Contre tout espoir

Chapitre 2 : Désillusions

Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/11/2016 23:15

Harry n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait que déjà l'homme se jetait sur lui. Il tomba à terre sous le poids du maître de potions, et sentit l'air quitter ses poumons au contact du sol. Mais son calvaire n'allait pas s'arrêter là. Snape saisit sa gorge à pleines mains et entreprit de l'étrangler. Harry agita vainement ses mains en direction de celles de son ainé, tandis que de petits points lumineux apparaissaient déjà dans son champ de vision.

- Snape… Lâ… chez…

- POURQUOI ? Avez-vous fait un pacte avec le diable dans le but de me pourrir la vie ?! De me gâcher ma mort ?!

Harry n'y comprenait vraiment rien. L'instant d'avant il était dans une forêt au milieu de nulle part à regarder Hermione pleurer dans un vieux pull de Ron, l'instant d'après il était au sommet d'une falaise et l'homme qui avait tué son mentor essayait de l'étrangler. Soudain, Harry ressentit une décharge magique le parcourir et les deux hommes se retrouvèrent séparés.

- Qu'est-ce que vous m'avez fait, Snape ? Ca ne vous a pas suffit de tuer le seul homme qui vous ait jamais fait confiance ? Maintenant vous voulez m'empêcher de mener à bien ma mission ? Quand est-ce que vous me livrez à votre maître, dans ce cas ?

- Je ne crois pas que vous aillez besoin de mon aide pour échouer, monsieur Potter. Maintenant réfléchissez. Ah, c'est vrai, vous en êtes incapable.

Snape savoura ses paroles. S'il était bloqué dans le passé avec ce sale môme, autant lui pourrir la vie dignement. Harry, quand à lui, sentit la honte l'envahir plutôt que la rage qu'il aurait dû ressentir après la tirade de Snape.

- Allez-y, tuez-moi, fit-il d'un ton défaitiste. Je ne suis bon à rien de toute façon, je suis un poids pour tout le monde.

- Allons, Potter, où est passé votre courage de Gryffondor ? Je ne vais pas vous contredire, vous êtes un poids pour la société, mais pourquoi prendrais-je la peine de vous tuer, alors que des centaines de Mangemorts en rêvent, sans compter leur chef.

- Alors vous êtes trop lâche pour me tuer vous-même, c'est bien ça ? Vous allez laisser les autres faire le sale boulot à votre place ?

- COMMENT OSEZ-VOUS ? Si VOUS aviez été capable de faire ce qu'on attend de vous, je ne serais pas là à essayer de rattraper votre incompétence, Potter.

- Vous… QUOI ?

- Eh oui, Potter, il y en a qui ont un plan. Maintenant il va falloir trouver une écaille de basilic, pour que je puisse enfin me débarrasser de vous.

- DONC VOUS AVOUEZ ! VOUS AVOUEZ QUE VOUS VOULEZ MA MORT !

- Non, Potter, vous n'êtes pas suffisamment important pour moi, espèce de sale petit moucheron collant ! Je veux me débarrasser de votre présence, vous renvoyer d'où vous venez, pas vous tuer !

- Mais… Mais…

- Quelle éloquence, monsieur Potter ! Bon, maintenant, vous vous tenez tranquille jusqu'à ce que j'arrive à vous renvoyer chez vous, ou sinon je vous attache.

- Professeur… Où sommes-nous ?

Snape vérifia que les sorts d'entrave et de bâillon qu'il avait lancés à Potter étaient opérationnels, et réfléchit à la meilleure façon d'agir. Devait-il révéler la vérité au garçon ? S'il lui disait, il ne pourrait pas s'en débarrasser. Intérieurement, il fulminait. Comment ce sale môme avait-il osé ? Il savait au fond de lui qu'il n'y était pour rien, et qu'il y avait là quelque chose qui le dépassait. D'un autre côté, s'il renvoyait le garçon maintenant, il se ferait tuer, et cet idiot était le seul espoir qu'ils avaient si lui, Séverus Snape, échouait. Il se décida donc d'expliquer rapidement la situation au jeune homme.

- Nous sommes revenus cinquante ans en arrière dans le but que je tue Tom Jedusor avant qu'il n'ait seulement le temps d'apprendre ce qu'est la magie. J'ai utilisé une potion, et Merlin sait comment, vous m'avez suivi ! Toujours là où il ne faut pas, hein, Potter ? Et maintenant, comme je n'ai absolument pas l'intention de jouer les nounous pour Golden Boy, je vais trouver une écaille de basilic, afin de créer un antidote me permettant de vous renvoyer dans le futur, afin que vous ne soyez plus pour moi qu'un mauvais souvenir ! Alors vous allez rester bien sage le temps que je trouve le moyen de vous renvoyer, ou sinon, Merlin m'entende, je ne réponds plus de rien.

Potter agitait frénétiquement la tête, comme s'il essayait de dire quelque chose. Snape soupira.

- Si je vous libère, ais-je la certitude que vous ne feriez rien susceptible de m'inciter à vous pousser du haut de cette falaise ?

Le regard de Potter en disait plus que tous les discours du monde.

- Bien.

Snape retira le sort du bâillon, et Harry reprit bruyamment son souffle.

- Comment pourrais-je vous croire ? Vous essayer de me faire avaler des salades, et vous voudriez que je vous croie sur parole ?

- Croyez ce que vous voulez, Potter, je n'en ai rien à faire. De toute façon, dès que je peux, je me débarrasse de vous.

Harry prit le temps de réfléchir à cela. C'était tout simplement démentiel. On ne pouvait pas revenir aussi loin dans le passé, ce n'était tout simplement pas possible ! Il se souvint de ce que Dumbledore lui avait dit en troisième année au sujet du retourneur de temps. Modifier une seule chose pouvait avoir des conséquences effroyables. Il tenta une question.

- Mais, en revenant dans le passé, vous avez déjà modifié le futur… Qu'est-ce qui nous prouve que notre monde est toujours tel qu'on l'a connu ? Est-ce que ça veut dire que vous n'existez plus dans le monde d'où l'on vient ? Et moi non plus ? Alors, qui est le Survivant ?

- Une question à la fois, Potter. Vous croyez-vous si irremplaçable que cela ? Nous n'avons pas disparu, c'est seulement que nous nous trouvons dans un espace temps différent. Le monde dans lequel nous étions nous a seulement portés disparus.

Mais le raisonnement du jeune homme l'intriguait. En réalité, il n'avait pas la moindre idée de ce qui était arrivé à leur monde depuis qu'il l'avait quitté. Mais s'il commençait à se poser ce genre de questions, il allait perdre de vue son objectif principal.

- Pourquoi voudriez-vous tuer votre maître ? Il ne vous a pas accordé le nouveau chaudron que vous vouliez pour Noël ?

La main de Snape agrippa Harry au col. Il rapprocha le visage du gamin tout prêt du sien.

- Arrêtez de croire que les gens sont tous blancs ou tous noirs, Potter ! Je n'ai jamais été dans son camp depuis la mort de votre mère, mais ça, je crois que vous le savez déjà ?

- Alors pourquoi avez-vous tué Albus ?!

Séverus ne prit même pas la peine de répondre à cela. Au même moment, il entendit des voix enfantines en contrebas. Faisant signe à Harry de se taire, et lui lançant un sortilège de mutisme et un d'entrave par précaution, il fit signe au garçon de rester où il était et partit explorer les environs.

Une heure plus tard, Snape revenait de son exploration des alentours. Un groupe d'enfants jouait sur la plage recouverte de déchets d'algues aux relents de pourriture. L'un d'eux se détachait du groupe. C'était surement lui. Le Lord. Le futur Lord. Du haut de la falaise, le gamin tourna un regard pénétrant vers lui, et Séverus sentit une conscience essayer maladroitement de percer les barrières de son esprit. Séverus eut un rictus : si le Seigneur des Ténèbres n'y arrivait pas lorsqu'il était au sommet de sa puissance, il ne percerait jamais sa barrière d'occlumentie en étant enfant. Mais c'était quand même le signe qu'il fallait se méfier : un tel développement des pouvoirs à son âge n'était pas normal.

Il entendit tout à coup un léger bruissement sur la roche derrière lui. Potter avait réussi à se libérer partiellement et essayait de ramper avec une seule jambe de libre. Snape ne put s'empêcher de le regarder avec un sourire moqueur aux lèvres. Il leva sa baguette et libéra son élève.

- Vous pourriez arrêter de me lancer des sorts ? Je commence à en avoir plus qu'assez !

- Si je pouvais vous faire confiance, Potter, je n'aurais pas besoin de vous entraver ! Si on est bloqué ensemble pour un certain temps, j'entends ne pas être dérangé par votre présence indésirée !

- D'ailleurs… Pourquoi je suis là ?

- Sans doute à cause de cette histoire de prophétie… Qui dit que vous, laissez-moi rire, avez le pouvoir de détruire le Seigneur des Ténèbres.

- Vous vous sentez plus capable de le faire, n'est-ce pas, Snape ?

- Bien sûr. Je suis plus doué que vous dans tous les domaines.

- Mais vous n'avez jamais entendu la prophétie en entier, pas vrai ?

- Non.

- Alors vous êtes dans la merde.

Harry réussit enfin de se dégager du troisième sort du bâillon qu'il recevait depuis le début de la journée. Snape boudait dans un coin alors que les enfants de l'orphelinat étaient déjà repartis. Une formidable occasion de tuer le gamin en faisant passer ça pour un accident venait de lui passer sous le nez, et cet idiot de Potter croyait en savoir plus que lui ! Mais il devait reconnaître qu'il valait mieux prendre connaissance de tous les paramètres avant de finir comme Voldemort lorsqu'il avait essayé de tuer un bébé. Un gamin qui connaissait déjà l'existence de la magie pouvait s'avérer beaucoup plus dangereux.

- Non mais vous êtes vraiment le pire connard qu'il existe, vous le savez ?

Harry réussit enfin à créer un sort du bouclier qui contra le sort de mutisme que lui avait négligemment envoyé Snape.

- Bravo monsieur Potter, enfin un progrès !

- Taisez-vous. A vous de m'écouter. Si on poursuit le même but, vous devez connaître certaines choses avant de vous lancer tête baissée dans une histoire qui vous dépasse.

- C'est l'hôpital qui se fout de la charité, monsieur Potter !

- Ouais, bon, j'avais pas trop le choix non plus, tandis que vous, vous avez foncé sans réfléchir aux conséquences dans le passé, au risque de changer totalement le monde dans lequel nous vivions, alors que ce n'est même pas à vous de tuer Voldemort !

- Ne prononcez pas son nom !

- Pourquoi ? Il n'existe même pas encore !

- Bon, ça suffit, j'en ai assez d'entendre vos jérémiades. Vous allez me faire le plaisir de vous taire avant que je ne vous réduise à jamais au silence.

- Et quel est votre plan, au juste ?

- Potter, je vous ai demandé de vous taire, il me semble !

Mais Harry ne répondait rien, regardant avec attention l'homme en face de lui. Exaspéré, Séverus se décida à répondre partiellement.

- Venir dans le passé, tuer Tom Jedusor.

- C'est tout ?

- Oui, Potter, c'est TOUT ! Parce que votre oh combien vénéré cerveau de limace croit savoir autre chose que moi, peut être ?

- Je crois bien, monsieur.

- Vous CROYEZ ? Eh bien moi je vais vous dire ce que je crois : dès que j'en ai la possibilité, je vous renvoie d'où vous venez !

- Et vous ?

- Comment ça, moi ?

- Vous rentrerez avec moi, bien sûr.

- QUOI ? Parce que vous croyez qu'une fois débarrassé de vous, j'aurais envie de rentrer avec vous, peut être ? J'ai enfin la possibilité de tout recommencer à zéro, et vous, vous voudriez que je revienne dans ce monde qui vous vénère afin de m'agenouiller à vos pieds ? Alors que je suis sûr que vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir pour vous approprier les lauriers de la victoire ?

- Je vous les laisse sans hésiter. Ca n'a jamais vraiment été mon truc, les lauriers. Allergies.

Il y eut un silence au cours duquel les deux sorciers se regardèrent fixement. On aurait pu entendre passer un Joncheruine. Puis, contre toute attente, Harry éclata de rire.

- Désolé… C'est… C'est les nerfs ! Vous comprenez… Hermione doit penser que je l'ai abandonnée… Et s'il le faut je n'existe même plus… Et…

- Allons, calmez-vous, Potter, vous allez nous faire une crise de nerfs.

Harry essuya ses yeux où des larmes commençaient à couler sans contrôle.

- Ca suffit, Potter, reprenez-vous, ordonna-t-il d'un ton sec.

Mais l'air sévère de Snape ne suffit pas à calmer Harry qui fondit tout à coup en sanglots.

- Et mes amis… Et…

Prit de cours, Snape ne sut ce qu'il devait faire. Il regardait le jeune homme ruisselant comme s'il s'agissait d'un animal sauvage particulièrement dégoutant dont il ne fallait surtout pas s'approcher au risque de tâcher sa robe. Mais s'il voulait la paix, il fallait que ces gémissements s'arrêtent.

Là encore, deux solutions. La première consistait à lancer un sort de silence tout autour de Potter, puis de faire comme s'il ne le voyait pas. Mais il y avait là un risque. Potter tenait sa baguette à la main, et même s'il n'était surement pas en mesure de prononcer un sort, il pouvait de nouveau laisser éclater ses pouvoirs sans aucun contrôle, et dans l'état où il était, les deux hommes risquaient de se retrouver projetés tout en bas de la falaise.

Il décida donc d'utiliser la deuxième solution. Elle lui arrachait le cœur, et si jamais quelqu'un l'apprenait, il était fichu. Mais il y était contraint, tenta-t-il de se convaincre. Alors, il avança une main tremblante jusqu'à Potter et lui tapota doucement l'épaule.

Le garçon se crispa sous ce geste si peu snapien, mais ne recula pas. Peu à peu, il parvint à reprendre le contrôle de ses nerfs, en même temps qu'une profonde gêne naissait au fond de son esprit.

- Désolé, monsieur. C'est juste que…

- Allons, Potter. Ne nous faites pas perdre plus de temps que vous ne nous en avez déjà fait perdre.

Mais curieusement, Harry sembla tirer de la force de cette dernière réplique, plutôt que la rage qu'il ressentait d'habitude.

- Professeur ?

- Quoi, Potter ?

- Si vous ne revenez pas…

- Oui ?

- Vous allez totalement changer le monde dans lequel on vit. Il a déjà été énormément modifié par notre départ, alors si vous ne revenez pas… On ne peut même pas s'imaginer à quel point vous avez modifié le futur.

- Arrêtez de vous en faire pour ça, Potter, ce n'est pas le moment. D'abord, je fais ce que j'ai à faire ici. Ensuite, si je suis toujours vivant, j'aviserai.

- Est-ce que c'est comme quand on utilise un retourneur de temps, monsieur ? Je veux dire est-ce qu'on existe toujours dans le futur, ou bien est-ce qu'on a totalement disparu ?

- Je vous ai déjà dit que je n'en savais rien, monsieur Potter ! Maintenant si vous en avez fini avec vos questions stupides, nous pourrions peut être trouver un endroit où passer la nuit.

En effet, le soleil commençait à descendre et les deux hommes frissonnaient en bord de mer.

- Alors votre plan, si j'ai bien compris, c'est de tuer un enfant avant qu'il ne devienne l'adulte qu'on connait.

- Vous voyez, quand vous voulez, Potter, vous comprenez !

- Un ENFANT !

- Oh, non, Potter, ne commencez pas, vous savez très bien qui il va devenir, ou plutôt ce qu'il va devenir ! On peut épargner des milliers de vies ! Réfléchissez-y un peu !

Harry prit le temps de penser à cet acte. Il avait vu les souvenirs de Dumbledore. Tom était déjà malfaisant à onze ans. Il pouvait sauver des vies. Il pouvait sauver sa mère et son père… Mais… Il sentit tout à coup un objet froid palpiter contre son torse. Il entrouvrit sa chemise et sentit un frisson dans sa nuque. Un lourd médaillon était accroché autour de son coup. Un médaillon qu'il ne quittait plus…

- Professeur…

- Quoi encore, Potter ?

- Je crois qu'on a un problème.

- Un seul, Potter ?

Il dégagea le médaillon de sa chemise.

- Savez-vous ce qu'est ceci, monsieur ?

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