Le lion et le serpent
La nuit commençait à tomber, et nous étions toujours bloqués au sommet de la tour d’astronomie.
Une fois de plus, Rose leva sa baguette et essaya de déverrouiller la trappe, mais une fois de plus ce fut sans effet.
- Non mais c’est pas vrai !! hurla-t-elle.
Je ne dis rien. Nous étions tous les quatre assis autour de la trappe, dans l’attente d’un miracle. Rose poussa un soupir excédé. Malefoy, lui, fixait le bois comme s’il avait pu le faire disparaitre de cette manière. Seule Alice semblait trouver la situation parfaitement normale, admirant le paysage ou chantonnant de temps en temps.
- Quelqu’un va bien finir par nous trouver, dit-elle.
- Oui, dit Rose avec un air sarcastique, à la première heure demain. Je n’ai pas envie de passer la nuit ici ! Je vous rappelle que les examens commencent demain!
- Et si… commença Malefoy mais il ne finit jamais sa phrase.
- Oh, ça suffit ! s’impatienta Rose. J’en ai plus qu’assez !
Elle se leva et se dirigea vers les remparts.
- OHE !!! hurla-t-elle. ON EST BLOQUES LA-HAUT !!!
Ce n’était pas la première fois qu’on appelait à l’aide, mais on était bien trop éloignés pour que quelqu’un puisse nous entendre.
Résigné à passer la nuit ici, je laissai Weasley s’époumoner. Londubat se leva aussi, mais ce n’était pas pour crier. Elle avança de quelques pas vers le bord et s’arrêta comme si elle était bloquée par un obstacle invisible. Stupéfais, je la vis lever doucement une main et faire un geste comme si elle attrapait quelque chose sauf qu’il n’y avait rien.
- N’aie pas peur, dit-elle.
A qui s’adressait-elle ? Rose s’était retournée et la regardait étrangement, se demandant sans doute si elle s’adressait à elle.
- A qui tu parles, Alice ? demanda Potter en fronçant les sourcils.
- Chut ! fit-elle. Vous allez l’effrayer.
- Effrayer qui ? insista Rose.
- Notre ami.
Je secouai la tête. Cette fille n’avait définitivement pas toute sa tête. Quelques heures enfermée et elle s’inventait déjà des amis imaginaires.
Un curieux bruit me fit sursauter. Comme si quelqu’un soufflait bruyamment. Un instant, je me demandai si ce n’était pas Weasley mais le souffle était trop fort.
- Tout doux, souffla Londubat.
Cette fois, je l’avais clairement entendu. Un hennissement.
Je me levai d’un bond. Alice inventait beaucoup de choses mais cette fois, il y avait vraiment quelque chose.
Rose avait l’air perplexe. Soudain, un éclair traversa ses yeux.
- Un sombral ! comprit-elle. Tu peux le voir, Alice ?
- Non, mais je peux l’entendre et le toucher. Je suis sûre que si on grimpe sur son dos, il nous déposera dans le parc.
- Mais on ne peut pas le voir ! m’exclamai-je. Ce… ce n’est pas risqué ?
- Tu préfères dormir ici ? demanda Rose en s’approchant de l’animal.
Elle tendit les bras à l’aveuglette jusqu’à ce que sa main rencontre quelque chose mais son visage était devenu très pâle.
- Heu… tu es sûre de vouloir faire ça ? Tu n’aimes pas voler sur un balai, alors un animal invisible…
- C’est bon. Un sombral est très sûr. J’ai plus confiance en lui qu’en un simple bout de bois.
A ma grande surprise, elle monta sans hésiter sur l’animal. C’était très étrange de la voir ainsi en suspension au-dessus du vide.
Alice monta derrière elle d’un geste souple et assuré.
- Je lui demanderais de venir vous chercher, dit-elle. Restez calmes pour l’entendre arriver !
Malgré cette recommandation, je ne perçus qu’un léger bruissement lorsqu’elles passèrent au-dessus des remparts et plongèrent dans le vide.
- Tu les vois, toi ?
- Non, c’est trop sombre.
- Attends, je crois que j’entends quelque chose.
Je tendis l’oreille et Potter m’imita. Nous étions tous les deux penchés pour tenter d’apercevoir les filles. Mais le parc était plongé dans la pénombre.
Un souffle chaud dans mon dos m’indiqua que le Sombral était de retour. Je fis signe à Potter et me retournai doucement. Il ne manquerait plus qu’il soit effrayé et nous laisse ici.
- Tout doux, dis-je sans conviction tout en tâtonnant ce qui devait être sa tête.
Potter le caressa aussi, à la fois pour le localiser et le rassurer. Lorsque je fus sûr d’avoir repéré son dos, je m’appuyai sur ses ailes pour grimper dessus, avec autant de grâce qu’un Troll apprenant à marcher. Je fis un peu de place pour que Potter puisse s’assoir devant moi. Ses mains étaient crispées sur la crinière invisible.
Avant de pouvoir dire un mot, le Sombral déploya ses ailes et commença à décoller. Lorsqu’il piqua vers le sol, je serrai Potter de toutes mes forces, au risque de lui briser une côte. Cependant, lorsque je compris que le sol se rapprochait avec douceur, je me détendis légèrement et Potter poussa un soupir.
S’il y avait une chose de plus crispé que les bras de Malefoy qui menaçaient de m’étouffer, c’était mes mains, et je me demandai si je pourrai les déplier un jour.
Cependant, la douceur du vent caressait mon visage et lorsque Malefoy relâcha un peu sa prise, je pus me détendre également. Se poser sur le parc avec une monture invisible avait quelque chose d’irréel, bien plus que certains sortilèges. Cela me procurait un sentiment incroyable qui perdura alors que nous retournions discrètement dans nos dortoirs, et même une fois que je me fus glissé dans mon lit. Je me détendis tout en gardant cette sensation, retrouvant peu à peu l'usage de mes doigts, et en ayant la curieuse l'impression que les bras de Malefoy était toujours serrés autour de moi.