A l'ombre d'un futur aux yeux violets : La Harpe qui jouait toute seule.

Chapitre 5 : Chapitre 5 : Où Nina déteste courir

7844 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 15/05/2020 15:49

Notes : Je suis sincèrement désolée de mon retard pour ce chapitre, je ne me sentais pas vraiment capable de poster ou de faire quoique ce soit. Merci à tous ceux qui ont commencé la lecture de mon histoire, qui ont commenté et un spécial merci à ensorceleurisee pour les petites erreurs remarquées dans les chapitres précédents !


Warning : Rien de bien violent dans ce chapitre, mais un léger passage de petite bagarre type harcèlement. Rien de méchant promis, mais soyez prévenu.



A l'ombre d'un futur aux yeux violets

Première partie :

La Harpe qui jouait toute seule

Première année


Chapitre 5 : Où Nina déteste courir





Après deux semaines de cours, de migraines et de rêves étranges (elle se souvenait notamment d'avoir entre-aperçu Hermione avec des dents lui arrivant jusqu'au col de robe, et de la tête de Harry qui flottait au dessus du sol), Nina avait réussi à se faire à l'idée que Gryffondor était désormais sa deuxième maison. Les journées étaient passionnantes, mais longues. Elles se finissaient généralement par des maux de tête qui la faisaient s'effondrer dans son lit, épuisée.

Le soir, elle faisait ses devoirs avec Hermione dans la salle commune… même si sa compagnie était bien moins amusante que celle de Harry, voir même celle des jumeaux Weasley, ce qui était tout de même un comble !

Hermione semblait accorder aux études une place principale dans sa vie, ce que, bien sûr, Nina comprenait, pour le nombre de fois où ses parents lui avaient bassiné l'importance de l'école et de bons diplômes. Mais il y avait une différence entre le soin porté au travail et une obsession.

Plus elle la regardait se perdre dans les parchemins, à rester des heures et des heures en Salle Commune, seule à une table, à écrire obstinément, sans relever la tête, et plus elle s'inquiétait. Hermione semblait se refermer sur elle-même et personne n'y prêtait attention. C'était glaçant. Il n’était pas rare que Percy Weasley finisse par lui ordonner d’aller se coucher, lorsque tard le soir, elle restait la seule première année encore debout.

Ou alors elle se faisait des idées. Hermione était forte. En tout. Chaque matière la faisait briller (même en potions!), chaque question qu'elle posait était accueillie par un sourire (sauf peut-être pour Rogue, qui se contentait au mieux d'un regard surpris), elle était la fierté de McGonagall.

Oui, peut-être se faisait-elle des idées…. Mais le sentiments désagréable persistait. Elle essayait donc de passer plus de temps avec elle, mais souvent, les rires de Potter ou les ronflements de Weasley lui donnaient trop envie et elle trouvait une excuse, qu'elle savait pathétique, pour s’éclipser.

Elle se sentait mal en fait. Mais, entre ses maux de tête, ses passages à l'infirmerie tous les deux jours, le secret qu'elle devait porter seule, les devoirs et les cours, elle manquait d'imagination concernant les solutions à apporter à Hermione.

Ce matin, cependant, elles descendirent ensembles à la Grande Salle en discutant. Aujourd'hui se déroulait le cours que Nina (et bon nombre d'élèves de première année) attendait avec le plus d'impatience : le cours de vol.

Par chance, il faisait beau et l'humeur de Nina s'en trouva sensiblement amélioré, à l'inverse de celle d'Hermione :

-Je ne comprends pas, répéta la brunette pour la 6e fois, pourquoi tout le monde est si excité ? C'est terriblement dangereux, suis-je la seule à m'inquiéter ?

-Oui Hermione, tu es la seule, répondit Nina en croquant dans son toast. Tout va bien se passer, tu verras, ça sera drôle !

-Non non on, ça n'a rien de drôle Nina ! Voler dans les airs, sans sécurité alors que...

-Hermione ! Tout va bien se passer, je te l'assure.

-Oui, oui tu as raison, il faut rationaliser. Tout va bien se passer, tout va bien se passer.

Elle respira à fond, tentant de se calmer. Du coin de l’œil, Nina remarqua le roulement des yeux de Weasley, qui paraissait exaspéré. Neville Londubat, le garçon au crapaud arriva à la table du petit déjeuner, blanc comme un linge :

-Ça ne va pas Neville ? Demanda Harry.

Le garçon haussa les épaules :

-Le cours de vol m'impressionne un peu...

Hermione sauta sur l'occasion :

-Tout va bien se passer ! Je crois... J'ai lu un livre sur le Quidditch et...

-Tu sais monter sur un balai maintenant, grâce à ce bouquin ? Demanda Weasley d'un ton légèrement moqueur.

Hermione eut l'air offensée :

-Non, mais toi, tu savais qu'il existait plus de 300 fautes possibles durant un match de Quidditch ?

-Non et honnêtement, ce n'est pas la partie qui m'intéresse le plus...

Hermione haussa les épaules, agacée, mais continua sur sa lancée :

-Quoi qu'il en soit, j'ai appris que quoi qu'il arrive, il ne faut surtout pas lâcher le balai !

-Vraiment ? Demanda Neville, buvant ses paroles.

-Oui ! Jamais, jamais !!

Nina n'était pas sûre qu'il était utile de lire pour apprendre à voler, mais avant qu'elle n'en fasse la réflexion à Hermione, le courrier arriva dans un bruissement d'ailes.

Depuis le début de l'année elle n'avait pas encore reçu quelconque courrier de la part de ses parents, mais il n'y avait lieu de s'inquiéter. Ses parents ne faisaient que peu confiance au service postale sorcier.

« Il suffit d'un sort Nina. D'un seul. Et paf, voilà un hibou à terre et ton courrier lu par n'importe qui. » disait Andrew avec un air sombre.

C'était comme un non-dit qui flottait dans l'air, mais Nina le savait quand même : son père se souvenait, d'un souvenir flou et brumeux, l'abattage de hiboux lors du règne du Seigneur des Ténèbre.

Mais personne n'avait le droit d'en parler. Jamais.

Toutefois aujourd’hui, dans un froissement de plumes feutré, l'élégante chouette effraie immaculée de sa mère se percha sur le dossier de sa chaise. Distraitement, Nina lui décrocha la lettre du bec et la nourrit d'un petit bout de pancake.

La lettre était faite de parchemin lourd et jaune, le préférée de sa mère, et sur le devant, son nom était marqué à l'encre violette, de son inimitable calligraphie.

-Merci Eris.

La chouette frotta sa tête blanche contre son épaule et s'envola silencieusement. Nina ferma les yeux et ouvrit la lettre :

De vert ou de rouge, tu restes ma violette préférée.

Te amo.

L'humeur de Nina augmenta considérablement. A travers les courbes des lettres, elle voyait le visage de sa mère, nerveux et souriant. Elle voyait la main de son père posé sur son épaule, elle voyait le bureau plongé dans une douce pénombre, elle les voyait donner l'enveloppe à Eris, enlacés. Elle pressa la lettre contre sa poitrine.

Enfin, elle se sentait à la maison.

-C'est un Rapeltout ! S'écria Neville à côté d'elle.

Il venait de recevoir, de sa grand-mère, devina-t-elle, un petit objet rond et sphérique. Si Nina en avait déjà entendu parler, il était évident qu'elle n'en avait jamais eu besoin. Nina n'oubliait jamais rien. Elle ricana doucement lorsque, alors qu'il expliquait aux autres le principe de l'artefact, une fumée rouge s'élevait doucement dans la sphère. Hermione fixait la boule d'un air fasciné et se pencha vers elle :

-Ça marche comment ? Ça lit dans tes pensées, mais comment c'est possible vu que tu as oublié et...

Nina releva la tête brusquement, la coupant sans le vouloir dans ses propos. Mais elle avait senti quelques chose. Une présence négative arrivait et... soudain, Draco Malfoy fut à leur table et se saisissait du Rapeltout de Neville. Hermione lança un drôle de regard à Nina, puis se détourna car d'un bond, Harry et Weasley s'était levé en même temps pour faire face à Malfoy.

Il n'y avait nul besoin de posséder le Troisième Oeil pour comprendre que les deux garçons étaient plus que prêts à en découdre avec le Serpentard. Hermione paraissait sur le point d’intervenir, mais McGonagall apparut presque aussitôt, mettant fin au combat de coq qui avait failli s'ensuivre.

La tête de Nina se mit à lui faire mal. Il était tôt, trop tôt pour ce genre d'attitude où les ondes négatives émanant de ses camarades lui empoisonnaient l'air. Dans les tréfonds de sa robe, elle saisit sa petite fiole et en versa dans son jus d'orange. Sentant des yeux sur elle, elle releva la tête. Hermione la regardait, les sourcils froncés, mais elle l’ignora, but son verre d’une traite et se leva :

-On a sortilèges, vous venez ?


L'après-midi arriva enfin, et avec lui la leçon de vol. Le soleil était haut dans le ciel clair, et une légère brise agitait la cîme des arbres de la Forêt Interdite au loin.

Ses frères lui avait déjà parlé de la professeur, Mme Bibine, une grande femme aux cheveux gris et aux yeux jaunes, qui parlait d'une voix sèche et puissante. Dans leurs récits, les cours de vol s'annonçaient bien souvent décevants à cause de sa rigidité d'acier.

« Ne volez pas trop hauts ! » « Redescendez ! » « Faites ci, faites ça ! »

-On ne peut même pas volez comme on le souhaite ! C'est une vraie casse-joie celle-là ! Se plaignait Caïn.

Ils avaient quitté le cours de vol en troisième année, au profit de l'arithmancie, mais ne perdaient pas une occasion de s'envoler dès qu'ils le pouvaient, frôler les nuages et poursuivre les oiseaux.

Mais Nina ne pouvait s'empêcher de se sentir surexcitée. Sa première leçon de vol ! Bien sûr, elle avait déjà volé sur un balai, mais la dernière fois remontait à cet été, et elle n'avait pas le droit de monter à plus de quelques cm du sol. Camille était intraitable.

-Alors, qu'est ce que vous attendez ? Mettez vous chacun devant un balai. Allez dépêchez-vous !

Nina se plaça près du balai le plus proche d'elle. Le manche en était un peu délavé et les épis un peu cassés, mais dans l'ensemble il était en plutôt bon état. En tout cas, en meilleur état que celui d'Harry Potter.

-Tendez la main droit au-dessus du balai, et dites « Debout ! »

Nina prit une respiration. Les balais étaient des objets particuliers. Il fallait les désirer, ne pas les craindre. C'étaient des relations presque professionnelles qui s'installaient entre les sorciers et leurs balais personnels, un travail en duo pour ne pas tomber.

Elle ré-ouvrit les yeux et fit un effort pour que sa voix sorte de sa gorge claire et distincte :

-Debout !

Le balai ne lui sauta pas dans la main, s'éleva de quelques centimètres, puis retomba mollement. Nina se sentit vexée. Le balai de Harry Potter lui avait sauté dans la main immédiatement ! Elle jeta un coup d’œil à Hermione, qui se trouvait dans la même situation qu'elle. Elle lui rendit son regard et articula « Ça marche pas ! » du bout des lèvres.

-Pour ceux qui n'y arrivent pas, encore une fois ! N'oubliez pas, une fois sur votre balai, vous êtes le maître à bord, alors parlez comme un commandant !

Nina reprit une respiration et...

Cette fois, le balai lui bondit en main. Le bois était chaud sous ses doigts, lisse des années d'usage. Hermione essaya encore, puis encore une fois. L'agacement commençait à poindre dans sa voix. Nina se glissa à son côté :

-Ne t'énerves pas.

-Mais ça ne fonctionne pas ! Pourquoi ça ne fonctionne pas ?

-Calme toi. Parle le lui, calmement et fermement. Tu es le chef, mais c'est lui qui te portes. Tu dois lui faire confiance, autrement il refusera de collaborer.

Hermione la fixa un instant, se re-concentra sur son balai.

-Debout, demanda-t-elle d'une voix plus douce qu'à l'ordinaire. Le balai se redressa doucement et vint se nicher lentement dans la paume d'Hermione, qui se tourna vers Nina, les yeux brillants :

-Merci !!

-Maintenant, enfourchez vos balais. Tenez le de la main gauche si vous êtes gaucher, oui comme ça jeune homme, et enfourchez le, tout en gardant un pied au sol. Ne sautez jamais sur vos balais ! Mme Pomfresh en a plus qu'assez de soigner vos entrejambes douloureuses.

Nina et Hermione pouffèrent, et se positionnèrent somme toute assez correctement. Puis vint l'heure de s'élever dans les airs. Hermione se tourna vers Nina :

-J'ai peur...

-Ne t'en fais pas. C'est juste un ou deux mètres. Et puis, le balai te porte. Tout va bien se passer.

Nina se sentait grisée. Un ou deux mètres ! Ce n'était pas grand chose, mais Merlin qu'elle en avait envie ! Elle n'en pouvait plus d'attendre le signal de Mme Bibine, elle voulait pousser sur le sol et s'envoler, loin, encore plus haut que les arbres.

-Trois, deux...

Nina sentit une onde de nervosité la traverser, ce qui était étrange, car elle n'avait absolument pas peur. Puis elle se rendit compte que ça ne venait pas d'elle.

Londubat était si nerveux qu'il frappa le sol bien avant le coup de sifflet, s'envolant comme un boulet de canon dans les airs.

-Redescend mon garçon ! Cria Mme Bibine.

Mais évidemment, il ne redescendit pas. Dans sa tête, Nina entendit un horrible craquement et comprit ce qui était sur le point de se produire :

-Attention, Madame ! Elle ne pût s'empêcher de crier.

Neville, blanc comme un linge, glissa de son balai et s'écrasa par terre. Poignet cassé, devina aussitôt la jeune sorcière. Toute la classe se précipita à ses côtés et Mme Bibine poussa sans ménagement Seamus Finnigan qui se trouvait sur son chemin. Avec précautions, elle souleva le garçon joufflu et aboya aux autres que pendant qu'elle l'emmenait à l'infirmerie, ils avaient tout intérêt à ne pas bouger.

De frustration, Nina faillit jeter son balai sur le sol. Sombre idiot !

-Pauvre Neville, murmura Hermione à ses côtés. J'espère qu'il va s'en remettre.

-A cause de lui, le cours est annulé !

-Ce n'est pas si grave Nina. Il y aura d'autres....

Elle fut interrompu par un ricanement :

-Vous avez vu sa tête à ce mollasson ?

C'était Draco Malfoy, qui riait à s'en décrocher la mâchoire. Un bon nombre des Serpentards éclata de rire à sa remarque.

-Tais-toi Malfoy, intima Parvati Patil.

-Tu prends la défense de Londubat Parvati ? Je ne savais pas que tu aimais les gros pleurnichards.

Des ondes de plus en plus négatives empoisonnaient l'air, et la tête de Nina commençait à devenir lourde. Parvati s'apprêtait à répondre à Parkinson sur un ton vénéneux, quand Malfoy se précipita à l'endroit où Neville était tombé :

-C'est ce truc idiot que sa grand-mère lui a donné, dit-il en ramassant le Rapeltout dans l'herbe.

-Donne moi ça Malfoy.

Harry avait parlé d'une voix très calme, surprenant tout le monde. La classe se tut, tendue dans l'attente de l'affrontement entre les deux garçons. Les yeux verts de Potter étaient plein de ce qui ressemblait à une haine enfantine, et pourtant si brûlante, et le rictus de Malfoy était mauvais, froid comme celui d'un bébé serpent.

-Je vais le laisser quelque part pour que ce pauvre Neville puisse le retrouver. Au sommet d'un arbre par exemple.

-Donne ça !

Nina regarda Malfoy enfourcher son balai d'un mouvement fluide et s'élever dans les airs. Elle ne put s'empêcher de l'envier un peu. Elle aussi voulait s'envoler, sentir le vent dans ses cheveux et voir le château depuis en haut !

Harry s'empara à son tour de son balai mais Hermione lui saisit le poignet :

-Non ! Madame Bibine nous a dit de ne pas bouger. Tu vas nous attirer des ennuis !

Il ne l'écouta pas et bientôt, il s'envolait au même niveau que Malfoy. Hermione revint près de Nina :

-Pourquoi personne ne m'écoute jamais ?

-Parce que tu as raison et que ça agace tout le monde, répondit Nina d'un ton morne, les yeux fixés sur Potter et Malfoy. Elle ne vit pas le regard heurté que son amie lui adressa.

Potter volait plutôt bien, pour un sorcier élevé chez des Moldus, et il n'était visiblement pas effrayé par la hauteur : quelques filles poussèrent des hurlements stridents en le voyant tirer sur son manche pour gagner quelques mètres encore.

Les deux garçons se crièrent des choses inaudibles d'en bas et soudain, Malfoy fit un grand geste avec le bras, et Potter fonça presque aussitôt vers le sol. Toute la classe se mit à hurler :

-Mais qu'est ce qu'il fait ?! Cria Hermione.

Nina savait bien se qui était en train de se passer, mais avant qu'elle ne puisse répondre à son amie, Potter arrivait tout près du sol, se redressait miraculeusement, en tenant serré dans sa main, le Rapeltout de Neville.

-Wow, ça c’est du vol... murmura-t-elle alors que tous les Gryffondors l'acclamaient à grands cris (sauf Hermione). Elle sentait qu'il n'avait absolument aucune idée de l'énormité de ce qu'il venait de faire, ou comment. Il se tenait debout sur l'herbe, les jambes tremblantes, le Rapeltout dans la main. Il le fixait comme transcendé par la fumée rouge qui s'élevait dans la petite sphère.

Mais qu'avait-il oublié ?

Nina sentit une présence menaçante arriver à toute allure par le sud du terrain. Elle se tourna vers son origine, une dizaine de seconde avant que l'entièreté de la classe sursaute au son de la voix de McGonagall :

-HARRY POTTER !

Leur directrice déboulait sur le terrain, ses jupes relevées dans son poings serré, une rougeur aux pommettes.

C'était ça qu'il avait oublié, comprit Nina en voyant son camarade pâlir.

-Jamais depuis que je suis à Poudlard...

Le choc faisait perdre ses mots à la professeure, qui agitait les mains d'un air impuissant. Nina et les autres élèves regardait la scène en silence, accrochés à leurs balais. Hermione tenait la manche de Nina avec des doigts tremblants. En se retournant, elle vit que Malfoy était discrètement descendu des airs, et regardait Potter se recroqueviller devant sa directrice avec une lueur d'amusement dans ses yeux pâles.

-Comment avez-vous pu oser ? Vous auriez pu vous rompre le cou !

Weasley tenta d'intervenir pour défendre Harry, mais McGonagall le fit taire sèchement. Nina résista à l'envie de parler à son tour. Hermione était vraiment tendue, elle le sentait, et elle passa un bras autour du sien pour la rassurer.

-Venez avec moi Potter.

La professeure s'éloigna avec le jeune élève. Hermione se couvrit le visage des mains :

-Ah non, mais quel idiot !

Nina posa sa main sur son épaule en silence. Elle ne savait pas quoi dire. Merlin n'aurait-il pu lui donner un peu de savoir sur les questions de l'amitié, plutôt qu'un pouvoir interdit ?

La vérité était, Nina n'avait jamais vraiment eu d'amis. Pas d'amis véritables à vrai dire. Des enfants ici là, qui n'étaient pas rebutés par ses yeux et ses lunettes et son silence, et tout le reste à vrai dire, qui acceptaient d'être ses partenaires de jeu pour un après-midi, mais bien souvent, rentraient vite chez eux dès que le ciel se teintait d'orange, sans un regard d'au-revoir pour la petite fille étrange qui savait quand la pluie allait tomber.

Elle n'avait pas réellement espéré que Poudlard soit bien différent, et pourtant, ça l'était. Dans les couloirs, des yeux verts ravissaient l'attention des ragots, et les cicatrices étaient plus au goût des potins que les petites filles silencieuses. Ici, personne ne savait son secret. Elle était à l'abri.

-Il va nous faire perdre des points !

-Tu es sérieuse là ? Il pourrait se faire sévèrement punir et toi tu t'inquiètes pour des points ?

Nina revint à la réalité présente en entendant Weasley et Hermione se disputer :

-Évidemment que je m'inquiète pour lui, mais...

-Tu es vraiment une horrible personne toi !

Hermione se tût, les yeux écarquillés. Nina ressentit comme un coup de poing dans le ventre les mots de Weasley. Elle sentait, savait qu'il ne voulait pas être méchant, mais son manque de considération et d'empathie l'estomaquait. Une furieuse envie de lui jeter un mauvais sort lui tordit les tripes.

-Y'a de l'eau dans le gaz chez les Gryffondors on dirait ! S'exclama une voix malicieuse.

C'était Malfoy, qui s'était approché, encadré de ses deux gorilles.

-Laisse nous tranquilles Malfoy ! Répondit Weasley d'un ton furieux.

-Je suis désolé, je ne voulais pas interrompre ta scène de ménage avec ta copine.

Weasley rougit jusqu'aux oreilles :

-Tu as regretter d'avoir dit ça Mal....

-Ça suffit !

Les mots s'étaient échappés tous seuls de la bouche de Nina. Par Merlin, elle s'était pourtant juré de n'intervenir dans aucune histoire ! Mais la voilà qui voulait faire cesser un combat par la seule force de sa voix, qui n'était pourtant pas bien plus qu'un tout petit pépiement. Elle voulait se taper le front, mais un regard dans la direction d'Hermione l'encouragea à continuer : elle avait les yeux très rouges, et son nez commençait à couler.

-Ça suffit, répéta-t-elle d'une voix plus douce.

-Tu te penses plus haute que nous Flintey ? l'agressa Malfoy. Tu penses pouvoir me donner des ordres ?

-C'est toi qui ne penses pas Malfoy. Laisse Weasley et Hermione tranquilles.

-Sinon quoi ?

Elle le fixa, ses yeux violets soutenant ceux gris du jeune garçon, qui perdit contenance un instant. D'un geste sournois, il sortit sa baguette et avant que Nina n'écoute son instinct et ne puisse réagir, il fit envoler ses lunettes d'un petit coup de baguette. Elle les regarda tomber dans l'herbe comme au ralentir. Hermione plaqua les mains contre sa bouche, choquée. La voix de Malfoy lui parvint comme à travers un voile.

-On fait moins la maligne maintenant ?

Nina était nue. Seule. Sa protection était partie.

Confuse, coincée entre la colère et la raison, elle perdit le contrôle de son Troisième Oeil. Il lui échappa comme un filet de fumée, se tortilla jusqu'aux plus grands secrets de Malfoy, dans un désir malsain de savoir pour faire mal, pour frapper aux souvenirs les plus honteux.

Sans s'en rendre compte, elle avait reculé d'un pas, ce que Malfoy avait pris comme un signe de faiblesse. Il la dominait avec un rictus mauvais :

-Tu vois ? Tu ne sers à rien ! Hors de mon chemin maintenant Gryffondor.

Pourquoi devait-elle retenir son pouvoir ? Pourquoi devait-elle chercher à protéger ce garçon alors qu'il ne cherchait qu'à l'humilier ? Quand elle pensait l'avoir trouvé sympathique au premier abord ! Une haine naïve anéantit ses morales. La vision d'un Draco de 5 ans pleurant enfermé dans sa chambre la faisait rire méchamment à l'intérieur d'elle. Toute ardente de vengeance et pleine de ressenti, elle lança les tentacules de son pouvoir à l'assaut de son futur.

Il la poussa alors à l'épaule, et elle tomba les fesses par terre, d'un coup. Désorientée, tous ses sens se tournèrent vers le ciel et elle se fit soudain assaillir par des visions terrifiantes du ciel et de plus loin encore. Elle ferma les yeux et enfouit la tête dans ses mains, se réfugiant dans le noir.

Elle sentit une petite main sur son épaule. C'était Hermione :

-Nina ! Nina, ça va ?

Mais elle ne pouvait pas ouvrir les yeux. Elle ne pouvait pas. Pas sans ses lunettes !

-Mes...mes lunettes...

-Tiens.

Elle les saisit à l'aveuglette et releva la tête, nauséeuse. Les Gryffondors se tenaient autour d'elle, l'air inquiets. Weasley lui avait tendu ses lunettes et Hermione était accroupie près d'elle, sa masse de cheveux bruns lui cachant la classe de Serpentards qui s'étaient réunis de l'autre côté du terrain.

-Oh mon Dieu, Nina ! S'exclama-t-elle.

Nina ne répondit pas, les yeux dans le vide, la tête tambourinante, cherchant frénétiquement dans la poche de sa robe la potion que Mme Pomfresh lui avait donné. La sensation rassurante de l'armature de ses lunettes sur le nez ne suffisait pas à la calmer.

-Nina... Nina tu saignes...

Elle saignait ? Où ? Elle ne sentait rien.

Hermione leva un doigt hésitant, pointant son visage :

-Ton nez, il saigne.

Nina se passa une main sur le visage, et sentit une matière visqueuse et collante s'accrocher à ses doigts.

« Oh non ».


Weasley et Hermione l'emmenèrent à la salle commune, malgré ses protestations : elle allait bien ! Mais ils ne voulurent rien n'entendre.

Assise confortablement dans un large fauteuil, une tasse de chocolat dans les mains et Pluton sur les genoux, elle fixait les flammes d'un air absent tandis qu'Hermione grattait de sa plume un parchemin qui n'était pas à rendre avant deux semaines. Weasley apprenait les échecs à Dean Thomas.

Nina trouvait les échecs moldus ridicules : quel intérêt si les pièces ne sont pas doués d'une vie propre ? Cela devait être d'un ennui mortel.

Hermione haussa les épaules et répondit que c'était un jeu de patience.

-Tu as fini tes devoirs pour demain ?

-En fait oui. Ils sont dans mon sac.

-Tu as trouvé quoi comme exemple d'engrais magiques ?

-Pas beaucoup j'avoue.

-J'en ai trouvé 23, mais je ne suis pas sûre que ça soit suffisant pour le professeure Chourave...

Nina soupira :

-C'est amplement suffisant Hermione.

Sa camarade rougit un peu. Il y eut un moment de silence : le feu crépitait toujours, mais la plume d'Hermione n'effleurait plus le papier. Comme Nina, cette-dernière regardait les flammes, pensive.

-Merci Nina.

Elle se tourna vers elle. Le feu projetait des ombres rouges sur ses boucles, et à ce moment précis, Nina trouva qu'elle ressemblait beaucoup à une sorcière. Une sorcière du feu.

-Merci d'être intervenue je veux dire. C'était vraiment très courageux de ta part.

« Courageux » pensa Nina. Peut-être oui. N'était-elle pas à Gryffondor après tout ? Mais elle ne l'avait pas voulu. C'était arrivé c'est tout.

Et puis une fois encore, le contrôle de son pouvoir lui avait échappé. Elle l'avait senti cette fois, les paroles de Dumbledore toujours comme un écho, résonnant dans sa tête. Le Troisième Œil lui échappait, agissait de son propre chef, comme un animal sauvage. Sans ses lunettes, elle n'avait aucune prise sur lui. Elle se sentait tellement faible. Tellement indigne.

Elle n'était pas capable de le contenir. Elle avait besoin d'air frais. Elle se dégagea de l'emprise moelleuse du fauteuil et enleva sa longue blouse noire :

-Je vais faire un tour. On se voit pour le dîner ?

Hermione ouvrit des grands yeux, l'air surprise :

-Euh oui, bien sûr, mais où...

Nina était déjà partie, Pluton sur ses talons. Ce ne fut que dans le couloir qu'elle réalisa qu'elle n'avait pas répondu aux remerciements de son amie.

« Quelle idiote je fais ! ».

Elle fut tentée de revenir sur ses pas, mais quand elle se retourna, la Grosse Dame avait quitté son tableau. La frustration la fit serrer les poings, et elle s'engagea dans le couloir d'un pas rapide et agacé.

L'air froid la faisait frisonner, mais elle continua d'avancer. Elle se dirigea vers le rez de chaussée, qui donnait sur la cour intérieure. Là, des élèves profitaient des derniers rayons de soleil. Dans un coin, un sixième année faisait voler dans les airs un bateau en papier pour impressionner sa petite-amie. Ici, un groupe de troisième année révisaient sur un banc.

Elle longea la cour en passant sous les arcades et alla s'asseoir sur un rebord de pierre. Pluton vint se lover sur ses genoux, ronronnant paisiblement. Les yeux fixés sur le ciel, elle poussa un profond soupir en le caressant distraitement.

Elle avait envie de rester là, malgré le froid, à regarder le ciel virer du bleu au rose, à l'orange, au rouge, au violet et au noir. Elle voulait voir les étoiles.

Elle savait exactement à quelle heure le soleil disparaîtrait derrière l'horizon, elle savait que le bateau du sixième année allait se prendre dans les cheveux de sa petite-amie, elle savait que McGonagall n'était pas réellement fâchée contre Harry.

Mais elle ne savait pas contrôler son pouvoir. Ça lui donnait envie de hurler. C'était injuste. Une force de la nature et de la magie avait jugé bon de la doter d'un don extraordinaire, mais pas du savoir pour l'utiliser.

-Salut Nina !

-Salut Harry, répondit-elle avec un sourire fatiguée. Évidemment qu'elle n'était pas surprise. Évidemment qu'elle l'avait senti venir depuis l'autre couloir.

Il était accompagné d'Olivier Dubois, le grand garçon aux larges épaules auquel Nina avait adressé la parole quelques fois depuis le début de l'année. Comme à chaque fois, elle se sentait encore plus petite et menue que d'habitude à côté de lui, et ce soir-là, ça ne faisait rien pour arranger son humeur.

-Salut Nina ! Dit Olivier avec un signe de la main.

Elle ne répondit pas, sourit à peine. Pluton remua le museau et planta ses griffes dans sa cuisse.

-Tu ne devineras jamais Nina !

Harry avait l'air très excité. Elle haussa un sourcil.

-Surprends moi, ricana-t-elle.

-Je vais devenir le nouvel attrapeur de l'équipe de Gryffindor !

Et encore une fois, elle dû feindre la surprise :

-Oh vraiment ? Tu n'es pas trop jeune ?

Son jeu d'acteur avait dû se rouiller avec la fatigue et la lassitude, car le sourire d'Harry se fana quelque peu. Ce fut Dubois qui répondit à sa place :

-Il est le plus jeune depuis un siècle au moins ! Mais ça ne fait que témoigner de son talent !

Ses yeux verts brillaient d'un excitement mal contenu, et Nina dû se rappeler de sourire.

-C'est super Harry. Je suis fière de toi, et je suis sûre que les autres vont être très contents.

-J'ai hâte de l'annoncer à Ron !

Elle hocha la tête, peu sûre de quoi dire ensuite.

-C'est bientôt l'heure du dîner. Tu viens avec nous à la Grande Salle ? Demanda Harry.

Elle acquiesça et se leva de son banc froid, Pluton dans ses bras. Le ciel était maintenant entièrement violet sombre, mais les étoiles n'étaient pas encore là. Elle remettrait la méditation à plus tard.

Même debout, elle devait à peine arriver au coude de Dubois et elle se surpris à se demander quand sa croissance viendrait-elle. Mais sitôt cette pensée lui avait traversé la tête qu'elle se força à la repousser, à l'oublier. Et si par inadvertance elle se voyait elle, plus vieille ? Elle n'avait pas le droit : son psychomage lui répétait bien assez :

« C'est une chose de protéger les autres en évitant leur futur Nina. Mais c'est toi que tu dois protéger avant tout. Connaître son propre avenir comme tu en es capable est terriblement dangereux. Ne le fais jamais. »

Dubois leur adressa un dernier signe de main excité lorsqu'ils entrèrent dans la Grande Salle et alla rejoindre ses amis de cinquième année. Harry et Nina se dirigèrent vers le coin de table où était assis Ron. Hermione mangeait non loin et Nina alla s'asseoir à côté d'elle.

-Excuse-moi, chuchota-t-elle, j'avais vraiment besoin de prendre l'air.

-Ne t'en fais pas, sourit son amie. Malfoy a vraiment été affreux avec toi et... enfin je comprends que tu puisses avoir envie d'être seule.

-Il a été horrible avec toi aussi.

Elle haussa les épaules :

-Tant que je suis meilleure que lui en potions...

Pour la première fois de la soirée, Nina laissa échapper un petit rire sincère.

-J'ai vu que tu étais avec Harry ! Alors, qu'est ce que le professeure lui a dit ?

-A vrai dire, elle ne l'a même pas disputé. Elle lui a au contraire proposé...

Mais avant qu'elle ne puisse finir sa phrase, un désagréable sentiment lui chatouilla la nuque, et elle se retourna pour voir Draco Malfoy et ses amis Crabb et Goyle se diriger droit sur la table Gryffindor.

Les yeux d'Hermione s'arrondirent à leur vue :

-Oh non, ça, ça veut dire encore plus de problèmes...

Les jeunes Serpentards s'arrêtèrent au niveau de Weasley et Harry et des éclats de conversations atteignirent les oreilles des sorcières :

-...quand tu veux, disait Malfoy. Cette nuit si ça te convient . Duel de sorciers. Baguettes magiques uniquement, pas de contact physique. Qu'est-ce qu'il y a ? Tu ne sais pas ce que c'est qu'un duel de sorciers ?

Nina voulut hurler de rire. Un duel de sorciers ? C'était la chose la plus ridicule qu'elle n'ait jamais entendu ! Les duels étaient des choses sérieuses, entre des sorciers adultes, mais surtout, parfaitement désuètes.

Il était monnaie courante jusque dans les années 1900 que les sorciers Occidentaux se fixent des duels à la mort, souvent pour régler un litige qu'ils ne pouvaient porter en Cour de Justice Magique, encore très vacillante à l'époque : mari trompé, parieur endetté... Mais ils s'étaient raréfiés de plus en plus avec le perfectionnement du système judiciaire sorcier, jusqu'à presque disparaître. Aujourd'hui, c'était un sport prisé des classes populaires, et Alexandre avait presque pleuré lorsque leur père avait refusé de les emmener au Tournoi Officiel de Duels du Bronx, à New-York il y a quelques années.

Alors un duel de sorcier entre des enfants de 11 ans, s'il vous plaît ! Que feraient-ils, à part se lancer quelques étincelles ?

Ce qui lui donnait encore plus envie de rire, c'était la tête d'Hermione, où l'inquiétude se mêlait à un agacement presque comique.

-Ne t'en fais Hermione, ils ne risquent rien.

-Ça n'est pas ça qui m'inquiète !

Elle se tourna vers Potter et Weasley :

-Excusez-moi.

Ils levèrent la tête vers elle et Weasley marmonna dans sa barbe.

-J'ai entendu ce que vous vous disiez avec Malfoy. Il n'est pas question que vous vous promeniez la nuit dans le château. Vous avez pensé aux points que vous ferez perdre aux Gryffindors si jamais vous êtes pris ? Et vous serez forcément pris. C'est vraiment très égoïste de votre part.

Nina haussa les deux sourcils en buvant une gorgée d'eau, les yeux rivés sur le spectacle.

-Et ça ne te regarde vraiment pas, répliqua Harry.

-Bonne soirée, ajouta Ron.

Ils se levèrent tous les deux et quittèrent la table. Hermione ne retourna vers Nina, l'air outré et un peu blessé :

-Je n'y crois pas ! C'est toute la maison qui est punie pour leurs bêtises !

-Ils ne se feront peut-être pas attraper...

-On en sait rien.

« Je pourrais savoir moi... » pensa Nina. Mais non. Elle devait penser à autre chose, laisser son Troisième Œil en dehors de tout ça. Elle empêcha Pluton se sortir de dessous la table. Les chats n'étaient pas admis dans la Grande Salle aux heures du repas.

-Quoi qu'il en soit, continua Hermione, c'est pas mes affaires. Je ne m'en mêlerai pas.

Nina rebut une gorgée d'eau, dubitative.


-Je croyais que c'était pas tes affaires ?

-Oh, ça va !

Nina soupira. Dans le noir de la Salle Commune, elles attendaient que Harry et Weasley sortent de leur dortoir pour aller à leur rendez-vous. Nina avait froid et sentait la fatigue pointer le bout de son nez. Chaque minute qui passait la rapprochait de planter Hermione là et d'aller se coucher.

-Les voilà ! chuchota-t-elle soudain.

-Oui j'ai vu...

Les deux garçons se faufilaient à l'aveuglette entre les fauteuils. Hermione alluma sa lampe et s'avança. Nina avait envie de se taper le front avec la main.

-Je n'arrive pas à croire que tu puisses faire une chose pareille, Harry.

Weasley et Potter se retournèrent vers elle, pris par surprise. Harry paraissait plus surpris qu'agacé, ce qui n'était pas le cas de Weasley :

-Retourne te coucher !

-J'ai failli tout raconter à ton frère. Percy est préfet, il pourrait empêcher ça.

Les garçons l'ignorèrent et passèrent le portrait. Hermione laissa échapper un sifflement exaspéré et les suivit. Nina hésita : elle était fatiguée, mais elle ne pouvait laisser son amie seule ! Elle finit par la suivre à contre-coeur :

-Hermione ! C'est une mauvaise idée !

Elle les rejoint dans le couloir. Hermione était toujours en train de lecturer ses camarades.

-Hermione, tant pis pour eux... J'ai un mauvais pressentiment...

Elle remonta nerveusement ses lunettes sur son nez.

-Demain, quand vous serez dans le train parce qu'on vous aura renvoyés, vous vous souviendrez de ce que je vous ai dit. Vous êtes vraiment des...

Elle s'interrompit, les yeux ronds d'horreur.

La Grosse Dame était partie.

Nina avait envie de dormir.


Cette nuit s'annonçait très mal. Heureusement, elle avait bu un peu de la potion de Mme Pomfresh après son altercation avec Malfoy. Sa tête ne lui faisait (pour l'instant) aucune misère, mais elle n'avait aucune confiance en ces trois là. Elle refusait catégoriquement de jeter un œil à ce qui les attendait, mais son instinct ne la trompait jamais : mieux aurait valu aller se recoucher.

-On vient avec vous, entendit-elle Hermione dire.

-Certainement pas.

Weasley et elle se chamaillèrent, et Harry et Nina échangèrent un regard fatigué, jusqu'à ce qu'un léger, très léger bruit, comme un pincement de ses sens, vienne titiller Nina. Elle se tourna pour en chercher l'origine et Harry leva sa lampe :

-Taisez-vous tous les deux, dit-il sèchement aux deux autres. On a entendu quelque chose.

Nina baissa les yeux. C'était Neville Londubat, allongé sur le sol en chien de fusil, contre le mur d'en face.

-Mais c'est pas possible...murmura-t-elle.

Il avait oublié le mot de passe ce gros lourdaud ! Elle décida de ne rien dire, et se cacha un peu derrière Hermione et sa masse de cheveux. Les trois autres lui demandèrent ce qu'il faisait là et Nina voyait l'heure tourner. Par Merlin, ne pouvait-on pas juste se rendre à ce duel ridicule et en finir avec toute cette histoire pour pouvoir enfin aller se recoucher ?

Finalement, ils se mirent tous les cinq en route à travers les couloirs sombres. Nina savait qu'il aurait été préférable qu'elle mène la marche, puisqu'elle pouvait deviner si quelqu'un venait vers eux, mais elle devait s'entraîner à garder son Troisième Œil à la frontière de son esprit.

Toutefois, au fur et à mesure qu'ils s'approchaient de la salle des trophées, elle se sentait de plus en plus nerveuse. Quelque chose n'allait pas.

Finalement, alors qu'ils entraient dans ladite salle, elle comprit. Malfoy ne viendrait pas. C'était un piège. Il fallait s'enfuir !

-Euh...commença-t-elle, mais sa voix était trop basse pour interpeller quiconque.

-Il est en retard, commenta Weasley. Peut-être qu'il s'est dégonflé.

Et soudain, la voix de Rusard résonna dans le couloir voisin. Une peur panique s'empara des enfants. Nina fut la première à réagir : sans réfléchir, elle ouvrit la porte du fond sans bruit, et marcha le plus rapidement et silencieusement possible dans la direction opposé à Rusard. Elle sentit que les autres la suivaient, mais... Traversé par une panique encore plus grande que la sienne, Nina s'arrêta d'un coup et se retourna :

-Neville calme...

Il était trop tard. Le garçon avait perdu le sens des mesures. Il se mit à courir, renversa une armure dans un boucan épouvantable. Nina n'attendit pas l'injection de Potter pour se mettre à courir à toute jambes. Elle et Potter prirent la tête du groupe et s'enfoncèrent dans un dédale de couloirs. Elle laissait son instinct prendre le contrôle, tourna à gauche, à droite, monta deux escaliers...

Soudain, ils étaient devant les salles d'enchantements, hors d'haleine. Nina n'était pas une grande fan de la course à pied et elle sentait actuellement ses poumons brûler et ses jambes fondre. Plus jamais, se jura-t-elle

Le sang battait tellement fort à ses oreilles qu'elle ne prêta pas attention aux jérémiades d'Hermione. Le temps qu'elle retrouve son souffle, les autres étaient déjà en route pour retrouver leur chemin vers la Salle commune.

-Non pas par là !

Trop tard (encore!). Peeves l'esprit frappeur apparut devant eux avec l'air absolument enchanté de les voir là.

-Oh c'est pas vrai....grinça Nina entre ses dents.

-Fiche le camp ! Grogna Weasley.

« Mais quel idiot ! »

Et de Peeves de hurler, et d'eux de courir à nouveau. Nina avait la tête qui tournait. Plus jamais, plus jamais elle n'écouterait Hermione l'entraîner dans ses aventures insupportables. Elle détestait courir.

Ils furent forcé de s'arrêter, car le couloir se terminait sur une porte verrouillée. En plus de la fatigue et de la douleur qui se répandait dans tout son corps, Nina sentit la panique se soulever à nouveau en elle.

Mais quand Hermione sortit sa baguette et ouvrit la serrure d'un sort habile, tout disparut pour laisser place à un sentiment plus profond, qu'elle connaissait bien. Elle connaissait cet endroit. D'où ? Elle ne savait plus. Weasley dut la tirer par la manche pour qu'elle se mette derrière la porte. Et elle se figea d'horreur.

C'était vraiment la pire des nuits. Elle était partagée entre le choc, l'horreur et cette étrange sensation de déjà-vu, qui l'empêchait de paniquer complètement.

-Harry ? Appela-t-elle d'une petite voix.

Il ne répondit pas, trop occupé à regarder l'altercation entre Rusard et Peeves dans le couloir.

-Harry ? Harry, s'il te plaît, regarde donc.

La panique de Neville lui parvenait par vagues nauséabondes et elle s'accrocha à son déjà-vu rassurant pour ne pas se laisser infecter par sa peur.

Finalement, Harry, Weasley et Hermione se retournèrent et se figèrent.

-Je crois qu'on a un petit problème, conclut Nina d'un ton étonnement posé.

L'énorme chien à trois têtes était toujours en train de les évaluer du regard, mais plus les secondes défilaient, plus il se rapprochait du moment où il les rangerait dans la case « ennemis » et alors....

Parfois, lire l'avenir n'était pas du tout attrayant.

Sans un mot, Harry ouvrit la porte et le petit groupe sortit à reculons, avant de claquer la porte et de se remettre à courir à une vitesse que la peur décuplait.

Par un hasard miraculeux, ils finirent par retrouver le chemin de leur salle commune. Pantelants, en sueur et morts de trouille, ils ignorèrent la Grosse Dame et ils pénétrèrent le passage en se bousculant.

Debout, seuls dans la pièce surchauffée, ils restèrent un moment silencieux. Neville était blanc comme un linge et Hermione ne semblait plus pouvoir exprimer une émotion autre que le choc. Chaque respiration s'arrachait de la poitrine de Nina avec un râle de douleur. Potter et Weasley se tenait la main sans s'en rendre compte.

-Mais qu'est ce qui leur prend de garder un truc pareil dans une école ? S'il y a un chien au monde qui a besoin d'exercice c'est bien celui-là !

La remarque (plutôt drôle, trouvait Nina) sortit Hermione de son état léthargique :

-Ça vous arrive de vous servir de vos yeux ? Vous n'avez pas vu sur quoi il était ?

-Il était par terre non ? Je n'ai pas regardé ses pattes, j'avais suffisamment à voir avec ses têtes.

-Non, il n'était pas par terre, il était sur une trappe ! On l'a mis là pour garder quelque chose, c'est évident.

Les paroles d'Hermione ramenèrent le sentiment étrange de déjà-vu dans l'esprit de Nina. Pourquoi cette salle lui était si familière ? Et que cachait-elle ?

Elle n'eut pas le temps d'y réfléchir, Hermione lui avait saisi la main et se dirigeait vers la cage d'escalier :

-J'espère que vous êtes contents de vous. On aurait pu se faire tuer, ou pire, être renvoyés. Et maintenant, si ça vous dérange pas, on va se coucher.

Et elle tira Nina avec elle jusqu'au dortoir. Une fois en haut, Nina la laissa aller se coucher, et s'assit sur le bord de son lit, songeuse. L'école avait un secret, et si quelqu'un pouvait le mettre à découvert, c'était elle. Elle n'avait qu'à le vouloir.

Mais n'avait-elle pas promis ? Promis d'essayer de les contrôler ?

Par la fenêtre, elle pouvait voir les étoiles briller dans le ciel écossais. Elle décida que c'était un bon exercice pour s'entraîner à contrôler son pouvoir que de s'empêcher de penser à un secret. Elle avait ses lunettes pour la protéger. Puis, après tout, c'était plus facile si elle ne retournait pas au deuxième étage, et elle venait de se découvrir une aversion pour les chiens, alors ça ne risquerait pas d'arriver.

C'était décidément la dernière fois qu'elle s'acoquinait avec Potter et Weasley.



Toutefois, cette nuit-là, ses rêves lui apprirent que la harpe jouait toute seule au deuxième étage et dans un grincement sourd, la trappe s'ouvrit sur une obscurité d'encre.



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