Ariana Potter, Second Cycle : Dans la Lumière de la Guerre
Chapitre 73 : XIV Le Devoir des Chaldo
4881 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 07/01/2021 04:13
CHAPITRE XIV : LE DEVOIR DES CHALDO
Les Chaldo apportaient les derniers détails à leur défense sous la direction de William. Sébastien se tenait debout sur le parvis du manoir, observant son neveu.
— Que fais-tu Seb ? demanda un homme lui ressemblant, légèrement plus âgé.
— J’apprécie le travail de ton fils, répondit-il. Il se révèle.
— Nous connaissions déjà ses talents de combattants, nous découvrons maintenant ceux de leader. Les temps durs comme ceux que nous vivons en ce moment révèlent la vraie valeur des individus.
À quelques mètres, le bruit reconnaissable d’un portoloin attira leur attention. Jeanne monta les marches, accompagnée de deux autres sorciers.
— La mission s’est bien passée, demanda Sébastien.
— Oui, répondit la jeune femme. Ce n’étaient que des bandes de pillards qui cherchaient à profiter de la situation. Rien de dangereux. On les a remis aux autorités compétentes. Ce fut juste long. On est affamé !
— Allez manger un morceau et vous reposer. On se prépare à subir une attaque du Serpent Blanc. On aura besoin de tout le monde.
Jeanne acquiesça et suivit son père à l’intérieur avec le reste de son équipe.
William rejoignit Sébastien.
— C’est Jeanne que je viens de voir ? demanda-t-il.
— Oui, sa mission s’est avérée plus simple que prévu. Et de ton côté ?
— On a presque fini les préparatifs. Ensuite, ce sera l’attente.
— Ce qu’il y a de plus dur…
— J’ai prévu un roulement sur les différents postes pour permettre à tous de pouvoir prendre du repos.
— Excellent travail.
William ne releva pas. Son regard couvrait le parc, se perdant sur le périmètre et au-delà.
— À quoi penses-tu ? osa demander son oncle.
— Que je préfèrerais être en train de préparer le prochain tournoi de Duel Magique plutôt qu’une bataille.
— Oui, je te comprends, rit-il. Il faut dire que la finale de la dernière Coupe du Monde était impressionnante ! Tu n’as pas volé ta victoire.
— Il n’y a jamais de beau match sans un bon adversaire.
— C’est vrai qu’il était très bon. Vichienko, c’est ça ?
— Oui. On s’est retrouvé dans le même bar après la compétition. On a pu faire plus ample connaissance. C’est vraiment un type sympa et un vrai compétiteur. J’espère pouvoir lui accorder la revanche que je lui ai promis.
— Et je serais là pour apprécier le spectacle.
— Pour le moment, j’espère surtout qu’il va bien, ainsi que sa famille.
Sébastien et William continuèrent à discuter. Derrière eux, sortant du manoir, s’avancèrent Charles et Justin Potter. Ils regardaient s’affairer les Chaldo dans le parc.
Sébastien se tourna vers eux :
— Messieurs, vous ne devriez pas être là. L’attaque peut survenir à tout moment.
— Nous avions besoin d’air, répondit Charles Potter. Nous sommes un peu tendus.
Charles couvrit le parc du regard.
— Vous n’avez pas à prendre tant de risques pour nous. Si je me livre, le Serpent Blanc vous laissera en paix.
— Peut-être. Mais il ne saurait en être question.
— Alors vous êtes prêt à sacrifier les vôtres pour des inconnus alors qu’il suffirait que je…
— Je doute que votre reddition les arrête, intervint William.
— Que voulez-vous dire ?
— Le Serpent Blanc vous veut, vous tous. Nous savons que c’est pour faire pression sur votre fille Ariana qui a un rôle important dans cette guerre. Du moins, les Dæmons le pensent. Or, même si je ne doute pas de l’attachement qu’elle vous porte, je pense que s’ils ne peuvent avoir qu’un membre de votre famille, ce ne sera pas vous.
— Sarah… blêmit Charles.
— Exactement. Et aucun de nous ne laissera ces énergumènes s’en prendre à une fillette ni à aucun d’entre vous. Vous êtes sous notre protection. Pour les Chaldo, c’est une question d’honneur. Ça fait quatre siècles que nous suivons cette voie. Ce n’est pas aujourd’hui que nous nous en détournerons. Je ne suis pas forcément le meilleur exemple pour dire ça, car j’ai essayé de m’éloigner de ce crédo durant longtemps. Maintenant que j’ai compris son importance, aucun Potter ne sera l’otage de nos ennemis tant que je vivrai.
— Mais vous risquez d’être tué ! s’exclama Justin.
— Alors que je sois tué en protégeant.
William tourna le dos aux Potter et retourna vers le périmètre de défense.
— Vous êtes tous si… commença Justin.
— William cherche à se rattraper de son comportement passé, surtout auprès de lui-même, expliqua Sébastien. Mais il a raison sur plusieurs points. C’est la voie que notre ancêtre, Pierrick Chaldo, et sa fille Su, ont choisie et que nous continuons de suivre. Notre héritage.
— Je comprends, acquiesça Charles. Harry Potter l’a souhaité aussi, mais nous nous sommes éloignés de sa volonté. Ariana, sans le savoir, a renoué avec. Harry Potter serait fier d’elle.
Justin eut un rictus de frustration puis soupira. Il se saisit de sa baguette et descendit d’un pas décidé les marches du parvis.
— Où vas-tu ? l’arrêta son père.
— Je ne vais pas laisser d’autres défendre notre famille et rester cacher, dit-il.
Et sans laisser à son père le temps d’ajouter le moindre mot, il rejoignit William et se proposa pour renforcer le dispositif de défense. William tourna son regard vers son oncle qui hocha affirmativement la tête en réponse à la question silencieuse.
— Il n’est pas un combattant, dit Charles.
— N’importe qui peut en devenir un. Ce ne sont pas les techniques de combat, le nombre de sortilèges connus ou la puissance qui compte. C’est d’avoir une raison de se battre et la volonté de le faire. Et votre fils a dû trouver l’une et l’autre.
— La volonté, peut-être. La raison, je n’en vois qu’une : ne pas laisser sa sœur avoir le bon rôle.
Sébastien rit et ajouta :
— J’espère que sa raison est plus altruiste.
— Je devrais l’imiter.
— Votre place est auprès de votre famille. Elles doivent avoir besoin d’être rassurées.
— Pour ma femme et Sarah, vous avez raison. Par contre, depuis qu’Heather sait pour le véritable métier de sa sœur, elle est surexcitée et ne parle que de faire comme elle ! Elle était en train de questionner une certaine Jeanne quand nous venions ici. Elle lui a même demandé si vous organisiez des stages !
Les deux quinquagénaires rirent de concert. Et soudain, le ciel s’embrasa. Un éclair d’une rare intensité avait frappé le dôme généré par l’enchantement de protection et s’était répandu à sa surface comme une toile d’araignée lumineuse et vrombissante.
— Tout le monde à son poste de combat ! lança William.
Un second éclair frappa. Nestio apparut près de Sébastien, annonçant paniqué :
— Monsieur ! Le sceau de l’enchantement s’est fêlé !
— Ramène Potter à l’intérieur ! ordonna-t-il.
Nestio obéit en prenant Charles par la main et en transplanant.
— William ! Le bouclier va céder !
— Les gars, on y est ! cria William. Préparez-vous au choc !
Un dernier éclair vint s’écraser contre la barrière. Le ciel et l’horizon se fissurèrent comme s’ils étaient faits de verre. Et dans un ultime fracas, ils volèrent en éclats.
Aussitôt, Justin sentit le froid l’envahir jusqu’au fond de ses entrailles. Il ne ressentait pas la morsure glaciale dans sa chair, c’était plus profond. Un froid qui lui glaçait l’âme. Il n’avait jamais ressenti un transissement pareil, mais il en avait lu des descriptions dans des livres de défense contre les forces du mal à Hogwarts. Le cri de William lui confirma que son intuition était bonne.
— Détraqueurs ! On reste concentré et on attend mon signal !
Justin les vit apparaître sur la lande environnante, leurs haillons d’un noir crasseux voletant derrière eux alors qu’ils fonçaient à pleine vitesse dans leur direction. Il chercha dans sa mémoire la formule. Spero Patronum. Mais l’incantation seule ne servait à rien sans un souvenir heureux auquel s’accrocher. Et alors que le froid et le désespoir l’envahissaient, aucune pensée agréable ne lui venait. Le bonheur lui semblait être un concept totalement abstrait.
— Prêts à les bloquer !
William attendit encore quelques secondes. Les détraqueurs étaient tellement proches que Justin distinguait leurs « bouches » putrides et recouvertes de croûtes sous leurs capuches.
William se dressa, tendant sa baguette.
— Spero Patronum !
Il ne produisit pas un Patronus corporel, tout comme les autres Chaldo qui l’imitèrent. Il dressa un bouclier d’un blanc laiteux sur lequel se fracassa l’assaut des détraqueurs.
Justin essayait de se joindre à leur effort, mais il ne produisit qu’un léger nuage informe. Tout à sa concentration, il ne remarqua pas que seule une partie des Chaldo participait à la défense, les autres patientaient un mètre derrière.
Les détraqueurs battirent en retraite, volant à quelques mètres. Les Chaldo dissipèrent le sort et attendirent. Les créatures spectrales reprirent de la vitesse pour fondre sur eux, mais elles avaient moins d’élan.
Justin paniquait alors qu’un monstre arrivait sur lui la gueule béante, prêt à aspirer son âme. Tremblant, il leva sa baguette en bégayant l’incantation.
William s’interposa.
— Spero Annihilum !
La vapeur blanche émanant de sa baguette enserra la silhouette sombre du détraqueur. Elle s’insinua sous la draperie et à travers la peau encroûtée. Le détraqueur s’arrêta net, se contorsionnant de manière absurde et crispée comme pris de convulsions. Justin le vit se réduire et finalement disparaître sans laisser de traces.
William se tourna vers Justin et lui tendit la main. L’Anglais n’avait même pas remarqué qu’il était tombé sur le sol. Il accepta l’aide offerte et regarda autour de lui une fois debout. Les détraqueurs n’étaient plus. Déjà, les Chaldo reprenaient leurs positions, se tenant prêts pour l’assaut suivant. La chaleur revint l’habiter.
— Spero Annihilum ! Je ne connaissais pas, dit Justin.
— Il est très difficile à pratiquer, expliqua William. Peu de sorciers en sont capables. On en parlera plus tard. Ce n’était que la première vague, d’autres ennemis vont suivre.
William se transforma en corbeau pour faire rapidement le tour du périmètre et s’assurer que les détraqueurs n’avaient pas fait trop de dégâts. Les Chaldo lui faisaient signe que tout allait bien sur son passage.
Il savait que le Serpent Blanc n’espérait pas les vaincre dès le premier assaut. Le but était juste de les affaiblir et d’instiller la peur dans leurs esprits. Ces sang-purs, sûrs de leur supériorité, allaient vite déchanter en trouvant leurs adversaires toujours aussi combattifs.
Ils les avaient sous-estimés, ils pensaient les effrayer. Bientôt, la peur gagnerait le camp de ceux qui pensaient la dominer.
William reprit forme humaine en se posant près de Justin. Aussitôt, il sortit ses deux baguettes. L’ainé des Potter se sentait démuni de n’en posséder qu’une seule, mais en y repensant, arriverait-il à se servir de deux baguettes à la fois ?
— Qu’est-ce qui va nous attaquer maintenant ? demanda-t-il.
— Surprise surprise ! répondit William d’un ton léger.
— Tu n’as pas regardé pendant ton vol ?
— Regarde, tu vas comprendre.
Justin passa la tête au-dessus du muret qui le protégeait. Il remarqua l’épais brouillard qui recouvrait les alentours du manoir.
— Ils nous cachent la vue pour nous surprendre et nous effrayer, expliqua William. Un vieil adage dit : on craint plus ce qu’on ne peut voir.
— Je le trouve très vrai. Mais j’ai l’impression que vous autres, ça ne vous effraie pas.
— Nous connaissons la peur. C’est juste que nous ne la laissons pas nous dominer. Elle est toujours, mais nous nous servons d’elle. C’est nous qui la dominons.
William n’ajouta rien. Son regard se perdit dans le brouillard. Ses mains ses resserrèrent sur ses baguettes.
— Ils arrivent.
Le silence s’abattit, aussi épais que la brume. Même la nature s’était tue, comme si le moindre bruit pouvait briser cette quiétude et déclencher une apocalypse.
Il y eut un grondement sourd, comme si quelque chose de lourd était tombé au loin. Puis un nouveau. Puis plusieurs, de plus en plus vite. Le bruit se rapprochait. Justin sentait le sol vibrer à chaque coup.
Des silhouettes informes se dessinèrent dans le brouillard. Elles devinrent de plus en plus précises à mesure que le grondement s’intensifiait.
Et soudain, les ombres jaillirent de la brume, prenant la forme de géants habillés de peaux de bêtes et brandissant des massues de la taille de troncs d’arbre.
Il n’y eut pas d’ordre de riposter. William incanta le premier, obligeant un géant à s’affaler sur le sol dans un fracas terrible. Les Chaldo visaient les jambes, la priorité étant d’empêcher ces immenses créatures d’approcher.
— Ne les laissez pas se relever ! s’écria William.
Justin savait qu’à l’instar des dragons, les géants jouissaient d’une protection magique très résistante. Il fallait se mettre à plusieurs pour les stupéfixer, tout en sachant que l’effet du sortilège serait court, ces créatures récupérant vite. Alors quant il vit les Chaldo achever les géants par des maléfices de mort sans forcément s’allier entre eux, il se demanda qu’elle était leur limite.
Un immense ennemi s’avança dans le dos de William. Ce dernier, juché sur le dos de sa dernière victime, ne le vit pas, occupé à observer la ligne de front dans l’autre direction.
Alors que le géant allait abattre sa massue sur William, Justin se dressa d’un coup et lança un sort de bloque-jambes en hurlant. Cela ne fit pas tomber le Gargantua difforme, mais le fit trébucher et permit à William de lui faire face. Il se métamorphosa en corbeau et, d’un coup d’ailes, il vint se poser sur sa nuque en reprenant forme humaine. Ce poids supplémentaire finit de provoquer la chute du géant.
William ne lui laissa pas le temps de se remettre. Il croisa ses baguettes devant lui, et, générant deux rayons rouges, les écarta pour venir trancher le cou de l’ennemi comme avec une paire de ciseaux.
Le combat contre les géants ne dura pas longtemps, car seule une vingtaine avait attaqué.
— Merci, fit William. J’ai failli y passer.
— Je n’ai pas fait grand-chose, dit Justin. Mon sort manquait de puissance.
— Il a été suffisant.
Justin parcourut la ligne de défense du regard. La plupart des géants avaient été stoppés avant de l’atteindre, mais deux étaient parvenus à l’enfoncer. Sur un de ces points, cela n’avait pas eu d’incidence notable. Sur le second, deux Chaldo évacuaient un troisième apparemment dans un état grave.
D’autres portaient également les marques du combat, mais aucun n’esquissait le moindre mouvement de recul. Au contraire, ils profitaient de ces instants de calme pour renforcer leurs positions.
Justin avait lu à plusieurs reprises les récits de la bataille de Hogwarts à laquelle ses ancêtres avaient participé. Chacune de ces lectures l’avait conforté dans son opinion que sa famille occupait une place à part dans le Monde Magique. Peut-être était-ce bien le cas ? Mais maintenant qu’il vivait un moment analogue, il n’en était plus si sûr.
Les Chaldo avaient connu maints combats, et pourtant, ils demeuraient dans l’ombre, servant les deux mondes.
Non, le seul monde qu’ils voyaient.
Le silence régnait dans le parc du manoir Chaldo. Un de ces instants où les mots étaient superflus. Chacun se réfugiait quelques secondes dans ses pensées, tous conscient de la fugacité de ce moment. Certains vérifiaient leur équipement, d’autres buvaient quelques gorgées d’eau.
William scrutait la direction par laquelle l’ennemi arriverait sous peu. Son attention fut troublée par le croassement d’un oiseau noir posé sur le cadavre d’un géant.
Bran semblait l’observer particulièrement. Il croassa encore une fois et s’envola pour se percher sur un arbre proche.
— Les voilà, dit simplement William.
Au début, personne ne les vit. Seuls des éclairs surgissant du brouillard trahissaient leur approche. Aveuglé par la brume, l’ennemi ne pouvait viser précisément. Les sortilèges venaient mourir sur les défenses ou contre les arbres. L’un d’eux frappa celui sur lequel se trouvait Bran, mais ce dernier ne bougea pas, il continuait d’observer sereinement la bataille.
Justin allait répliquer, mais d’un geste, William l’arrêta.
— Garde tes forces pour quand tu les verras, dit-il.
Le calme dont il faisait preuve impressionna Justin. Il ne baissa pas sa baguette, mais attendit.
Les premiers adversaires qui surgirent n’avaient rien d’humain. William les reconnut grâce aux descriptions que les rapports de la DE en avaient faites : des reapers et des breakers. Les sorciers du Serpent Blanc se trouvaient à quelques pas derrière eux.
Les défenseurs s’étaient mis à répliquer sitôt qu’ils virent clairement les assaillants. Les sorts claquaient de toutes parts. Malgré tous leurs efforts, les Chaldo ne purent les empêcher de les atteindre. Le corps à corps s’engagea.
Des flyers et des sorciers sur des balais attaquèrent par le ciel derrière la ligne de défense. Sur le parvis du manoir, les « anciens » de la famille ne se laissèrent pas surprendre. Sébastien, le premier, en abattit un d’un maléfice de mort.
— Il est temps de montrer ce que les vieux valent ! lança-t-il.
— Je parie que j’en abats plus que toi ! défia son frère.
— J’attends de voir.
Pris dans la ferveur de la bataille, Justin lançait sort sur sort. Il ne remarqua même pas qu’il avait cessé d’incanter alors qu’il extériorisait de plus en plus de puissance.
Deux sorciers du Serpent Blanc lui tombèrent dessus, le projetant au sol. Il tendit sa baguette sur eux, mais resta figé, la respiration saccadée. L’un d’eux sourit d’un air mauvais devant l’expression craintive de sa victime.
— Vas-y, invita-t-il. Quoi que tu fasses, tu mourras.
Justin ne voulait pas se faire tuer. Il voulait vivre, toujours convaincu de pouvoir et de devoir faire de grandes choses, pas celles qu’il croyait jusqu’à ce jour, mais de grandes choses. Il ne voyait pas comment s’en sortir. Alors, quitte à mourir, autant en emmener un avec lui.
— Avada Kedavra !
Les yeux soudainement vides, un des mages noirs tomba. Le second désarma Justin d’un Expelliarmus. Il le toisa avec une haine sanguinaire.
— Tu vas payer pour ça ! Traitre à ton sang !
L’Anglais vit la baguette se lever et entendit les premières syllabes retentirent :
— A… Va… Da… Ke… Argh !
La baguette du mage noir lui échappa. Un trou sanguinolent perçait sa main. Il n’eut pas le temps de se tourner vers celui qui était intervenu. William fonça sur l’adepte, bondissant pour venir enserrer ses jambes autour de son cou et le faire lourdement choir. Il posa sa baguette sur la gorge de l’ennemi et d’un sortilège de découpe lui trancha les carotides.
William se releva, délaissant l’homme en train de mourir doucement, et aida Justin.
— Ce n’est pas fini ! s’exclama le Chaldo. Continue comme ça !
— Ma baguette… Où est-elle ? balbutia-t-il.
— Accio, incanta William, attirant la baguette de Justin à lui. Tiens. Et maintenant, continue à te battre.
William se détourna pour se jeter de nouveau dans la mêlée. Justin voyait les corps joncher le sol. Des créatures et des humains. Il remarqua avec horreur des Chaldo parmi eux. Un maléfice qui lui frôla la tête le ramena dans la bataille.
À quelques pas de l’ainé des Potter, William redoublait d’efforts, frappant de chaque côté, relevant un de ses cousins, donnant des ordres brefs, lançant sort sur sort. Naturellement, plusieurs Chaldo se portèrent à ses côtés, se joignant à sa lutte comme un seul et même guerrier.
Sébastien vit la scène et interpela son frère.
— Pat ! Regarde ton fils !
Sur le visage de Patrick Chaldo, la fierté se lisait.
— Ils ont trouvé leur capitaine, dit-il. Ils le suivront jusqu’en enfer, voire au-delà.
William était au centre, sa sœur sur sa gauche parmi des cousins à divers degrés.
— Sur la gauche ! Protego ! Sur la droite ! Avada Kedavra ! Bloque ! Contre-attaque ! Stupéfix !
Les ordres qu’il criait étaient exécutés comme si c’était lui qui agissait réellement. Ses bras ne restaient pas ballants et faisaient tomber les ennemis. Ils étaient bien plus nombreux que les défenseurs, mais cette supériorité s’inclinait devant leur volonté.
Jusqu’au moment où un éclair d’une puissance hors norme frappa le sol, projetant des gravats et les Chaldo en l’air, désarmant William. Il redressa à peine la tête et vit leur assaillant. Un Dæmon s’avançait, ses yeux rougeoyants au fond de sa cagoule.
William tâtonna pour tenter de retrouver une de ses baguettes, mais il ne sentit rien sous ses doigts. Il regarda autour de lui et les vit éparpiller à plusieurs mètres. Il vit aussi sa sœur et ses cousins qui gémissaient de douleur en regardant la créature s’approcher. Ils ne semblaient pas souffrir de blessures graves.
Le Dæmon s’arrêta juste devant William. Il les toisa tous de son regard diabolique.
— Pourquoi souffrir alors qu’il vous suffirait de vous rendre pour que ça s’arrête ? grogna-t-il.
— Car nous préférons mourir libres, répliqua William en grimaçant.
— Libre ! Non, vous vivrez pour nous servir et nous nourrir. Si vous résistez, vous mourrez à genoux devant nous.
Un léger ricanement accueillit ces mots. William était agité de soubresauts. D’un grognement, le Dæmon l’interrogea sur ce qu’il trouvait si drôle.
— Nous mourrons peut-être, répondit-il. Mais jamais à genoux. Nous serons toujours debout devant vous, à vous défier. On n’a pas le choix, on a été élevé comme ça. Jamais à genoux, Toujours debout.
— Alors meurs, debout si tu le souhaites.
Le Dæmon leva sa main griffue où des éclairs fatidiques crépitaient déjà. William ne baissa pas les yeux, il semblait simplement attendre la mort. Et alors que la créature allait l’abattre, un sortilège perforant la toucha à l’épaule, la blessant à peine, mais détournant son attention. Elle leva les yeux, cherchant l’origine du maléfice et trouva Justin debout à une dizaine de mètres.
Le Dæmon lui lança un éclair qui lui transperça la cuisse, l’envoyant à terre en hurlant de douleur. Il allait lui en envoyer un autre pour l’achever quand un coup de pied détourna son bras. William s’était relevé. Il enchaîna immédiatement avec un coup de pied circulaire à la face et un latéral au corps qui força l’ennemi à reculer. Il prit deux pas d’élan et s’envola pour conclure par un double coup de pied sauté qui percuta à la fois le visage et le flanc de la bête.
William retomba accroupi alors que le Dæmon se préparait déjà à contre-attaquer. Il tendit la main derrière lui quand un croassement retentit. Bran fit tomber une baguette dans la main tendue. D’un geste souple, William lança un Sectumsempra qui trancha le bras du Dæmon au niveau du coude. Dans une arabesque, il vint l’amputer de ses deux jambes.
William se redressa et s’approcha de son adversaire gisant dans son propre sang vert pâle. La haine se lisait sur le moindre de ses traits.
— Cela ne changera rien ! cracha-t-il. Vous n’avez que trois destinées qui s’ouvrent à vous : nous servir, nous nourrir ou mourir.
— Vous sous-estimez les Hommes et les autres Êtres vivants dans le système solaire, dit calmement William. Mais qu’importe, car vous en particulier, ne verrez pas la fin de cette guerre.
Et sans plus de cérémonie, William l’acheva d’un éclair vert.
Il regarda autour de lui et soupira. La bataille était terminée. Il vit rassuré plusieurs de ses compagnons se relever dont Jeanne qui lui lança un sourire avant d’aller aider les blessés.
William vint s’occuper lui-même de Justin dont la cuisse saignait. Il appliqua un sortilège pour arrêter l’hémorragie.
— Merci, fit Potter.
— Je te dois bien ça, tu m’as sauvé la vie deux fois aujourd’hui.
— Et toi, tu as fait bien plus.
— J’ai fait mon devoir.
Bran vint se poser sur l’épaule de William d’un froissement d’ailes, poussant un croassement strident qui figea les Chaldo dans leurs mouvements. Tous levaient les yeux vers lui.
William sentit un lien se nouer entre lui et l’étrange oiseau. Il comprenait enfin tant de choses. Les Corvus, les Chaldo, et le combat éternel dans lequel ils étaient engagés contre les ténèbres.
— Corbeau, lança la voix de Jeanne, brisant le silence qui s’était installé.
— Corbeau, reprit un autre Chaldo.
— Corbeau !
Les Chaldo répétèrent ce mot comme une clameur en encerclant William qui se releva, Bran toujours sur son épaule. Le silence ne revint que quand les anciens s’approchèrent, Sébastien à leur tête. Il fit un signe de tête à son frère. Patrick Chaldo vint se placer devant son fils, lui souriant avec fierté.
— Aujourd’hui, tu deviens le Corbeau, gardien de nos valeurs, notre épée.
Des « hourra » et « Corbeau » résonnèrent. Ils ne furent troublés que par l’arrivée discrète de Cicéron Chaldo. Le doyen regardait son arrière-petit-fils en souriant.
William demanda le silence.
— Nous avons gagné cette bataille, mais d’autres nous attendent. Soignez les blessés, relevez les morts, redressez nos défenses et préparez-vous à repartir au combat. Ne pleurez pas ceux qui sont tombés, ce temps viendra plus tard.
Les Chaldo s’exécutèrent sans attendre. William fit léviter Justin pour l’amener se faire soigner dans le manoir.
— Trois Corbeaux ! s’exclama Cicéron. Ça ne s’est jamais vu. Mais à époque exceptionnelle…
— Nous déplorons malheureusement des pertes, dit Sébastien.
— Nous savions que nous payerions notre tribut à cette guerre. Et comme l’a dit William : d’autres batailles nous attendent. Je retourne à la DE. Prévenez-moi quand vous serez de nouveau opérationnel.
— Des nouvelles de Tony, Alex et Julia ?
— Ils ont vécu une bataille aussi, sur Mars, pour détruire un des Crânes de cristal atlantes. Les Dæmons ne pourront pas s’en servir. Ils sont de nouveau à bord de l’Ankou, et les connaissant, ils vont repasser à l’action prochainement. Vous direz aux Potter qu’Ariana va bien également.
Cicéron posa des yeux attristés sur la destruction qui l’entourait, s’attardant sur les membres de sa famille qui gisaient encore sur le sol. Il les avait vus grandir, et il avait espéré mourir longtemps avant eux. Maintenant, il espérait que cette guerre ne dure pas.