Le vampire aux yeux verts

Chapitre 1 : Achèvement

1896 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 19:17

La scène avait semblé tirée d'un scénario sordide de guerre. Elle était baignée par la faible lueur du crépuscule, ce qui la rendait plus pénible et plus infligeante encore.

Une heure plus tôt, alors que l'école entamait le diner, les alarmes avaient retenti, pour la première fois depuis des siècles. Des alarmes qui avaient apeuré tout le monde car elles indiquaient que le château était attaqué. J'avais immédiatement gelé en comprenant ce que cela signifiait. L'échange de regard alarmé des professeurs n'avait fait que renforcer ma conviction que les attaquants n'étaient autres que les mangemorts… Et Voldemort. Une vague de panique m'avait immédiatement parcouru de la tête au pied. Je n'étais pas prêt à lui faire face maintenant. Si jamais je l'étais un jour. J'avais encore du mal à faire face à la mort de Sirius. Je ne réalisais même pas encore pleinement que sa disparition était irrémédiable… Que jamais plus je ne recevrais de lettres de sa part, qu'il ne me sourirait jamais plus, ne me serrerait plus contre lui.

Je ne voulais pas me retrouver face à Voldemort et ses « chiens ». Je ne voulais pas combattre, mourir ou devenir un meurtrier. Pour la première fois depuis que j'avais découvert le monde magique, je voulais oublier. Oublier le meurtrier de mes parents. Oublier ma fâcheuse célébrité… Oublier, enfin, le poids qui pesait sur mes épaules.

Et, pourtant, je ne pouvais pas faire cela. Je le savais. J'étais conscient que trop de vie dépendait de la réalisation de la prophétie. Dépendaient de moi. Je ne pouvais pas ignorer cette vision, cette prophétie. Je ne pouvais pas me laisser m'apitoyer sur mon sort. D'ailleurs, comme je l'avais déjà dit à Dumbledore lorsqu'il était venu me chercher, l'année précédente, Sirius n'aurait pas aimé que j'agisse ainsi. Lui qui avait réussi à surmonter les conséquences de son emprisonnement à Azkaban. J'avais décidé de me battre pour lui, en sa mémoire. Et, en celle de mes parents aussi. Mais j'avais aussi pris cette décision après le soutient inconditionnel que m'avait manifesté mes meilleurs amis après que je leur ai dévoilé la prophétie et ce que l'on attendait, donc, de moi.

J'avais certes pris la décision de me battre mais je n'en avais pas moins été terrifié lorsque les professeurs avaient commencé l'évacuation. Peu d'élèves étaient restés en arrière, se portant volontaires pour combattre. Pour défendre l'école, pour défendre leurs idéaux. Quelques élèves majeurs et l'essentiel de l'AD. Les professeurs avaient bien tenté d'évacuer ces derniers, pour la plupart mineurs, mais ils avaient vite abandonné, conscients qu'ils n'arriveraient pas à les faire partir et sachant qu'ils manquaient de temps. Le dernier élève avait à peine été évacué que les défenses du château avaient cédé. Et, là, la bataille avait commencé…

Et, maintenant, près d'une heure plus tard, au milieu de la bataille, moi, Harry Potter, je m'étais demandé ce que je faisais là. Si j'étais vraiment utile. Je n'avais pas eu l'impression d'être assez fort pour faire face à ce qui arrivait. Et, donc, encore moins à Voldemort. Je m'étais demandé s'il n'y avait pas eu erreur d'interprétation, si j'étais vraiment l'élu. Le sauveur du monde magique. Je savais ce que c'était d'être en proie aux doutes, que cela pouvait me tuer mais je n'avais pas pu faire taire cette voix terrifiée qui criait que ce n'était pas ma place.

Je m'étais ressaisis, toutefois. Je n'avais pas le droit de douter. Mes amis combattaient à cet instant même. En partie par ma faute, me disais-je. Je ne prendrais pas toute la faute sur moi. Ce serait les insulter… Car, après tout, ils avaient fait leur choix par eux-mêmes. En toute connaissance de causes. Cependant, je ne pouvais m'empêcher de penser que j'étais, en grande partie, responsable de leur présence en ce lieu de morts. Parce qu'ils étaient mes amis, ma famille, ils étaient devenus des cibles privilégiées. Parce qu'ils étaient tout cela, ils avaient été impliqués, bien trop jeune, dans une guerre qui les dépassait.

Aussi, je n'avais pas pu laisser le doute et la peur polluer mon esprit. Je devais me battre comme eux… Pour eux. Je devais faire mon devoir. J'avais répétés ces phrases en boucle alors que je me déplaçais au milieu du champ de bataille. J'avais essayé de ne pas prêter attention aux cris de douleurs et de frayeurs qui parvenaient à mes oreilles. De ne pas chercher à reconnaitre les voix. J'avais voulu rester concentrer sur ce qui me concernait directement. Et, surtout, continuer à avancer. Vers le lieu où se trouvait Voldemort.

J'avais réussi plutôt bien jusqu'à un moment précis de la bataille où, parmi les cris divers de douleurs, j'en avais reconnu un qui m'avait fait stopper net. Je me rappelle mettre tourné, d'un mouvement vif, vers l'origine du cri, terrifié de découvrir pourquoi Remus, l'un des rares adultes en qui je faisais confiance, avait poussé ce cri.

Ce que j'avais vu m'avait crevé le cœur.

Mes deux meilleurs amis, Ron et Hermione, étaient debout entre l'un des pires mangemorts, Macnair, et le corps de Remus étendu sur le sol.

Je n'avais guère eu le loisir d'en voir plus, cependant. A part, peut-être, Draco Malefoy qui accourait dans leur direction. Mais, cette dernière partie est, toutefois, très vague car, à l'instant même où je m'étais tourné dans cette direction, j'avais senti que l'on me poignardait à l'estomac. Un rire fou m'avait renseigné, bien vite, sur le responsable (ou plutôt la responsable) de cet acte. Bellatrix Lestrange avait retiré l'arme de mon corps et s'était éloigné, sans plus attendre, alors que je tombais à genoux sur le sol meuble.

J'avais porté des mains tremblantes à mon ventre qui s'étaient teintées, immédiatement, de rouge. Ainsi, l'assassin de Sirius allait aussi devenir le mien. C'était la seule pensée cohérente qui avait jailli dans mon esprit. C'était une certitude. Ce poignard, je le connaissais. J'avais entendu Rogue en parler, avec un peu d'effrois dans la voix, à Dumbledore et Remus. Il était imprégné de magie noire. Le sévère professeur les mettait, alors, en garde parce que la blessure de ce poignard était très difficilement soignable. Certainement mortelle compte tenu de qui était la propriétaire du dit poignard. Ce qui s'était révélé exact, avais-je réalisé. Bellatrix m'avait poignardé à un point mortel. Je l'avais deviné, sans le moindre doute.

J'avais lentement relevé la tête pour diriger mon regard vers mes amis, les mains sur mon abdomen. Le désespoir m'avait pris à la gorge lorsque j'avais vu la scène qui se déroulait face à moi. Alors que Remus était toujours au sol, Ron était aux prises avec Macnair. Hermione, quant à elle, se faisait trainer, de force, par Malefoy loin d'eux. Ma meilleure amie avait les yeux rivés sur moi, apparemment horrifiée.

Je me souviens avoir pensé que ce ne pouvait pas être ma dernière vision du monde. Je ne voulais pas mourir ainsi, sur la vue d'une telle scène. Je voulais vivre longtemps, entouré d'une famille et d'amis. Je voulais mourir en paix, dans un endroit calme et beau.

C'est sans doute à ces pensées que ma magie avait répondu. Je crois que c'est alors que me faisais ces réflexions que j'ai transplané pour la première fois de ma vie. J'en avais à peine pris conscience de la sensation de passer par étroit tuyau. J'avais fermé les yeux, quelques secondes, pour me soustraire à la pénible scène de mes amis souffrants, mourants peut-être. Aussi, lorsque j'avais rouvert les paupières, j'avais été surpris de voir que j'avais laissé derrière moi la bataille sanglante et que je me trouvais, à présent, dans une magnifique clairière ensoleillée.

Les lieux respiraient la paix. Un lieu parfait pour mourir…

Je crois que j'ai même souri, apaisé par la quiétude des lieux. Je n'avais même pas réalisé que je n'étais pas seul en ces lieux. Je n'avais pas vu qu'à mon arrivée soudaine, quatre vampires mâles avaient brusquement cessé leur activité, surpris. Pas plus que je ne les ai vu ou senti se précipité vers moi alors que je m'effondrais en arrière. A aucun moment, je ne les avais vu se pencher sur moi pour tenter de me sauver en arrêtant le saignement. A aucun moment, je n'avais réalisé la portée de ce qu'avait fait ma magie.

A cet instant, tout ce que j'avais pu penser, c'était que ma vie s'arrêtait ici. Ce que je ne savais pas, alors, c'était qu'il ne s'agissait que de ma vie humaine qui s'achevait.

 

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