Contre tout espoir
Chapitre 16 : Bonus 2 : l'enfance de Severus
Catégorie: T
Dernière mise à jour 08/11/2016 22:13
« Cher Père Noël,
Cette année, je ne savais pas quoi te demander. Je ne voulais pas un jouet ou un nouveau livre d'images, il y en a déjà plein à la maison. Papa me répète que j'ai de la chance par rapport à certains enfants qui n'ont pas d'argent. Et je sais qu'il a raison. Il me suffit de voir ceux qui ont un uniforme tout troué à l'école pour le savoir.
Quand j'en ai parlé à Papa, il m'a dit de réfléchir à quelque chose qui me manquerait, quelque chose que je n'avais pas et qu'il me ferait plaisir de recevoir pour Noël. Alors, j'ai fait la liste de tout ce que j'avais, et ma conclusion est que j'ai tout. J'ai même tellement de choses que je n'ai jamais voulu avoir, comme ce balai de course dont je ne sais même pas me servir, et que je suis trop petit pour voler tout seul avec, que les autres enfants veulent tous être amis avec moi. Je ne les aime pas trop, mais au moins, les plus grands n'osent pas s'attaquer à moi, parce que je ne suis jamais seul.
J'ai quand même fini par trouver ce que je n'avais pas. Je n'ai pas connu ma famille. Je sais que mon papa n'est pas mon vrai papa, il me l'a expliqué, et m'a dit que mes vrais parents étaient morts tous les deux. Il m'a expliqué, quand j'ai été assez grand, qu'il était venu me chercher parce que mon papa et ma maman étaient morts, et qui était vraiment mon père. Un moldu. Finalement, je suis bien content de ne pas avoir été élevé par un moldu. Je n'aurais même pas pu voler sur un balai si j'étais resté avec ma vraie famille ! Je sais aussi que le père de mon papa était mort deux ans avant ma naissance. Papa en parle toujours avec un regard bizarre, comme s'il allait se mettre à pleurer, mais il sourit en même temps. Je ne sais pas qui était mon grand-père, mais je pense que c'était quelqu'un de bien. Et c'est pour ça que je t'écris.
Père Noël, cette année, je ne veux pas de jouets. A six ans, je suis bien trop grand pour ça. Ce que je veux, c'est pouvoir parler à mon grand-père, savoir qui il était vraiment. Je n'ai pas de maman, je n'ai que mon papa. Alors, s'il y avait vraiment quelqu'un de bien dans ma famille, je veux qu'il sache que j'aurais voulu le connaitre. Même si je sais que ce n'est pas possible de faire revenir les morts, papa dit qu'ils restent toujours prêts de nous par la pensée.
Alors voila, Père Noël, si tu pouvais faire parvenir cette lettre à mon grand-père, ce serait le plus beau cadeau de Noël que je n'ai jamais reçu.
Merci d'avance,
Severus Prince »
Severus cacheta soigneusement sa lettre, en faisant attention à ne pas se brûler avec la cire chaude. Puis il alla l'apporter à son père, un peu gêné devant cette tradition qu'il considérait comme enfantine. Les plus grands des enfants de l'école de Pré-Au-Lard disaient que le père Noël n'existait pas, mais comment cela pouvait-il être possible alors qu'à chaque fois que son papa postait une lettre au père Noël, il recevait le matin du 25 décembre les jouets qu'il avait demandés ?
Alors, cette année, il tentait le tout pour le tout. Il alla porter la lettre à son papa, en se demandant comment il le saurait si son grand-père avait reçu sa lettre. Il se creusait encore la tête lorsque Tom prit la missive, éclatant de rire devant l'expression de son fils. Lequel tourna les talons comme si de rien n'était, les sourcils toujours risiblement froncés. Lorsqu'il fut sûr qu'il ne le verrait pas, Tom décacheta la lettre. Un simple sortilège lui permettrait de la recacheter et de faire semblant de la poster à la poste de Pré-Au-Lard.
Il parcourut les premières lignes non sans une certaine fierté. Oui, il avait réussi à fournir à son fils tout ce que lui-même n'avait pas eu. Il avait tout ce dont pouvait rêver un petit garçon, et le plus incroyable était qu'il ne prenait même pas la grosse tête. Peut être que cela viendrait avec l'âge, et à ce moment-là, Severus serait le Serpentard le plus admiré de tous les temps. Il aurait un bel avenir, aussi beau que s'il était né dans une famille de sang-pur noble.
Son cœur se serra lorsqu'il arriva au paragraphe qui parlait de l'envie de Severus de connaître sa famille. Tom n'aimait pas les femmes, il n'avait pas pu offrir une maman à son fils. Mais il fut étonné lorsqu'il vit que Severus ne voulait pas de maman, mais plutôt parler à son grand-père. Ainsi, le respect que lui-même ressentait pour l'homme avait dû être si évident que le petit garçon considérait presque son grand-père comme un saint. Peut être aurait-il dû lui en parler.
Peut être aurait-il dû lui raconter son grand-père, avec toutes ses qualités et tous ses défauts. Peut être était-il trop jeune pour connaître la vérité, et surement qu'il ne lui révèlerait jamais tout. Mais… C'était décidé. Tom lui parlerait de son père, de son premier cadeau de Noël, les petits soldats de plomb dont il ne s'était jamais séparé. Une idée germa dans son esprit.
Les derniers jours avant Noël passèrent à la vitesse de l'éclair. Severus paraissait moins calme que d'habitude. En général, alors que les autres enfants étaient excités à l'approche du jour où ils recevraient des cadeaux, Severus se contentait de hausser les épaules, comme si ce n'était pas correct de montrer son impatience. Tom songeait souvent que l'enfant avait un sens du politiquement correct inné, et il s'amusait beaucoup à le voir arranger pendant des minutes entières sa posture à table, comme si c'était la chose la plus importante au monde que d'appliquer à la lettre les règles en usage, à savoir ne pas mettre les coudes sur la table, se tenir droit, sans être avachi sur le dossier de sa chaise, les deux pieds au sol, les jambes décroisées.
Mais cette année, Severus se montrait plus taciturne, plus soucieux peut être. Il l'observait souvent, alors qu'il passait de plus en plus de temps enfermé dans la bibliothèque, essayant vainement de décrypter des livres bien trop difficiles pour son âge, déjà autodidacte dans son apprentissage. Le soir de Noël, Severus resta assis au pied du sapin jusque très tard, jusqu'à ce que Tom vienne le chercher.
- Allez, fiston, le père Noël ne viendra jamais si tu restes sous le sapin, viens te coucher !
- Mais papa, et si le père Noël il pouvait pas me donner ce que je veux ?
- Le père Noël peut tout faire, Sev. C'est le plus grand sorcier de tous les temps, presque plus grand que Merlin !
- C'est vrai ?
Severus sembla plongé dans des réflexions bien trop profondes pour un adulte comme son père, qui le prit dans ses bras, l'entrainant vers sa chambre. Il le déposa doucement entre les draps, l'embrassant sur le front.
- Mais papa, et si je ne pouvais pas savoir si le papa Noël il a pu faire ce que je voulais ?
- Il faut que tu ais confiance en lui, il est très fort, tu sais ?
- Plus fort que grand-père ?
Tom sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine. C'était le genre de questions posées innocemment par les enfants qui mettent les adultes dans tous leurs états. Il s'efforça de sourire et déposa un baiser sur le front de son enfant.
- Ca, j'en doute. C'était quelqu'un, ton grand-père.
- Tu m'en parleras, un jour ?
- Promis, mais ce soir, il est temps de dormir. Bonne nuit, mon fils.
Tom éteignit la veilleuse, laissant Severus qui serrait à présent un vieux hibou en peluche dans ses bras.
Seul face au sapin de Noël, il se décida à déterrer ses souvenirs du grenier. Aidé par un elfe de maison, il alla chercher la vieille boite dans le grenier. Cette vieille boite en bois, avec les soldats peints sur le couvercle, et son trésor de soldats de plombs à l'intérieur. La peinture n'avait presque pas souffert du temps, et il laissa ses doigts courir sur les figurines froides, en se souvenant du temps qu'il avait passé à revivre des batailles imaginaires, encore et encore. Il prit la boite, la nettoya d'un sort et revint au salon, la déposant sous le sapin. Puis, il alla chercher deux oranges qu'il plaça sur le couvercle. Enfin, il alla se coucher, en se demandant si Severus apprécierait le geste.
La nuit fut longue pour les deux habitants de la grande maison. L'impatience de chacun semblait créer une atmosphère lourde et palpable, et l'aube n'arriva que trop tard. Ils se levèrent tous deux aux aurores, et Tom resta un peu en retrait, attendant de voir la réaction du garçon. Severus ouvrit dubitativement la boite, observa les soldats, puis se tourna vers son père, une expression interrogative sur le visage.
- Alors, Sev, qu'est-ce que le père Noël t'a apporté ?
Il se rapprocha, tandis que Severus lui tendait sans mot dire la boite de soldats. Il la prit, et s'assit par terre, aux côtés de son fils.
- Incroyable ! C'est la boite de soldats que m'avait offerte ton grand-père quand j'avais ton âge !
- C'est vrai ? Demanda Severus, tout à coup surexcité.
- Oui, regarde ce qui est gravé dans le bois, là.
Tom lui indiqua un endroit du couvercle, à l'intérieur, où Harry avait autrefois gravé ces quelques mots. « A mon fils que j'aime ». Il sentit Severus retenir son souffle alors qu'il caressait l'inscription du bout des doigts.
- Je vais te raconter une histoire, Sev. C'est l'histoire d'un homme sans qui on ne serait pas là aujourd'hui. C'est l'histoire de ton grand-père.