Les belles et bonnes histoires d'Aziraphale&Crowley

Chapitre 3 : Shining light

1999 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 14/07/2023 11:22

Prompt 3 : Personne A et personne B se donnent la main pour traverser la foule, mais ne se la lâchent pas une fois la foule dépassée.


Personnages : Aziraphale et Crowley

Figuration : des Français

Narration : Dieu (gender-fluid, conjuguez comme vous préférez !)


Shining Light


L’été était déjà bien entamé et Crowley se surprenait à apprécier chaque jour un peu plus sa cohabitation à la mortelle avec l’Ange depuis l’Apocaflop. Le rapprochement, discret, s’opérait dans chaque geste, chaque parole, chaque petite routine qui s’installait de jour en jour. Même moi, je ne saurais dire lequel était le plus timide des deux lorsqu’ils se bousculaient dans la boutique, dans la cuisine ou encore lorsqu’Aziraphale lisait son journal et que Crowley se perchait en haut du canapé, désœuvré, ne sachant que faire d’autre que contempler son Ange.

Mais, une chose était sûre, ils étaient aussi maladroits l’un que l’autre quand il s’agissait de communiquer, du moins, sur leurs sentiments… Il y avait pourtant des milliers de regards, des milliers de mouvements et autant d’esquisses de caresses, de mains qui s’effleurent, mais ne se touchent pas. Et des millions de silences.

Des silences destinés à conjurer le sort, à ne pas briser la magie, à ne pas tout gâcher ! Des siècles à se tourner autour, à s’apprivoiser, à s’apprendre et pourtant, toujours cette peur viscérale de tout perdre, de se perdre, qui les paralysait, du tréfonds de leurs âmes jusqu’au bout de leurs plumes… Cependant, aucun des deux n’était lâche, bien au contraire. Peut-être juste idiot. Oui, c’était exactement ça d’ailleurs, deux idiots ! Je les avais toutefois conçus sans ce détail de caractère, lequel devait être dû à l’acculturation avec les Humains. Il faut dire que, de toutes mes créatures Célestes, ces deux-là étaient les seuls à avoir passé autant de temps sur Terre, ce qui ne peut que laisser des séquelles de vous à moi…

Cette journée du 14 juillet s’était déroulée comme les autres, dans le confort de la librairie et la sécurité apaisante des non-dits. 

— Il y a une lecture de contes ce soir à Soho Square, veux-tu m’accompagner, Crowley ? 

Crowley aimait bien la littérature, moins que l’Ange bien sûr, mais il avait côtoyé nombre d’auteurs célèbres en Enfer qui l’avaient initié aux bienfaits de la lecture, en commençant par lui apprendre à lire ! Aujourd’hui, cependant, le Démon était d’humeur festive et il souhaitait surprendre Aziraphale car il était récemment tombé sur un podcast traitant des relations amoureuses alors qu’il était au volant de sa Bentley, et la présentatrice revenait sans cesse sur l’importance “d’entretenir la flamme”. Pourquoi Crowley écoutait un podcast dans sa voiture, vous étonnez-vous ? Eh bien la réponse est simple, la dernière fois que le Démon avait véhiculé Newton, dont la propre voiture “Dick Turpin” était en panne, le mortel avait emprunté les CD de Queen. Un emprunt longue durée vraisemblablement, comme il est d’usage de pratiquer chez les Humains !

Le Déchu s’était interrogé sur la signification de cette expression, “Entretenir la flamme”... Crowley connaissait bien les flammes, il était né dedans ! Sa deuxième naissance tout du moins, en tant que Démon… Il avait, du reste, déjà bravé les flammes plusieurs fois pour Aziraphale, mais l’entretenir ? Crowley s’était, de tout temps, toujours posé beaucoup de questions, c’est d’ailleurs à cause de cette manie qu’il avait rejoint l’Adversaire dans sa Chute. Cette fois-ci ne faisant pas exception, il avait demandé l’aide de Madame Tracy, qui, en tant qu’ancienne professionnelle en entretien, avait éclairé sa lanterne. Crowley n’était pas certain de former un couple avec Aziraphale, au sens où les mortels l'entendaient. Ils habitaient ensemble certes, mais cela ressemblait davantage à une collocation ambiguë qu’à autre chose… S’il n’était pas certain de savoir comment fabriquer un couple, il pensait, en revanche, être tout à fait qualifié en matière de flammes ! Il avait donc fomenté un plan diabolique ; feindre l’indifférence et l’oisiveté toute la journée, pour surprendre sa moitié angélique le soir venu. C’est-à-dire maintenant ! 

— Et si je t'emmenais plutôt en France ? Ils fêtent la Prise de la Bastille ce soir… 

Surprit, l’Ange eut rapidement un doux sourire aux lèvres : 

— Je me rappelle bien de la Terreur ! Tu te souviens quand tu étais venu me sauver ? Nous avions mangé des crêpes… ajouta-t-il, nostalgique.

— Alors, tu es d’accord ?  

— Je pourrais bien me laisser tenter ! répondit l’Ange, avec enthousiasme.


*~*


Crowley se félicitait d’avoir écouté les conseils radiophoniques d’une ancienne actrice de films pornos ! Aziraphale semblait animé d’une énergie toute nouvelle, il était lumineux ce soir, au milieu de la nuit et de la fête foraine. Le Démon n’avait d’yeux que pour lui ; ses vêtements démodés mettant en valeur son embonpoint réconfortant, ses adorables bouclettes blondes platines, les fossettes qui embellissaient ses joues charnues sur lesquelles il rêvait de poser un baiser… 

— Tu ne regrettes pas la lecture de contes, Zira ?

— Oh non ! J’adore Paris… Surtout depuis la fin de la Révolution ! rajouta-t-il, tout sourire.

— Tu as un petit creux ?

— J’ai toujours un petit creux, mon cher…

— Ne bouge pas, je reviens ! le prévint le Démon, en s’éloignant à grandes enjambées.

L’Ange n’avait d’yeux que pour lui ; sa démarche sautillante, ses vêtements austères à la coupe cintrée qui mettaient en valeurs ses membres bien trop longs, ses longues mèches rousses dans lesquelles il rêvait de faire glisser ses doigts…  

Une fois de retour, le Démon lui tendit une pomme d’Amour, en prenant soin de la croquer avant : 

— Pour toi, mon ange ! 

— Mmmmm… Un Fruit Défendu ? plaisanta la Principauté.

— Entouré de caramel… J’ai bien peur que cette pomme-ci ne vienne pas de l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal, mais d’un verger français, cependant !

— Il n’en demeure pas moins délicieux… Il faut nous hâter, le feu d’artifice va commencer, mon cher ! 

— Fais attention à ta veste avec le caramel…

— Si je me tache, je sais que je peux compter sur ta gentillesse pour opérer un petit miracle démonique, lui sourit Aziraphale. 

Gentillesse ? Je ne suis pas gentil, je suis un démon, gentil est un… s’emporta le Déchu.

— Un mot de six lettres, oui, je sais, mon cher… le coupa la Principauté, gentiment exaspérée.

L’Ange n’eut pas besoin de faire attention au caramel longtemps ; en quelques bouchées seulement, il était déjà en train de mordiller le bâtonnet devant le regard subjugué du Démon. Crowley n’eut toutefois pas le temps d’élucubrer le moindre scénario endiablé, car la foule se faisait de plus en plus compacte devant eux et il suivait l’Ange de près pour être certain de ne pas le perdre de vue. Bousculé par les badauds, toujours plus impatients et excités à l’approche du coup d’envoi du spectacle, Aziraphale jetait des petits regards inquiets à son compagnon. L’Ange, sans être un ochlophobe enragé, n’était pas à l’aise au milieu des foules ; trop habitué qu’il était au calme de sa petite librairie et Crowley le savait bien ! Il connaissait l’Ange aussi bien que moi. Mieux que moi, à vrai dire…

Le Démon s’était donné pour mission de protéger Aziraphale depuis des siècles maintenant, même si cela n’avait jamais exigé de sa part le moindre contact physique rapproché ! Traverser une masse d’Humains à l’humeur festive semblait être l’occasion d’amorcer un contact à l’apparence anodine, aussi Crowley se rapprocha de l’Ange en tortillant sa frêle silhouette entre les mortels, et saisit tranquillement la main de son ami : 

— Je ne veux pas te perdre, mon ange ! lui susurra-t-il à l’oreille, pour justifier son geste.

Le Démon passa devant et Aziraphale le suivit de bonne grâce, les pupilles dilatées de surprise et de bonheur, un sourire angélique aux lèvres. De la contestable innocence du geste ou de la sincérité des paroles de Crowley, l’Ange n’aurait su dire ce qui le bouleversait le plus… Toujours était-il que la Principauté avait bu ces paroles comme s’il arrivait enfin sur une terre où coule le lait et le miel après une interminable errance ! Tandis qu’il fendait la foule, à l’abri derrière son Démon, Aziraphale savourait le contact de sa paume serrée dans la sienne ; pour un serpent, Crowley avait la peau drôlement chaude, songeait-il, amusé. Et monsieur tu-vas-trop-vite-pour-moi-Crowley se délectait de ce contact, si anodin et pourtant si exceptionnel : 

— Dieu bénisse la foule, merci Seigneur ! 

De rien.

— De quoi ? demanda Crowley, en se retournant de trois quarts.

— Je disais, ne me lâche pas, c’est fou ce qu’il y a comme monde ! s’empressa de répondre l’Ange, en cramponnant le Déchu comme si sa vie en dépendait.

Crowley ne répondit rien, mais raffermit sa prise sur la main pressante de l’Ange… Le spectacle pyrotechnique était magnifique. Et long… La musique, si tant est que le Démon puisse qualifier le fond sonore de musique, n’étant pas à son goût, il remplaça le morceau de techno par de la vraie musique d’un claquement de doigt. C’est ainsi que le feu d’artifice se termina sur un morceau de Queen, Somebody to love, pour être exact. La foule, satisfaite, se dispersa rapidement après le bouquet final, néanmoins, ni l’Ange, ni le Démon ne voulait se lâcher. Toujours incapables de formuler leur volonté avec des mots, les deux idiots évitèrent tout contact visuel et se dirigèrent tacitement vers les stands de douceurs. Main dans la main. Désormais côte à côte, ils marchaient ainsi, deux amoureux parmi tant d’autres, flânant au milieu de la fête foraine dans la chaleur étouffante d’une nuit d’été. Quelques fois, Aziraphale jetait un œil fasciné et inquiet en direction du Démon. À chaque fois, Crowley penchait sa tête en avant pour faire glisser ses lunettes et lui répondait par un sourire ou un regard complice. D’un simple contact, du silence d’un regard, la plus belle phrase d'amour était dite.

  

Après de nombreux tours et détours toutefois, le Déchu porta la main de l’Ange à sa bouche pour y déposer un timide baiser du bout des lèvres : 

— Il faudrait un miracle pour que je t’offre une crêpe et que tu la manges sans que je lâche ta main… 

— Non… Il faudrait un miracle pour que je te lâche, Crowley ! s’enthousiasma l’Ange.

Si vous vous demandez comment Aziraphale a mangé sa crêpe, je vais vous le dire moi ! Ils ne se sont pas lâché la main ; Crowley lui a à moitié donné la becquée, l’autre estomac sur pattes lui a à moitié arraché de la main… Ce fût la dégustation de crêpe la plus anarchique et la plus salissante de toute la Création ! La plus romantique aussi…




***** Prompt un peu spécial, pour le 14 juillet 😀, direction le forum pour des fanarts et GIF 😉


Pour la bande son, je recommande :

Shining Light d'Aimé Simone

Somebody to love de Queen

À bientôt ❤️ *****

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