Ariana Potter, Second Cycle : Dans la Lumière de la Guerre
CHAPITRE XII : PLANS DE DEFENSE
En se levant, Ariana abandonna la robe qu’elle avait mise pour le mariage de ses deux amies pour enfiler de nouveau sa tenue de combat. Cet uniforme était devenu pour elle comme une seconde peau. Elle se sentait bien en la portant, malgré toutes les souffrances auxquelles elle était liée.
Elle nouait ses cheveux en une queue de cheval quand elle surprit le regard d’Alex posé sur elle. Il souriait, peut-être amusé de la voir un peu coquette malgré le côté militaire et pratique de sa livrée. Elle répondit à son sourire, rosissant légèrement.
— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-elle.
— Rien, répondit-il. Je te regarde, c’est tout.
— Tu ne vas pas me dire un truc cliché comme « ce que tu es belle » quand même ?
— Je pourrai, mais comme tu dis, ce serait totalement cliché. Je vais plutôt dire que je te préfère avec la robe que tu portais hier soir. Elle t’allait bien.
— C’est cliché également, rit-elle. J’espère en porter d’autres. J’aime bien, j’ai l’impression d’être une dame du grand monde. C’est mieux que ces frusques.
— Elles te vont aussi très bien, elles te ressemblent plus. Tu es une guerrière.
— À chaque fois que je la mets, je sais que je vais devoir me battre, voir des gens souffrir et même mourir. Et pourtant, je respire mieux en la portant, je me sens plus sereine.
— Tu verras que tu seras soulagée quand viendras le moment de l’enlever définitivement. Pour le moment, c’est la guerre et tu en es pleinement consciente.
Ariana jeta un coup d’œil amusé et coquin à Alex.
— Je sais que tu n’attends que ça que je l’enlève.
Alex rit et ils allèrent rejoindre les autres sur la passerelle.
Mars, rougeoyante approchait. Tout autour on devinait des vaisseaux martiens et terriens en orbite. Ceux des Dæmons s’étaient éloignés à l’approche de la flotte venue de la Terre. Les renseignements transmis par la DE indiquaient leur position. Ils étaient hors de vue de l’Ankou, poursuivis par des forces martiennes.
— Nous sommes entrés dans le périmètre couvert par les radars alliés, indiqua Rozenn. Heureusement qu’ils savent que nous sommes de leur côté.
— Tu craignais qu’ils ne rayent la peinture de ton vaisseau ? plaisanta Alex.
— Ce n’est jamais agréable de se faire tirer dessus par des alliés. Aucune trace du vaisseau ennemi que nous traquons. Peut-être ne sont-ils pas venus ici finalement.
— Contactons Rowena dans un premier temps, dit Tony. Elle aura peut-être des infos.
Zoé était déjà à pied d’œuvre, initiant le protocole de chiffrement pour coder la communication.
Sur Mars, au quartier-général de la coalition, Rowena était chargée de coordonner les renseignements et de conseiller l’état-major sur l’utilisation des forces issues du monde magique. Elle faisait aussi office d’agent de liaison entre les sorciers et les moldus, permettant d’éviter les incompréhensions « culturelles ».
Heureusement, elle pouvait compter sur son fidèle Irvine Smith pour le seconder efficacement. Ce dernier vint à elle rapidement. Elle comprit que quelque chose se passait et elle attendit qu’il lui en fasse part.
— Un vaisseau est entré dans la zone couverte par les radars orbitaux. Il a transmis le code d’identification de la DE.
— Sûrement l’Ankou, en conclut Rowena. Et donc l’équipe de Tony et Kat arrive enfin.
— Pour le moment, ils veulent te parler. Zoé a chiffré la communication.
D’un geste de baguette, Irvine isola la pièce. Rowena connecta son TOI pour prendre la liaison, générant une image holographique devant elle où apparut Anthony Chaldo.
— Tony, le Patron m’a prévenu que vous veniez vers Mars, dit-elle.
— Nous sommes à la poursuite d’un vaisseau dæmon comme tu le sais sûrement, expliqua-t-il. Aurais-tu des informations qui pourraient nous aiguiller ?
— Pas vraiment. On a du mal à suivre leurs vaisseaux hors du champ des radars orbitaux de Mars. Les mouvements qui nous sont signalés par les flottes sont souvent aberrants.
— On sait pourquoi.
Tony lui raconta ce que le vaisseau dæmon qu’ils poursuivaient avait fait pour leur échapper, emportant avec lui les crânes de cristal et Ramus Owali.
— Et donc il ne leur manque plus que le Maître-Crâne, finit Tony. Les Atlantes l’ont gardé en leur possession au Temple. Quelle est la situation aux alentours ?
— Pour le moment, la guerre a épargné cette zone, répondit Rowena. Si les légions cherchent le Temple, elles ne l’ont pas encore repéré ou ne le montrent pas. Mais ça ne durera pas éternellement. Je me suis entretenu avec les Premiers plusieurs fois sur le sujet et on a mis au point un plan d’évacuation de la population au cas où. Pour le moment, les civils atlantes sont bien plus à l’abri là-bas.
— On ne va pas commettre l’erreur de guider Ramus jusqu’à eux. Nous voudrions contacter Shemhazai.
— Je vais vous mettre en liaison. Mais avant, peux-tu m’éclairer sur un point ? Le Patron a dû faire une erreur, dans son message annonçant votre arrivée, il a parlé de Corbeau et Corvus. Est-ce que Julia a repris ton ancien indicatif ?
— En fait non, c’est moi qui ai repris le mien.
— Et pourquoi Julia a pris Corbeau ? Je croyais que c’était toi maintenant !
— Je le suis toujours mais… Arrête de rire et viens clarifier la situation au lieu de me laisser ramer ! s’écria soudain Tony en s’adressant à quelqu’un hors champ.
Hilare, Alex apparut dans le champ holographique au côté de son jumeau. Si Rowena fut surprise, elle se garda de le montrer. Elle se contenta de pousser un long soupir.
— Je ne vais pas dire que je ne suis pas surprise, mais ton retour me surprend moins que ta mort en fait, dit-elle. A force de fréquenter les Chaldo, on finit par ne plus être surpris de rien. C’est triste…
— Attend que l’on soit face à face pour reprendre les hostilités envers moi s’il te plait.
— Je pense qu’il est temps pour moi de passer à autre chose. Je sais que la mort de ma sœur t’a blessé autant que moi. Elle avait choisi ce métier et tout comme nous, elle en connaissait les risques et les acceptait. Et puis, je dois avouer qu’une partie de moi est heureuse que tu sois de retour.
— Content de l’apprendre. Mais au risque de te décevoir, mon cœur est déjà pris.
— Ariana doit être aux anges ! Je m’occupe de la liaison avec le Temple. Zoé, reste sur ce canal.
La communication cessa là.
— Comment elle a deviné qu’on était ensemble ? se demanda Ariana. Tu aurais pu rencontrer quelqu’un d’autre.
— Rowena a toujours été très perspicace, dit Alex. Elle doit avoir compris mes sentiments pour toi avant même que j’en sois conscient moi-même.
Quelques minutes plus tard, la communication fut établie entre l’Ankou et le Temple. Ce fut Shemhazai en personne qui les contactait.
— Monsieur Alexandre Chaldo, c’est avec joie que j’ai appris à l’instant que vous aviez survécu, salua-t-il.
Alex se contenta d’un hochement de tête. Shemhazai enchaina sur le sujet principal qui les préoccupait :
— Concernant le Maître-Crâne, nous en avons débattu à plusieurs reprises entre nous et il nous est apparu que le conserver nous faisait prendre trop de risque, aussi bien à nous qu’à notre peuple et aux autres.
Voyant tous les regards troublés tournés vers lui, le chef des Premiers continua :
— Seul, il est inutile. Nous ignorons où les Dæmons ont emmené les autres crânes. Sans le Maître-Crâne, ils ne sont que de vulgaires morceaux de cristal ouvragés. Les combats se rapprochent du Temple et donc, sa sécurité est compromise. Vu que les Dæmons ont les autres crânes, nous ne pouvons prendre le risque qu’ils ne s’emparent de celui-ci.
— Que proposez-vous ? De le détruire ? interrogea Tony.
— Oui, nous pensons que c’est le plus sage.
— Mais ces crânes contiennent votre Histoire, vos connaissances, votre culture ! s’emporta Julia.
— Nous ne voulons pas que nos connaissances tombent entre les griffes des Dæmons. Quant au reste, nos descendants vont devoir s’intégrer à votre peuple. Nous leur avons parlé d’Atlantis et du chemin que nous avons parcouru avant, pendant et après la Première Guerre Solaire. Ils s’en souviendront même lorsque nous aurons disparu. Ils devront s’en contenter et faire perdurer notre héritage. Leur héritage, devrais-je dire.
— Pouvez-vous le détruire dès maintenant ? questionna Tony.
— Pas dans le Temple, la puissance qu’il renferme le ferait s’effondrer. Nous devons agir à l’air libre. De plus, cela prendra plusieurs minutes.
— Vous risquez d’être pris pour cible pendant ce laps de temps. Surtout que Ramus doit être en surveillance et se lancera à l’assaut dès qu’il vous repèrera. On ne peut pas faire appel aux armées, ce serait trop visible. On va assurer votre protection nous-mêmes. D’après ce que nous a dit Rowena, les alentours du Temple sont encore épargnés par les combats. Et comme l’idéal serait de limiter le déplacement du Maître-Crâne, vous allez procéder à sa destruction dans cette zone. Le seul inconvénient, c’est la sécurité de la population. Il vaut mieux que votre peuple soit en position d’évacuer à ce moment-là. Si nous sommes repérés, ils n’auront que quelques minutes.
— Ils seront prêts. Donnez-nous quelques heures pour les derniers préparatifs, que ça soit de l’évacuation ou de la destruction.
— Cela nous laisse le temps de mettre en place le dispositif de protection. On se recontacte dans trois heures.
Shemhazai acquiesça avant de couper la communication. Tony se pencha sur une carte holographique en trois dimensions de la région du Temple.
— Il nous faut un lieu facile à défendre si possible, dit-il.
— Ici, indiqua Alex. Ça semble la meilleure option.
La zone qu’il indiquait était une sorte de cuvette de deux cents mètres de diamètre entourée de crêtes rocheuses d’une vingtaine de mètres. Sûrement les vestiges d’un cratère de météorite datant de plusieurs millénaires.
— Parfait ! accorda Tony. Je vais briefer les UA et les STAR et on va décider d’un plan de défense. Il faut que tout le monde soient prêts dans deux heures et trente minutes. L’Ankou pourra-t-il assurer la couverture aérienne en cas de besoin ?
— Bien entendu ! répondit fièrement Rozenn. Mon frère va commander la manœuvre, car je viens avec vous avec quelques pirates.
— Dont moi, intervint Igor Stradus. Et je ne te laisse pas le choix cette fois.
— Alors je sais qu’il ne nous arrivera rien de fâcheux, conclut la capitaine.
Sébastien Chaldo entra dans la pièce accompagné de son neveu William. Il fit signe aux deux hommes qui gardaient le prisonnier de sortir. Une fois la porte fermée derrière eux, il fit apparaître une chaise et s’assit, William demeura debout derrière lui.
Devant eux, ligoté magiquement à une chaise, les mains sur les accoudoirs, Dick Jards les toisait avec haine.
— Vous allez le regretter au-delà de ce que vous pouvez imaginer, cracha-t-il.
— Pour le moment, ce n’est pas nous qui sommes attachés, répliqua calmement Sébastien. Vous veniez chercher les Potter qui se trouvent sous notre protection. Pourquoi eux ?
— Cela ne vous regarde pas ! Livrez-les nous et nos maîtres se montreront peut-être cléments. Refusez et…
— Oui c’est bon, on sait : on souffrira.
Sébastien poussa un long soupir de lassitude.
— Je sais que vous connaissez la réputation de notre famille. Sachez qu’elle n’est pas usurpée. Personne ne s’en prendra aux Potter ni à aucun de ceux qui sont sous notre protection.
— Alors nous vous tuerons tous !
— Vous essayerez. Et en attendant : répondez à ma question.
Les yeux de Sébastien glacèrent le prisonnier. Il comprit que toutes menaces étaient inutiles. Cet homme ne se laisserait pas impressionner. Il perçut même qu’il ne reculerait devant rien pour avoir ses réponses.
Il prit peur. Toute sa vie on lui avait appris que son sang pur lui octroyait la puissance et la supériorité. Il savait que les Chaldo, par contre, ne croyaient pas en la pureté du sang et n’hésitaient pas à s’unir aux moldus et à d’autres races telles que les Dragoniars. Selon ce qu’on lui avait enseigné, ils devraient être faibles et dégénérés
Alors pourquoi se sentait-il écrasé par la puissance qui émanait de cet homme ? Comment pouvait-il démontrer un tel ascendant psychologique ? L’avait-ton trompé toute sa vie ? Lui avait-on enseigné des mensonges ?
Il savait qu’il ne pourrait rien lui cacher. Alors autant se mettre à table.
— Nos maîtres veulent les Potter, informa-t-il.
— Pour quelle raison ?
— Ariana Potter est agent IS à la DE. Je ne sais pas pourquoi mais ils pensent qu’elle détient quelque chose qui pourrait les détruire. Je n’en sais pas plus sur le sujet. Ils veulent que nous prenions en otage sa famille pour faire pression sur elle et la forcer à se livrer.
— Votre secte va attaquer de nouveau ?
— Oui, et cette fois-ci ce sera en force. Vous ne vous en sortirez pas.
— A quelle force doit-on s’attendre ? continua Sébastien sans démontrer la moindre inquiétude.
— Plusieurs escouades de sorciers entraînés au combat et des créatures alliées telles que des géants et des détraqueurs. Ainsi que d’autres.
— Des légions, devina-t-il. Bien, je pense que nous avons fini.
— Que comptez-vous faire de moi ?
— Vous êtes un prisonnier de guerre. Nous vous traiterons comme tel jusqu’à la fin du conflit, de manière convenable. Après, vous serez certainement jugé. Nestio !
L’elfe de maison apparut immédiatement.
— Que puis-je pour vous monsieur ? demanda la créature.
— Assure-toi que notre prisonnier reçoive le minimum vital.
— Bien monsieur, fit-il avant de disparaître.
— William, tu peux le mettre en cellule.
Le jeune homme fit revenir les deux gardes qui se saisirent de Dick Jards et l’emmenèrent.
— Qu’est-ce qu’Ariana pourrait bien avoir qui fasse si peur aux Dæmons ? demanda William.
— J’ai ma petite idée là-dessus. Ça a un rapport avec quelque chose que Tony et elle ont appris alors qu’ils étaient à Valinorya. Une sorte de prophétie faite par l’Eldyr[1]. Elle a appelé Ariana « Araya Meyana ». Cela signifierait « La Lumière Salvatrice ». Mais je n’en sais pas plus.
— Doit-on la prévenir ?
— Non, elle a sûrement d’autres choses qui réclament toute son attention. Sa famille est sous notre responsabilité. Alors nous nous battrons pour la protéger. Renforce les défenses, nous allons subir une attaque d’envergure.
[1] Voir « Ariana Potter et le Serment des Eldars ».