Sauvetage imprévu

Dès sa première année, Harry se révéla être un élève studieux et appliqué. Il était plutôt discret, mais ça ne l’empêchait pas d’avoir un caractère particulièrement affirmé et une tendance certaine à briser les règles.

Certains prétendirent qu’il était sous l’influence de son ami le plus proche, Drago Malefoy, mais il prouva à de nombreuses reprises qu’il était parfaitement capable de penser par lui-même et de se défendre sans que Drago ait à intervenir. Il lui arrivait parfois de s’emporter violemment et ses colères étaient dévastatrices.

Dumbledore essaya plusieurs fois de le ramener dans son giron, mais Severus veillait au grain et Harry était bien trop attaché aux Malefoy et à son professeur acariâtre pour se laisser faire. Les informations sur ses parents restèrent sans effet sur lui : Severus lui parlait régulièrement de sa mère. Quant à son père, il découvrit la façon dont il avait traité Severus par hasard en surprenant une conversation entre ce dernier et Lucius. Harry n’avait pas dit un mot, mais il avait, dans son esprit, tiré un trait sur cet homme qui ressemblait un peu trop à son cousin tyrannique.

Avec les années, Harry oubliait sa petite enfance catastrophique et malheureuse. Il lui arrivait encore de faire des cauchemars, mais c’était loin d’être aussi violent que lorsqu’il était plus petit et c’était exceptionnel. Pourtant, Drago continuait parfois à le rejoindre dans son lit pour discuter et ils s’endormaient ensemble.

Même s’ils étaient discrets, Théo les surprit un matin lors de leur troisième année. Il leva un sourcil amusé et il leur avoua qu’il n’était pas vraiment surpris : après tout, ils étaient toujours aussi fusionnels qu’à leur arrivée à Poudlard.

Parfois, malgré leur complicité, les deux garçons se disputaient violemment. Ils se hurlaient dessus avant de partir chacun de leur côté bouder dans leur coin. Cependant, ils se réconciliaient rapidement, la plupart du temps aidés par leurs amis puisqu’ils devenaient rapidement insupportables lorsqu’ils étaient loin l’un de l’autre.

La seule exception fut une dispute épique durant leur quatrième année, pendant le tournoi des trois sorciers. Ils restèrent sans se parler pendant près de deux semaines, rendant l’atmosphère dans le dortoir Serpentard irrespirable. Malgré leurs efforts, Blaise et Théo ne parvinrent jamais à savoir ce qui s’était passé exactement.

D’après les cris de Drago sur Harry, ils en déduisirent que la brouille était due à une fille. Visiblement, Harry avait eu un coup de cœur pour une joueuse de Quidditch et Drago n’avait pas apprécié…

Lorsque Blaise s’en était étonné, Théo avait levé un sourcil moqueur et avait ricané qu’il n’était pas vraiment étonné de la réaction de leur cher blondinet susceptible…

Les deux garçons étaient têtus et bien que malheureux ils continuèrent de ne pas se parler. Excédé, Severus intervint, pour la paix de sa maison et de sa classe : non seulement les deux garçons semblaient être devenus des grenades dégoupillées, prêtes à exploser, mais en plus ils n’étaient pas du tout attentifs pendant le cours de potions et il avait dû faire face à plusieurs explosions de chaudron intempestives…

Il leur parla longuement, avec l’impression de ne pas être écouté. Plutôt que de perdre son temps à hurler après deux têtes de mules butées qui ne tiendraient pas compte de ses paroles, il les menaça des pires représailles s’ils ne réglaient pas rapidement le problème.

Il y eut quelques jours où les deux garçons s’évitaient après cette remise au point, l’air à la fois malheureux et furieux. Les lettres de Narcissa se multipliaient, adressées à l’un puis à l’autre… jusqu’à ce que Drago arrive un jour devant les vestiaires de Quidditch pour surprendre un Harry rougissant discuter avec l’attrapeuse des Serdaigle, Cho Chang. Il ne fit pas attention au fait que Harry semblait plutôt mal à l’aise, et il chargea comme un taureau furieux. La jeune fille prit rapidement la fuite en les voyant se hurler dessus et commencer à se battre.

Blaise et Théo n’eurent même pas le temps de les séparer, puisqu’avant qu’ils n’arrivent près d’eux, ils étaient en train de s’embrasser comme si leur vie en dépendait… De l’avis de leurs deux amis, ils avaient réussi l’exploit de représenter la pire mise en couple de l’histoire de Poudlard… voire de l’histoire du monde magique.

Une fois calmés, Harry et Drago discutèrent longuement tous les deux, collés l’un à l’autre, sans se soucier du reste du monde, et la dispute fut rapidement oubliée. Harry avoua rapidement que son intérêt pour Cho venait de ses talents au Quidditch et qu’il la trouvait jolie. Cependant, il n’avait pas imaginé lui proposer un rendez-vous alors que Drago s’était déjà mis dans la tête que la Serdaigle allait lui voler son meilleur ami depuis toujours. Sa jalousie irraisonnée lui permit de se rendre compte qu’il ne voulait pas être séparé de Harry et même si sa mère lui avait souvent dit dans ses lettres de parler à cœur ouvert avec son ami, il avait préféré envisager le pire et repousser le jeune homme pour ne plus avoir le cœur brisé.

Il avait compris que Harry était plus qu’un ami lorsqu’ils s’étaient finalement embrassés : au moment où leurs lèvres s’étaient touchées, il avait su qu’il aimait le brun, et qu’il le voulait pour lui tout seul.

Pour Harry, les choses étaient un peu différentes. Il ne s’était jamais posé de questions, pensant que Drago serait toujours près de lui. Il ne pensait pas à l’amour, et il n’avait aucune arrière-pensée en parlant de Cho Chang. Leur dispute l’avait blessé et il avait réagi en rendant coup pour coup, refusant d’avouer que la présence de Drago lui manquait terriblement. Dans son esprit, il n’avait rien fait de mal et il refusait de céder, tout simplement.

Le baiser qu’il avait échangé avec Drago l’avait déstabilisé, parce qu’il n’avait jamais pensé à l’avenir. Finalement, il avait décidé comme toujours de profiter de l’instant présent.

La paix était revenue entre eux. Cependant, leur nouvelle relation avait agité Poudlard presque autant que la répartition de Harry dans la maison Serpentard.

Au début, Harry avait cru que le problème venait du fait qu’ils étaient deux garçons. Cependant, même si certains ne semblaient pas à l’aise avec leur couple, le principal problème venait de leurs identités : Harry était le survivant, celui qui avait mis fin au règne de Voldemort et Drago était le fils d’un Mangemort notoire.

Ils ignorèrent les réflexions et les regards noirs, vivant leur relation sans s’intéresser au reste du monde.

Malgré les déclarations grandiloquentes de Dumbledore, il n’y eut pas de nouveau signe de vie de Voldemort. Ce que le vieil homme ignorait était que Severus et Lucius veillaient au grain et s’assuraient qu’aucun de leurs anciens complices n’aurait l’idée de ramener le Seigneur des Ténèbres à la vie. Ils avaient appris à aimer Harry Potter sincèrement, tout autant que Drago. Le protéger leur semblait naturel même s’ils regrettaient parfois les idées de Voldemort, avant qu’il ne devienne sanguinaire.

Peut-être que Albus Dumbledore aurait aimé savoir qu’il avait eu raison. En partie. Voldemort avait bien été vaincu par l’amour. Ce n’était pas cependant le sacrifice de Lily Evans Potter qui avait fait la différence. C’était la façon dont son fils unique était entré dans le cœur de la famille Malefoy…