Sauvetage imprévu

Harry entra dans Poudlard avec les yeux brillants, regardant autour de lui, émerveillé. Bien évidemment, il avait entendu parler de Poudlard, et Narcissa lui avait appris tout ce qu’il y avait besoin de savoir. Avec Drago, ils avaient lu l’histoire de Poudlard également, curieux de ce nouveau monde qui s’ouvrait à eux.

Le jeune garçon nota le froncement de sourcils du directeur, mais il l’ignora, se rapprochant instinctivement de Drago pour murmurer.

   — Tu crois qu’on sera dans la même maison ?

Le blondinet haussa les épaules, ne semblant pas vraiment inquiet.

   — Quelle importance ? Tu sais que je ne t’abandonnerai pas, quoi qu’il arrive.

Harry soupira, frustré de ne pas réussir à faire comprendre à son ami ses inquiétudes. Isolé dans une autre maison, il craignait d’être vulnérable. Il craignait de ne pas pouvoir se lier à d’autres camarades, de ne pas pouvoir accorder sa confiance comme il l’avait fait avec les Malefoy.

Harry se plongea dans ses pensées, un peu crispé, et Drago lui jeta un bref coup d’œil inquiet. Il tentait de le rassurer, mais il avait les mêmes inquiétudes. Il savait à quel point Harry pouvait se renfermer sur lui-même, et il n’était pas tranquille à l’idée de le penser seul dans un dortoir, alors qu’il faisait toujours des cauchemars réguliers. Il était certain que cet idiot ne se plaindrait jamais, et l’idée qu’il soit livré à lui même lui serrait le cœur.

Il s’était attaché à lui, et ce depuis le jour de leur première rencontre. Cet étrange gamin trop maigre et apeuré, qui n’avait pourtant pas hésité à venir le secourir… Contre son propre cousin moldu, alors qu’il savait qu’il serait probablement battu pour s’être interposé.

Profitant du fait qu’ils étaient au milieu de la masse des nouveaux élèves apeurés, ils se collèrent l’un contre l’autre et Drago prit brièvement la main de Harry, serrant ses doigts pour lui prouver qu’il n’était pas seul. Et qu’il ne serait plus jamais seul.

*

Severus regarda les enfants allant être répartis avec une grimace agacée. Il détestait chaque rentrée, chaque nouvelle fournée de gosses bruyants et stupides qui arrivaient. Cette année, pourtant, était différente.

Dumbledore avait commencé à lui parler de Harry Potter, de sa présence et de sa ressemblance avec son père. Incrédule, il l’avait écouté, les sourcils froncés, mais il n’avait pas dit le moindre mot. Il était resté silencieux alors que Dumbledore préparait déjà l’entrée du fils Potter, réglant avec Minerva les détails, persuadé qu’il serait réparti chez les rouge et or comme ses parents.

Pour connaître le petit garçon — contrairement au directeur — il savait qu’il y avait de grandes chances pour que le choixpeau décide effectivement de l’envoyer à Gryffondor, mais il savait également que Harry n’avait rien en commun avec ses parents. Aucun de ses deux parents. Son enfance désastreuse l’avait marqué, et le maître des potions se jura de tout faire pour empêcher le directeur de le manipuler.

En le voyant épaule contre épaule avec Drago, il retint un sourire amusé. L’air pincé de Dumbledore en disait assez long sur ce qu’il en pensait, tout comme le dos raide de Minerva. C’était probablement la dernière chose qu’ils aient pu imaginer, que Harry Potter se lie avec Drago Malefoy.

Severus laissa ses pensées dériver alors que les nouveaux élèves étaient appelés les uns après les autres pour passer sous le choixpeau. Sans surprises, son filleul fut envoyé à Serpentard à peine l’artefact magique eut effleuré sa tête.

Lorsque Harry Potter fut appelé, la Grande Salle devint totalement silencieuse. Severus nota les joues rouges de Harry et il capta son regard pour lui adresser un discret signe d’encouragement. Aussitôt, le garçon se redressa et avança, s’installant sur le tabouret, visiblement mal à l’aise.

Le choixpeau fut posé sur sa tête et il y eut un long silence. Puis, « Serpentard » retentit et Harry se leva d’un bond avec un sourire, fixant Drago à la table des Serpentard.

Alors que le petit garçon allait se précipiter, inconscient du lourd silence choqué, Minerva lui attrapa l’épaule, lui tirant une grimace de douleur, pour le retenir. Elle lança un regard au directeur, répugnant visiblement à le laisser rejoindre sa maison, mais Severus se pencha.

   — Il me semble qu’il ne s’agit pas de l’un de vos lions, Minerva. Laissez-le rejoindre sa table et poursuivez qu’on en finisse !

La directrice adjointe rougit, prise en faute, et un signe de tête sec de Dumbledore la convainquit d’abandonner. Harry lui jeta un regard pensif en se massant l’épaule et se dépêcha de s’éloigner, pour aller se coller contre Drago.

S’il n’avait pas été autant habitué à masquer ses émotions, Severus aurait laissé un large sourire fleurir sur ses lèvres, ravi de pouvoir veiller sur Harry sans avoir à composer avec Minerva ou même Dumbledore. Le vieux fou en voulant mettre de côté les Serpentard en les jugeant perdus d’avance lui avait donné une totale liberté sur la gestion de sa maison… et il devait s’en mordre les doigts en cet instant. Il avait lui-même placé le survivant hors de sa portée.

Les yeux brillants de satisfaction, il fixa les deux garçons qu’il appréciait plus que tout et leur adressa un bref sourire de félicitations.

*

En arrivant près de Drago, Harry semblait excessivement fier de lui, et il s’installa, en massant toujours son épaule. Drago fronça aussitôt les sourcils.

   — Elle t’a fait mal ?

   — C’est rien… Je vais bien.

Malgré lui, Drago ne put s’empêcher de ricaner.

   — Et tu t’inquiétais qu’on soit séparés, hein ? Je ne sais pas comment tu as fait, mais c’est… génial !

Harry gloussa, libéré d’un poids énorme, avec l’impression que sa scolarité ne pourrait pas être meilleure. Il fit un clin d’œil à Drago et regarda autour de lui. Son bonheur fut complet en croisant le regard de Severus et en notant son sourire.

Le cœur en fête, il ignora le reste de la répartition ainsi que le discours du directeur, se laissant juste aller dans une douce euphorie tout contre son ami.

Drago murmura pensivement.

   — On enverra un mot à maman pour la prévenir, elle m’a demandé de la tenir au courant.

Harry ricana.

   — Bien sûr ! Elle a parié avec Lucius au sujet de ma répartition. Elle pensait que je serais dans la même maison que toi, et bien évidemment elle avait raison.

Les deux amis échangèrent un regard complice et un même sourire moqueur naquit sur leurs lèvres. Drago haussa les épaules, concluant leur échange avant de se servir dans le plat devant lui.

   — Maman a toujours raison, de toute façon…