !
Un coup de tonnerre gronda au loin.
— On n’a pas le choix, ajouta Mélinda en observant avec attention la belle-fille de son allié.
— Allons-y ! s’exclama le roi. Mais avant, prenons un verre de vodka pour le succès de notre entreprise périlleuse !
Il fit apparaître d'un geste de la main trois petits verres de vodka et les distribua à ses compagnons d’armes. Seul Carl accepta ; le mage maléfique vida les autres verres.
— En outre, continua Kochtcheï d’un ton plus solennel, lorsque je créerai une diversion en l’assaillant avec mes sortilèges, vous devrez cibler le point vulnérable de son armure naturelle, à savoir le ventre, au moyen d’épée, de javelot ou de flèches.
Il se tourna affablement vers la médium.
— Miss, pour votre sécurité, demeurez en retrait et attaquez le monstre avec des flèches. Je ne veux pas que vous mouriez avant l’heure, laissant votre mari veuf et sans descendance ! Allons au combat, mes braves héros !
Et le trio sortit du château et arriva dans une forêt de feuillus qui avoisinait la demeure. Plus ils avançaient, plus la sombre forêt se métamorphosait : les chênes et bouleaux cédèrent la place aux conifères et un silence oppressant remplaça le joyeux zinzinulement des oiseaux. Les bruits de l’armure et des pas des mortels sur les feuilles mortes étaient le seul son. Ils suivirent l'étroite sente qui se perdait en zigzaguant au cœur des ténèbres les plus profondes. Aucune lumière ne parvenait à percer les frondaisons et l’unique source de luminosité provenait des armures et des armes scintillantes.
Après plusieurs heures de marche, ils arrivèrent devant une grotte. Faisant un signe aux mortels de rester en retrait, Kochtcheï plana jusqu’à l’entrée du repère.
— Zmeï Gorynytch, petit dragon tricéphale, l’apostropha-t-il. Sortez de votre trou ! Lorsque le Tsar du Vingt-Septième Royaume en personne arrive, il faut l’accueillir dignement, s’incliner et se plier à sa volonté ! Aucune discussion n’est possible, sinon, vous serez condamné de la peine capitale !
Le monstre courroucé sortit de sa sombre demeure. Il vomit un jet de flamme que Carl évita de justesse. Le mage maléfique fit un signe discret à ses compagnons de se mettre en position, puis il s'éleva dans les airs. Il capta l’attention du dragon et ses trois têtes le suivirent des yeux en ignorant Mélinda qui était en retrait à la droite de Kochtcheï et Carl à la gauche qui grimpa dans un sapin qui bordait l’entrée.
Le roi chanta victorieusement :
— Yesli v komnate tvoyey nochʹ, / Pritailsya po uglam mrak, / I net sil prognatʹ yego prochʹ, / Pozovi, ya rasskazhu — kak… (5)
Ces paroles résonnèrent à plusieurs kilomètres à la ronde tandis que les mortels passèrent à l’action simultanément. Carl transperça l’un des cous du monstre avec un javelot alors que Mélinda fendait le ventre de la créature avec des flèches durcies au feu. Le Dragon s’effondra, aveuglé par une lumière gigantesque qui, en s’intensifiant, fit fondre ses écailles, comme du métal dans une fonderie. Zmeï s’écroula, mort, laissant une dépouille fumante sur le sol.
Essuyant la sueur sur son front, le regard scintillant de fierté, le sorcier pénétra dans la demeure du Dragon pour constater la présence de nombreux coffres dispersés dans toute la pièce et, en son centre, de Jim, exténué et entravé par des liens magiques.
— Miss Gordon, votre mari est entier ! Pas un cheveu ne lui manque !
Kochtcheï claqua des doigts, ce qui délivra l’époux de la médium. Caitlin, présente depuis le début des combats, ne pouvait camoufler son étonnement, mais demeura coite.
— Et il est sain et sauf, libre et en sécurité, maintenant ! s’enthousiasma le mage. Aucun danger ne rôde dans les parages !
Les mortels avancèrent dans l’antre, méfiants et épuisés par le combat, particulièrement la médium. Jim, inquiet, serra tendrement son épouse, pour lui offrir son soutien et pour la réconforter.
— On partage le butin, les amis, cria le tsar. Je donne à chacun un coffre rempli d’or et de diamants, donc trois coffres multipliés par deux. Je prends le reste, non pas par appât du gain, mais pour que vous n'éveillez pas la jalousie de vos proches et voisins.
D’un autre claquement des doigts, il téléporta immédiatement les trésors dans les demeures respectives des mortels.
— Messieurs et gente dame, venez ! Je vous invite dans mon château pour célébrer la victoire, mets divins et boissons au programme ! Occasion pour reprendre des forces !
Le sorcier se tourna vers Jim Clancy qui le toisa nullement impressionné par sa forte stature et ses vêtements d’apparat.
— Vous êtes le mari de Miss Gordon, n’est-ce pas ? l’interrogea rhétoriquement le tsar.
Les yeux bleus de l’interpellé lancèrent des éclairs de colère au sorcier avant de lui répondre d’un ton sévère :
— Oui je suis le mari de Mélinda Gordon-Clancy ! Et tenez-vous loin de ma femme ! Ne pensez même pas mettre votre main sur elle, compris ?
Un petit sourire triste s’afficha sur le visage du mage. Il soupira et répondit :
— Je n’avais même pas pensé m’approcher de votre épouse ! Ni vous la voler, elle restera vôtre !
Kochtcheï baissa les yeux sur ses diverses bagues avant d’incliner imperceptiblement la tête, vaincu.
***
Au palais de Kochtcheï, quelques heures plus tard, après le festin.
Seuls le maître des céans et Carl burent jusqu’à tard le soir. Jim et Mélinda restèrent sobres et quittèrent assez tôt la pièce. La médium cherchait Caitlin. Au détour d’un couloir, elle remarqua la belle-fille de leur ami :
— Caitlin, l’aborda-t-elle. Pourquoi restes-tu encore à errer parmi les vivants ?
— Parce que je doute que Kochtcheï soit devenu bon et je redoute qu’il ne veuille faire de vous son épouse. Donc tant que je ne connaîtrai pas ses exactes intentions, je ne partirai pas dans la Lumière !
Elle baissa les yeux avant de murmurer :
— Aussi, dites à mon beau-père qu’il cesse de se culpabiliser de ma mort… C’était en dehors de ses possibilités d’action !
— Je vais de ce pas m’entretenir avec Carl, la rassura la médium avec son sourire le plus sincère, des larmes qui coulèrent sur ses joues.
La jeune femme, suivi de son mari, arriva dans la salle du trône où les deux hommes buvaient encore. Carl était manifestement enivré par ses consommations ; Kochtcheï, plus résistant, semblait imperturbable. Caitlin se matérialisa devant son beau-père et renversa le verre qu’il voulait porter à ses lèvres. Le policier se leva d’un pas chancelant sous le regard étonné de leur amphitryon qui salua ses hôtes d’un signe de tête avant de quitter la table en marchant en ligne droite jusqu’à sa chambre où il ne dormit point.
— Carl, l’interpella Mélinda, je voudrais te parler de ta belle-fille, veux-tu t'asseoir et m’écouter ?
— Oui, répondit-il.
Il s’avachit sur le siège plus qu’il ne s’assit et la regarda avec une lueur d’angoisse dans ses sombres yeux.
— Ta belle-fille Caitlin veut que tu cesses de te culpabiliser. Tu ne pouvais rien faire puisque Kochtcheï voulait faire d’elle son épouse.
— Mais elle était mineure ! protesta-t-il.
— Carl Neely, précisa Caitlin, c’est Kochtcheï qui m’a emporté dans son pays alors que je revenais de l’école. Depuis, je vivais chez lui, bien nourri et logé. Il me faisait la cour et s'autorisait à me dévorer du regard, me lançant quelques compliments. Je craignais qu’il ait mis des philtres d’amour pour que je le laisse se glisser dans mon lit ou un poison pour se débarrasser de moi si je le refusais. J’ai entendu de ses serviteurs invisibles qu’il était capable de vérifier par lui-même la virginité de celles qu’il enlevait. J’avais cessé de consommer la nourriture proposée, par crainte qu’il ne me viole et je suis morte d’inanition. Au moins, il ne m’a pas touché de manière indécente, ni essayé quelques autres entreprises plus déshonorantes !
Mélinda rapporta fidèlement les propos du fantôme. L’inspecteur, le visage empourpré par la colère, serra ses mains en poings et frappa violemment sur la table en s’exclamant :
— Sorcier immonde ! Il a tué Caitlin !
Il se leva, furieux, mais la jeune femme le retint. Elle lui dit :
— Carl, va dormir ! Ne laisse pas ta rage t’aveugler ! Un cerveau embrumé ne réfléchit pas adéquatement ! N’oubli pas qu’il est un puissant sorcier et assez retors, donc ne le provoque pas, sauf si tu veux qu’il te réduise en cendres et poussière en un clin d’œil !
Il soupira et, à contrecœur, se traîna jusqu’à sa chambre. La médium et son mari, à leur tour, regagnèrent leurs appartements privés.
***
Le surlendemain matin, dans la salle du trône.
Kochtcheï donna une accolade d’adieu à Jim, Mélinda et Carl.
Mélinda informa le policier :
— Carl, notre ami, ta belle-fille, Caitlin, est celle qui a renversé ton verre d’alcool hier soir. Elle est attristée que tu te culpabilises de sa mort.
— J’aurai dû mieux la protéger pour que ce sorcier slave des contes ne l’enlève pas pour femme ! Tu te rends compte qu’elle était mineure !
— Je ne l’aurais pas marié avant sa majorité, soit dix-huit ans, voire vingt-et-un ans, lui répondit posément le ravisseur de la défunte. Je l’aimais tellement que j’aurais pris mon mal en patience. Et vous voyez que je l’aime tellement qu’aucune autre femme ne peut la remplacer ! Sa mort résulte d’une mécompréhension, parce qu’elle a refusé de se nourrir, craignant que je ne veuille l’empoisonner ou lui donner un philtre d’amour. Ce que je n’aurais jamais fait ! J’aurai attendu son consentement avant de l’amener à convoler en justes noces !
Le tsar se tourna vers le mari de Mélinda et affirma, main sur le cœur.
— Vous voyez bien, je ne feins pas. Je n’ai même pas pensé une seule seconde à vous prendre votre épouse. D’ailleurs, je ne faisais que comparer Miss Gordon avec Caitlin Mahoney.
Il détourna son regard de son interlocuteur, observant le vide avant de continuer sur un ton plus doux :
— Ma Katiouchka bien-aimée, tu me manques cruellement ! Je vais t’attendre lorsque tu te réincarneras, je te reconnaîtrai, même si tu reviens dans vingt ans, cent ans ou mille ans ! Je suis immortel, le temps est de mon côté, ma chérie ! Je t’attendrais, peu importe où tu sois !
Il se pencha vers le policier pour lui murmurer :
— Et je me suis promis à moi-même de ne plus procéder ainsi. Je ne kidnapperais plus les jeunes femmes, ni n'emploierais la force pour les connaître plus intimement, mais je vais agir d’une manière civilisée, en demandant la main de la jeune fille, en lui faisant une cour décente, des lettres d’amour, entre autres. Bref, je m’employerai d’obtenir son consentement et sa pleine volonté à vouloir vivre avec moi, afin que nous soyons mari et femme pour l’éternité, tsar et tsarine de mon Royaume, le Tridevyatoe Tzastvo.
La défunte sourit, ravie de déceler une sincérité dans les yeux séduisants de son ravisseur. Carl grommela quelques paroles indistinctes avant de serrer poliment la main de Kochtcheï en signe de réconciliation. Caitlin tourna sa tête à droite, visage illuminé par une lumière qu’elle seule pouvait discerner.
— Je remarque une lumière ô combien accueillante et bienveillante ! Une douce merveille divine !
Elle se retourna pour affronter le regard de la médium, lui chuchotant :
— Est-ce pour moi cette clarté ?
Des larmes de joie dans les yeux et la voix tremblante d’émotion, Mélinda prononça :
— Oui, Caitlin ! Cette Lumière est pour toi ! Bon voyage !
— Merci !
Elle s'approcha de Carl et lui donna une accolade enfantine, lui murmurant :
— Merci Carl Neely pour tout ce que tu as fait pour moi ! Tu t’es montré meilleur que mon propre père ! Je te souhaite bonne chance avec ma mère !
La défunte se pencha vers son ravisseur, lui enlaçant amicalement les épaules :
— Un malentendu stupide, mon cher sac d’os. Tu vas me manquer ! Je te souhaite bonne chance dans ton entreprise pour trouver une épouse digne de toi !
— Je pense, commenta Kochtcheï, ému, que pour trouver une femme digne de moi, je vais patienter que Katiouchka se réincarne ! Bon voyage ma princesse chérie ! N’aie pas peur du fleuve Smorodina ! C’est une étape de l’existence ! Derrière cette lumière t’attend ce fleuve et je suis certain que tu auras le droit à une bonne prochaine vie !
L’adolescente, en souriant, avança d’un pas certain vers le fond de la salle, se laissant accueillir par la Lumière. Elle disparut progressivement de la vue de la médium. Cette dernière, ébranlée par le dénouement, rapporta les dernières paroles de celle qui passa dans l’au-delà en paix.
Après quelques minutes de recueillement, le sorcier slave affirma :
— Mes amis, il est temps de se quitter. Le Dragon est mort, mais il est immortel tout comme moi. Cela lui prendrait du temps avant de se renaître de ses propres cendres ! Nous aurons la paix pendant au moins quelques années. Honnêtement, j’ignore la période nécessaire pour ce monstre à se reconstituer… Sinon, Miss Gordon et Misters Neely et Clancy, bon retour à la maison, mais sachez que ma datcha en Alaska est toujours là pour vous si vous avez besoin d’aide ou de conseil. Je vais vous amener à l’instant devant la porte de vos demeures respectives !
— Merci, Kochtcheï de nous assister pour délivrer Jim, commenta Mélinda en lui serrant poliment la main droite en signe de reconnaissance.
Un petit sourire s’esquissa sur son austère visage et il répondit :
— Une obligation, rien de plus ! D’ailleurs, votre part du butin vous attend sagement, ajouta le tsar. À la prochaine, Druzya(6), Camarades ! J’ose espérer vous convier à mon mariage avec Katiouchka.
Et sur ces paroles, le sorcier leur donna une carte professionnelle où les coordonnées de sa maison de campagne étaient indiquées. Puis, il les transporta, en un clin d’œil, à l’aide d’une formule magique en russe, à Grandview, aux États-Unis.
***
Dans la demeure de Jim et Mélinda, quelques heures plus tard.
Le couple, assis depuis plusieurs minutes sur les canapés beige clair du salon, était ravis et étonnés du dénouement du mariage annulé de Tricia. Mélinda, blottie contre son mari, l’enlaça amoureusement. Elle se confia à lui :
— Jim, je ne peux exprimer cette tension en mon âme depuis peu ! Un vrai soulagement indescriptible et un chagrin innommable de ces aventures improbables ! Ravie car tu es bien vivant, sans qu’aucun mal ne te soit arrivé ; affligée par la perte de Caitlin. Pauvre notre ami et ses parents, quelle peine et douleur ! Si jeune et innocente, Caitlin Mahoney…
Elle éclata en sanglots.
— Une fin tragique ! conclut tristement son mari en enlaçant plus puissamment la jeune femme. Moi aussi suis bien partagé entre ces deux émotions contradictoires ! C’est bien pénible pour des parents que d’apprendre que leur enfant meurt avant eux ! Je ne peux que considérer comme sacrilège une telle pensée ! Tellement contre la nature et les lois naturelles de l’ordre du monde… J’ose espérer que nos enfants ne réveilleront pas l’attrait des créatures des contes… Impitoyables qu’elles sont !
— J'espère aussi !
Un silence de recueillement pour la défunte s’installa entre eux, avant que la médium, perdue dans les souvenirs des événements des derniers jours au Vingt Septième Royaume, commenta :
— Jim, j’ai tellement eu peur de ce dragon ! Je n’aurais jamais pensé que des créatures des contes existent !
— Ouais, ces personnages existent, semble-t-il ! Je suis juste jaloux à l’idée qu’un d’eux puisse un jour jeter son dévolu sur toi ! grommela-t-il. Tu es mon épouse !
Il embrassa avec force la brunette.
— Nous sommes mariés pour le meilleur et le pire ! Dans la prospérité et dans le danger !
— Littéralement ! rit d’un cœur léger son épouse. Je pense qu’aucun cas d’esprit ne peut être si particulier que ce que nous venons de vivre ! Heureusement que l’amour peut changer un homme, tout immortel qu’il soit ! … Aussi, j’ai bien été ébahie de savoir manier instinctivement un arc, moi qui n’ai jamais manié une arme ! Moi qui a horreur du sang !
— Épatant, j’avoue ! Bon ! On va dormir, ma chérie ?
Elle approuva et le couple partit prendre un repos bien mérité.
___
(1) Caitlin Mahoney, dans la série, est morte d’anorexie plus jeune. Je la vieillis un peu pour la cohérence du récit à dix-sept ans. Aussi, je change la cause de son décès.
(2) Katiouchka est le diminutif russe pour Catherine.
(3) Le fleuve Smorodina est le fleuve, dans la mythologie slave, qui démarque le monde des vivants de celui des morts.
(4) Blini — crêpes fines servies avec de la confiture ou crème. Sirniki — galettes de fromage accompagnées de miel ou de confiture. Kacha — bouillie à base d’orge, d’avoine ou de millet cuit dans l’eau ou au lait.
(5) Notre translittération d’une strophe de la chanson Oт меня к тебе [Ot menya k tebe, De toi à moi] du groupe Машина времени [Mashina vremeni, La machine à remonter le temps], « Если в комнате твоей ночь, / Притаился по углам мрак, / И нет сил прогнать его прочь, / Позови, я расскажу - как... » qui se traduit « Si la nuit règne dans ta chambre, / Si l'obscurité se cache dans les coins, / Et que tu n'as pas la force de la chasser, / Appelle-moi, je te dirai comment... »
(6) Druzya, en russe, Друзья, littéralement « Amis », signifie des proches amis. Au singulier, Drug, Друг.