Le lion et le serpent
- Je n’irai pas ! Je n’irai pas à Serpentard ! m’exclamais-je.
Le moment que j’attendais autant que je redoutais depuis des mois était enfin arrivé. Aujourd’hui, je rentrais à Poudlard. Et Griffondor serait ma maison.
- James, arrête un peu ! gronda ma mère.
- J’ai simplement dis qu’il irait peut-être, se défendit mon frère tout en m’adressant un horrible sourire. Il n’y a pas de mal à ça. Il sera peut-être à Serp…
Il se tut en croisant le regard de maman. C’était la seule personne au monde à pouvoir le faire taire de cette manière et j’aurai donné ma baguette pour avoir le même pouvoir.
Nous arrivâmes devant la barrière et James me regarda par-dessus son épaule, d’un air qui signifiait que lui, il avait déjà été à Poudlard l’année dernière alors que moi, je n’y connaissais rien…
Il y a des moments où je le haïssais.
Mon tour vint de franchir la barrière qui menait au Poudlard express. Je l’avais déjà fait l’année dernière, lorsque j’avais accompagné mon frère qui faisait alors moins le malin, mais j’avais encore un peu peur de ce mur. Et si je courrais vers lui et que le passage se bloque ?
J’essayai de ne pas y penser tout en courant vers la barrière, mon père à mes côtés. Même si aucun choc ne vint, je ne pus retenir une grimace.
Une épaisse vapeur blanche recouvrait le quai, ce qui avait permis à mon frère de disparaitre. Mais ce n’est pas lui que je cherchais des yeux parmi la foule indistincte.
- Où sont-ils ? demandais-je.
- On va les trouver, me rassura ma mère.
Nous scrutâmes la foule durant un moment qui me sembla incroyablement long. Et si pour une quelconque raison, ils ne venaient pas ?
- Je crois que c’est eux, Al, dit enfin maman.
Ils s’avancèrent vers le tout dernier wagon. Ce n’est qu’en arrivant tout près d’eux que je pus les reconnaitre.
- Salut, lançais-je avec soulagement.
Rose m’adressa un sourire radieux. Elle aussi devait être soulagée de me voir. Cependant, ni elle ni moi n’avions très envie de parler. A la place, on se contenta d’écouter son petit frère et ma petite sœur parler de la maison dans laquelle ils aimeraient être plus tard, ce qui n’était pas vraiment une bonne idée car nous étions encore plus tendus.
- Si tu n’es pas à Griffondor, on te déshérite, lança alors le père de Rose à celle-ci. Mais je ne veux pas te mettre la pression.
- Ron !
Lily et Hugo éclatèrent de rire, mais nous fûmes incapables de les imiter.
- Il dit ça pour rire, assurèrent nos deux mères.
Comment pouvait-on rire dans un moment pareil ? Quand je pensai que ce soir déterminerait les sept prochaines années de ma vie, j’eus un sentiment de nausée.
Mais je me repris et remarquai mon oncle faire un signe discret à mon père. Intrigué, je regardai dans la direction qu’il indiquait de la tête. L’épaisse fumée s’était dissipé un instant, révélant un couple et leur fils qui devait avoir mon âge.
Je regardai distraitement la foule, l’esprit entièrement accaparé par ma rentrée à Poudlard. Le moment que je redoutais le plus était sans doute la répartition. Mon père avait beau dire qu’il n’y aurait pas de problème, que je serais forcément à Serpentard, je ne parvenais pas à être aussi sûr que lui.
Bien sûr, j’avais envie d’aller à Serpentard. C’était la maison qui m’attirait le plus. Je trouvais qu’il en émanait une aura de mystère et de grandeur que j’aimais, et que je ne retrouvais dans aucune autre.
Enfin, le vert était de loin ma couleur préféré.
Autant de raisons qui auraient dû me rassurer sur la décision que prendrait le choixpeau. Mais le problème, c’était qu’étant fils unique, je n’avais pas de grand frère ou de grande sœur qui aurait pu me parler de Poudlard et me rassurer.
Bien sûr, mon père et ma mère m’en avait longuement parlé, mais j’avais tendance à me méfier des avis vieux de plus de vingt ans. Il y aurait sûrement des différences.
Avec envie, j’essayai de distinguer les familles avec plusieurs enfants. Certains étaient encore trop jeunes pour aller à Poudlard et je trouvai ça cruel de les emmener ici, à regarder le train partir sans eux…
La vapeur se souleva brusquement en face de nous, révélant justement une famille nombreuse, qui semblait partagé entre l’excitation et l’appréhension.
A ma grande surprise, mon père adressa un signe de tête à l’homme brun qui portait des lunettes rondes ridicules. Mais il se détourna ensuite très vite et je supposai donc que ce n’était qu’une connaissance du travail.
Mais je n’y pensais déjà plus, mon attention c’était tourné vers le garçon de mon âge qui se tenait près de l’homme à lunette. Ils se ressemblaient autant que mon père et moi. Cela m’amusa avant que je ne croise le regard du garçon.
Chaleur.
Cela ne dura qu’un bref instant, mais assez pour que je puisse voir ses yeux verts qui brillaient comme deux émeraudes. Jamais je n’avais vu un regard pareil. Mes yeux à moi, ils étaient gris et terne comme un vieux rocher. Alors que les siens brillaient comme un phare en pleine nuit.
L’homme était blond et très pâle. Il nous adressa un bref signe de tête et se détourna, ce qui m’intrigua. Je ne me souvenais pas l’avoir vu avant.
Mon attention se porta ensuite sur le garçon et nos regards se croisèrent.
Frisson.
Il avait les yeux si clairs que je ne pus définir leur couleur à la distance où je me trouvais. Mais il me semblait qu’ils avaient un éclat argenté comme un clair de lune.
- Voici donc le petit Scorpius, murmura mon oncle. Arrange-toi pour être toujours meilleure que lui en classe, Rosie. Dieu merci, tu as hérité de l’intelligence de ta mère.
- Ron, pour l’amour du ciel, n’essaye pas de les dresser l’un contre l’autre avant même qu’ils aient commencé l’école !
- Tu as raison. Désolé.
Mais il se pencha vers sa fille et ajouta :
- Ne sois quand même pas trop amie avec lui, Rosie. Grand-père Weasley ne te le pardonnerait jamais si tu épousais un Sang-Pure.