L'Ecrin des illusions

Chapitre 30 : Les Larmes du Léthé (deuxième partie)

4169 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 13/05/2024 21:13

Hazel se trouvait à présent dans une maison abandonnée. Des bruits de pas se firent entendre et elle vit émerger par la porte d'entrée, une femme tirant par la main, une petite fille épuisée. L'enfant tenait un Niffleur en peluche contre sa poitrine. La petite fille n'était autre qu'elle-même. Comprenant qu'elle venait de retrouver le souvenir de cette nuit funeste, Hazel observait l'enfant et sa mère. La fillette lasse et affamée ne cessait de réclamer son père et sa maison, Dahlia ne prêtait aucune attention à ses jérémiades et la houspillait afin qu'elle se taise. Hazel se rappela alors de leur fuite loin de l'Allée des Cerisiers. Quelques jours auparavant, Dahlia, au lieu de la conduire à l'école, avait pris un autocar les ayant conduit toutes les deux à Londres. À partir de là, s'en était suivie une longue errance en compagnie d'une Dahlia nerveuse, changeant sans cesse d'apparence grâce au fabuleux collier qu'elle portait autour du cou. Hazel ouvrit les yeux et lança un regard aux deux silhouettes enveloppées de brume. Après plusieurs de jours de vagabondage et de sommeils agités, la mère et la fille étaient arrivées sans encombre à la maison du vieil Alphard Black.


Dahlia Black retira sa cape ruisselante d'eau et la laissa tomber au sol. Elle lâcha la main de la petite Hazel et s'avança de quelques pas sur le sol poussiéreux. Depuis la mort de son père, le cottage familial prenait la pluie et la saleté. Elle dirigea sa baguette vers un candélabre couvert de toiles d'araignée et alluma les trois bougies mourantes. La pièce se retrouva baignée d'une faible lumière et Hazel put distinguer avec plus de netteté, la silhouette de sa mère. Dahlia avait retrouvé sa véritable apparence et arborait une moue pincée, fort peu aimable. À ses côtés, la petite Hazel recommençait à geindre se plaignant de la faim et du froid. Dahlia lui décrocha un sombre regard avant de cogner le talon de sa bottine contre le parquet d'un geste impatient.


- Quilp !


Un vieil elfe de maison, ses flancs maigrichons ceints d'un torchon douteux, fit son apparition. Hazel se rapprocha et observa la créature : contrairement à l'elfe Penny, l'elfe des Black avait une triste mine ! Il était borgne, son visage était marqué de rides profondes et une petite touffe de cheveux gris jaillissait de ses oreilles dévorées par la crasse.


- Maîtresse Dahlia ! s'écria le vieil elfe. Mais...


Il se tut et écarquilla les yeux de stupeur en apercevant la petite Hazel. La Hazel plus âgée, celle dont nul ne pouvait percevoir la présence, s'avança vers le trio. La fillette lâcha la jupe de sa mère et s'approcha de la créature d'un pas hésitant. Elle voulut tendre sa petite main pour toucher le vieil elfe mais sa mère suspendit son geste.


- Veux-tu bien cesser ! Tu vois bien qu'il est dégoûtant !

Elle écarta sa fille et se retourna vers l'elfe de maison tremblant.

- Prépare mon ancienne chambre et amène-nous de quoi manger.

- Mais, maîtresse... balbutia la petite créature. Vous ne pouvez pas...

- Suffit, ordonna-t-elle en massant ses tempes, cette maison m'appartient. Cesse de discuter et active-toi !


Le pauvre Quilp disparut. Dahlia parut enfin s'intéresser à sa fille. Elle s'agenouilla et d'un geste sec, dépourvu de chaleur, déboutonna le manteau gorgé de pluie de l'enfant. Elle prit le vêtement et le fit disparaître dans sa besace. La petite Hazel secoua la tête, sa tresse mal peignée retomba contre son épaule. Dahlia lui prit les mains avec brusquerie et les serra dans les siennes. Hazel se pencha pour écouter les recommandations que sa mère donnait à son double enfant. La fillette, terrifiée par les paroles de sa mère, acquiesça et promit d'être sage pour ne pas leur attirer des ennuis.


- Maman, osa toutefois la petite Hazel, papa va venir avec nous ?


Le sourire méprisant qu'adressa Dahlia à sa fille fut pire qu'une réponse pour la Hazel spectatrice de la scène. Ce simple rictus trahissait toute l'absence de sentiments que Dahlia Black portait à Oliver Evans. La fillette avait-elle perçu le mépris dissimulé derrière le silence de sa mère ? Elle baissa les yeux et serra la Chose contre sa poitrine. Dahlia se saisit du bras de sa fille et l'entraîna vers une porte située tout au fond du couloir. Hazel les suivit dans une chambrette où Quilp les attendait. Un feu avait été allumé dans la cheminée, et obéissant aux injonctions de sa maîtresse, le petit elfe de maison avait apporté un plateau débordant de nourriture. Dahlia ordonna à la petite Hazel de s'asseoir sur le lit. Hazel fut submergée par le chagrin en voyant cette fillette perdue mordillant la patte de sa peluche avec nervosité. Dahlia, loin de se soucier de son enfant, s'approcha du secrétaire et y déposa la besace qui ne l'avait pas quittée depuis son départ. Elle se mit à fouiner dans les tiroirs, tout en pestant contre la saleté. Quilp se saisit d'un pain et d'une pomme et, sans doute pris de compassion, les apporta à la fillette assise sur le lit.


- Merci, bredouilla la petite Hazel, reconnaissante.

Le vieux Quilp tenta d'esquisser un sourire.

- Hazel, la réprimanda Dahlia, tu n'as pas à le remercier. Cette vieille chouette crasseuse est à notre service. Tu devrais oublier toutes ces politesses, tellement moldues, enseignées par ton père !


La grande Hazel en resta bouche bée et sentit son cœur se serrer en voyant le pauvre Quilp courber l'échine. Elle crut entendre le petit elfe renifler et se faire violence pour réprimer ses sanglots. La petite Hazel tendit ses doigts et avec maladresse, tapota l'épaule de la créature avec tendresse. Quilp eut, cette fois-ci, un vrai sourire édenté et s'installa auprès de la fillette. Hazel se rapprocha de Dahlia.


Petit à petit, les souvenirs enfouis resurgissaient au fur et à mesure qu'elle retrouvait la mémoire concernant cette nuit tragique . Quand elle n'était encore qu'une enfant dépourvue de dons magiques, Dahlia ne se souciait guère d'elle. Elle ne s'était jamais occupée de Hazel, la laissant à la charge d'Oliver Evans, complètement sous le charme de sa fille. Qui lui avait appris à marcher ? Oliver. Qui avait salué son premier mot ? Oliver. Qui lui avait appris à faire du vélo, à lire et à lacer ses chaussures ? Oliver. Oliver, éperdu d'amour, tentant de combler les absences régulières de sa compagne, en lui trouvant sans cesse des excuses. Le petit cabanon qu'il avait installé au fond du jardin avait été, au départ, construit pour les beaux yeux de Dahlia qui y passait la majeure partie de son temps. Hazel se plaça aux côtés de Dahlia fouillant dans sa besace. Dahlia avait commencé à s'intéresser à elle, lorsque ses pouvoirs avaient commencé à se manifester.


- Maîtresse Dahlia, osa demander le petit elfe de maison. Qui est cette enfant ?

- C'est ma fille, répondit la sorcière en se retournant vers eux. Tu ne reconnais pas son beau sourire Black ? C'est malheureusement la seule chose dont elle a hérité de moi...

- Est-elle... une sorcière ?

- Bien entendu ! répliqua Dahlia avec orgueil. Dans le cas contraire, je l'aurais laissée à son Moldu de père.

Hazel fut sonnée par l'égoïsme et la cruauté se dégageant de cette femme dont elle avait chéri le souvenir depuis tant d'années. Dahlia croisa ses bras contre sa poitrine, le collier de rubis était plus étincelant que jamais.

- Je compte bien reprendre cette maison en main. Je ferai renaître la noble lignée des Black et qui sait, peut-être que cette vieille bique de Walburga me viendra en aide...

- Madame votre tante n'aimait pas tellement le maître, murmura Quilp.

- Oui, mais elle m'a toujours eue à la bonne. J'ai besoin d'argent.


Dahlia se saisit de sa besace et se dirigea vers le lit. Elle poussa le pauvre Quilp sans ménagement, le faisant tomber sur le tapis avant de s'asseoir face à sa fille. Le petit elfe, dévoré par la curiosité se redressa et se mit à observer les gestes de sa maîtresse. Dahlia sortit un écrin de sa besace et l'ouvrit. Elle en retira le Remonteur de temps cassé et caressa l'objet avec amour. La fillette achevait de croquer dans sa pomme, quêtant un regard de la part de cette mère, plus intéressée par son artefact que par son enfant.


- Je compte bien partir en Amérique, poursuivit Dahlia dans un chuchotement à peine perceptible, là-bas, je serai libre.

- Vous-Savez-Qui, reprit Quilp, il...

- Ne sera pas un problème ! J'ai réussi à le semer en m'accoquinant avec un Moldu niais pendant six ans, il n'est pas prêt de me retrouver !


Hazel suffoquée d'indignation, faillit désobéir à Rogue en jetant un objet à la tête de Dahlia Black, lorsque des bruits de pas se firent entendre. Le pauvre Quilp blêmit avant de dissimuler ses yeux globuleux de ses grandes mains poilues. La petite Hazel s'apprêtait à questionner sa mère lorsque celle-ci lui plaqua la main contre la bouche avec brutalité. Tout en lui faisant signe de rester silencieuse, elle se tourna vers l'elfe de maison.

- Qui est-ce ? s'enquit-elle, un brin nerveuse.

- Le petit maître, gémit Quilp tout en se frappant le front contre le pilier du lit à baldaquins.


Dahlia lui ordonna de cesser ses simagrées et d'aller accueillir le « petit maître ». Quilp disparut en poussant des gémissements douloureux. Dahlia parut réfléchir quelques secondes avant d'agir. Elle s'empara de la Chose, dissimula son écrin dans la poche de l'animal en peluche, le fourra dans les bras de sa fille avant de la traîner jusqu'à l'armoire. La petite Hazel tenta de se débattre, geignant que sa mère lui faisait mal. À bout de patience, Dahlia pointa sa baguette vers le visage de sa fille.

Silencio !


La petite Hazel porta la main à son cou et jeta un regard paniqué à sa mère. Elle tenta de parler mais aucun son ne sortit de ses lèvres ! Dahlia, loin de la consoler ou de la rassurer, la poussa dans l'armoire, retira la bague - l'anneau d'invisibilité reconnut Hazel -, de son annulaire et l'enfila au doigt de la fillette. La petite Hazel disparut et Dahlia, sans aucune pitié pour les larmes silencieuses de son enfant, referma la porte de l'armoire.


Hazel vit Dahlia tourner un fauteuil face à la porte. La sorcière se recoiffa, épousseta ses vêtements avant de prendre place dans le fauteuil, dans une attitude volontairement provocante, sa baguette tendue devant elle. La porte s'ouvrit avec fracas sur un petit groupe de quatre personnes masquées et entièrement vêtues de noir.


- Ma chère et tendre épouse, susurra Hyde en retirant son masque richement sculpté, quelle joie de te revoir !


Altaïr s'avança, majestueux, à l'apogée de sa puissance et de sa beauté vénéneuse, vers Dahlia. La jeune femme se redressa, tout en passant ses doigts sur le pendentif en forme de dahlia noir suspendu au creux de ses seins. Hazel apprendrait plus tard que ce pendentif était le cadeau de fiançailles qu'un jeune Hyde avait offert à Dahlia alors qu'ils n'étaient encore que des étudiants de sixième année.


- Le plaisir est partagé, mon ami, répondit Dahlia en faisant à présent danser ses doigts sur la parure de rubis.

Ce geste empreint de sensualité, lui valut un sifflement répugnant de la petite silhouette trapue, qui n'était autre que celle de Carew, se tenant près du lit. Dahlia tourna la tête vers lui et esquissa un sourire volontiers aguicheur, ses petites dents blanches tranchaient avec la rougeur de ses lèvres. Hazel, loin d'admirer la beauté maternelle à cet instant, la trouva tout aussi dangereuse que celle d'Altaïr Hyde.


- Que faites-vous ici ? l'apostropha la troisième silhouette.


Hazel découvrit un homme doté d'une impressionnante carrure. Il possédait de longs cheveux noirs et une mâchoire épaisse, tout en lui rappelait Seren. La jeune sorcière devina qu'elle se trouvait face au père de son ami. Ce dernier fixait Dahlia avec un mépris non dissimulé et paraissait fort peu goûter à ses minauderies. Il se saisit de sa baguette en toute discrétion et s'adossa contre la porte.


Dahlia perdit quelque peu de sa superbe et tenta de se montrer pleine d'assurance.

- Je comptais bien y trouver mon cher époux, répondit-elle sans se départir de son arrogance, et j'espère également faire amende honorable auprès de notre Maître...

- Seriez-vous folle ?! déclara la dernière ombre, celle qui n'avait pas retiré son masque.


Hazel eut un frisson en reconnaissant le murmure émanant du sorcier se tenant près de l'armoire. La voix avait beau encore posséder une texture juvénile, on ne pouvait se tromper sur l'identité de son propriétaire. Dahlia parut enfin s'apercevoir de la présence du quatrième sorcier. Carew s'approcha du jeune Mangemort et lui décrocha une grande claque dans le dos : le masque - plus simple que celui des trois autres -, tomba à ses pieds, dévoilant le visage hâve et couvert de quelques boutons d'un tout jeune Severus Rogue. Ses longs cheveux noirs et graisseux tombaient en bataille sur son front luisant.


- Fais pas ton timide, ricana Carew en lui donnant un coup de coude fraternel. Tu peux aller saluer la p'tite dame, si tu veux.

Le jeune Rogue secoua la tête et baissa les yeux vers ses souliers crottés. Carew, en passant une langue taquine sur ses lèvres gercées, s'adressa à Dahlia.

- Faut l'excuser, il ne sait pas encore s'adresser aux femmes...


Dahlia esquissa un sourire oscillant entre moquerie et compassion. Elle parut flattée par l'émoi qu'elle avait suscité, bien que brièvement, chez le jeune Serpentard. Severus marmonna quelques mots incompréhensibles ; Carew lui asséna une nouvelle claque avant de s'éloigner dans un rire bien gras. Hyde parut s'amuser de la scène. Lui et Dahlia échangèrent un regard complice. Ce simple geste brisa encore davantage, le cœur déjà bien malmené de la pauvre Hazel. Ces deux-là entretenaient un lien étrange, que Dahlia Black n'avait jamais eu avec Oliver Evans. D'autres réminiscences revinrent en mémoire à la jeune sorcière tandis que Hyde s'avançait vers Dahlia. Les sourires de sa mère, elle s'en rappelait à présent, avaient toujours eu quelque chose de factice. Avec son compagnon moldu et sa fille, elle prenait soin de garder une distance en arborant un masque de sphinx à l'esprit impénétrable ; avec Hyde, elle semblait au contraire, une toute autre personne...


- Où es-tu donc passée pendant toutes ces années ? chuchota Hyde en se penchant vers elle, les mains agrippées aux bras du fauteuil.

- C'est un secret.

- Tu as toujours été une femme pleine de mystères... Que veux-tu, Dahlia ?


La sorcière éclata d'un petit rire séducteur. Wilde émit un grognement agacé, le visage du jeune Rogue devint écarlate et Carew, la bave aux lèvres, savourait ce petit jeu entre les deux anciens complices, avec gourmandise.


- Un marché, rien d'autre, répondit Dahlia en se redressant. Je veux négocier avec le Maître afin de regagner le monde de la magie.

Ses lèvres effleurèrent celles de son ancien compagnon. Hazel sut à cet instant qu'elle aurait dû fermer les yeux et tout en mettre en œuvre pour briser cette douloureuse vision mais la curiosité étant la plus forte, elle voulait aller jusqu'au bout de cette épreuve.


- Ta fortune ? demanda Hyde en avançant ses lèvres vers celles de Dahlia.

- Qu'elle me soit restituée...

- Notre mariage ? poursuivit-il dans un souffle, en déposant un baiser contre la bouche vermeille, source de tentation.


Dahlia rompit leur baiser, porta sa main à la joue de Hyde et la fit glisser jusqu'à son menton. Hyde ferma les yeux et savoura cette caresse intime, lui rappelant bien d'autres. Dahlia approcha sa bouche de l'oreille de son ancien compagnon et lui souffla quelques mots que lui seul entendit. Une grimace déforma le visage du Mangemort. Il ouvrit les yeux. Hazel, bien qu'invisible, se recula d'un pas, saisie par la lueur animale brillant dans les yeux de Hyde. Il poussa un cri rageur et se saisit de la parure de Dahlia. La sorcière tenta de se défendre, mais il la lui arracha avec violence avant de lancer l'artefact contre l'armoire. Hazel vit avec horreur la porte s'entrouvrir. Dahlia, qui ne souciait visiblement pas de la petite Hazel, se redressa d'un bond, pointant sa baguette vers la poitrine de Hyde ; celui-ci devançant son geste, avait posé sa propre baguette contre la gorge offerte de celle qu'il considérait comme une traîtresse. Hazel se rapprocha de l'armoire, le cœur battant : devait-elle agir afin de protéger la petite Hazel ? Elle entendit alors le jeune Rogue murmurer un sort avant de refermer la porte de l'armoire d'un coup de talon ; les deux autres Mangemorts qui avaient dégainé leurs baguettes, n'avaient guère prêté attention au geste de la nouvelle recrue.


Le jeune Severus sortit sa baguette à son tour et ce fut à ce moment-là, qu'un autre lambeau du souvenir oublié revint en mémoire à Hazel : privée de la parole par le sortilège lancé par sa mère, elle avait été protégée de la violence régnant dans la pièce par un sort d'aveuglement momentané prononcé par l'ancien Serpentard. Son cœur fit un bond dans sa poitrine : dépossédée de ces deux sens, elle n'avait jamais assisté au déferlement de violence qui suivit ...


Dahlia tenta de lancer un sort impardonnable mais se retrouva désarmée par l'action combinée des trois Mangemorts. Hyde la projeta contre le mur et se saisit de sa baguette. Dahlia, sonnée par la brutalité de l'impact, se redressa néanmoins, les jambes tremblantes et la tempe droite en sang. Elle avait perdu de son orgueil et l'assurance avait laissé place à une peur indescriptible. Venait-elle prendre conscience de sa faiblesse? Venait-elle de comprendre qu'elle ne pourrait pas lutter, en dépit de son talent, contre quatre Mangemorts dont trois étaient plus qu'aguerris à l'art du duel irrespectueux des règles ?


À la grande stupeur de Hazel, Dahlia se laissa tomber à genoux et d'une voix chevrotante, supplia Hyde de la laisser en vie, de lui pardonner et de lui venir en aide. Elle tendit ses mains jointes vers lui, l'assurant de son amour et de sa fidélité. Hyde abaissa sa baguette, une lueur soulagée s'alluma dans les yeux sombres de son ancienne compagne. Le Mangemort, un rictus malsain accroché aux lèvres, s'avança vers elle, bras ouverts, comme s'il désirait sceller leur réconciliation. Hazel entendit alors le ricanement de Carew et sut que Hyde s'apprêtait à se jouer de la naïveté dont faisait preuve Dahlia Black. La sorcière se releva avec lenteur et s'apprêtait à se nicher contre lui quand un Endoloris vicieux la frappa en pleine poitrine. Hazel se saisit de sa baguette, la leva, avant de se raviser. À quoi bon défendre une femme aussi égoïste que manipulatrice ? Son Destin n'était-il pas scellé ? il ne servait à rien de le modifier... Hazel resserra ses doigts autour de sa baguette mais ne fit rien pour repousser le second sort qui plongea Dahlia Black dans une souffrance insoutenable.


Tout en infligeant de cruelles blessures à son ancienne compagne, alternant entre Endoloris et Cruxcuor, Hyde interpella ses comparses afin de les convier à son petit jeu. Seul, Carew répondit à cet appel et se joignit avec grand plaisir à la séance de torture. Wilde se tenait toujours près de la porte, ne participant pas aux bestialités des deux sorciers ; le jeune Rogue avait le corps secoué de tremblements et semblait sur le point de s'évanouir.


Hyde poussa un cri terrifiant et lança un nouveau sort à sa victime à la peau couverte d'hématomes et de coupures sanglantes. Une profonde entaille se dessina sur la poitrine de Dahlia et un pétale rougeoyant se déploya sur son chemisier immaculé. La sorcière, à bout de forces, tomba tandis que les deux Mangemorts se penchaient vers elle.


Hazel sentit une présence derrière elle. Une main pâle, exhalant une légère odeur de noisette, se posa sur ses yeux, obstruant sa vue ; tandis qu'une voix ô combien familière et rassurante, lui glissa un sort au creux de l'oreille. Les cris de Dahlia furent remplacés par des bourdonnements et la jeune sorcière comprit, qu'une fois de plus, Rogue désirait protéger son innocence de l'indicible crime auquel se livrait Hyde. Au bout de longues, interminables minutes, les doigts du sorcier s'envolèrent de son visage, les bourdonnements s'évanouirent, ne laissant place qu'au silence et à l'aube naissante. Le corps de Dahlia Black gisait sur le lit. La sorcière, dont les cheveux couverts de sang glissaient jusqu'au tapis, était plongée dans ce sommeil éternel dont elle ne pourrait se libérer avant bien des années ...


Hazel voulut s'approcher de l'endormie quand la porte de la chambre s'ouvrit. Un jeune Rogue, seul cette fois-ci, entra dans la pièce et après avoir lancé un regard de pitié au corps de Dahlia, s'approcha de l'armoire et l'ouvrit.


Homenum revelio, murmura-t-il en pointant sa baguette vers ce que Hazel devina être la silhouette de son double du passé.


Il se pencha vers une petite Hazel pétrifiée par l'effroi, ôta les sortilèges lui ayant ôté la vue et la parole et, avec une certaine douceur, se saisit de l'enfant. Elle ne tenta même pas de se débattre et telle une poupée de chiffon dépourvue de toute conscience, laissa sa tête reposer mollement contre l'épaule du jeune sorcier. Dans sa petite main droite, elle tenait fermement la patte de sa peluche, seul lien la maintenant avec la réalité. Le jeune Severus lui chuchota quelques mots avec maladresse avant de disparaître, chargé de son précieux et douloureux fardeau.


- Je ne savais pas quoi faire de vous, chuchota le maître des potions se tenant derrière Hazel. Je vous ai emmenée à Poudlard et j'ai demandé à Penny, une elfe de maison qui s'est prise de sympathie pour moi lors de ma scolarité, de me conduire jusqu'au bureau de Dumbledore.

La jeune sorcière se retourna vers lui. Rogue contemplait l'armoire vide d'un air absent.

- Je l'ai supplié de faire quelque chose pour vous, pour sauver votre esprit traumatisé par ce que vous aviez pu percevoir...

- Le Pacte... murmura Hazel.

- C'était le seul moyen pour ne pas vous « oubliéter » et éviter de causer des dommages irréversibles à votre jeune cerveau. J'ai... je...

Hazel le vit détourner les yeux, comme s'il cherchait à masquer sa gêne.

- Dumbledore a tenté de m'avertir des conséquences, mais je m'en moquais bien à ce moment-là ! Je pensais que nous ne serions pas destinés à nous revoir... Je voulais juste vous ôter ce maudit souvenir afin que vous puissiez poursuivre votre petite vie de fillette sans cervelle auprès de votre imbécile de Moldu de père !

- Pourquoi ?

- J'imagine que je voulais réparer ma dette. Je n'ai rien fait pour empêcher cette ignominie de se produire, avoua le sorcier en serrant sa baguette si fort que les jointures de ses doigts se mirent à blanchir.


Hazel contempla cet homme, rien qu'un homme, rongé par la culpabilité et le poids de secrets qu'il traînait comme une chaîne dont il ne parvenait pas à se défaire. Avoir abandonné Dahlia Black aux griffes impitoyables de Carew et de Hyde, n'était sans doute pas le seul péché dont il portait encore les stigmates. À cet instant, le vent poussa les volets et s'engouffra dans la chambre, déposant aux pieds de Hazel, des pétales desséchés de myosotis. La jeune sorcière vit la silhouette du maître des potions s'évanouir dans la poussière. Elle tendit la main, se saisit de son avant-bras et se retrouva emportée par une brume noirâtre.


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